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Épisode 123 – Huayhuash; LA Randonnée Ultime en Amérique du Sud

21 May 2017

05.35 – Dans le nuit encore noire, nous quittions Huaraz à bord d’un vieux bus remplis à craquer de péruvien.
Direction Chiquian, village situé aux portes de la Cordillera Huayhuash, l’une des chaines de montagne les plus reculées des Andes; une forteresse de glace à plus de 6000m.
La Cordillera Huayhuash serait le théâtre de notre dernière grande randonnée en Amérique du Sud… et non la moindre. 

HUAYHUASH POUR LES NULS
Réputé comme l’un des treks les plus spectaculaire de la planète, souvent cité comme la meilleure randonnée alpine sur Terre, le Circuit Huayhuash est pourtant relativement inconnu du commun des mortels. Avec Torres del Paine (Patagonie/Chili), Huayhuash offre sans aucun doute les plus beaux paysages de montagne en Amérique du Sud. 
D’une longueur d’environ 120km, avec 8 Cols à plus de 4600m, dont 2 supérieurs à 5000m, le Circuit Huayhuash est classé « Difficile » dans le monde de la randonnée. 
On recommande fortement de faire le Circuit avec guide/porteurs/mules, mais c’est tout à fait possible de le faire en autonomie complète (c’est ce que nous avons fait).
Le Circuit Huayhuash propose plusieurs itinéraires. Il est important de faire un peu de recherche au préalable afin d’évitez les mauvaises surprises;

– Le « Circuit Alpino »; très technique (besoin de corde, harnais, baudrier, etc.), peu fréquenté & complété pour la 1ère fois en 2004, 

– Le « Circuit Clasico », dit le Circuit dans la Vallée; essentiellement de la marche à haute altitude,

– Le « Circuit Hybride »; soutirant le meilleurs des 2 Circuits précédant, en évitant les sections trop techniques et celles trop faciles. 


Peu importe l’itinéraire, hautes montagnes, glaciers, villages reculés et lacs aux eaux azurs seront au rendez-vous.
Après avoir passé presque une nuit entière debout à lire et regarder les cartes de Huayhuash, j’en étais venu à la conclusion que nous pouvions terminer le Circuit Hybride en 8 jours.
La randonnée devait prendre entre 10 et 12 jours, nous avions planifié 8 jours (donc 9 jours de nourriture)… et l’avons finalement bouclée en 6. 

Jour 1 – 2 POIDS LOURDS
Départ Pocpa (@3440m)

Arrivé Cuartelwain (@4000m)

Distance 11km

Dénivelé Positif +560m

Dénivelé Négatif 0
Une fois à Chiquian, nous sautions dans un autre bus qui nous conduisait jusqu’à un minuscule village, fait de bâtiments en terre cuite, situé au plus profond d’un immense canyon. 
Terminus Pocpa (@3440m)
Pocpa serait le 1er de PLUSIEURS villages à charger un frais de passage aux randonneurs. 
Voyez-vous, la Cordillera Huayhuash n’est pas un Parque Nacional, et c’est là tout le problème. Si Huayhuash était un parc national, on pourrait acheter un billet unique au départ et ça finirait là. 
Or, chaque village situé sur le Circuit charge des frais qui varient grandement. Il n’y a pas de poste de contrôle, donc aucun moyen de savoir où se procurer les billets. Généralement, tu marches sur le sentier et un cavalier vient à ta rencontre.
En tout et pour tout, faire le Circuit Huayhuash coute environ 80$us (oui oui 80$us) par personne en frais de passage. 
Bref, non sans rouspéter, nous acquittions les frais et nous mettions en marche. Dès lors et pour la prochaine semaine, notre seul moyen de transport serait… nos bonnes vieilles jambes. 
Direction le campement Cuartel Huain.
La randonnée du jour consistait à monter en suivant une route de terre dans le fond du canyon. Une montée toute en douceur, non sans peine en raison du poids insensé de nos sacs. J’avais l’impression de porter une tonne de briques, le RPM de mon coeur était en permanence en sur-régime et les muscles de mes molets semblaient vouloir déchirer à tout moment. 


En plus d’y aller en autonomie complète, nous avions décidé d’ajouter un peu de luxe (2 bouteilles de vin, etc.). J’en payais donc le prix. 

Jour 2 – SOUVENIR D’ÉCOSSE*
Départ Cuartelwain(@4000m)

Arrivé Lago Carhuacocha (@4150m)

Distance 21km

Dénivelé Positif +1300m

Dénivelé Négatif -1200m

Ascensions

– Paso Qaqanan @4700m

– Paso Carhuac @4650m
Une longue journée de marche était au menu avec l’ascension de 2 Cols. 
Dès le départ, le sentier ne donnait pas de répit. Nous quittions le fond de la vallée pour atteindre le sommet de Paso Qaqanan via un sentier rocheux & très abrupte. 


Les paysages étaient magnifiques… identiques à mes souvenirs d’Écosse. Bon… je ne suis jamais allé en Écosse, mais j’ai l’impression que si j’y était allé, mes souvenirs seraient similaires 😉
Paso Qaqanan (@4700m), offrait une vue d’ensemble des environs; la vallée que nous quittions était rocheuse et étroite, tandis que celle dans laquelle nous basculions était toute verte et ouverte. À l’horizon, une mer de sommets se dressaient devant nous. 
Il ne restait plus qu’à suivre la ligne de boue qui traçait dans la vallée. Il fallait sortir nos talents de patineur artistique sur boue. 
Après une pause bien méritée dans les pâturage bordant le Lago Mitucocha (où les randonneurs s’arrêtent normalement pour la nuit), il était temps de s’attaquer au 2ème Col de la journée; Paso Carhuac. 
Une fois Paso Carhuac derrière nous (l’endroit est sans grand intérêt), le sentier descendait dans une vallée sinueuse jusqu’au Lago Carhuacocha. 


Le campement de ce soir était tout simplement grandiose; en bordure du Lago, avec d’impressionnantes montagnes & glaciers droit devant. Du nombre se trouvait le Nevado Yurupaja, 2ème plus haut sommet du Pérou à 6635m. 
Le camping était cependant chargé; 4 groupes organisés (environ 6 randonneurs par groupe) et un couple de français faisant le Circuit en solo. Peu importe, nous les avions rattrapé aujourd’hui… et allions les distancer dès demain.

Jour 3 – LA PROMMENADE DES GLACIERS
Départ Carhuacocha (@4250m)

Arrivé Laguna Barrosocoha (@4600m) 

Distance 18km

Dénivelé Positif +1050m

Dénivelé Négatif – 500m

Ascension

– Paso Siula @4800m
Après une nuit ponctuée d’averses violentes, et de chien errants jappant bruyamment, le soleil et le calme étaient au rendez-vous en matinée.
Après avoir longé le lac jusqu’au pied des glaciers, nous quittions le Circuito Clasico pour nous aventurer sur une portion du Circuito Alpino; l’ascension de la Paso Siula. Le sentier bifurquait dans une vallée longeant de hauts sommets et des lacs aux eaux clairs. Les paysages étaient tout simplement I N C R O Y A B L E S. 


Paso Siula (@4800m) était aussi dramatique qu’inhospitalier; le panorama était à couper le souffle, mais l’endroit était balayé par de forts vents d’hiver. 


Nous basculions dans une vallée toute verte et avec un sentier hyper facile… mais glissant (boue). 


Nous passions au travers du Camp Huayhuash en vitesse (pour éviter de payer les frais). Sensé être le campement pour la nuit, nous filions plutôt en ligne droite à travers les collines, en faisant fit des murets de pierre, pour rejoindre le Laguna Barrosocoha (@4600m), devant en théorie être quelques km plus loin, et éventuellement franchir la Paso Trapecio (demain). 
Situé sur le Circuito Alpino (donc à l’abri de la meute de randonneurs) le sentier était inexistant. Ajoutez à cela que ni le sentier, ni la Paso, pas plus que le lac n’étaient représentés sur la carte officielle du Circuit. Heureusement, le sentier était sur Maps.Me.
En plus de nous faire passer au coeur de la Cordillera, la Paso Trapecio se voulait un raccourci qui nous ferait sauver 2 jours de marche sur le Circuito Classico (un portion de sentier ennuyeuse et loin de la haute montagne). 
N’empêche, je pouvais voir le regard perplexe de Tanzi. Sans trop savoir où j’allais et où se trouvait le lac, je continuais à marcher d’un pas assuré à travers les collines (même si j’étais moi-même en proie à quelques doutes) en espérant tomber sur un sentier et/ou le lac à un certain moment. 
Ma patience était récompensée; nous tombions sur le sentier… quelques centaines de mètres avant d’apercevoir le lac 🙂
Cette nuit, nous serions seul au monde dans une plaine au pied d’une montagne gigantesque.



Day 4 – L’IMPENSABLE
Départ Laguna Barrosocoha (@4600m) 

Arrivé Paso San Antonio (@4600)

Distance 27km

Dénivelé Positif +1500m

Dénivelé Négatif -1600m

Ascensions

– Paso Trapecio @5110m

– Paso San Antonio @4990m 
Cette journée pourrait être à la fois ma plus belle & pire journée de randonnée à vie. Si quelqu’un pouvait voir dans le futur et avait pu me raconter comment cette journée allait se passer, je l’aurais traité de fou.
Le soleil peinait à faire son chemin au travers de l’épaisse nappe de brouillard, si bien qu’il faisait un froid de canard. 
C’est complètement à l’aveuglette que nous commencions l’ascension de la Paso Trapecio au travers d’une plaine marécageuse & diagonale (vers le ciel), puis un versant hyper incliné. 
J’avais fait du repérage la vieille, et il y avait de rare totems, mais disons que la donne était différente dans le brouillard total.
Un peu avant d’atteindre le sommet, la végétation disparaissait complètement et le sentier devenait hyper clair. Entouré de neige, avec un très fort vent d’hiver et avec le soleil qui ne réusissait toujours pas à se débarrasser du brouillard, mes « corones » rétrécicaient à vue d’oeil. 
Alors que tout était bouché sur le versant que nous montions, nous atteignions Paso Trapecio pour trouver une vallée dégagée et ensoleillée de l’autre coté. 
Le décor était complètement différent de ce que nous avions vu sur le Circuit jusqu’à maintenant; une espèce de vallée lunaire parsemée de glaciers et de lacs azur. 


De 5100m où nous étions au sommet de la Paso, il fallait désormais descendre jusqu’au fond de la vallée à Huynaypatay (@4500m). 
Une fois atteint la vallée, nous marchions à peine 5 minutes sur le Circuito Classico avant de retourner sur le Circuito Alpino. Nous entreprenions alors notre 2ème ascension du jour; Paso San Antonio (@4900m). 
Le sentier était désormais clair comme de l’eau de roche… mais montait avec une inclinaison casse gueulle à plus de 60 degrés. 


Quelques heures plus tard, nous foulions Paso San Antonio. L’endroit était réputé pour offrir la plus belle vue de tout le Circuit; une vue globale de la Cordillera Huayhuash. 
W O We



Après avoir admiré pendant de longues minutes ce qui pourrait bien être le plus beau panorama que j’ai pu voir de ma vie, il fallait se résigner à quitter le sommet de Paso San Antonio. 
Aussi impressionnante était la vue, nous étions à plus de 4900m, le soleil se couchait à l’horizon et l’endroit était tout sauf idéal pour installer notre campement. 
Nous entreprenions la descente dans une section d’éboulement à plus de 75 degrés d’inclinaison, avec le fond de la vallée à plus de 1000m sous nos pieds. Le moindre faux mouvement résulterait (au mieux) à une chute de plusieurs centaines de mètres. 


« Il faudrait être complètement fou pour monter ce versant de la Paso San Antonio » que je lançais à Tanzi. Déjà que l’ascension sur l’autre versant avait été tout sauf une sinécure, l’ascension de ce versant relevait de la folie.
Après plus d’une heure et plusieurs centaines de mètres de descente, le sentier disparaissait. Devant nous se dressait un mur plongeant directement vers le fond de la vallée quelques centaines de mètres plus bas. 
Sans corde, ni casque, ni piolet, il était impensable de descendre ce mur avec des sacs de 20kg sur le dos. Nous allions devoir rebrousser chemin!!!
Pour ceux qui ont lu attentivement les derniers paragraphes, rebrousser chemin signifiait remonter au sommet de Paso San Antonio… via un sentier extrêmement incliné dans une zone d’éboulement. 
C’est généralement dans ce genre de situation que je me demande « pourquoi j’aime les montagnes et non les plages? ».
De retour au sommet, une dizaine de touristes (monté au sommet sans sac pour voir le coucher du soleil) nous applaudissaient à tout rompre. Ils n’en revenaient pas que nous ayons fait l’ascension de ce versant avec des sacs aussi gros. 
Nul besoin de dire qu’après tout ce que nous avions déjà fait depuis le début de la journée, nous avions passé depuis un bon moment l’étape « Brulé Raide ». Tanzi s’effondrait au sol en pleur, tandis que je peinais à rester debout et à contenir mes émotions (il n’était pas question que je pleure devant un groupe d’idiots). 
Il fallait maintenant redescendre de l’autre coté et trouver un site pour camper…
..
Jour 5 – ON TOUCHE LE FOND
Départ Paso San Antonio (@4600m)

Arrivé Susococha Camp (@4500m)

Distance 24km

Dénivelé Positif +1450m

Dénivelé Négatif -1550m

Ascension

– Paso Tapush @4800m
Une bonne nuit de sommet et nous étions remis de nos émotions fortes de la veille et prenions la route aux premières lueurs du soleil. 
C’est avec mes bas d’hiver sur les mains (pour les dégeler) que nous entamions la descente. 
Le Circuito Alpino étant trop technique à cet endroit, nous n’avions d’autre choix que de prendre le très long et très bas détour via le Circuito Classico. La journée d’aujourd’hui consistait à engranger le plus de km possible en descendant dans une espèce de vallée couloir aux paysages plus qu’ordinaires, pour remonter de l’autre coté et rallier un autre versant de la Cordillère Huayhuash. 
Une fois atteint Huayllapa, le point le plus bas du Circuit à 3500m d’altitude, il fallait maintenant remonter jusqu’à Paso Tapush à plus de 4800m. 


Nous passions le camp Hurtiac en vitesse (où tous les groupes s’arrêtent pour la nuit) pour aller directement à la Paso. 
Le sommet de la Paso Tapush est un espèce d’immense plateau inhospitalier où il est difficile de savoir où se trouve le point le plus haut. Par 2 ou 3 fois nous pensions être arrivé au sommet… mais nous débouchions simplement sur une portion plus haute du plateau.

Le temps de descendre -300m de denivelé de l’autre coté que la temperature passait d’une journée froide d’hiver à une chaude journée d’été, et que les paysages devenaient du bonbon pour les yeux. 

Jour 6 – THE LONG WAY HOME
Départ Susococha Camp (@4500m)

Arrivé Llamac (@3300m)

Distance 21km

Dénivelé Positif +800m

Dénivelé Négatif -2100m

Ascension

– Paso Yaucha @4750m

– Paso Llamac @4300m
Et un autre réveil dans une plaine gelée à l’intérieur d’une tente toute givrée. 
Au menu ce matin, l’ascension de la Paso Yaucha @4750m, nécessitant seulement ++300m d’ascension (partez les rires en canne).
À partir de là, il ne restait qu’à descendre une couple de centaines de mètres, marcher sur le plat dans le fond d’une vallée, monter un dernier Col (Paso Llamac @4300m… à ne pas sous estimer quand vous êtes exténué) et descendre -1100m de dénivelé négatif.
Un dernier coup d’oeil à Huayhuash & ses Nevados chargés de neige, et nous basculions en direction de Llamac, la fin du Circuit. 
Une douche bien chaude & une bière bien froide… c’est tout ce que je demandais (j’avais plus de chance d’avoir une douche bien froide et une bière chaude). 

Huayhuash EN BREF

+ Randonnée difficile, mais un sentier bien balisé et très fréquenté,

+ Multiple itinéraires possibles, 

+ Campement sur les sites désignés, 

+ Source d’eau abondante tout au long du Circuit,  

+ Beaucoup de groupes de randonneurs avec guide et porteurs (à organiser depuis Huaraz), peu de randonneurs en autonomie complète,

+ Même en autonomie complète, le Circuit coute une petite fortune. Comptez environ 90$us par personne (site de camping + passage dans chaque village).

P.S. Je dédis cette Épisode à ma copine Tanzi. Tu m’as suivit sans broncher sur une tonne de sentiers pas commode tout autour de l’Amérique du Sud. 
Jamais au grand JAMAIS tu ne t’es plain (tu as bien faillis t’évanouir quelques fois… mais ne s’est jamais plain ;-). 
Pour une fille qui n’avait pas vraiment d’expérience de randonnée et qui avait une peur bleue des effets de l’altitude, tu as t’es même permis de me botter le cul à quelques reprises lors d’ascension (bon… mon sac était plus lourd 🙂

Épisode 122 – Cordillera Blanca; Santa Cruz & Cie.

Plus de 31h dans un bus, répartis sur 2 nuits consécutives, et nous avions quitté Cusco et l’Empire Inca, pour nous retrouver à la base de la Cordillera Blanca, un endroit surnommé « la Suisse du Sud » (pas pour sa richesse), la capitale du plein air au Pérou…

Bienvenue à Huaraz!



LA CORDILLERA BLANCA POUR LES NULS
La Cordillère Blanche est un endroit difficile à manquer pour tout amateur de plein air voyageant en Amérique du Sud. 
L’endroit est littéralement la plus grande concentration de hauts sommets de l’Hémisphère Ouest; 33 sommets de plus de 5500m, dont 16 dépassant les 6000m, dont Huascaran, la plus haute montagne du Pérou & 4ème plus haute montagne d’Amérique du Sud, et de toutes les Amériques, du haut de ses 6768m. La montagne a d’ailleurs donnée son nom au Parque Nacional Huascaran, parc qui englobe l’ensemble de la Cordillera Blanca et qui est inscrit au Patrimoine de l’UNESCO. 
Comme vous le devinez, cette contrée blanche, au multiples sommets coiffés de glaciers, est un paradis de la randonnée et de l’escalade. 
Difficile de choisir parmi la tonne de randonnées et d’ascensions possibles (pour tous les niveaux d’expérience). 

