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Épisode 22 – Destination Pangong Lake
(cet épisode commence à la seconde où j’ai posé les pieds à Leh après mon trip de vélo… voir épisode 21)
ENFIN… j’ai de la misère à croire que je suis enfin arrivé à Leh
Après 9 jours de vélo des plus exténuants, je me propose maintenant un peu de repos… TRÈS BIEN MÉRITÉ… ahhh non… attendez… on me souffle quelque chose à l’oreille présentement… Ohhhh… changement de plan…
…
À mon arrivé à Leh, j’étais un peu pas mal perdu devant la quantité de touristes et le choix d’hôtel qui s’offrait à moi (il y en avait des tonnes). N’ayant fait aucune recherche sur Leh et n’ayant pas mon Lonely Planet (beaucoup trop lourd), je n’avais aucunement l’intention de faire le tour des hôtels avec mon vélo et mon tempérament explosif causé par les derniers kilomètres sur le bord de l’autoroute à me faire brasser par la circulation.
J’ai donc décidé de demander à un touriste au hasard dans la rue s’il pouvait me recommander un endroit beau/bon/pas cher.
J’ai donc pris le premier venu… un backpacker… comme moi (barbe pas faite). Celui-ci s’est montré tellement aimable qu’il m’a escorté jusqu’à la guesthouse en question et ce fut le coup de foudre entre elle et moi.
En marchant, parle parle jase jase;
– Espagnol; « where are you coming from with your bike?!? (de où est-ce que tu arrives comme ça à vélo?!?) »
– Moi; « I’m coming from Manali (j’arrive de Manali) »
– Espagnol; « Wow… I was looking to do the same thing, but I have not enought time… I just did the Zanskar valley trek. Tomorow i’m going in Pangong Lake and from there I’ll come back in Leh by the Nubra valley… by bike (wow… je voulais faire la meme chose, mais je n’ai pas assez de temps… j’ai plutôt fait un trek dans la Zanskar valley. Demain, je m’en vais au lac Pangong et à partir de là, je reviens à Leh en passant par la vallée de Nubra… en vélo) »
– Moi; « Wow… I want to do the Zanskar valley trek in few days… Let me 1 hour and I pay you a drink in exchange of few advice about the trek?!? (wow… je veux justement faire le trek de Zanskar dans quelques jours… donne-moi 1 heure et ensuite je te paie un verre en échange de quelques informations à propos du trek) »
Vous croyez au Destin… ou c’est le hasard qui fait bien les choses. Ce gars là à fait le Zanskar Trek en solo tout comme je l’envisage.
Entretemps dans ma chambre d’hôtel à décompresser… complètement détruit de mon trip de vélo, j’ai surpris mon cerveau à penser au trip de vélo qu’il voulait faire. Les 2 endroits où il s’apprêtait à aller était 2 endroits où je voulais aller au départ, mais dont je n’avais aucune l’intention de faire via un trip organisé en jeep ou pire en autobus.
Rendu au café où nous avions convenu de nous rencontrer, je ne lui ai pas laissé le temps de parler et je lui ai lance « do you think it is possible to obtain a permit to go in Pangong and Nubra by tomorow cause if yes, and if you don’t mind, I would like to go with you (est-ce que tu crois qu’il est possible d’obtenir le permit pour aller à Pangong et Nubra avant demain, parce que si oui, et si ça ne te dérange pas, j’aimerais faire le voyage avec toi) »
En guise de réponse, il s’est levé, a été payé sa facture et il m’a amené à l’agence où il avait fait affaire pour louer son vélo et obtenir son permit.
Rendu là, l’indien m’a dit « no problemo… you’ll have it this evening (pas de problem… tu vas avoir ton permit ce soir) ».
À peine 2heures après mon arrivé en ville, je m’embarquais dans un nouveau trip de vélo… au grand désespoir de mes jambes… et de mon cul. Le vide causé par l’absence de rouler aura finalement durée que moins de 24h.
Pour les gens qui se disent « oh mon Dieu, tu vas passer 1 semaine avec un pur inconnu… », je réponds « ouin pis… ça s’appelle voyager ». Ça a commencé comme ça entre moi et mon buddy Roark et regardez où ça nous a mené.
Je mets donc sur pause mon voyage en ermite (solo) pour quelques jours l’instant de réaliser ce nouveau trip de vélo avec mon nouvel ami Jaume (veut dire Jack/James) 35 ans – Enseignant – Maniaque de vélo – Espagnol… euh, je veux dire Catalan. Quand il s’est présenté, il m’a expressément dit qu’il venait de la Catalogne, non pas de l’Espagne… vous savez la province qui veut se séparer de l’Espagne… à la différence du Québec que EUX, c’est la province la plus riche de leur pays, non pas un trou de paumés géré par les syndicats et qui se dote de plein de programmes sans être capable de payer la facture au final… oufff, je me suis égaré… revenons à nos moutons.
Sinon, comment vous le décrire?!? Ahhh oui, à la minute où je l’ai vu dans la rue, je me suis dit « ben condonc, c tu Guillaume Lemay-Thivierge?!? ». Selon moi, il est le sosie parfait de Guillaume… autant physiquement que psychologiquement (il parle vite et est surexcité).