LAGUNA CHURUP
Besoin d’une randonnée d’un jour pas trop difficile, mais assez haute en altitude, pour faire une répétition générale avant d’entreprendre une randonnée de plusieurs jours? Ajoutez en prime de splendides panoramas? 
La randonnée jusqu’au Laguna Churup est toute désignée (comme si nous avions besoin d’une randonnée de pratique).
Situé à 4450m, au pied du Nevado Churup (5495m), il faut tout d’abord prendre un bus depuis Huaraz, se faire brasser sur une route durant 18km jusqu’au village de Pisac, et faire une courte (mais intense) ascension (3km +650m allé). 
Le sentier est bien balisé mais abrupte, avec quelques sections semi-techniques (escalade avec corde). 



REFUGIO PERU
Départ Cobollapampa (@3910m)

Arrivé Refugio Peru (@4675m)

Distance 15km

Dénivelé Positif +850m

Dénivelé Négatif 0
Aujourd’hui, les choses devenaient un peu plus sérieuses.
Un minibus de Huaraz à Yungay, via une route suivant le fond de la vallée, et nous sautions dans un autre bus. Celui-ci quittait le fond de la vallée en zigzaguant sur une route sinueuse et mal entretenu. En d’autres mots; ça brassait. 
Nous avions alors une vue imprenable sur le double sommet de Nevado Huascaran (plus haute montagne du Pérou), 2 monstrueuses boules de crème glacée surplombant la vallée. 
Environ à mi-chemin, la route quittait la vallée pour entrer dans un canyon profond et étroit. Les lacets de la route devenaient de plus en plus serrés, nouant de plus en plus nos estomacs. Ça brassait maintenant en tab…
Terminus Cebollapampa, point de départ de la randonnée permettant de rejoindre le lac le plus connu de la Cordillera Blanca; le Laguna 69. 
Contrairement à 99% des touristes qui visitaient le Laguna 69 (en 1 journée allé-retour), nous allions faire la boucle qui passe par le Refugio Peru, y passer la nuit, et rejoindre Laguna 69 en matinée le lendemain. 
Encore un peu étourdi de la run de bus et sous un ciel chargé (qui n’allait pas tarder à nous tomber dessus), nous commencions l’ascension de +850m pour rejoindre les hauteurs de la Cordillera Blanca.


Après avoir joué au chat et à la souris avec le brouillard et la pluie tout au long de l’ascension, nous arrivions sur un plateau complètement dégagé. Devant nos yeux se trouvait un champ de roche (avant plan) et 2 hauts sommets et leur glacier respectif (Nevado Huandoy @6000m & Nevado Pisco @5752m).
Le Refugio Peru se trouvait à la limite entre les glaciers et la moraine (les roches). 
W O W



Un refuge digne des Alpes francaises. Pas simplement pour l’emplacement, mais aussi pour la qualité du bâtiment lui-même. Il y a quelques années, le Parque Huascaran avait lancé un programme de parrainage avec certains pays européens. 
Les villages de la Cordillera Blanca étant très pauvres et reculés, des refuges de montagne ont été construits un peu partout dans la Cordillera. Financés par les européens, ces refuges sont gérés par les communautés, et tous les profits vont à la construction d’infrastructures dans les villages.


Tout cela pour dire que le refuge était digne d’un refuge alpin, plus beau que probablement 99% des bâtiments au Pérou… et 100 fois mieux que n’importe quel refuge sur le GR20 en Corse.

LE TOIT DU MONDE
Départ Refugio Peru (@4675m)

Arrivé Cebollapampa (@3910m)

Distance 12km

Dénivelé Positif +400m

Dénivelé Négatif -1150m
Le réveil se faisait dans une mer de brouillard. Mis à part le Refugio, nous ne pouvions rien voir à plus de 10m à la ronde. 
Direction Laguna69!
Pour ce faire, il fallait traverser un champ d’éboulement en marchant sur de grosses roches instables. Un faux pas et c’était la fracture. 
Toutes ces roches n’étaient pas arrivées la par magie; nous étions dans la zone d’avalanche des Nevados nous surplombant. 
Quoique technique, le sentier était facile à suivre en raison des multiples hauts (et beaux) totems.


Les Nevados sortaient du brouillard les uns après les autres, jusqu’au point ou il ne restait plus un seul nuage à l’horizon. 
Nous avions l’impression d’être sur le toit du monde tellement la vue était spectaculaire; 8 des plus hauts sommets du Pérou… donc 8 des plus hauts sommets des Amériques… donc 8 des plus hauts sommets sur Terre… se trouvaient autour de nous.
Le Laguna 69 dans tout cela? Wow!!! 


D’un bleu comme seulement j’en avais vu dans les Rocheuses Canadiennes (Lacs Peyto & Moraines) et avec un immense glacier accroché juste au-dessus, il mérite sa réputation de plus beau lac de la Cordillera. 


De retour sur la grand route, il nous fallait maintenant gagner Vaqueria, le départ de la randonnée Santa Cruz. 
Situé seulement 30km plus loin, il était impensable de penser marcher jusque là en raison du mur (montagne) qui se dressait sur le chemin… la route montait de plus de +1500m avant de redescendre de l’autre coté. 
Bref, nous allions lever nos pouces en l’air et espérer pour le mieux. 
Moins de 5 minutes plus tard, un 4×4 conduit par des locaux se pointait… et avait 2 places de dispo.
Sur une route déserte comme celle là, route où il ne doit pas passer plus d’une voiture par heure, nous étions béni des Dieux. 

SANTA CRUZ TREK
Santa Cruz est la randonnée vedette de la Cordillera Blanca. 
Santa Cruz est aussi la 3ème randonnée la plus touristique en Amérique du Sud, après Torres del Paine (Chili) et la Inca Trail menant à Machu Picchu (Pérou). 
En d’autres mots, nous pouvions espérer croiser beaucoup de wanabe randonneurs. 
En théorie, guide & porteurs sont obligatoires. En pratique, personne ne porte attention et le sentier est hyper facile à suivre. 
Mis à part si vous ne voulez pas cuisiner et porter/monter votre tente (quel genre de randonneur êtes vous), un guide est inutile. 


Jour 1 – DE ROCHES ET DE BOUE
Départ Vaqueria (@3950m)

Arrivé Taullipampa (@4150m)

Distance 23km

Dénivelé Positif +1450m

Dénivelé Négatif -850m

Sans aucune journée de repos, nous étions de retour dans nos bottes à la première heure le lendemain. 
Direction Punta Union, la seule passe et point le plus haut de la randonnée 18km et +1400m plus loin. 
C’était la matinée « Hola Buenos Dias » à croiser une multitude d’enfants en route pour l’école. 
Après avoir passé quelques villages, nous étions véritablement dans la nature.


Avec des vues assez (pas mal) ordinaires (vallée entourée de montagnes toutes vertes), nous tachions d’engranger le plus de km avant que les rayons du soleil nous frappent. 


Après avoir passé le campement Paria, les choses devenaient sérieuses; le sentier montait sans relâche vers Punta Union (8km +1000m). 


Après une dernière portion d’ascension pas piqué des vers (presque en ligne droite, avec une forte inclinaison, sur de la roche exposée) et avec le RPM dans le tapis depuis une bonne heure, nous avions vaincu Paso Punta Union. En guise de récompense, Pachamama jugeait bon de nous lancer une forte averse de grêle sur le dos. 


Peu importe, la totalité de la randonnée Santa Cruz restante était désormais en descente… -1700m de dénivelé négatif. 
Alors que le versant précédant était une très grande vallée en forme de serpent, la vallée dans laquelle nous basculions était étroite et linéaire. Un immense glacier se trouvait juste à coté de nous sur la droite. 


Après avoir marché 2 jours en 1, nous arrivions au campement Taullipampa complètement exténué. 
L’endroit avait une vue imprenable sur le Nevado Taulliraju. Tout au fond de la vallée, la montagne agissait telle la sentinelle de Santa Cruz, voyant et entendant tout. 

Jour 2 – I N T E R M I N A B L E
Départ Taullipampa (@4150m)

Arrivé Cashapampa (@3600m)

Distance 24km

Dénivelé Positif +50m

Dénivelé Négatif -600m
Le réveil se faisait dans une vallée glacée où les rayons du soleil ne réchaufferaient pas la terre avant encore plusieurs heures. La tente était complètement givrée. 
Les mains bien glacées après avoir procédé à un dégivrage manuel que nous commencions la journée. 
Direction Cashapampa, la fin du sentier, tout en bas au fond de la vallée 24km plus loin. 
Nous disions Adieu à la Sentinelle… pour dire Bonjour au Nevado Alpamayo. Pointant à plus de 5900m, Alpamayo avait été nommée la plus belle montagne au monde (escalade parlant) par le magazine allemand Alpinismus. Nous étions malheureusement hors de la saison d’escalade (possible seulement en aout/septembre) sinon j’aurais tenté ma chance. 
Tout de suite après avoir croisé Alpamayo, le sentier descendait dans le fond de la vallée. Nous en étions quitte pour marcher dans l’immense lit d’une rivière asséché. 


Le lit de rivière se transformait en un canyon qui semblait ne pas avoir de fond. Le soleil nous avait depuis rattrapé, rendant la descente interminable… 


J’adore la randonnée, mais il n’y a rien de mieux que d’arriver à la fin du parcours et de savoir qu’un lit, une douche chaude et une (des) bière(s) vous attendent. 

Santa Cruz est une belle randonnée, mais jamais dans les plus belles d’Amérique du Sud. 
Un peu comme les randonnées pour se rendre à Machu Picchu, Santa Cruz se veut une parfaite introduction à la haute montagne pour quelqu’un sans expérience. 
Il faut par contre faire tout en son possible pour dormir au Refugio Peru et se rendre au Laguna 69.

Épisode 121 – Au Coeur de l’Empire Inca; Qosqo & Machu Picchu

8 Mai 2017 

15.00 – Depuis maintenant une dizaine de minutes, nous marchions sur des rails en jetant des regards inquiets derrière nous… afin de s’assurer qu’il n’y avait aucun train. 
Aussi bizarre que cela puisse paraître, nous étions en direction du site touristique le plus célèbre d’Amérique du Sud…


Au bout de 2 heures de marche, le chemin de fer nous avait guidé jusqu’à « Aguas Calientes », un ramassis d’hôtels et de restaurants se donnant des airs (ratés) de village suisse… 


Depuis quelques années, Aguas Calientes avait été rebaptisé « Machu Picchu Pueblo »…



QOSQO… CUSCO… PAREIL PAS PAREIL
L’aventure avait commencée à Qosqo, ancienne capitale de l’Empire Inca, rebaptisée Cusco (Cuzco) lors de sa capture par les conquistadors en 1536. 
On raconte que les conquistadors, mené par l’infâme Francisco Pizarro, furent émerveillés par la beauté de Qosqo à leur arrivé… ce qui ne les empêcha pas de tout détruire. 
Les bâtiments espagnoles ont été construits sur les ruines Incas. Par exemple, Santo Domingo, plus importante église de Cusco, fut construite directement sur les ruines de Qoricancha, le plus important temple Inca. 
C’est assez flagrant lorsqu’on regarde le mur sud de l’église; la parti inférieure est faite de gigantesques pierres taillées, toutes de la même dimension et déposées les unes sur les autres sans l’aide de mortier (tous les bâtiments Incas étaient construits de cette manière), alors que la parti supérieure est un ramassis de pierres de toutes tailles, disposés n’importe comment et soudées à l’aide de mortier. 
Lors du dernier grand tremblement de terre qui frappa Cusco dans les années 80, plusieurs constructions espagnoles, n’ont pas tenus le coup, alors que les murs datant de l’époque Inca ne bronchèrent pas d’un poil. 
Cusco version 21ème siècle est un endroit à l’histoire riche et complexe. Ville inscrite au Patrimoine Mondiale de l’UNESCO en raison de son architecture coloniale espagnole et ses nombreuses églises (16) plus belles les unes que les autres, la culture Quechua (descendants des Incas) est plus vivante que jamais; les locaux parlent le quechua (langue des Incas) et vénèrent Pachamama (Dame Nature) et sa Trilogie des Andes; le Puma représente la Terre (Monde Physique), le Condor représente le Ciel (Monde Spirituel) et le Serpent représente la Mort (Monde des Ténèbres).  


Fait amusant, le drapeau de Cusco (l’ancien drapeau de l’Empire Inca), est un arc-en-ciel ressemblant à s’y méprendre au drapeau de la Fierté Gay. Seule difference (impossible à remarquer pour quelqu’un qui ne le sait pas), le drapeau de la Fierté Gay compte 6 couleurs, alors que celui de Cusco en compte 7. Les Incas croyaient que les arc-en-ciels reliaient les 3 Mondes (Physique, Spirituel et Ténèbres). 

DESTINATION MACHU PICCHU
Il y a plusieurs moyens d’atteindre Machu Picchu; en train, en bus/voiture, ou en marchant. 
Train

Un train luxueux ($$$) relis Cusco à Machu Picchu Pueblo 1 ou 2 fois par jours. 
Collectivo (taxi collectif)

– 1er Collectivo de Cusco jusqu’à Santa Maria (5-6heures)

– 2ème Collectivo de Santa Maria jusqu’à Hydroelectrica (1-2heures)

– Marche sur les rails de Hydroelectrica à Machu Picchu Pueblo (2heures)
Randonnées

– Inca Trail – l’une des randonnées les plus célèbres du continent sud américain. Prend de 3 à 5 jours, hyper touristique, guide obligatoire ($$$) et besoin de réserver quelques mois à l’avance,

– Salkantay Trail – alternative la plus populaire pour ceux qui veulent marcher jusqu’à Machu Picchu, cette randonnée de 3 à 5 jours peu se faire avec ou sans guide… pas besoin de réserver à l’avance. 
Dans cet épisode, il n’y aura pas de description de la randonnée Saltankay ou Inca Trail pour une raison bien simple; nous avons choisi d’aller à Machu Picchu en collectivo. 
Quoi? Des adeptes de plein air, ayant marché la quasi totalité des randonnées que le continent sud américain a à offrir, ont décidé de lever le nez sur l’une des randonnées les plus réputées sur Terre? 
La réponse est oui!
Je ne veux pas paraitre hautain, mais les randonnées Inca & Salkantay nous ont semblées très surévaluées;

– Les paysages autour de Machu Picchu sont intéressant, mais ils n’ont rien à voir avec les paysages de Patagonie, de la Cordillera Real (Circuit Illampu – Bolivie), la Cordillera Vilcanota (Circuit Ausangate – Pérou), la Cordillera Blanca (Santa Cruz Trek – Pérou) ou encore la Cordillera Huayhuash (Circuit Huayhuash – Pérou),

– Salkantay et Inca Trails sont saturées de randonneurs, 

– Nous venions d’enchainer le Circuit Illampu (Épisode 119) et le Circuit Ausangate (Épisode 120), et nous étions sur le point de marcher coup sur coup la randonnée Santa Cruz (Épisode 122) et le Circuit Huayhuash (Épisode 123),
Bref, nous ne voulions pas gaspiller nos énergies sur une randonnée faite sur mesure pour les randonneurs du dimanche, mais décevante pour les randonneurs expérimentés comme nous…

MACHU PICCHU PUEBLO
2 Collectivos et une marche de 12km sur des rails plus tard que nous entrions dans Machu Picchu Pueblo, blottis dans le fond d’une vallée. De là, Machu Picchu se trouve à 3km et +450m. 
2 options s’offraient à nous;

– prendre un bus ($$$ avec une file interminable à partir de 04.30am… même si les bus commencent seulement à 06.00am),

– Marcher (environ 1-1.5h)

MACHU PICCHU
07.00 – Peu après le lever du soleil, nous atteignions l’entrée du site alors que les nuages se dissipaient tranquillement dans la vallée. 


Situé à moins de 80km de Qosqo (Cusco), Machu Picchu doit sa remarquable préservation (probablement la ville Inca la mieux préservée) à son emplacement; perchée sur un plateau situé au sommet d’une montagne… cette même montagne étant perdue au milieu de nul part à la jonction de plusieurs vallées. 


Fait intéressant, Cusco se situe +1000m plus haut en altitude que Machu Picchu. Machu donne l’impression d’être plus haut puisque Cusco se trouve au fond d’une vallée. 
Bref, tout cela pour dire que les conquistadors n’ont jamais découvert l’endroit… sinon ils auraient tout détruit… comme ils ont fait partout ailleurs.
Encore aujourd’hui, les historiens & archéologues en savent bien peu sur Machu Picchu. 
– Construite dans les alentour de 1430…

– Abandonnée vers 1570 alors que les Incas étaient en pleine déconfiture face aux conquistador…

– Redécouverte par pur hasard en 1911 par un archéologue amateur… 
Pouvant héberger tout au plus 750 personnes, les historiens pensent que l’endroit était un lieu de villégiature pour les gens de la haute société Inca. 
À son apogée, l’Empire Inca, assurément la société pré-colombienne la plus célèbre d’Amérique du Sud, s’étendait du sud de la Colombie (nord), au nord du Chili (sud), jusqu’à l’Amazone (est). 
Machu Picchu se trouvait dans la « Vallée Sacrée », une vallée comprenant les terres les plus fertiles du royaume, une vallée ne faisait pas parti de l’Empire Inca, mais étant la propriété privée de l’Inca (nom de l’Empereur Inca). 
Pour ceux désirant avoir une vue à vol d’oiseau de Machu Picchu, il existe 2 options;

Huayna (Wayna) Picchu

Petite colline dominant le site. L’accès au sommet est limité à 400 personnes par jour ($$ – Billet à acheter quelques mois à l’avance). 

Cerro Machu Picchu 

Située à 3000m d’altitude, soit +600m au-dessus de Machu Picchu, le sommet domine non seulement Machu Picchu, mais tous les environs. Le sentier pour s’y rendre est une succession d’escaliers faites pour des géants, et s’apparente à un mur par moment. 



De nos jours, Machu Picchu est une grosse business; un maximum de 2000 touristes peuvent visiter le site à chaque jour. 
Pour se faire, il faut se procurer un billet ($$) à Machu Picchu Pueblo, la veille ou le matin même (en basse saison), ou quelques jours/semaines à l’avance (en haute saison). 
Ceci étant dit, un voyage en Amérique du Sud est incomplet sans une visite des ruines les plus connus dans le monde… l’une des 7 nouvelles Merveilles du Monde; Machu Picchu, « La Cité Perdue des Incas ». 

Épisode 120 – Ausangate; La Montagne Sacrée

4 Mai 2017

« Vous-allez à Machu Picchu aujourd’hui? » Que nous lance l’homme à la réception de notre auberge à Cusco. 
« Non! Nous allons à Tinqui pour commencer le Circuit Ausangate »
?!? – L’homme bouche bée finit par avouer qu’il ne savait pas de quoi je parlais. Même si le départ de la boucle se trouve à moins de 100km de Qosqo, l’ancienne capitale Inca rebaptisée Cusco par les conquistadors, 9.5 voyageurs sur 10 font le déplacement pour une seule et unique raison; visiter Machu Picchu.
La veille, en allant nous renseigner au bureau de IPeru, la référence touristique au Pérou, l’homme avait paru très surpris que nous lui posions des questions sur Ausangate et  » comment se rendre à Tinqui ». 
« Vous devez passer par une agence de voyage », qu’il nous avait répondu.
« Foutaise!!! » que je lui lançais du tac au tac. 
Nous étions donc les seuls non péruvien à bord d’un bus (qui avait définitivement eu de meilleurs jours) roulant en direction de Tinqui (Tinke). 

AUSANGATE POUR LES NULS
Se prononçant O-Sun-Ga-Té, Ausangate est le point culminant (6372m) de la Cordillera Vilcanota, la plus haute chaine de montagnes au nord du Pérou. 
Depuis l’époque pré-Inca jusqu’à aujourd’hui, la montagne est vénérée par le peuple quechua (habitants du coin) qui lui font de multiples offrandes et sacrifices. 
Le Circuit de Ausangate est d’une longueur de 70 km, culmine à plus de 5000m, débute et termine à Tinke (Tinqui) et est considéré comme la plus haute randonnée au Pérou. 
Llamas, villages quechua, glaciers et lacs aux eaux turquoises sont au rendez-vous.

JOUR 1 – AUSANGATE
Départ Tinke (@3800m)

Arrivé Upis (@4400m)

Distance +/-15km

Dénivelé Positif +650m

Dénivelé Négatif -50m
Avec seulement 4 jours de repos depuis la fin de notre intense randonnée sur le Circuit Illampu (Bolivie), nous étions reparti pour un tour. 
Moins de 1km après avoir quitté Tinke (3800m) et commencé à marcher en direction de Ausangate, nous croisions un couple de français. Effrayés, ils nous racontait la nuit infernale qu’ils venaient de passer à Upis (4410m)… le camp où nous avions planifié de dormir ce soir. Durant toute la nuit, des locaux avaient tenté de voler leurs affaires. L’un d’eux avait même réussi à dézipper leur tente et avait prit la fuite avec l’un de leur sac à dos. 
Le Circuit Ausangate malheureusement s’était forgé cette réputation depuis quelques années; des locaux n’aimant pas du tous les étrangers et faisant des « raids » dans les campements la nuit. 
Nous étions pleinement conscient de cette problématique avant de commencer, et avions décider d’aller de l’avant. Après tout, nous dormions avec nos porte-feuilles et téléphones dans nos sous-vêtements. Tout ce qu’un voleur trouverait serait des bottes puantes et des sacs à dos remplis de trucs suintants. 
La randonnée d’aujourd’hui pourrait se résumer à marcher sur une route de campagne bordée de murets de pierre et traversant une plaine diagonale (en direction du ciel) parsemée de bâtiments rudimentaires. 


Nos beaux sourires et « Hola! Buenos Dias! » se butaient plus souvent qu’autrement à des « pokerface » (regards sévères). 

Quelques km avant de terminer notre journée de travail, nous atteignions un plateau avec quelques fermes. 


Nous faisions alors la connaissance de Anna, son jeune fils de 4ans et leur petit chien de 4 mois trop excité. Anna élevait seule ses 2 enfants et plus de 100 llamas & alpacas. L’emplacement de sa maison était à rêver. 
Terminus Upis… au pied de Ausangate et de son glacier. 



JOUR 2 – DES GLACIERS & DES LLAMAS
Départ Upis (@4400m)

Arrivé Ananda (@4350m)

Distance 27km

Dénivelé Positif +950

Dénivelé Négatif -1000m
À notre réveil, une brume épaisse recouvrait tout autour de nous. Peu importe, il fallait se mettre en marche… 
Direction Paso Arapa, le 1er col du Circuit à 4850m. L’ascension se faisait sur un sentier extrêmement bien balisé, au travers d’une contrée recouverte de roches de toutes tailles. Peu avant notre arrivé au sommet, Ausangate sortait du brouillard. 


Dès lors, le sentier traversait des plaines habitées par des centaines, que dis-je… des milliers de llamas et croisait de multiples lacs aux eaux turquoises. 


Une fois sur les berges du Lago Hatun Pucacocha, le plus grand de ces lacs, Ausangate se dévoilait complètement. Nous pouvions admirer le coeur de ce géant des Andes; un gigantesque glacier suspendu aux parois rocheuses depuis des millénaires. 


Après avoir égaré le sentier… et dû marcher directement dans le lac… à l’eau glaciale… nous n’avions plus d’excuse; il fallait maintenant remonter pour rejoindre la Paso Palomani à 4800m.


Une fois au sommet… il ne restait plus qu’à atteindre le Lago Ausangate… situé quelques centaines de mètres plus bas de l’autre coté. 
Dès lors, la prochaine (et plus grande) difficulté du Circuit se dressait devant nous; la Paso Ausangate, du haut de ses 5 milles quelques mètres. Paso Ausangate allait cependant attendre. 
Au lieu de monter vers la Paso, nous bifurquions vers la droite et plongions vers le fond de la vallée. Direction Ananda, campement à une dizaine de km en dehors du Circuit. 
Le sentier passait alors par une vallée aux couleurs toutes aussi contrastantes que surprenantes; un versant de vallée tout rouge (sable), le fond de la vallée vert radioactif (végétation), avec le glacier (tout blanc) en arrière plan. 


Après que le beau temps se soit transformé en mini tempête de neige, qui s’était elle-même transformée en averse plus nous descendions en altitude, Ananda était désormais en vue. 



Jour 3 – LA COLORADA MONTANA
Départ Ananda (@4350m)

Arrivé Ananda (@4350m) + voiture/bus Cuzco

Distance 15km

Dénivelé Positif +650m

Dénivelé Négatif -650m
Ananda jurait par rapport au reste du Circuit; un tampon de maisons et de vendeurs de cossins. L’endroit était accessible par la route et une tonne de minibus bondées de touristes y venaient chaque jours. 
Ananda avait la particularité d’être situé à la base de la Colorada Montana (Montagne Arc-en-Ciel). 
Autant le Circuit Ausangate était désert, autant la Colorada Montana faisait courir les foules.
Chaque jour, des milliers (oui autant que cela) de touristes quittaient Cusco vers 03.00/04.00 du matin à bord de minibus, arrivent à Ananda vers les 08.00/09.00, et se mettent en marche pour atteindre le sommet de la Colorada Montana. 
06.00 – C’est ainsi que notre réveil sonnait dans une vallée glacée qui attendait encore les premiers rayons du soleil. Il n’était pas question d’attendre le soleil ou que la température se réchauffe, nous voulions avoir le sommet de la Colorada Montana à nous tout seul avant que la horde de randonneurs du dimanche ne prennent d’assault la montagne (pour avoir croisé la horde lorsque nous descendions, je peux vous jurer que « prendre d’assault » est le bon terme). 


Après avoir marché pendant un bon 2 heures sur un sentier s’apparentant à une ligne de boue montant jusqu’au sommet d’une montagne, nous atteignions un endroit qui ressemblait à un bunker militaire perdu dans les montagnes. 
Nous y étions; à plus de 5000m… la Colorada Montana. 


Malheureusement pour nous, il avait plu durant toute nuit (donc neigé à plus de 5000m). 
À quoi ressemble une montagne aux couleurs arc-en-ciel quand on la recouvre de neige? À une montagne recouverte de neige!!!


N’empêche, la vue sur les hautes montagnes était impressionnante. 

Parce que nous avions vu les plus beaux paysages que le Circuit Ausangate avait à offrir (les plus beaux panoramas se trouvent dans la 1ère partie du Circuit) … 
Parce que la suite du Circuit comportait beaucoup de dénivelé positif…
Parce que Tanzi était malade et qu’un peu de repos ne pourrait pas nuire pour la suite…
Nous décidons d’écourter notre randonnée. 
Depuis Ananda, un jeune péruvien nous conduisait jusqu’à la grande route située 60km plus loin. 
De là, nous sautions dans le 1er bus en direction de Cuzco… en route pour de nouvelles aventures… 

Épisode 119 – Illampu; Là où le Temps s’est Arrêté…

24 avril 2017
Quelque part 100km au nord ouest de La Paz (Bolivie)
Le vieux minibus bondé avalait les km de la route cahoteuse. 
Le Lago Titikaka se trouvait sur notre droite, mais notre regard était fixé droit devant sur le massif de l’Illampu, l’un des joyaux de la Cordillera Real, la plus importante chaine de montagnes de Bolivie. 


Du haut de ses 6388m, Illampu donnait l’impression d’être un monstre à plusieurs têtes (quinze sommets entre 5500m et 6400m pour être plus exact) fait de roches, de neige et de glace. 
Le bus quittait l’altiplano pour plonger dans une immense vallée sortie de nul part. 
Au final d’un route sinueuse, le chauffeur s’écriait « Sorata »!
Surnommé le « Jardin d’Éden » par les conquistadors, Sorata se situe à mi-chemin entre l’Amazone et les Andes. De la place publique au centre du village, il n’y a qu’à lever les yeux les « neiges éternelles » ou regarder vers le bas pour voir de la jungle à perte de vue. 

Cette soirée là, nous serions les 2 seuls touristes en ville. Incompréhensible puisque Sorata était assurément la plus belle ville que nous avions vu en Bolivie. Pour nous, Sorata était surtout le point de départ du Circuit de l’Illampu. 


JOUR 1 – EN MARCHE VERS LE CIEL

Départ Sorata (@2700m)

Arrivé Abra de Illampu (@4600m)

Distance 24km

Dénivelé Positif +2300m

Dénivelé Négatif -300m

Ascension

– Paso Abra de Illampu @4741m
06.00 – Le réveil sonne… ahhh… vlan… snooze. 
Pour les 9 prochaines minutes, j’allais tenter de mémoriser la sensation d’être couché dans un lit…
À peine quitté la Plaza del Armas, au centre de Sorata, que le circuit montrait ses couleurs. Dès les premières minutes de la 1ère journée le sentier montait en flèche vers le sommet de la vallée. Avant de dormir ce soir, il faudrait monter +2000m de dénivelé positif jusqu’à Abra de Illampu (4741m), le 1er col du Circuit. 
Dès lors, et pour les 110km et des poussières que compte le Circuit, l’expression « seul au milieu de nul part » allait rarement être aussi vraie. Même si la randonnée se trouve dans tous les guides de voyage, et même si nous étions en plein coeur de la saison touristique, nous n’allions pas croiser d’autres randonneurs, et simplement une poignée de locaux, durant les 5 prochains jours. 


Bientôt Sorata n’était plus qu’un lointain souvenir. Seul le bruit des oiseaux rivalisait avec l’air qui donnait lourdement dans nos poumons. 
Les heures défilaient, mais nous étions toujours à monter cet espèce de mur végétal; la route de terre montait en lacets au travers des champs de mais et des petites fermes.


Vers le haut de la vallée, les champs et troupeaux de moutons étaient remplacés terres laissées à l’état naturel où vagabondaient des llamas. 
Au tournant d’un virage, nous dominions maintenant la totalité de la vallée, avec Illampu tout en haut sur notre gauche.


Passé Estancia, un petit village perché plus de 4000m, nous disions au revoir à la route de terre, pour dire bonjour à un sentier rocheux et difficile à suivre. 

Après s’être perdu une bonne heure en suivant un mauvais sentier, nous entreprenions l’étape finale pour gagner le Col de Abra de Illampu. Nous n’avions plus qu’une seule vitesse; hyper super lent… une tortue sur le plat nous aurait dépassée. 


La dernière centaine de mètres d’ascension se faisait en zig zag dans un couloir d’éboulement. 
Abra de Illampu était dorénavant à porté. 
Du sommet, nous avions l’impression d’être les Rois du monde. Tout (sauf Illampu) était en dessous de nous. 


Nous basculions dans une nouvelle vallée étroite. À peine commencé la descente que nous localisions une petite plaine pleine de merde de llamas, avec un petit ruisseau glacé à proximité. 
À ce sujet, il n’y a aucun campement désigné sur le Circuit Illampu; vous campez où vous voulez sans avoir à payer le moindre frais.
L’endroit serait parfait pour la nuit. 
Le soleil ne tardait pas à laisser toute la place au ténèbres… et à un froid glacial. Nul doute, même si nous étions en plein milieu de l’été austral, la température descendrait bien en deca de zéro. 
Nous étions les seuls être vivants à des milles à la ronde… même pas la moindre trace de végétation… que de la roche noire à perte de vue. 
Toute la nuit, il allait régner un silence de mort; pas un son, pas même une goutte de vent. 

Joue 2 – LE BRUIT DU SILENCE
Départ Abra de Illampu (@4600m)

Arrivé Cocoya (@3500m)

Distance 21km

Dénivelé Positif +700m

Dénivelé Négatif -1800m

Ascension

– Paso Korahuasi @4480m
Le réveil se passait dans une contrée complètement givrée. Un bain de soleil avec les 1ers rayons et nous étions en route. 
Ce matin ne serait pas le cardio, mais bien les genoux qui seraient mis à l’épreuve; -700m de descente tout au fond de la vallée via un non sentier fait de roches et de marécages. 
Tout au fond, à la jonction de plusieurs vallées, le sentier rejoignait une route de terre. Le fond de la vallée était peuplé de fermes extrêmement rudimentaires (faites avec les moyens du bord… donc de la pierre). La qualité de vie dans ce coin de pays semblait (au mieux)!extrêmement difficile. 


Une fois passé Estancia Utjana Pampa, un village désormais en ruine, il était désormais temps d’entreprendre l’ascension du Paso Korahuasi, le 2ème de 6 Cols sur le Circuit… une ascension sans véritable sentier, au travers d’un jardin de buissons jaunes et de roches. 


Depuis le sommet de Korahuasi (@4480m), le sentier empruntait une vallée ressemblant à un espèce de corridor descendant en droite ligne sur Cocoyo, le plus grand (et seul) village sur le Circuit. 
La descente se terminait à marcher dans une plaine inondable sur quelques km… plaine traversée par des rafales de brouillard venant comme des murs blancs.


Un peu avant d’arriver au village, la pluie nous tombait férocement dessus et ne semblait pas vouloir arrêter de sitôt. 
Durant la dernière heure, nous n’avions pas arrêté de se dire « encore un peu plus loin » à chaque fois que nous trouvions un site de camping convenable. 
Il était maintenant trop tard. Le jour avait presque fait place à la nuit et il nous tombait des cordes dessus. 
Nous décidions alors de chercher un alojamiento (hébergement chez les locaux)… sans succès. 
Nous étions sur le parvis de l’église à chercher une solution, quant Tanzi eut l’idée d’aller voir au « Centro de Salud (Centre du Salut) » que nous avions aperçu à l’entrée du village. 
À peine entré dans les « bureaux » que l’homme et la femme y travaillant comprenaient nos intentions… et nous menait vers une pièce inoccupée. 


Ce ne serait pas le grand luxe, mais au moins nous avions un toit pour nous protéger de la pluie. 

Jour 3 – HOLA! BUENOS DIAS!
Départ Cocoya (@3500m)

Arrivé Plaine Marécageuse (@4100m)

Distance 14km

Dénivelé Positif +1100m

Dénivelé Négatif -450m

Ascension

– Paso Sarani @4600m


Au matin, les nuages étaient bien présent, mais la pluie avait disparu; hip hip hip…
Nos hôtes ne voulaient rien savoir de recevoir un quelconque paiement de notre part. Tout ce qu’ils voulaient était une photo avec nous devant le Centro de Salud… difficile de refuser. 
Pour rejoindre le sentier, nous devions monter tout en haut du village en passant par la rue principale… à l’heure où les enfants partaient pour l’école. 
Notre passage dans le village prenait des allures de spectacles alors que tous les enfants voulaient nous dire « Hola, Buenos Dias ». Que de bonheur de voir les visages s’illuminer en entendant notre réponse. 


Le village ayant récemment été désenclavé (une route a été construite pour relier le village au reste du monde), les gens n’avaient plus à utiliser le sentier que nous empruntons. N’empêche, les enfants de Cocoyo n’avaient pas vu beaucoup de blancs dans leur vie. 
Le route sortant du village se dirigeait vers une vallée menant à Paso Sarani +1000m plus haut. Le brouillard ne tardait pas à nous envahir, nous réduisant à marcher à l’aveuglette. 


Un petit & vieux monsieur pas de dent sortait de nul part et nous demandait des pilules pour le mal de tête (c’est en tout cas ce que nous avions compris)… puis 3 petits cochons venaient à notre rencontre, semblant demander de la nourriture… puis des troupeaux d’alpacas & llamas (toujours aussi amusant de regarder leur petite tête toute drôle)…

La vallée devenait peu à peu une véritable mer de roches. Aussi invivable l’endroit donnait l’impression d’être, nous croisions de petites fermes extrêmement rudimentaires jusqu’au sommet de la Paso. 
Paso Sarani (@4600m) est le genre d’endroit où on ne s’éternise pas. Nous étions accueilli au sommet par un mélange de grêle et de brouillard très dense. 
La vallée dans laquelle nous débouchions n’était guère plus accueillante; un désert de roches comprenant toutes les teintes de blanc (brouillard). 
Plus nous descendions et moins le brouillard était dense, laissant peu à peu apparaitre une vallée verdoyante ceinturée de hautes montagnes, avec de petites fermes, des troupeaux de llamas et une rivière serpentant au milieu. Notre patience avait été récompensée…


Cette vallée était de loin l’endroit le plus propice à la vie de tous les lieux que nous avions croisés depuis notre départ de Sorata. 
Désormais au plus profond de la vallée, nous passions au travers d’une immense plaine marécageuse peuplée de centaines de moutons, llamas et alpacas… l’endroit parfait pour installer notre campement. 
Au final de notre 3ème journée de randonnée, nous avions désormais marché plus de la moitié du Circuit, monté 3 des 6 cols et nous étions en avance d’une bonne demi-journée sur notre itinéraire pour faire la randonnée en 7 jours. 


JOUR 4 – LE BLIZZARD ÉLECTRIQUE
Départ Plaine Marécageuse (@4100m)

Arrivé Laguna San Francisco (@4700m)

Distance 24km

Dénivelé Positif +1400m

Dénivelé Négatif -800m

Ascensions

– Paso Abra de Calzada @5045m

– Paso San Francisco @4900m
Meilleure… Pire… Qui n’en fini pas… À glacer le sang… Trop chaud… Glaciale… À couper le souffle… tous ces qualificatifs y passent pour décrire le Jour 4 de notre randonnée sur le Circuit Illampu. 
Cette journée est maintenant un bon souvenir, mais jamais je ne veux revivre une journée comme cela, tellement elle a failli tourner au drame à quelques reprises.
Toute bonne histoire commence… par un commencement (sauf dans le film Inception). 
Nous admirions la plaine marécageuse et les nombreux animaux y jouant durant un bon moment avant de se résigner à plier bagage et commencer la journée. 
Au menu d’aujourd’hui, l’ascension de la Paso Abra de la Calzada, le point le plus haut de la randonnée (@5045m), située 11km et +950m plus loin. 
Le sentier prenait abruptement fin quand nous tombions sur une pelle mécanique…
Au lieu d’un sentier rocheux, nous en étions quitte pour faire l’ascension via une route de terre. C’était malheureusement le sort que la plupart des sentiers de grande randonnée étaient destines (je pense ici au circuit de l’Annapurna au Népal :-(. Triste, mais qui sommes nous pour empêcher un pays de se moderniser. 


Une fois atteint Paso Abra de Calzada, se trouvant entre les sommets Calzada (5600m) & Kasiri (5875m) et leur glacier respectif, le ciel bleu exempt de nuage que nous avions jusqu’alors, se couvrait d’un épais brouillard. Les glaciers tout autour de nous ne faisaient alors plus qu’un avec le ciel. 


Le brouillard se transformait rapidement en un blizzard qui recouvrait le sol de quelques cm de neige… assez pour faire disparaitre toute trace du sentier.
Les gros flocons de neige nous tombaient dessus avec furi. Comme si cela n’était pas suffisant, des éclairs traversaient le ciel. 
Un blizzard électrique… pfff… ton histoire est sans queue ni tête? Je vous répondrais que l’histoire est trop insensé pour que je l’ai inventé. 
Je disais donc… les éclairs traversaient le ciel. Sachant qu’un immense glacier se trouvaient directement au-dessus de nos têtes, nous avions une peur bleu qu’un éclair frappe la glace et déclenche une avalanche. Après tout, le lac plus bleu que bleu en contrebas et le champ de grosses roches, que nous traversions depuis bientôt 1h, n’étaient pas arrivés là par magie.
Il était donc hors de question d’attendre la fin de la tempête pour localiser le sentier. Non! Nous allions y aller à l’aveuglette. 
Le son de chaque éclair nous résonnait dans le corps et nous glaçait le sang. J’essayais de rassurer Tanzi, mais peinais moi même à garder mon sang froid. 
Une heure plus tard, le temps s’était complètement dégagé et nous terminions la journée à marcher dans des dunes de sable jusqu’au Lago San Francisco. 


Nous avions alors une vue imprenable sur Kasiri et Ancohuma, 2 des hauts sommets du massif de Illampu. 
Un peu avant d’arriver au Lago San Francisco, nous décidions d’installer notre campement dans une magnifique plaine. Nous allions partager l’endroit avec un groupe de chevaux sauvages (affreux je sais…)


JOUR 5 – LA BRUME
Départ Laguna San Francisco (@4700m)

Arrivé Sorata (@2700m)

Distance 36km

Dénivelé Positif +700m

Dénivelé Négatif -2550m

Ascension

– Paso Altiplano @4890m
Au matin, de fort vents balayaient notre site. Le genre de matin ou tu veux t’emmitoufler dans tes couvertes et mettre le chauffage dans le tapis… 
Nous devions nous résigner à démonter et partir sans avoir eu notre bain de soleil matinal. 
Nous rejoignions le Laguna San Francisco (@4450m) en vitesse, traversions une plaine marécageuse, qui ne demandait qu’à nous engloutir au moindre faux pas, et commencions l’ascension du dernier Col du Circuit (col sans nom que j’ai baptisé Paso Altiplano) via un sentier en zig zag. 


Du sommet de Paso Altiplano (@4890m) nous pouvions en théorie voir le Lago Titikaka tout en bas. En pratique, tout était bouché par un brouillard épais. 
Nous étions de retour dans l’Altiplano bolivien (plaine en haute altitude). Dès lors, il fallait « simplement » rallier Sorata -2150m plus bas.
Il y avait une route de terre, mais nous décidions d’y aller en ligne droite dans la plaine… ce qui s’avérait être une erreur puisque nous nous butions constamment à des collines sortant de nul part dans le brouillard. 


Nous descendions dans un No Man’s Land / désert de cailloux. On ne voyais pas à plus de 10 mètres à la ronde. Des troupeaux de llamas sortaient du brouillard… et y retournaient aussitôt.
Le brouillard disparaissait complètement quelques km avant le village de Milipaya. Le tout se faisait extrêmement soudainement alors que nous étions à marcher dans des champs où travaillaient des boliviens. Vous auriez du voir leur visage! Leur regard semblait dire « mais d’où sortent ces 2 touristes?!? ».
Il ne restait « plus qu’à » suivre la route jusqu’à Sorata. (+/-20km et -1200m).

Sans trop se tromper, le Circuit Illampu fut notre randonnée la plus ambitieuse en Amérique du Sud. 
Sans rien enlever au Circuit Huemul, à Dientes de Navarino, à Torres del Paine et au Circuit Huayhuash, ce fut 5 jours en autonomie complète sur un sentier TRÈS peu fréquenté, à une altitude moyenne de 4000m, avec des cols dépassant les 5000m, des températures froides le jour et glaciales dès que le soleil disparaissait. 

Illampu! 
Là où le temps et l’horloge de la modernité se sont arrêtés il y a quelques siècles. 
Là où les habitants semble encore vivre à l’époque du Moyen-Age (exception faite des cellulaires). 
Marcher le Circuit Illampu c’est être seul dans une contrée surprenante et reculée!
Marcher le Circuit Illampu c’est être prêt à faire face à l’imprévisible!
Vous rêvez d’avoir un sentier de Grande Randonnée à vous tout seul? Ne cherchez pas plus loin!

Illampu EN BREF

+ La randonnée très difficile en raison de l’isolement, 

+ Un sentier pas toujours facile à suivre & souvent inexistant, 

+ Source d’eau abondante tout au long du Circuit,  

+ Aucune possibilité d’hébergement autre qu’en camping, 

+ Aucun site de camping, vous campez où vous voulez,

+ Aucun frais de passage et/ou de camping (gratuit),

+ Possibilité d’organiser guide et/ou porteurs depuis Sorata. 

P.S. I – Essayez de gonfler des matelas de sol à 5000m d’altitude sans vous évanouir. 

Épisode 118 – La Paz & El Choro

Paz – Nom Féminin signifiant « Paix » en espagnol. 


Le minibus roulait au travers de l’altiplano bolivien, laissant derrière le Lago Titikaka. 
La Cordillera Real (Cordillère Royale), et ses hauts sommets enneigés, faisait son apparition. 
Le bus pénétrait dans une grande ville; El Alto. 
Soudainement, la ville disparaissait, laissant toute la place à… une nouvelle ville située dans un immense & profond canyon. Une sentinelle de glace se dressait droit devant, le Cerro Illimani à 6460m. 
Difficile de ne pas être lâcher un WOW!!!
Bienvenue à La Paz, capitale de la Bolivie, plus haute capitale du monde (@3640m) et l’une des « 7 Wonder Cities (7 Villes Merveilleuses) » du monde!

LA BOLIVIE POUR LES NULS
Re-bienvenue au pays des « Chucutas »… surnom des boliviens… qui signifie « Monsieur Patate »… les boliviens sont généralement petits, trapus et avec une grosse tête…
J’ai déjà parlé abondamment de la Bolivie il y a quelques mois lors de notre premier séjour. 
Cette section Pour les Nuls se concentrera donc sur Evo Morales, l’actuel président de la Bolivie. 
– En 2005, Evo Morales fut élu président de la Bolivie… le 1er dirigeant bolivien aux origines indigènes. 

– Avant lui, tous les présidents de la Bolivie étaient à la solde des intérêts étrangers, vendaient (donnaient) les richesses du pays et se foutaient royalement du peuple. 

– Depuis 2005, Evo s’efforce de redonner la Bolivie aux boliviens; il a nationalisé de nombreuses entreprises, construit de nombreuses routes pour relier des coin de pays jusqu’alors inaccessible, réformé le système d’éducation, etc. 

– Tout n’est pas rose en Bolivie… le pays est toujours l’un des plus pauvres sur Terre… mais au moins les boliviens ont leur sort entre leurs mains et s’en vont dans la bonne direction. 

– De nos jours, Evo est considéré comme une espèce de semi-Dieu par la population. 

LA PAZ
Aucune raison ne justifiait la création d’une ville dans un canyon aride, profond de plus de 400m et situé à presque 4000m d’altitude. Il n’y avait aucun cours d’eau important à proximité, l’endroit était difficile à défendre et beaucoup trop haut en altitude pour faire pousser quelconque culture. Aucune raison… ne serait-ce que la petite rivière qui passait au milieu du canyon était à l’époque remplis d’or… la seule chose qui importait pour les conquistadors. 
En 1548, « Nuestra Senora de la Paz (Notre Dame de la Paix) », dit La Paz, était fondée. 

Mirador Kili Kili

Situé au nord du canyon et facile d’accès après une courte (mais intense) ascension depuis le centre-ville, le Mirador Kili Kili est l’endroit parfait pour commencer la journée et avoir une vue d’ensemble sur la capitale.
Il n’y a pas de plat à La Paz; soit vous montez ou descendez. Mis à part le centre-ville, situé dans le fond du canyon et comportant des tours résidentielles et commerciales, le reste du canyon est un ramassi de petits bâtiments en briques rouge.



Cholitas Wresting

Dans la catégorie; « j’aurais souhaité ne jamais y aller », nous avons assisté à un spectacle de Cholitas; un espèce de Lucha Libre Mexicaine (lutte où tout est chorégraphié) mettant en scène des femmes habillées en costumes traditionnels (robe + chapeau haut de forme + tresse + talon haut). 
J’avais un certain malaise à regarder ces petites dames se taper dessus et se briser des planches de bois sur le dos. 



RANDONNÉE « EL CHORO »
L’idée est simple; marcher plus de 50km sur un ancien chemin Inca reliant le Col « La Cumbre », situé sur les hauteurs de La Paz (@4900m), jusqu’à Coroico, ville à la lisière de l’Amazone (@1700m). 
Jusqu’en 1930, ce sentier était la seule route reliant La Paz au nord-est de la Bolivie. 
Une randonnée facile de 3 jours… ou assez intense de 2 jours.

Jour 1 – TOUT EN DESCENTE


Départ
La Cumbre (45min de bus depuis La Paz)

Arrivé Vila Loba (camping)

Distance 24km

Dénivelé Positif +300m

Dénivelé Négatif -2800m
Une fois descendu du bus et monté les derniers +300m séparant la grande route du sommet de La Cumbre, un endroit où rien ne pousse, mais offrant un formidable panorama à 360 sur les montagnes environnantes, le sentier plongeait dans une vallée sinueuse. 


Dès lors, la randonnée se résumait en une « chute libre » de presque -3000m de dénivelé négatif, passant au travers d’une contrée reculée, où les llamas étaient nombreux, mais les habitants rares. 


Tanzi étant malade depuis quelques jours, elle avait décidé d’aller se reposer et m’attendre à la fin du parcours. 
Même si la randonnée est sans aucune véritable difficulté, et que le départ est a moins d’une heure de La Paz, le sentier était désert; j’allais croiser une demi-douzaine de randonneurs tout au plus. Du nombre, Nicolas (québécois), Maeva et Charlotte (françaises), avec qui j’allais partager le chemin lors de la 1ère journée.
Qui dit « ancien chemin Inca », dit « route de pierre en mauvais état ». Le chemin était en réalité une ligne de pierre zigzaguant dans le fond de la vallée au travers de la plaine.  


La vallée montagneuse et sans végétation du début laissait peu à peu la place à une forêt tropicale de plus en plus dense. Du même coup, la température fraiche du début était désormais chargée d’une humidité suffocante.

Jour 2 – SOUS UNE PLUIE DILUVIENNE

Départ
Vila Loba (camping)

Arrivé Pacallo + taxi jusqu’à Cocoiro

Distance 32km

Dénivelé Positif +850m

Dénivelé Négatif -1850m
Nouveau jour, même rengaine; descente dans une vallée tropicale via un sentier rocheux.


La pluie se mettait rapidement de la parti, se transformant éventuellement en un véritable déluge qui allait perdurer toute la journée, transformant du même coup les roches (sur lesquelles je marchais) en un jeu dangereux. 


J’arrivais à Villa Esperanza, la fin du sentier, au bout de 7 longues heures. 
Ayant distancé mes compagnons de marche en début de matinée, j’étais seul et le seul transport pour gagner Coroico (20km plus loin) était un taxi à 60$. 
Sans dire un mot, je souriais au chauffeur, reprenais mon sac et commencais à marcher sur la route. 
5km plus loin, j’atteignais le village de Pacallo. Un homme s’écriait « taxi ». Je lui demandais « cuanto (combien) » sur un air désabusé (en pensant qu’il allait me demander une fortune lui aussi)… il me répondait « 10bob (2$) ». Hehe
2 jours, 50km de marche et plusieurs km de dénivelé négatif sur un sentier rocheux, que moi et mes genoux en compote étions désormais à quelques minutes de retrouver Tanzi à Coroico. 

COROICO
Alors que La Paz se situe en plein coeur de la Cordillère des Andes, moins de 2 heures de route vers l’est et le paysage change radicalement. 
Vous atteignez alors Coroico (1700m), charmant village situé au coeur de la province de Yungas, une région faite de collines toutes vertes à mi-chemin entre les Andes et l’Amazone. 

Épisode 101 – Circuit Huemul; LE Trek Ultime en Patagonie

*IMPORTANT*

Ce trek est TOUT SAUF pour les randonneurs du dimanche. Il faut avoir beaucoup de « millage » dans ses souliers de montagne, de l’expérience sur glacier, du sang froid à revendre et un brin (ou 2) de stupidité, pour s’attaquer à ce trek. 

13 Janvier 2016 – El Chalten
J’avais donc réussi à louer un harnais (Voir Fin de l’Épisode 100)… 
Un stop au (tout sauf super)marché du coin et j’étais fin près à 4 jours d’autonomie complète (encore) sur le Circuit Huemul. 
Huemul est le nom d’un mammifère, qui ressemble à une antilope, et qui est très commun en Patagonie. C’est aussi le nom d’une montagne située à quelques 20km au sud-ouest de El Chalten; le Cerro Huemul, autour duquel le Circuit Huemul zigzague… un Circuit réputé comme une randonnée exigeante de 4 ou 5 jours, en dehors des sentiers battus, avec un sentier compliqué à suivre (parfois inexistant), avec quelques sections assez techniques (dangereuses), de la marche sur glacier (ça sonne amusant… pas vraiment), aucun service (oubliez la douche le soir… et les toilettes)… et beaucoup BEAUCOUP B E A U C O U P de vent. 
Bref, le genre de randonnée où on ne croise pas beaucoup de monde… mon genre de randonnée…

Jour 1 – QUAND LES ÉTOILES S’ALIGNENT
Départ; Info Touristique de El Chalten 

Arrivé; Camp Toro

Distance; 17km

Dénivelé; +660m, -400m
11.00 – Avec déjà 13km dans les jambes en matinée, je me trouvais au départ du Circuit à l’Information Touristique à l’entrée de El Chalten… un peu nerveux. 
Pour faire le Circuit Huemul, il fallait en théorie (et en pratique) s’enregistrer auprès des gardiens du parc, être au moins 2 personnes et avoir TOUT l’équipement obligatoire (j’avais presque tout sauf des crampons et une corde… trucs que j’avais jugé non essentiel).  

  
Voyant qu’il n’y avait pas vraiment de point de contrôle, je passais en coup de vent sans m’enregistrer (pas que je ne voulais pas m’enregistrer… mais si je m’étais enregistré, ils auraient vu que j’étais seul…) et je commençais mon périple. Une personne, rencontrée quelques jours après la fin de ma randonnée, me confiait qu’elle avait tenté de faire le Circuit Huemul et qu’un garde du parc lui avait refusé l’entrée à ce même endroit 🙂
Direction le 1er campement sur le bord du Laguna Toro… 17km plus loin.
Dès le départ, le sentier proposait une ascension de +600m, avec Fitz Roy qui brillait de tous ses feux sur la droite… et le soleil qui tapait solidement sur la tête.
À mi-chemin, je débouchais sur une clairière avec une vue époustouflante sur le Lago Viedma, l’un des plus gros lac d’Argentine. Si tout se passait bien, je serais sur ses berges dans 2 jours.

    
À partir du 8ème km, s’en était fini de Fitz Roy. Je descendais alors jusqu’au fond d’une vallée avec le Cerro Huemul impossible à manquer devant moi. Je pouvais alors voir une rivière bleu zigzaguer jusqu’au fond de la vallée et remonter jusqu’à un lac se trouvant au pied d’un glacier… le Laguna Toro… ma destination du jour. 

        
Si le Circuit Huemul comportait une journée facile, c’était DE LOIN celle-là, avec un sentier sans difficulté et bien balisé. 

En voyant le Camp Toro pour la 1ère fois, on pourrait penser qu’il s’agit d’un décor pour une reconstitution de bataille lors de la guerre de sécession aux États-Unis; dans une petite forêt juste à coté d’une clairière, avec des barricades de bois partout. Ces barricades mes amis sont ce qu’on appelle « se protéger du vent le mieux possible avec les moyens du bord ». Parce qu’il ventait fort quand je suis arrivé, mais il allait venter TRÈS (trop) FORT toute la nuit. 

   
    
Le vent venait par rafale (extrêmement puissante), repartait… revenait aussi fort… et ainsi de suite. Tu es couché dans ta tente, il ne vente pas du tout… et puis tu entends un bruit qui se rapproche de plus en plus… fouettant les arbres au passage… comme si une chute d’eau te fonçait dessus… le bruit gagne en intensité jusqu’à devenir assourdissant… et le vent frappe… et ça fesse… et tu te blottis dans ton sleeping en ayant les yeux bien ronds et en souhaitant que ta tente résiste et que tes piquets soient solidement plantés.
Puis… tout redevient tranquille… en attendant la vague suivante. 
Après quelques rafales, tu relaxes un peu en te disant que si ta tente a résisté à toutes les rafales précédentes, elle devrait faire de même avec les suivantes… et tu t’endors… zzzzz

Jour 2 – PASO DEL VIENTO
Départ; Camp Toro

Arrivé; Refugio Paso del Viento

Distance; 12km

Dénivelé; +850m, -650m
07.30 – Par un matin gris & venteux, et alors que tout le monde dormaient encore à poing fermé (il y avait 7 autres tentes la veille), je prenais mon petit déjeuner, rangeais le campement et puis scram gram.
Direction la « Paso del Viento (le Col du Vent) » quelques +800m plus haut. Avec un nom pareil, je n’osais imaginer comment il pourrait venter… puisqu’il ventait déjà à écorner des boeufs. Je ne voyais alors que des montagnes devant moi;
– Sur ma gauche… des nuages noirs et une dangereuse montagne,

– Sur ma droite… un glacier perdu dans les nuages.

– Tout droit devant… un mélange de nuages blancs et de ciel bleu et une toute gentille montagne,
L’une de ces destinations serait l’heureuse élue…
Une rivière à passer via une tyrolienne (simple corde d’acier) bien accroché avec son harnais et je quittais les berges du Laguna Toro pour marcher en périphérie du Glacier Rio Tunel (nom de merde). 

   

  

 C’était la fin de la promenade dans le parc et le début d’une solide journée de travail. 
J’empruntais un section hyper délicate à traverser en ligne droite un champs d’éboulement instable et sans véritable sentier. Je tentais bien que (plus) mal de suivre les rares totems. 
J’avais beau marcher sur de la roche en bordure du glacier, je savais fort bien que j’étais SUR le Glacier Rio Tunel… sur une portion recouverte de cailloux… certaines portions de glace noire étaient sans équivoque sur ce point. 

            
J’étais tour fin seul au milieu de nul part et remplis d’un mélange de peur et de joie. Aussi belle soit la nature qui m’entourait, le tout pouvait rapidement se transformer en catastrophe si je n’étais pas 100% attentif à où je posais les pieds. 
Une fois atteint le Laguna Tunel, s’en était fini de longer le glacier; je montais maintenant directement à la Paso del Viento par la paroi d’une des montagnes… +600m d’ascension sans relâche sur un « beau » sentier avec un petit glacier sur la droite. 

  
11.29 – J’atteignais la Paso del Viento après avoir marché 7.1km en 4 heures. Le vent ne faisait alors aucun compromis; c’était comme si un immense sèche-cheveux me soufflait dessus en permanence. Je devais attendre le bon moment pour mettre un pas en avant sinon je reculais et perdais du terrain. 
Je basculais ensuite dans une nouvelle vallée entièrement occupée par l’immense Glacier Viedma. La vue était I N C R O Y A B L E… à perte de vue une mer de glace figée dans le temps (les photos ne rendent aucunement justice à l’endroit puisqu’il n’y a pas de référence humaine pour juger de l’ampleur).

        
13.02 – J’atteignais le Refugio Paso del Viento après avoir emprunté un sentier tout en descente dans une toundra rocheuse adjacente au Glacier.
Ne vous emballez pas avec le mot Refugio; la vieille cabane avait été construite dans les années 50/60 par l’armée argentinienne afin de préparer leur troupe aux rigueurs de l’Antarctique… ça vous donne une idée des conditions qui peuvent prévaloir ici. L’endroit servait dorénavant de salle à manger avec quelques très vieilles chaises et tables.

      
Peu importe, c’était tout ce que j’avais besoin pour afficher mon plus beau sourire après une dure journée au bureau 🙂
Ce que je ne savais pas encore c’est que la pire partie de cette dure journée allait être la nuit… avec de terribles rafales de vent s’abattant sur le site (pire que la veille). Par 3 fois, je devais aller replanter les piquets et replacer les roches sur les coins de ma tente. 
Des 8 tentes qu’il y avait la veille au Camp Toro, il n’en restaient que 3 ce soir… tous les autres ayant rebroussés chemin à un moment ou à un autre durant la journée.

Jour 3 – LE VENT M’EMPORTERA
Départ; Refugio Paso del Viento

Arrivé; Bahia de Hornos (Lago Viedma)

Distance; 16km

Dénivelé; +400m, -800m
En regardant la carte et une section du sentier, j’aurais pu croire (et je l’ai cru) que cette journée serait facile. En effet, le sentier était assez plat dans la 1ère partie, pour ensuite descendre « tranquillement ». C’est avec cette mentalité (d’avoir une journée facile devant moi) que je quittais le Refugio Paso del Viento… 
Erreur… moi qui croyais avoir subi le pire vent de ma vie à Torres del Paine (Voir Épisode 98)… mon 3ème jour sur le Circuit Huemul allait me faire changer d’idée radicalement.
Je marchais sur un sentier en montagne russe, au travers d’un paysage sculpté depuis des millénaires par la glace et le vent, avec une montagne sur ma gauche et une vue I M P R E N A B L E sur le Glacier Viedma en contrebas sur ma droite. Le sentier était en théorie très facile à suivre, mais en pratique rendu extrêmement difficile en raison du vent.    

  

  

   

    
   
    
Voyez-vous, le vent changeait constamment de sens. Quand celui-ci poussait vers la montagne, dans mon dos ou de face, il n’y avait (relativement) aucun problème… mais plus souvent qu’autrement il venait latéralement en dévalant la montagne… et essayait de me pousser tout en bas de la montagne. Vu l’étroitesse du sentier, un pied placé au mauvais endroit aurait pu résulter à rendre une visite au Glacier quelques centaines de mètres plus bas. 
Quand j’entendais une rafale descendre de la montagne, j’arrêtais de marcher, m’encrais solidement les pieds et tentais de prendre appui avec une main sinon 2 (c’était aussi pire que cela). 
Si j’avais eu l’impression d’avoir un sèche-cheveux devant moi durant la journée d’hier, j’étais aujourd’hui dans une soufflerie industrielle. Je me faisais rabattre par terre par le vent une bonne demi-douzaine de fois comme si j’étais une vulgaire poupée de chiffon (et je suis très solide sur mes pieds)… heureusement du coté de la montagne. 
Je croyais cette section difficile… mais je n’avais encore rien vu…
Tranquillement, mais surement, je me dirigeais jusqu’au point le plus haut du Circuit Huemul à la Paso Huemul, après quoi le sentier descendrait jusqu’au niveau du Lago Viedma -750m plus bas. 
J’atteignais Paso Huemul au final d’une courte, mais pénible ascension. Le vent ne donnait aucun répit. Quand il se calmait, c’était simplement pour revenir plus fort. 
Paso Huemul est le genre d’endroit (qui pourrait être) magnifique, avec une superbe vue sur le Glacier ET le Lago Viedma… mais il est impossible d’en profiter puisque tu luttes pour ta vie.

  
Pour avoir une vue panoramique complètement dégagée du Lago et du Glacier, j’avais (la TRÈS MAUVAISE) idée de monter au sommet d’une colline surplombant la Paso. 
Soyons bien clair; j’ai eu ma photo, mais à quel prix. Je n’ai JAMAIS eu à lutter (et le mot est très bien choisi) contre un vent aussi fort. Je me faisais frapper par des vagues de vent. C’était comme si j’étais en apnée depuis un peu trop longtemps sous l’eau; j’avais de la misère à respirer tellement le vent m’essoufflait (ce qui est assez contradictoire en soit). 

    
Je me retrouvais coincé au sommet de la Paso. Le vent décidait où j’allais… et il était futile d’offrir quelconque opposition… sauf à partir du moment où il décidait de me pousser en bas d’une falaise. De toute ma vie, j’ai rarement eu aussi la chienne qu’à ce moment. 
Pendant un bon 4-5minutes (qui semblent avoir durée des heures), j’avais les 2 pieds bien ancrés dans le sol, et le vent réussissait quand même à me faire reculer… et me pousser tranquillement vers le précipice. Je criais (sacrais) de toute mes forces en pensant que c’était extrêmement stupide de ma part d’être venu ici seul et sans m’enregistrer. 
Puis, le vent me donnait une petite fenêtre de répit. Je m’empressais alors de descendre et regagner le (non) sentier. J’étais sauvé…
Si moi, qui ai des jambes de béton, a bien failli me faire emporter, je ne souhaite à personne d’avoir la mauvaise idée de monter au sommet sommet de la Paso Huemul. 
Remis de mes émotions, j’entamais la dernière section du jour; la descente vers le Lago Viedma, que j’avais maintenant droit devant moi.            


    
La journée était loin d’être terminée puisque la descente se faisait via un sentier plus vertical qu’horizontal, sur une paroi à plus de 70 degrés d’inclinaison… au travers d’une forêt d’arbustes piquants sur un sentier à peine débroussaillé. En faisant abstraction du vent, ce serait assurément la section la plus difficile du circuit. 
Cette section était un mur difficilement (voir impossible) à descendre par jour de pluie. Je comprenais maintenant pourquoi il était fortement déconseillé de faire le circuit dans le sens des aiguilles d’une montre; monter cette paroi aurait nécessité quelques (grosses) heures. 
Toute la fatigue, accumulée durant ma lutte contre le vent, me descendait désormais dans les jambes. Et moi qui avait osé penser que cette journée serait facile. 
14.35 – J’atteignais le bord du Lago Viedma et trouvais un site convenable pour installer mon camp pour la nuit. 
Il me restait alors 4 petits pains, 1 sachet de soupe et un sachet de riz. Il ventait beaucoup trop pour utiliser mon bruleur. Je prenais donc le pari que demain matin sera moins venteux et gardais le riz pour déjeuner. 
Ce soir, mon dinner serait 4 petits pain et une soupe froide. Comme on dit; c’est mieux que rien. Avez vous déjà eu un repas où le pain était le gout… moi oui. Sur le bord du lac à manger mon festin, je me perdais dans mes pensées à penser à Tom Hanks dans « Seul au Monde »… au moins moi j’avais de l’eau potable à profusion. 
J’avais le sourire fendu jusqu’aux oreilles en pensant que j’allais passer la nuit tout fin seul sur le bord du Lago Viedma (je ne sais pas ce qui était advenu des 3 autres tentes), perdu quelque part dans le Parque Nacional Los Glaciares, à moins de 17km à vol d’oiseau d’une des villes les plus touristiques d’Argentine (et de tout le continent sud américain). 

      
Surprise… ce n’était pas le vent, mais bien mon vieil ami la pluie, qui allait me « bercer » lors de cette 3ème et dernière nuit sur le Circuit Huemul. Je rêve au lendemain; douche chaude, lit douillet et bar open sur la nourriture et la bière.
NOTE

La description de cette journée de randonnée semble tirée par les cheveux et sensationnaliste. Well… si vous faites un jour le Circuit Huemul, vous ne pourrez pas dire que je ne vous ai pas prévenu. Il y a fort à parier que je suis tombé sur une de ces journées où le vent se déchaine, et que vous pourriez passer la Paso Huemul, sans trop d’opposition du vent, mais bon…

Jour 4 – LE SENTIER QUI VA NUL PART
Départ; Bahia de Hornos (Lago Viedma)

Arrivé; El Chalten

Distance; +/-25km (difficile à évaluer)

Dénivelé; (impossible à évaluer)
06.30 – Une forte pluie, jumelée à d’intenses rafales de vent me souhaitaient « Bon Matin ». Je décidais de dormir 1h de plus.
07.30 – Ma patience avait rapportée; la pluie avait cessé et j’avais un ciel bleu au-dessus de ma tête.

  
08.05 – J’avais bien l’intention d’en finir au plus vite avec le Circuit. Direction El Chalten par delà champs et collines. 

   
  
 Comme il fallait s’y attendre, cette journée ne s’avérait pas aussi facile que prévue; le sentier était impossible à suivre en raison de la présence de beaucoup de sentier alternatif créés par le bétail. 
Résultat; après avoir perdu beaucoup de temps à zigzaguer et me faire leurré par ces « faux » sentier, j’avais décidé de marcher en droite ligne en me fixant un point à l’horizon. 

  
Une 2ème (et dernière) tyrolienne sur le Circuit et j’arrivais à Bahia de Hornos, à la fin du Lago Viedma. 

  
De là, il ne me restait plus qu’à couper au travers des collines avec El Chalten à moins de 9km. 

La fin du Circuit se terminait en queue de poisson alors que toute les « sorties » du Circuit, indiquées sur ma carte, avaient des clotures avec de gros écriteaux « No Pasar (Interdit de Passer) ». Quelqu’un avait du clôturer ces « sorties » sans penser aux randonneurs, de sorte que ceux-ci se retrouvaient « prisonniers » du Circuit et devaient faire de gros détour, sans la moindre trace de sentier, pour rejoindre El Chalten. 

  
13.15 – Je posais les pieds à Chalten.
Chow Bye Patagonie…
Direction Bariloche dès demain…

TIC TAC
Autant je viens de passer les 2 derniers mois à ratisser chaque coin du Chili, autant à peine arrivé en Argentine que mon temps y est déjà compté. 
En effet, mon nouvel objectif est d’atteindre Rio (Brésil) pour le Carnaval à la fin février. Pour ce faire, je devrais être à Buenos Aires début février pour obtenir mon visa de touriste (pour le Brésil).
Comme quoi, même quand on a tout le temps du monde pour voyager, il faut quand même faire des choix déchirants (je sais… je sais… ça vous attriste au plus haut point). 

Épisode 84 – Chimborazo; Voyage à l’Extrême Opposé du Centre de la Terre 

26 septembre 2016

Après avoir passé plus de 2 semaines à faire copain copain avec les volcans autour de Quito sur l’Avenue des Volcans, je quittais définitivement la capitale pour une seconde et dernière fois. Quito, une ville dont je n’avais AUCUNE attente et qui (franchement) me faisait un peu peur, avait confondu le sceptique en moi. J’allais m’ennuyer.
Direction le sud. Terminus Riobamba.
Malgré un nom qui incite à la fête, Riobamba n’avait rien de très festif. C’était une ville sans intérêt que la très grande majorité des voyageurs évitent.
Ce n’est tellement pas touristique que l’hébergement que je trouvais était un hôtel 3 étoiles… à 18$ la nuit (il serait au moins à 100$ en Europe/Amérique du Nord). Exception faite de mon séjour au Canada, je ne me rappelais pas la dernière fois où j’avais eu ma propre chambre (je dors toujours en dortoir/auberge jeunesse) et ma propre salle de bain. À voyager autant que je le fais, on fini par oublier certains petits plaisirs de la vie… comme de prendre une douche ayant une forte pression d’eau et dans laquelle on peu régler la température (parce que plus souvent qu’autrement on subit la température de la douche dans un auberge jeunesse… soit hyper chaud ou glacial).
Mais pourquoi donc aller à Riobamba si la plupart des touristes l’évite. Eh bien, d’une part je ne suis pas « la plupart des touristes » et de l’autre, la ville surnommée « le Sultan des Andes » est entourée de 3 géants; le El Altar (5319m – volcan éteint), le Carihuairazo (5018m – volcan dormant) et le Chimborazo (volcan dormant).
Toute ces randonnées et ascensions de volcans des dernières semaines avaient un but bien précis; me préparer au mieux à réaliser l’ascension de Chimborazo.
Venant des mots Quechua « Chimba » & « Razu » qui signifient « la neige de l’autre versant » ou « glace de l’autre coté », Chimborazo est le géant des géants du pays, du haut de ses 6310m. Surnommé « Taita Chimborazo », c’est à dire Papa Chimborazo, Chimborazo est considéré comme étant le « père » de tous les autres volcans d’Équateur… la « mère » étant Mama Tungurahua (épisode précédent).
Plus que cela, le sommet de Chimborazo est réputé comme étant le point le plus éloigné du Centre de la Terre sur la surface de la planète. Eh oui, si vous voulez être le plus près des étoiles avec les 2 pieds sur Terre, il ne faut pas aller au sommet de l’Everest, mais bien sur le Chimborazo. La Terre n’étant pas parfaitement ronde… le diamètre est plus grand à l’Équateur. Pour être exact, le sommet de l’Everest est à exactement 6382.467km du centre de la Terre alors que Chimborazo est à 6384.687km. Pour les nuls en math, Chimborazo est plus de 2km plus près des étoiles.
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En fin de journée, je me réveillais tout juste à temps pour aller admirer le coucher du soleil du « Parque 21 de Avril », meilleur point de vue en ville. Je fixais Chimborazo pendant de longue minutes. Je peinais à croire que le sommet était à plus de 3450m d’altitude de l’endroit où je me trouvais tellement la montagne avait l’air « petite ».
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LA VIE NOUS RÉSERVE PARFOIS DE BIEN DRÔLE DE SURPRISE
Dans la vie, tout ne va pas toujours comme nous l’avons prévu. Toutefois, cela ne veut pas dire que les choses ne vont pas tel qu’elles sont supposées aller.
J’avais décidé de faire une dernière randonnée d’entrainement en haute altitude avant Chimborazo. Direction le volcan El Altar.
Ancien méga volcan, El Altar fut autrefois la plus haute montagne d’Équateur… jusqu’à il y a 500ans alors que sa dernière éruption fit exploser la montagne et créa une multitude de sommets (coiffés par des glaciers) entourant le Laguna Amarillo, un lac situé dans l’ancienne caldeira.
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Je me réveillais à la première heure pour me diriger à la station d’autobus… pour apprendre que le premier bus en direction de La Candelaria (village au pied de El Altar) partait seulement à 11.00am. Durant 4 heures, je me gelais le cul dans ce dépotoir qu’ils osaient appeler station d’autobus… alors que j’aurais pu être confortablement dans mon lit.
11.00 – Le bus ne venait jamais. On me disait que le bus partirait finalement à 14.00…
Fuck El Altar… je n’allais pas passer ma journée à attendre un bus qui ne viendrait probablement jamais. Je me dirigeais d’un pas déterminé à l’agence de voyage; j’allais monter Chimborazo dès demain (il est interdit de grimper au sommet de Chimborazo sans guide).
À peine arrivé à l’agence qu’on m’indiquait que quelqu’un d’autre était intéressé à faire l’ascension de Chimborazo. Hip Hip Hip, les frais (astronomiques) d’ascension allaient être divisés par 2.
Je demandais à rencontrer l’autre gars pour être sur qu’on soit sur la même longueur d’onde.
Moi – « Where are you from? (de où viens-tu?) »
L’Autre – Canada
Moi – « Seriously… I’m Canadian too… Where about? (Sérieux… Moi aussi… Tu viens de où?) »
L’Autre – Québec
… j’étais sans mot…
Il fallait bien un autre québécois pour faire un truc de fou comme ça.
J’allais donc faire équipe avec Alex (24ans / Montréal / en voyage 2 semaines en Équateur) et un guide pour tenter l’ascension de Chimbo.
Ne restait plus qu’à retourner à ma chambre pour m’imbiber d’eau et me reposer afin d’être fin près pour le lendemain.
LE REFUGE CARREL
28 septembre 2016
11.00 – Moi, Alex et notre guide partions de l’agence en route vers la montagne. Objectif du jour; dormir au refuge Carrel situé au pied du volcan à 4800m.
Passé 4000m d’altitude, plus rien ne poussait sur les flancs du volcan. Il n’y avait que du sable et de la roche volcanique. Nous étions dans un paysage lunaire avec des collines désertiques… et une grosse boule de crème glacée au milieu.
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13.00 – Arrivé au refuge Carrel, nous nous retrouvions dans une mer de nuages. Impossible de voir le volcan… mais les 2-3 gros bus de touristes étaient bien visibles. Alors que tous portaient des vêtements d’hiver, je sortais du véhicule en short et en flip flop. Pas besoin de vous dire (je vous le dis quand même) qu’une tonne de paires d’yeux se pointaient sur moi.
Peu m’importait, ma concentration était ailleurs. Ne restait plus qu’à me reposer et m’acclimater à l’altitude.
Au refuge nous tombions sur Florence, jeune québécoise voyageant en solo et tentant aussi l’ascension le lendemain. C’est donc dire que sur les 8 personnes qui allaient tenter l’ascension, 3 seraient québecois, 3 espagnols (très expérimenté en montagne… je les avais croisé sur Ilinizas) et un couple australien (je ne leur donnait pas grand change d’atteindre le sommet).
Les québécois ont probablement cette dose de folie qui les poussent à faire des trucs stupides.
18.30 – Dodo… à 4800m… ma nuit la plus haute en altitude à vie… seulement 1 semaine après avoir amélioré mon record à Ilinizas.
HARDCORE TREK – CHIMBORAZO
29 septembre 2016
23.00 – 28 septembre – À l’heure où beaucoup d’entre-vous écoutez vos séries TV et songez à aller au lit, moi et mon équipe étions debout.
La vérité me sautait aux yeux; Chimborazo. J’étais pris d’un mélange de panique & d’excitation et comme à la veille de toutes mes aventures rocambolesques, mon cerveau tentait (en vain) de me faire changer d’idée.
On raconte que 60% des gens qui tente l’ascension du Chimborazo atteignent le sommet… j’allais savoir dans quelques heures de quel coté du % j’allais me trouver.
00.00 – 29 septembre 2016 – Le déjeuner bien installé dans l’estomac, les bottes rigides de montagne au pieds, le casque sur la tête, le piolet à la main, les crampons dans le sac et bien encordé à mes 2 compagnons, je quittais le refuge dans la nuit noire sous un ciel étoilé exempt de nuages.
Nous commencions une marche qui allait nous mener 1400m plus haut à temps (espérons-le) pour le lever du soleil… beaucoup plus facile à dire qu’à faire.
Après avoir passé le 2ème refuge, le refuge Whymper (en l’honneur du 1er à avoir atteint le sommet de Chimborazo) à 5000m, le choses devenaient tout de suite sérieuses en négociant une section de sentier dans une zone de glissement de terrain. Nous ne le savions pas encore, mais c’était la section de sentier la « plus facile » de l’ascension… plus facile ne veut pas dire facile.
À 2 reprises, nous devions nous abriter sous des rochers pour éviter d’être frappé de plein fouet par une pluie de roches venant du sommet. Essayez d’évitez des roches qui vous foncent dessus pleine nuit; dans la nuit silencieuse, vous entendez le bruit des roches qui descendent à vivent allure, vous avez les yeux grand ouvert… et vous entendez un bruit de mort quand votre guide se fait frapper sur le genou par l’une de ces roches. Après s’être tordu de douleur durant quelques minutes, il était prêt à repartir.
Une fois à 5200m au sommet de la zone d’avalanche, et après avoir négocié quelques section d’escalade pur et dur, nous atteignions la neige, qui se transformait lentement en glacier pour recouvrir tout autour de nous.
C’est à ce moment que le « fun » commençait véritablement. De 01.30 à 06.30 du matin, nous allions négocier un sentier à plus de 60/70 degrés d’inclinaison… sans aucun relâchement du début à la fin… pas de section plane ou moins inclinée… JAMAIS… une ascension sans interruption et brutale. C’est sans aucun doute le sentier le plus abrupte que j’ai eu le « plaisir » de marcher dans ma vie.
L’ascension pouvait se résumer ainsi; marche durant 2-3 minutes… suivit de moi et/ou Alex qui s’effondrait par terre à bout de souffle…  suivit d’un repos de 2-3 minutes pour reprendre le contrôle de notre rythme cardiaque… et ainsi de suite. Des fois on pouvait se reposer 5 minutes, recommencer à marcher, et s’effondrer par terre après 30 secondes. À chaque arrêt, nous devions creuser un siège dans le glacier avec notre piolet pour éviter de glisser tellement la pente était abrupte.
Et dire que je me considérais dans la forme de ma vie après Ilinizas il y a quelques jours (épisode précédent). J’avais passé les 2 dernières semaines à grimper tous les volcans que j’avais pu faire afin de m’acclimater au mieux à l’altitude, et j’avais quand même l’impression d’être dans une forme physique minable en montant la paroi enneigée de Chimborazo. Mon coeur battait à tout rompre & donnait l’impression qu’il voulait sortir de ma cage thoracique, et je sentais le battement de mon coeur sur ma tempe… j’avais l’impression que la veine allait éclater.
À ma décharge, il faut dire que j’étais diminué par une grosse grippe depuis 3 jours. Un homme sensé aurait repoussé l’ascension de quelques jours… mais je ne suis pas réputé pour mes choix sensés.
Passé 6000m cela faisait plus de 5 heures que j’avais le RPM du coeur dans le tapis et que je faisais un effort physique intense. J’étais à bout de souffle (le mot n’est pas assez fort), je n’étais plus qu’une loque humaine incapable d’avoir un raisonnement logique et je titubais sur le sentier.
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Je puisais au plus profond de mes ressources comme rarement je ne l’avais fait auparavant. Mon corps commençait à faillir; je crachais abondamment de sang par la bouche et ma narine gauche était rouge.
À quoi bon faire tout cela si ça n’apporte que souffrance psychologique et physique? « Ain’t no mountain high enough »… la phrase qui décrit le mieux ma vie; au sens propre comme au figuré, il n’y a pas de montagne assez haute… je ne recule pas devant un obstacle un point c’est tout.
Je vous mentirais si je vous disais que je n’avais pas pensé abandonner durant l’ascension. J’avais bien failli rebrousser chemin une bonne vingtaine de fois. Mon moral avait abdiqué et j’étais prêt à tout à redescendre. À chaque fois je continuais, puisque je ne voulais pas laisser tomber Alex. Si j’abandonnais, cela voulait dire que nous abandonnions puisque le guide n’aurait pas voulu nous séparer.
Heureusement pour moi, nous avons persévéré. Abandonner aurait été un soulagement sur le moment présent, mais une amère déception pour le reste de ma vie.
06.30 – Le sommet…
Je lâchais un L I B E R T É bien senti (à la Mel Gibson dans « Coeur Vaillant ».
Le soleil à peine levé, il n’y avait aucun son, aucun vent et les nuages tout juste au-dessus de nos têtes semblaient former un toit. La vue était à couper le souffle (au sens propre comme au figuré); on pouvait voir au loin Tungurahua, Ilinizas, Cotopaxi et compagnie. Je quittais le sentier balisé pour prendre des photos et calais jusqu’à la taille dans la neige du glacier.
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J’avais les 2 pieds à l’endroit le plus éloigné du centre de la Terre sur la surface de la planète et mon nouveau record d’altitude du même coup. Ma première fois au-dessus de 6000m. Mon record allait surement durer jusqu’en janvier/février et ma tentative d’ascension de l’Aconcagua.
Le sommet m’avait revigoré alors que je retrouvais alors tous mes sens… tout le contraire pour Alex dont la condition était devenue inquiétante. Il était complètement intoxiqué par l’altitude. Tout le temps que nous avions passé au sommet, il s’était recroquevillé sur lui même en boule par terre sans bouger.
La descente se transformait en un espèce de secours en haute montagne. Alex pouvait à peine se tenir sur ses jambes et n’avait plus toute sa tête. Premier de cordée en avant, je redoublais de prudence et devais m’assurer de descendre à un rythme assez lent pour ne pas tendre la corde et lui faire perdre pied. Je devais aussi me battre avec notre guide (un véritable emmerdeur) qui faisait fit de l’état d’Alex et me demandait d’aller plus vite.
J’étais toujours près à planter mon piolet dans la neige au cas où il perde pied. Nous étions tous les 3 encordés; si il tombait, nous tombions…
4 heures de descente dans ces conditions. Heureusement, le paysage était incroyable.
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C’est alors que je réalisais à quel point le sentier était incliné. Cela n’avait aucun bon sang. Je n’avais plus aucune difficulté à comprendre pourquoi nous étions plié en 2 à toutes les 2 minutes lors de l’ascension.
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11.00 – De retour au refuge Carrel après 11 heures de marche, nous étions complètement vidé. C’était drôle de penser qu’on était levé depuis maintenant 12 heures alors que pour beaucoup la journée venait de commencer.
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Je me retournais pour regarder la montagne et me rappelais alors avoir trouvé Chimborazo petit en le regardant de Riobamba la veille. PLUS JAMAIS je n’allais utiliser les mots « petit » et « chimborazo » dans la même phrase, autre que pour dire « je me sens petit en montant Chimborazo ».
Même si c’est la plus haute montagne d’Équateur, Chimborazo n’obtient pas tout le respect qu’elle devrait avoir puisque tout le monde n’a de yeux et ne parle que de Cotopaxi (je l’avoue, j’étais de ces personnes).
Chimborazo est un monstre… un géant de glace qui a gagné toute mon admiration.
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Au final, 6 des 8 personnes ayant tenté l’ascension avaient atteint le sommet. Seul le couple d’australien avait abandonné…
Je ne suis pas docteur, mais je me donne un billet de médecin spécial; pas de marche en haute montagne pour au moins quelques jours histoire de récupérer un peu.
Direction Cuenca encore plus au sud… ça sent de plus en plus le Pérou.
P.S. I – Pour les adeptes de randonnées en haute montagne et/ou d’escalades, voici un Top5 des montagnes les plus techniques d’Équateur;
1. Altar
2. Ilinizas Sur
3. Antisabe
4. Cayambe
5. Chimborazo
Concernant Chimborazo, l’ascension n’est pas vraiment technique… si un sentier très incliné était considéré comme technique, Chimborazo serait assurément premier de cette liste.n’est pas vraiment technique.

Épisode 78 – Lost in the Los Nevados

07.30 – 24 aout 2016
Je regardais tranquillement Medellin s’éloigner derrière moi alors que la vallée était couverte de sa brume matinale.
Direction la Zona Cafetera, ou plus communément le « Triangle du Café »… étrange destination pour un non buveur de café…
MANIZALES
Une route sinueuse menait jusqu’à Manizales, ville universitaire de 350000 habitants perchée tout en haut d’une vallée montagneuse, et ma porte d’entrée dans le triangle.
Aussitôt arrivé que je sautais dans le cable car (un autre) pour rejoindre la haute ville.
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Au premier coup d’oeil, j’aurais dit que Manizales était une ville de merde sans charme (je l’avais même écris)… mais bon, comme j’avais tout mon temps, j’avais les moyens d’y « perdre » une journée.
Choix judicieux puisque passé une première impression désagréable, qui vous donnait envi de prendre vos clics et vos claques et de partir sans plus tarder… et en faisant abstraction de l’étrange rue principale avec ses grands palmiers (on est en montagne à 2100m d’altitude!!!), Manizales renfermait quelques trésors (oui oui, le mot n’est pas exagéré) qui valait la peine de s’y arrêter une journée (pas plus).
D’une part, tout en haut de la ville se trouvait une magnifique promenade offrant de super points de vue sur les montagnes et vallées environnantes (malheureusement pour moi, la lumière ce jour là était nul… du coup toutes mes photos sont à chier…).
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La promenade culminait avec le « Monumento a los Colonizadores (monument en hommage aux colonisateurs) », sculpture impressionnante de réalisme comme rarement j’en avait vu et hommage au premiers colons de Manizales.
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Je fais une parenthèse pour dire que peu importe où je vais en Colombie, les cerf-volants (kites) sont très populaires auprès des enfants… vous savez ces objets tout simple qui pouvaient occuper la journée des enfants avant l’avènement des ordis et téléphones intelligents de ce monde… mais bon, il est toujours plus facile de surveiller un enfant qui fixe la TV dans le salon que de se donner la peine d’aller au parc avec lui.
La basilique et la cathédrale de l’Immaculé Conception valent aussi 1 seconde de votre vie; l’une pour son ensemble (intérieur comme extérieur et qui pourrait être un parfait décor pour un film d’horreur), l’autre pour son intérieur composé d’impressionnantes arches de bois… et une Plaza Bolivar (encore) avec une statue de Simon Bolivar (encore)… représenté en espèce d’oiseau de la mort (ça c’est nouveau).
Clou du spectacle, je séjournais dans une auberge familiale aux allures de vieux château… avec un espèce de bar hawaïen bizarre au sommet… qui offrait une superbe vue sur toute la ville.
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Overall, ville de montagne, mais un peu trop urbaine à mon gout.
Après 1 journée bien remplis, je reprenais le cable car pour descendre en basse-ville, sautais dans un bus, défaisais la route sinueuse jusqu’en bas de la vallée, et me dirigeait vers le coeur de la Zone Cafetera.
SALENTO
Depuis mon arrivé en Colombie, Salento était LA destination que j’avais le plus hâte d’atteindre. Non pas pour le village en tant que tel, mais pour sa proximité avec le Parc National Los Nevados.
Nevados signifie en espanol « neige éternelle ». Le parc « protège » quelques-uns des derniers sommets enneigés se situant au niveau des tropiques; 5 volcans, dont 3 dormants et 2 actifs, tous entre 4700 et 5300m d’altitude.
3 de ces volcans sont encore aujourd’hui considérés comme des Nevados, mais il faut maintenant aller à plus de 5000m pour voir de la neige « éternelle ». Vous aurez donc compris que ce n’est qu’une question de temps avant que la neige disparaisse totalement…
Du nombre, le Nevado del Ruiz est le plus beau, haut (5321m) et dangereux (interdit d’accès); sa dernière grosse éruption (1985) a tué 22000 personnes et fait disparaitre le village de Amero de la carte.
Les 2 montagnes qui attirent plus particulièrement mon attention sont le Nevado de Tolima, 2ème plus haute montagne du parc (5220m) et le Paramillo del Quinto… autrefois Nevado del Quinto, dorénavant appellé Paramillo (haute montagne) depuis qu’il a perdu sa neige éternelle… sommet à 4750m, qui offre une splendide vue sur tout le parc et les 3 Nevados par temps clair.
Malheureusement pour moi, les volcans sont dans les nuages en quasi permanence dû à El Niño. C’est donc dire que même si j’atteints leur sommet, j’ai 90% de chances de n’avoir aucune vue… mais j’ai 100% de chance de ne pas avoir de vue si je n’y vais pas.
Autre inconvénient; il est obligatoire d’avoir un guide ($$$)… même si j’ai tout mon matériel et que les ascensions sont réputés faciles.
Salento dans tout cela; un village sans histoire situé sur un plateau perdu dans un cadre enchanteur de montagnes toutes vertes.
La Plaza Mayor avec (surprise) un monument de Simon Bolivar au milieu… et le Camino Real (rue principale), bondés de boutiques & restaurants pour attirer les touristes, jurent avec la tranquillité du reste du village.
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En une après-midi, j’avais déjà fait le tour des compagnies de plein air et ramassé toutes les informations dont j’avais besoin pour ma randonnée.
PARAMO TREK
Les no.1 à Salento… mais ne sont pas flexibles (randonnée sur le Paramillo del Quinto seulement… le Nevado de Tolima étant hors de question) et seulement en groupe; 6 personnes, 470000cop/personne (environ 160$) pour 3 jours,
SALENTO TREKKING
Je ne les ai jamais trouvé…
FOG WALKERS
Nouvelle compagnie avec des forfaits hors de prix… même le gars au comptoir me disait que les prix n’avaient pas de bon sang (son honnêteté est tout à son honneur, mais il devrait repenser à sa stratégie de vente),
CRESTED OUTDOORS
Diego est semble-il LE guide par excellence des Los Nevados. J’aI eu une très bonne et surprenante discussion avec lui.
En lui expliquant mes intentions, mon expérience de montagne et tout le matériel que j’avais, il m’a donné une réponse complètement inattendue; « if I was you, I would do it alone (si j’étais toi, je le ferais tout seul).
Le meilleur guide de la région me disait que je devrais faire la randonnée tout seul.
Moi; « … mais c’est obligatoire d’avoir un guide dans le parc non?!? »
Diego; « mmm… oui et non… il n’y a pas de garde dans le parc et le seul endroit où ils vérifient est à l’entrée officielle du parc à 150km d’ici. Avec l’experience que tu as, l’ascension devrait être sans grande difficulté ».
Dans une gentillesse extrême, il avait pris le temps de me donner des infos sur le parc; où bivouaquer (camper), la localisation des points d’eau pour faire le plein, les difficultés du terrain, etc.
J’avais l’équipement, l’expérience, la volonté et surtout la folie pour le faire seul. Ma décision était prise…
LOS GRINGOS EXPEDITION
Jour 1 – LA TÊTE DANS LES NUAGES… LES PIEDS DANS LA BOUE
07.30 – 27 aout 2016
Je sautais dans un « willie » (vieux jeeps américains reconvertis en transport en commun) à la première heure en direction de Cocora quelques 20km plus loin. À la manière des locaux, j’étais agrippé debout derrière le jeep.
Quelque chose de magique s’était passé la nuit dernière; juste avant d’aller au lit la veille, 3 personnes étaient arrivées dans mon dortoir. Après leur avoir brièvement parlé de mon intention de faire une randonnée dans les Los Nevados sans guide, ceux-ci voulaient se joindre à moi.
À minuit moins 1 de mon départ, je trouvais des compagnons;
– Jordi | Espagnol
– Larry | alias le « sleepwalker » | Canadien
– Hannah | Allemande
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07.50 – Moi et mes 3 gringos quittions Cocora (2445m), minuscule village au pied du parc Los Nevados. Nous marchions alors dans la vallée de Cocora; plaine montagneuse parsemé de waxpalm (espèce de très haut et mince palmier et arbre national de Colombie). La vallée propose un sentier en boucle d’environ 6 heures… la plupart des touristes de passage à Salento se contente de faire cette marche.
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Pour notre part, nous ne faisions que passer dans la vallée et prenions un embranchement pour rejoindre les Los Nevados.
Dès le départ, le sentier proposait une très bonne inclinaison, rendant l’ascension difficile.
12.15 – Après avoir atteint Estrella de Agua (3250m), le sentier devenait extrêmement boueux. En contrepartie, il était extrêmement bien balisé.
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Nous sortions finalement de la forêt pour gagner un plateau à 3700m. À partir de là, le paysage changeait du tout au tout pour devenir toundra.
16.00 – Nous finissions notre journée à marcher dans le brouillard jusqu’à La Primavera (3700m), notre refuge du jour, une ferme/gite familiale située dans les hauteur d’une vallée toute verte.
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RÉSUMÉ DU JOUR
Distance 22km
Dénivelé positif +1700m
Définelé négatif -300m
Heure de marche 8 heures
Jour 2 – OÙ EST LE FOUTU SENTIER
La nuit, passée dans un bâtiment fait de planches de bois non isolés, avait été GLACIALE. Tellement pas près pour une randonnée du genre, Jordi avait passé la soirée avec ses bas Ralph Lauren dans les mains 😉
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Nous avalions notre déjeuner en vitesse pour prendre la « route » au plus vite.
Nous avions alors une vue sublime et complètement dégagée des environs. On pouvait admirer la vallée d’où nous étions arrivée à droite, le Nevado de Tolima (montagne au sommet enneigé) au centre gauche et le Paramillo del Quinto (notre destination du jour) en arrière gauche.
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Contrairement à la veille, le sentier était dorénavant tout sauf bien balisé.  Je perdais complètement la trace du sentier, pour la retrouver quelques minutes plus tard… et ainsi de suite. Je m’en remettais à mon application maps.me et à mon instinct.
Nous marchions alors dans une vallée faite de cactus bizarres et de marécages… une vallée exempte de son… pas même un seul oiseau.
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Après 2h de marche, nous arrivions sur un promontoire à mi-hauteur d’une nouvelle vallée. Nous étions à plus de 4000m et le paysage devenait désertique.
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Pour atteindre le sommet du Paramillo del Quinto, 2 choix s’offraient à nous selon maps.me;
– Descendre dans le fond de la nouvelle vallée et remonter de l’autre coté,
OU
– Longer la montagne en marchant dans une zone de glissement de terrain.
Bien que plus dangereuse, je préférais l’option de longer la montagne.
Nous entamions donc notre longue et périlleuse traversé.
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12.20 – Après plus de 2h de marche dans la zone de glissement de terrain, je devais voir la réalité en pleine face; j’avais pris la mauvaise décision… continuer à longer la paroi ne menait nul part et j’avais depuis longtemps perdu toute trace du sentier. Le sommet du Paramillo del Quinto semblait alors plus loin que jamais.
Je me sentais terriblement mal envers mes 3 gringos qui m’avaient suivit les yeux fermés. Heureusement pour moi, ils se montraient très compréhensif, notamment en raison du fait que la vue était impressionnante.
Alors à plus de 4550m, nous prenions la décision d’abandonner l’idée de gagner le sommet et de descendre jusqu’en bas de la vallée.
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Une fois au fond, je réalisais que ma décision de marcher sur la paroi avait été COMPLÈTEMENT INSENSÉE. Or, je n’avais alors pas le point de vue que j’avais du fond de la vallée et il était toujours plus facile d’analyser après coup.
À partir de là, nous décidions de regagner notre gite de La Primavera par une nouvelle vallée. Ma carte montrait 2 sentiers parcourant cette vallée, mais il nous était impossible de les trouver. Ne sachant pas où étaient les sentier, je savais par contre dans quelle direction se trouvait notre gite; il « suffisait » de descendre jusqu’au fond de la vallée. Nous allions donc descendre en ligne « droite ».
La vallée s’avérait être un véritable labyrinthe parsemée de ravin et rivière difficilement franchissable. Nous étions constamment à rebrousser chemin pour contourner les obstacles. La crainte s’installait alors dans le groupe et les visage se crispaient. Nous étions perdu, mais je gardais le moral puisque je savais dans quelle direction aller.
15.00 – Nous arrivions finalement dans une plaine au bout de la vallée. Ne restait alors « plus qu’à » monter une montagne de +/-300m et le gite se trouverait derrière. Le brouillard faisait alors son apparition en force.
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La Primavera sortait finalement du brouillard de l’autre coté. Nous étions sain et sauf après ce qui était sans aucun doute l’une des journée de randonnée les plus bizarre de ma vie.
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RÉSUMÉ DU JOUR
Distance +/-24km
Dénivelé positif +/-1200m
Définelé négatif +/-600m
Heure de marche 8.5 heures
Jour 3 – TOUT CE QUI MONTE DOIT REDESCENDRE
07.30 – Ne pouvant pas me fier à maps.me, je devais renoncer à explorer plus en détail le parc et me résignais à terminer mon périple dans les Los Nevados et redescendre jusqu’à Cocora avec mes 3 gringos.
Nous prenions le décision de descendre par une valkée différente que celle par laquelle nous avions fait l’ascension. Dès le départ, nous perdions la trace du sentier… pour le retrouver quelques minutes plus tard et ne plus jamais en perdre la trace.
Le Nevado de Tolima se decouvrait l’instant d’une seconde pour nous dire Au Revoir.
La descente passait par un super sentier panoramique avec une vue imprenable sur les environs, et passant par des champs et fermes perchées dans les hauteurs de la vallée. Le genre d’endroit magique où tu veux rester jusqu’à la fin de tes jours.
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Nous pénétrions ensuite dans la forêt, puis gagnions la vallée de Cocora pour finalement gagner Cocora. J’étais alors devenu un zombie avec les jambes en guimauves. Il n’y avait plus aucune activité dans mon cerveau, je laissais mes jambes me guider.
À 13.50 nous avions une bière à la main en attendant le Willie qui allait nous ramener à Salento.
RÉSUMÉ DU JOUR
Distance +/-24km
Dénivelé positif +/-600m
Définelé négatif +/-1850m
Heure de marche 6.5 heures
Au final, on va le dire une fois pour toute; vous n’avez pas besoin de guide pour aller dans les Los Nevados à partir de Salento… mais vous risquez de vous perdre… et ce sera une expérience magique.
Réputé comme un endroit où il fait un temps de cul à l’année, nous avons été extrêmement chanceux d’avoir 3 jours sans pluie et avec peu de nuages.
Constat personnel inquiétant; mon mois au Canada a faut beaucoup plus de dommage que je ne l’aurais pensé; j’ai perdu toute ma bonne forme physique accumulée durant les 3mois précédents. Il faudra recommencer presque à zéro.
DOSSIER SPÉCIAL – LE CAFÉ COLOMBIEN POUR LES NULS

Par le passé, la Colombie a toujours eu 2 grosses exportations; l’or blanc… pas vraiment legit… et le café.

De passage à Salento, au coeur de la Zona Cafetera, je pouvais difficilement quitter la région sans visiter une plantation de café.
Mon choix s’arrêtait sur la Finca Don Eduardo, la plus vieille plantation de café de Salento (plus de 100ans) et propriété de Tim, un vieil australien passionné de café. C’est peut-être la visite guidée la plus passionnante que j’ai eu de ma vie… même si je déteste le café.
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Tout d’abord, un petit bourrage de crâne;
– Il y a 5 types de café dans le monde, mais seulement 2 sont commercialisés;
1. ARABICA
Originaire de l’Éthiopie, ce type de café a plus de gout et moins de caféine. Il y a plus de 100 sous-types de café Arabica réparti en 2 grandes familles; les traditionnels et modernes (développé en laboratoire). Aujourd’hui, la très grande majorité du café est de type moderne.
2. ROBUSTA
Originaire d’Afrique de l’Ouest, ce type de café contient beaucoup de caféine mais a un gout désagréable pour la majorité des gens.
– La Colombie est à ce jour le 4ème plus gros exportateur de café au monde après le Brésil (1er… en produisant plus du 1/3 de la production mondiale), le Vietnam (2ème), l’Indonésie (3ème), et devant l’Éthiopie (5ème), le Mexique (6ème) et l’Inde (7ème).
– Les meilleurs cafés dans l’ordre;
1. Arabica Washed Coffee
2. Arabica Unwashed Coffee (le sucre pas complètement enlevé)
3. Robusta
Vous aller comprendre washed/unwashed plus loin.
– La Colombie est le 2ème producteur mondiale de Arabica Washed Coffee. C’est donc dire que le pays est reconnu pour son café de grande qualité.
– Le café venant du Panana est le café le plus reconnu dans le monde ($$$). Il a gagné les médailles d’Or lors des 10 dernières années. Une tasse de café pananéen peut couter jusqu’à 20$
– Il y a plus de 3000 fermes de café en Colombie. La plupart sont de petites fermes qui vendent leur production à des usines qui commercialisent le café.
– Le café pousse à l’année longue, mais doit idéalement être récolté durant la mousson (les mois pluvieux).
– Une fois cueilli, il est impossible de différencier un type de café d’un autre. Toutes les graines de café sont pareil.
– Une plantation de café n’est pas du tout comme un vignoble. Le café pousse dans de petits arbustes disposés de manières aléatoires sur un flanc de montagne. Tout peu influencer le gout du café (climat, qu’est-ce qui pousse à coté, etc.), de sorte que beaucoup de plantation de café font aussi pousser des ananas, des avocatiers, etc.
Voici donc le processus du café de la plantation jusqu’à votre tasse en 24 étapes.
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Étapes 1, 2 & 3
Développer la plante de café en incubateur
Étape 4
Après 5 mois, la plante est prête à être transplanté dans le sol.
Étape 6, 7 & 8
Cela prend entre 30 et 36 semaines avant de voir les fleurs de café se transformer en cerises de café
Étapes 9 & 10
La cueillette. Les cerise rouge sont prête à être cueilli, les noires ne sont plus bonnes et les vertes ne sont pas encore prêtes.
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Étapes 11, 12 & 13
Despulpadora. Il faut extraire les graines de café des cerise.
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Étape 14
Une fois les graines extraites des cerises, il faut enlever le sucre du café. Ceci se fait avec le processus de fermentation; les graines sont mises dans l’eau… celles qui flottent sont éliminés… celles qui coulent sont conservés. Il faut répéter le processus en changeant l’eau de 5 à 8 fois pour que les graines soient complètement exempte de sucre (d’où le Arabica Unwashed Coffee d’un peu olus haut). Qui dit fermentation dit alcool. Les colombien font de l’alcool avec l’eau utilisé pour extraire le sucre; la Crema de Coffee goute et ressemble à du Bailey’s.
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Étape 15, 16 & 17
Il faut maintenant faire sécher les graines (de 7 à 18 jours). Dans la Finca Don Eduardo, on utilise un système de double toit; 1 toit semi-transparent et rétractable par beau temps, et un toit de béton en dessous où l’on dispose les graines pour sécher. En période de cueillette, les routes sont couvertes de graines de café à sécher.
Étape 18 – Les graines de café sont vendus aux usines.
Étapes 19, 20 & 21
Trilladora – Une mince peau ressemblant à une feuille de papier est enlevé des graines de café. À ce moment les graines sont verdatre et ressemble un peu à des peanuts. Les graines noires sont éliminées.
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Étape 22
L’étape la plus importante et difficile; il faut faire rôtir à sec les graines de café jusqu’à obtenir une couleur chocolaté. Plus la graine est rôtie et moins elle aura de caféine (Starbuck a des graines extrêmement rôties).
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Étape 23
Mouler les graines de café.
Étape 24
Déguster le café
Au final, pour 2 tonnes de cerises de café récoltés, il y aura environ 14kg de café.
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Quelques trucs pour boire votre café;
1. Le meilleur moyen de boire du café est en utilisant une presse francaise?!?
2. Il est préférable d’acheter des grains de café et de les mouler vous même,
3. Le meilleur moyen de boire du café Robusta est en Expresso… et le pire moyen de boire du café Arabica est en Expresso.
Au fait, vous connaissez Juan Valdez… la célèbre marque de café? Eh bien Juan Valdez n’a jamais existé, c’est un personnage fictif inventé pour représenter le label de qualité du café colombien.
Direction le Sud. Goodbye Salento.
P.S. Dans la catégorie « pas très éco responsable » et qui me chicote depuis mon arrivé en Colombie; j’ai pu observer depuis mon arrivé en Colombie qu’il y avait BEAUCOUP TROP de compagnie d’autobus. Pour un même trajet, il peut y avoir 4-5 bus qui partent en même temps et qui roulent tous presque vide. Il n’y aurait pas moyen de travailler conjointement? Quand on pense qu’on ne voit que cela des bus sur la route, cela pourrait faire toute une différence.

Épisode 74 – Au sommet de l’Europe*

28 juin 2016
Fraichement arrivé sur le bord du lac Léman en provenance de Corse, je ne m’attardais pas plus longtemps qu’une soirée à Genève avant de sauter dans un bus en direction de Chamonix.
Non pas que je n’aimais pas Genève, bien au contraire, J’ADORE Genève, mais bien parce que je n’avais qu’une seule chose en tête… une très grosse chose en tête… et non je ne parlais pas de mon truc entre les jambes… NON… je parlais plutôt de la grosse crème glacé dominant les alpes à la frontière de la France, l’Italie et la Suisse… la plus haute montagne d’Europe… j’ai nommé le Mont Blanc.
Je mentirais si je disais que l’ascension du Mont Blanc était un vieux rêve. Cela remontait à mon séjour en Asie et à ma lecture du livre « Annapurna; le premier 8000 », ascension historique du 1er sommet de plus de 8000m, 3 ans avant l’ascension du sommet de l’Everest par Edmund Hillary et Tenzig Norway, par une équipe française composée d’alpinistes de la Compagnie des Guides de Chamonix.
Le mandat que je m’étais donné était très clair; j’allais faire tout en mon possible pour atteindre le sommet du Mont Blanc. Plus que jamais, mon objectif dépendait du bon vouloir de Dame Nature; il me fallait une température parfaite sinon je rentrerais bredouille.
LA COMPAGNIE DES GUIDES DE CHAMONIX
L’ascension du Mont Blanc est possible sans guide, et je l’aurais probablement fait ainsi en temps normal, mais je m’étais laissé tenter par la Compagnie des Guides de Chamonix.
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Fondée en 1821, la compagnie est la plus vieille organisation de guides de montagne au monde. D’une durée de 5 jours, leur « Stage Mont Blanc » proposait 3 jours de formation sur glacier en haute altitude pour se familiariser avec les techniques de crampon/piolet/corde, tout en s’acclimatant à l’altitude, suivit de 2 jours de monté/descente du Mont Blanc.
Du haut de ses 4809m, le Mont Blanc était loin d’être mon plus haut sommet. Or, c’était justement l’erreur à éviter avec cette montagne; il ne fallait pas se contenter de regarder les chiffres… cette montagne pouvait être sournoise. En condition hivernale à longueur d’année, on raconte qu’un peu moins de 50% des randonneurs qui tentent l’ascension du Mont Blanc parviennent jusqu’au sommet. Du 50% qui échouent, certains renoncent pour cause de blessure, mal des montagne/altitude, ou en raison du mauvais temps. Ajoutez à cela que la montagne fait entre 5 et 10 victimes par année. Bon nombre de randonneurs/alpinistes plus chevronnés que moi y avait perdu la vie. Tout cela pour dire que c’était le plus grand défi de ma jeune carrière de randonneur en haute montagne.
J’avais beau avoir plusieurs 5000m+, presque 6000m avec le Kilimanjaro, à mon actif, je n’avais jamais eu à négocier des sentiers de haute montagne sur neige/glacier. Comme j’avais l’intention de répéter l’expérience plusieurs fois en Amérique du Sud, je voyais cette formation comme un investissement dans ma santé & sécurité.
SOUS HYPNOSE
Vous êtes-vous déjà senti à la maison instantanément à un endroit où vous n’avez jamais habité. C’est le feeling que j’ai éprouvé à mon retour à Chamonix.
Bien que je déteste tout le fla fla entourant les villes dégoulinants de touristes, peu importe l’endroit où je me trouvais en ville, je n’avais qu’à lever les yeux vers le ciel pour trouver la paix et me rappeler pourquoi j’étais là.
Situé au plus profond de la vallée à 1035m d’altitude, Chamonix est à l’ombre de géants. Collé l’un sur l’autre, le Mont Blanc et ses 2 éternels acolytes, l’Aiguille du Midi et le Glacier des Bossons, m’hypnotisaient. Même quand je marchais en sens opposé, je me surprenais à me détourner pour les fixer.
Du haut de ses 3842m, l’Aiguille du Midi était une formidable montagne pointant vers le ciel. On peut accéder au sommet via un téléphérique et le panorama y est grandiose, ce qui en fait l’attraction touristique no.1 de la vallée.
Faisant figure de négligé, le Glacier des Bossons était celui qui m’impressionnait le plus. Le meilleur moyen de le décrire est d’imaginer une cascade d’eau descendant du sommet du Mont Blanc, cascade qui aurait brusquement mis les freins à mi-hauteur de la montagne… et gelé sur place. En résultait donc une mer de glace… avec une gentille forêt sur la partie basse de la montagne. Ces arbres n’avaient aucune idée que leur paisible existence prendrait brusquement fin si (quand) le monstre juste au-dessus se réveillait.
Le contraste était total; je me trouvais à la chaleur à Chamonix et passait ma 1ère soirée dans le jacuzzi extérieur de mon auberge à contempler le montagnes, alors que dans quelques jours je serais tout en haut à me les geler en conditions hivernales.
Jour 1 – MONTENVERS – MER DE GLACE
30 juin 2016
Après 2 jours de repos à ne rien faire d’autres que fixer les montagnes… et boire de la bière locale, l’action reprenait enfin.
Direction Montenvers (1913m), via un petit train sur un chemin de fer très incliné. Nous descendions ensuite sur la « mer de glace » (glacier) pour faire une journée d’entrainement.
Au 19ème siècle, la gare de Montenvers avait été construite tout juste au-dessus du glacier, mais il fallait aujourd’hui descendre pendant plus de 30 minutes pour atteindre le glacier. Tout au long de la descente, on pouvait voir des panneaux indiquants la hauteurs du glacier à partir de 1820 jusqu’à aujourd’hui. Il devait y avoir une bonne cinquantaine de mètres entre le panneau « 2005 » et la hauteur actuelle.
Les 16 randonneurs inscrits au Stage Mont Blanc avec les Guides de Chamonix passaient la journée sur le glacier en compagnie de guides afin d’apprendre / parfaire les techniques de marche avec crampons, d’encordage et d’utilisation du piolet dans diverses situations; sur glace/neige/roche, sur pente abrupte/légère, en monté/descente, etc.
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En fin de journée, nous étions séparé en groupes de 2 randonneurs (basé sur nos aptitudes) pour être ensuite jumelé à un guide. Ces 2 autres personnes allaient être mon équipe pour les 4 prochains jours.
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Je me retrouvais jumelé avec Arnaud, un jeune suisse hyperactif qui en était à sa 2ème tentative; l’an dernier, il avait dû rebrousser chemin à 4300m en raison du très mauvais temps.
Christophe, le chef guide qui nous avait donné la formation d’aujourd’hui, ne tardait pas à nous choisir. Il nous confiait qu’il voulait une équipe performante avec des gens qui se débrouillaient bien en montagne. C’était un peu compréhensible; il allait devoir s’encorder avec ces clients sur la montagne… et donc mettre sa vie entre leurs mains.
Jour 2 – FUNAMBULE DES NEIGES
1 juillet 2016
Aujourd’hui j’allais réaliser un rêve (un peu con), un rêve vieux de seulement 2 ans, mais un rêve quand même.
Lors de mon passage à Chamonix avec mon pote Julien Fumard en Janvier 2015, nous étions monté à l’Aiguille du Midi. J’avais alors pu admirer de valeureux skieurs quitter le « confort » (il n’y a aucun confort… on se les gèles en été comme hiver) de la station de l’Aiguille du Midi pour s’aventurer sur la très étroite arrête de l’Aiguille du Midi avec leur ski sur le dos. Cette arrête toute enneigée n’était pas plus large que mon cul (en fait moins large que mon cul), avec une drop de plus de 1000m de part et d’autre. Cette arrête ne présentait aucune difficulté technique, mais personne n’était à l’abri de perdre pied, de s’enfarger dans ses crampons, ou d’un coup de vent aussi soudain que puissant. Pas besoin de vous dire (mais je vais vous le dire quand même) qu’il n’y avait pas de seconde chance en cas de chute… c’était GAME OVER. Cette arrête, comme la plupart des montagnes environnantes, avait fauché plusieurs vies.
Bref, j’avais été fasciné de regarder ces skieurs marcher tels des funambules… fascination résultant d’un mix de jalousie et de voyeurisme… voyeurisme dans la mesure où je voulais voir si ils allaient se péter la gueulle. Dès lors, je m’étais promis de marcher cette arrête un jour… eh bien… je vous le donne en mille; ce jour était venu.
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Nous ne franchissions pas cette arrête simplement par plaisir. C’était le meilleur moyen d’accéder au Col du Midi, glacier situé entre l’Aiguille du Midi et le Mont Blanc, et lieu de notre 2ème journée de stage et première journée de randonnée en haute montagne.
Armé de mes crampons, de mon piolet et bien encordé à mon guide et à mon jeune ami, je quittais la plateforme de l’Aiguille du Midi premier de cordé sous le regard de plusieurs touristes incrédules.
Pour la durée de la traversée, mon destin était lié à celui de mes 2 compagnons; une erreur de l’un pouvait être fatale à tous les 3.
J’avais l’étrange feeling de marcher sur un fil (de neige) suspendu dans le vide. La dernière chose à faire était de tenter de franchir l’arrête en vitesse. Il fallait prendre tout son temps. Je profitais pleinement du moment et admirais la vue. Nous étions à plus de 3800m avec une vue imprenable sur Chamonix 2000m plus bas.
Le plus « drôle » dans tout cela; environ au milieu de l’arrête, je chantonnais la chanson « way down we go » de Kaleo. Pour les non anglais, « way down we go » se traduit littéralement par « directement en bas nous allons ». Réalisant la stupidité de la situation, je stoppais net sec de chanter et serrais un peu plus mon piolet.
Passé l’arrête sans encombre, on s’amusais sur le glacier quelques  heures… avant de repasser l’arrête pour retourner à l’Aiguille.
Je vous laisse deviner comment s’est passé la trajet du retour sur l’arrête puisque je n’écris pas cet épisode post mortem…
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Toujours en vie, mais mort de fatigue.
Jour 3 – JOUR DE PLUIE
2 juillet 2016
Le temps orageux et les grands vents ont coupé court à notre journée en montagne. Nous sommes plutôt allé dans un centre d’escalade intérieur.
Jour 4 – LE BALCON DES DIEUX
3 juillet 2016
06.30 – Mon réveil sonne… j’ai les yeux ronds… je me lève d’un coup et me dirige à la fenêtre… bleu… le ciel est bleu sans aucun nuage… Hip Hip Hip…
La réalité me sautait aux yeux; j’allais réaliser l’ascension du Mont Blanc aujourd’hui. J’étais envahi par un mélange de nervosité (que ça commence), de peur (avec tous les accidents qui arrivent sur le Mont Blanc) et d’excitation.
09.30 – Après avoir pris le téléphérique des Houches, suivit d’un train qui donnerait mal au coeur même à ceux qui n’ont pas le vertiges, nous étions au Nid d’Aigle. À 2380m, c’était le terminus du train et le départ de la voie normale d’accès au sommet du Mont Blanc.
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S’en suivait une monté de 800m d’altitude relativement facile, alternant entre cailloux, neige et glace.
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11.15 – Nous franchissions le « Refuge de Tête Rousse » pour se rendre à la base du « Corridor du Gouter ».
Communément appelé « le couloir de la mort », cette paroi rocheuse, frôlant les 70/80 degrés d’inclinaison, était la section la plus difficile / dangereuse du sentier. L’idée consistait à monter en zigzag sur 600m de hauteur au travers d’une zone d’avalanche / glissement de terrain comportant des chutes de pierres en permanence.
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Le Corridor du Gouter était l’endroit le plus meurtrier du Mont Blanc; la plupart des gens qui se tuaient sur la montagne se tuaient ici; soit à recevoir une pierre par la tête ou en raison d’une erreur. Être la personne la plus prudente au monde ne suffisait pas, il fallait avoir la chance de notre coté et être concentré du début à la fin… le moindre moment de relâchement pouvait être fatal.
Et moi dans tout cela? J’avais bien sur peur… ce qui est tout à fait normal; la peur est cette petite alarme dans la tête qui éveille vos sens et vous empêche de faire des trucs (trop) stupides. Si mon heure était arrivé, elle allait arriver, that’s it. Jusque là, je n’allais pas laisser la peur prendre le dessus et j’allais profiter du moment.
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Ce passage obligé menait au Refuge du Gouter, notre objectif de la journée. S’était impressionnant à voir d’en bas; perché en porte-à-faux à 3863m (à moitié dans le vide) tout en haut du corridor du gouter, le refuge se donnait des airs de forteresse imprenable tellement il était juché sur une paroi rocheuse en apparence impossible à franchir.
Tout le long de la monté, je n’arrêtais pas de taquiner mon guide Christophe en disant « quand est-ce qu’on monte? Je ne savais pas que le Mont Blanc était aussi plat que cela… », alors que nous étions en train de monter un mur. Je lui signifiais indirectement que notre rythme était trop lent pour moi. Il me regardait en souriant… sans accélérer le pas… alors qu’Arnaud peinait à suivre le rythme.
À tout moment lors de la monté, on entendait des cris « Attention », « Pierre » venant d’un peu partout en haut ou en bas. S’était chaque fois la même chose; on s’arrêtait un instant pour voir d’où ça venait avec les yeux bien ronds et tous nos sens en alerte, les roches passaient, on poussait un soupir de soulagement, et on repartait.
Je demandais à Christophe de nous raconter des incidents qu’il avait vu sur le corridor. Il nous parlait d’une femme qui avait décroché presque tout en haut du mur et qu’il avait vu tomber jusqu’en bas, de ce guide qui avait reçu une roche par la tête, pensait être ok et découvrait en enlevant son casque que la roche lui avait percé le crâne, et ainsi de suite.
13.25 – Non sans quelques frayeurs, nous parvenions sain et sauf tout en haut du couloir de la mort. Le Refuge du Gouter n’était plus qu’à une centaine de mètres devant. Nous avions réalisé le trajet Nid d’Aigle / Refuge du Gouter en un peu moins de 4 heures, ce que notre guide jugeait excellent vu le temps normal de 5.5 heures.
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À partir de là nous n’avions plus de difficulté majeure pour rejoindre le sommet; ce n’était essentiellement qu’une marche sur la glace/neige avec un dénivelé positif de +1300m. L’ennemi no.1 était dorénavant l’altitude; il fallait prendre de grande respiration et boire beaucoup d’eau pour contrer les effets de la haute altitude.
Le Refuge du Gouter semblait tout droit sorti d’un film de science fiction; sa forme ronde, sa façade métallique et sa position donnant l’impression d’être dans un équilibre précaire sur le bord de la falaise, faisaient penser à un vaisseau spatial qui se serait écrasé dans une plaine enneigé et aurait arrêté sa course à la dernière minute pour éviter de plonger dans le précipice.
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Le Refuge du Gouter était sans aucun doute le plus beau refuge de montagne que j’avais vu de ma vie… rien à voir avec les refuges de merde sur le GR20 en Corse. Le bâtiment était une réussite architecturale sur toute la ligne autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. La salle à manger et les dortoirs étaient comparables aux plus beaux auberges jeunesses où j’avais séjourné dans ma vie.
Cela ne s’arrêtait pas là, le balcon extérieur, que j’avais rebaptisé « Balcon des Dieux », valait à lui seul le détour; déjà que le refuge était à moitié dans le vide, le balcon ceinturait le bâtiment avec un plancher fait de grillage métallique. En clair, on voyait le vide sous nos pieds en marchant sur le balcon. Il ne fallait donc pas souffrir du vertige pour apprécier la vue imprenable sur les montagnes environnantes (impossible de voir le sommet du Mont Blanc d’ici), le couloir de la mort tout en bas et la vallée de Chamonix au loin. On voyait même le lac Léman et Genève à l’horizon.
Je passais le plus clair de mon temps sur le balcon à sourire en songeant à quel point ma vie était merdique 😉
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Jour 5 – LE SOMMET DE L’EUROPE
01.30 – Oui Oui… 01.30… le refuge commençait à s’activer. C’était la course pour déjeuner et partir au plus vite.
Ayant réussi à fermer l’oeil quelques heures, je me sentais frais et dispo, malgré un bon mal de crâne et le coeur qui battait à tout rompre même au repos… problèmes dû à ma non acclimatation à la haute altitude. L’adrénaline qui coulait dans mes veines compensait à me faire oublier tout cela.
La journée s’annonçait très longue. Alors que nous avions marché « à peine » 4 heures la veille, le pronostic d’aujourd’hui était de 4 heures de monté jusqu’au sommet, 3 heures de descente pour revenir au refuge, et 3 heures de descente jusqu’au train.
02.30 – Nous étions lancé pour le sommet dans la nuit glaciale. La température était officiellement de -10 degrés Celsius, mais le vent faisait descendre la température ressenti à environ -20.
Nous passions la première 1h30 à monter le « mur des flatulences » en marchant sur le coté en faisant des pas croisés. Le « mur des flatulences » était bien sur mon appellation personnelle… parce que les pets étaient les seuls bruits transperçant le lourd silence de la nuit.
03.45 – Le Dôme du Gouter était atteint. Une grosse ombre en forme de dôme sortait alors de la pénombre devant nous. Pour la 1ère fois, nous avions une vue sur le sommet.
Nous passions ensuite le Refuge Valot à 4362m. Sans gardien, ni chauffage, cet abri rudimentaire était à utiliser en dernier recours lors de tempête ou pour récupérer un petit peu lors de la monté/descente.
2 jours plus tôt, un alpiniste y était mort. Jeune trentenaire (comme moi), et se croyant invincible (comme moi), il s’était tapé 19 heures de monté depuis le Refuge des Cosmiques par mauvais temps. Le Refuge des Cosmiques est situé tout près de l’Aiguille du Midi via un sentier alternatif pour atteindre le sommet. Arrivé au Refuge Valot, son corps avait lâché et il s’était tapé un oedème cérébral. Cela faisait de lui la 1ère victime du Mont Blanc cette saison.
Fin de la parenthèse… Gulp…
S’en suivait la monté du versant « coup de cul »… de son véritable nom… pas mon invention. Mon guide me racontait que c’était la portion la plus incliné du sentier et qu’il lui fallait souvent donner un bon « coup de pied au cul » à ses clients pour qu’ils continuent à avancer. Il n’aurait pas à faire cela avec nous… même si j’avais soudainement arrêté de dire que le Mont Blanc était plat pour me concentrer sur ma respiration.
05.40 – Le sommet était désormais a porté. À ce moment là, plus rien ne pouvait m’empêcher d’atteindre mon but… pas même un orage soudain.
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05.56 – Un dernier pas et il n’y avait plus rien à monter, que de la descente de tous les cotés avec une vue à 360 degrés. L’Europe étaient sous mes pieds… Angleterre non inclus 😉
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Le ciel était alors complètement dégagé avec le soleil qui se réveillait à l’horizon. La température n’aurait pas pu être plus parfaite… une journée « Grand Beau » comme le disent les cousins français. J’avais encore une fois une chance incroyable.
Le sommet du Mont Blanc n’était pas un sommet comme les autres. N’ayant aucun panneau indiquant « Sommet du Mont Blanc – Toit de l’Europe – 3810m », un randonneur sans guide pourrait très bien passer tout droit. Bon… il faudrait que ce randonneur soit vraiment idiot, ou complètement intoxiqué par l’altitude, pour ne pas se rendre compte en regardant autour de lui qu’il n’y avait pas de montagne plus haute… improbable, mais possible.
Cela s’expliquait en raison du fait que le Mont Blanc était recouvert d’une couche de neige/glace épaisse d’environ 20 mètres et que cette couche variait selon les années. Mesuré à chaque année, le sommet du Mont Blanc avait très bien pu être à 3815m l’an dernier…
Le sommet n’était que la moitié du trajet… il fallait maintenant descendre.
En regardant vers l’ouest, on pouvait voir l’ombre que le Mont Blanc projetait sur la vallée; il y avait du soleil partout, sauf dans une gigantesque pyramide d’ombre.
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Une fois de retour au Refuge du Gouter, et avec déjà plus de 6 heures de marche dans les jambes, le plus dur restait à faire; il nous fallait descendre le Corridor du Gouter. Déjà que ça avait été une montée éprouvante, j’anticipais la descente « rock’n roll »… en espérant que l’expression ne soit pas prise au 1er degré.
Contrairement à un chat monté trop haut dans un arbre, il n’y aurait pas de pompier pour nous faire descendre… seulement notre huile de genoux et un peu de jugeote.
J’étais encore une fois premier de cordé; je n’avais rien sauf le vide devant moi. Nous avions à descendre un mur… et par « mur » je voulais vraiment dire MUR. Ce pan de mur en descente est DE LOIN, la section de sentier la plus difficile que j’ai eu à négocier dans ma vie. On ne se le cachera pas; j’avais peur… peur de faire un mauvais mouvement et de me retrouver en bas plus vite que prévu. J’avais failli commettre l’irréparable quelques fois… en pouvant toujours récupérer à minuit moins une.
Pour détendre l’atmosphère, Christophe me lançait un « est-ce que tu trouves encore le sentier trop plat? »… et moi de répondre « oui… beaucoup trop plat… mais plat vertical ».
Arrivé au « Refuge de Tête Rousse » sain et sauf, je lançais à mes compagnons « qui l’eu cru… nous sommes toujours en vie » avec un rire rempli de soulagement. Je n’avais jamais douté que nous serions en bas de la montagne avant la fin de la journée… mais j’avais eu quelques craintes à savoir si nous serions en bas… vivant.
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La pression tombait… à partir de là, il n’y avait plus « aucun » risque; ne restait plus qu’à se laisser glisser sur la neige (parfois littéralement) jusqu’au train 1h plus bas.
11.30 – La gare du Nid d’Aigle était à portée. Le trek était terminé.
Notre guide regardait sa montre avec étonnement. Il nous disait qu’il était normalement de retour à cette gare entre 14.00 et 17.00, et que nous étions probablement son groupe le plus rapide.
À moins que le train ne manque de frein, nous allions vivre un autre jour…
EPILOGUE
Un jacuzzi, quelques bières et une bonne nuit de sommeil plus tard, j’étais dans le train « Mont Blanc Express » à quitter la « Vallée Blanche ». Par la fenêtre, je fixais l’Aiguille du Midi et au Mont Blanc.
J’avais un immense sourire… un sourire ayant une signification différente des sourires précédents; à les regarder d’en bas, je devais me pincer pour croire que j’étais vraiment allé tout en haut.
Le Mont Blanc n’était pas mon sommet le plus haut (à ce jour c’est toujours le Kilimanjaro), mais assurément le plus difficile. Des 16 randonneurs inscrit au Stage Mont Blanc en même temps que moi, seul 7 s’étaient rendus au sommet.
Moi qui était blasé et qui n’avait qu’une seule idée en tête après avoir fini le GR20 (épisode précédent); rentrer au plus vite au Canada, j’avais finalement passé les 5 plus beaux jours de mon voyage sur le Mont Blanc et ses environs… 5 jours qui faisaient passer le reste de mon voyage pour une promenade dans le parc tellement le niveau de difficulté/dangerosité avait été grand.
Je quittais les Alpes Françaises avec une excitation sans borne pour mon voyage en Amérique du Sud, voyage où je planifiais collectionner les sommets enneigés de plus de 5000/6000m.
Allez… cap sur Toulouse dans le sud de la France avant de rentrer 1 mois au Canada.
On se reparle en direct de Bogota/Colombie début aout.
P.S. – Un gros MERCI à mon guide Christophe Bougon pour nous avoir mené au sommet et retourné sur le plancher des vaches sain et sauf… et pour avoir enduré toutes mes blagues stupides avec le sourire et la bonne humeur.
*Sommet de l’Europe si l’on exclus la Russie de l’Europe. Le Mont Elbrus dans la chaine des Caucase est plus haut). Certains pourraient dire que c’est la Russie qui s’exclut elle-même de l’Europe… mais bon, je ne parle pas de politique.