Voici donc l’aventure dans les très grandes lignes;
Demain matin on prend un bus en direction de Pangong Lake. À partir de là, tout se passera en vélo. On va commencer par s’amuser un peu autour du lac, pour ensuite prendre le chemin du retour, le même qu’on va avoir fait en bus. Le chemin consiste en l’ascension de la ChangLa Pass… oui oui, encore une Passe à monter… celle-ci culmine à plus de 5300m. Après avoir descendu la Passe, nous prévoyons bifurquer dans la Nubra Valley via une route de terre. Quelques jours dans la vallée de Nubra et nous entamerons le chemin du retour via la plus haute Passe du Ladack et la 2ème plus haute voie carrossable au monde à 5600m. Une partie de plaisir qui devrait nous prendre environ 7 jours. De toute façon, notre voyage ne peut pas durer plus longtemps puisque le permit qui nous a été délivré pour les 2 endroits est valide 7 jours.
Qu’on de si spécial c’est 2 régions pour qu’il fasse un permit spécial pour y aller… et que je décide de mettre en veilleuse mon repos pour me lancer dans cette aventure?
Tout d’abord, le lac Pangong est l’un des plus grand et des plus beaux lacs en Inde. De plus, il est à la frontière entre l’Inde et le Tibet (Chine). Il est contrôlé au 1/3 par l’Inde et au 2/3 par la Chine.
En ce qui concerne la vallée de Nubra, eh bien c’est une vallée désertique, avec un désert comme on peut se l’imaginer; dunes de sable, etc.
Bref, une petite journée de repos et on retourne dans l’action… La vie est pleine d’opportunités, il n’appartient qu’à toi de sauter dessus.
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Aout 2013 – L’HIMALAYA… MON TERRAIN DE JEU
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Jour 1 – HELL « BUS » RIDE (une promenade d’enfer en bus)
Info;
– Leh (3400m)
– Karu
– ChangLa Pass (5300m)
– Tangtse (4300m)
– Lukung – Pangong Lake
– Spangmik – Pangong Lake (4240m)
Nombre de kilomètres; 154km en bus + 10km en vélo
Description;
5h30 – Je rencontre Jaime à notre point de rendez-vous et on se dirige vers la station de bus.
6h30 – Après avoir attaché nos vélos sur le dessus du bus de peine et de misère (ni l’un ni l’autre ne savait faire de véritables nœuds), nous étions en route pour Pangong et il ne restait plus qu’à prier pour que les nombreuses bosses de la route épargnent nos vélos.
Il faut savoir que pour aller au Pangong Lake, je dois revenir sur mes pas jusqu’à Karu, puis passer devant le Chemde monastery (voir épisode 21). C’est ensuite une centaine de km plus loin. Ça fait donc un peu bizarre de repasser par la route où je suis déjà passé…
Une fois passé Chemde, la route commençait à monter drastiquement pour aller rejoindre la ChangLa Pass. Le chemin était sinueux et à flanc de montagnes. Tout autour de nous, le décor était fait de montagnes exemptes de toute végétation avec une vallée toute verte et ponctuée de plein de petites maisons dans les champs plus bas.
Selon mon livre, la route Karu/Pangong Lake est réputé comme étant la 3ème plus haute route carrossable au monde.
La route était alors complètement pavée. Ce sera un vrai régal de la descendre demain… mais il faudra tout d’abord la monter de l’autre coté à partir du Pangong Lake.
Une fois au sommet, quelle ne fut pas notre surprise de trouver plein de bâtiments; une cafétéria, etc. C’est la première fois que je vois cela sur le dessus d’un col où la neige peut se pointer à tout moment et où il fait un froid de canard. Bref, très inusité, mais un problème de moins pour nous demain puisque nous pensions devoir apporter avec nous de la nourriture pour effectuer l’ascension et la descente du col (plus de 80km).
Sur l’autre versant, l’asphalte était INEXISTANTE. On aurait dit que le bus était un bateau tellement il tanguait de tout bord tout coté… sur la route étroite. Mais bon, depuis longtemps j’ai accepté que j’étais dans une contrée dangereuse et qu’il pourrait un jour m’arriver quelque chose, donc je ne me stress plus avec ce genre de chose qui sont hors de mon contrôle.
Il y avait 5-6 little bouddha (apprentis moines) dans le bus. Disons simplement que ce n’est pas parce qu’ils portaient la toge de moine qu’ils étaient des modèles de paix universelles… au contraire. De vrais petits bums avec leur casquette de yo à pitcher des bouteilles d’eau sur les voitures que nous passions.
Le bus continuait à aller de plus en plus loin, tout en descendant encore, encore et encore. Le lac n’était toujours pas en vue. J’ai alors commencé à paniquer et à douter fortement que nous soyons capables de rejoindre le sommet du col dès demain comme prévu. Ne m’étant pas impliqué dans la planification du trip jusque là, j’ai entrepris de calculer le nombre de kilomètre à faire pour rejoindre le col à partir de Spangmik, notre point de départ. Le décompte non officiel atteignait 80km… tout en montée. J’ai alors proposé à mon gentil conquistador de séparer l’ascension en 2 journées en s’arrêtant dans un village où nous avions vu des hébergements en passant plus tôt. Il m’a alors regardé avec un espèce de regard de soulagement en acquiesçant à mon idée.
3h30 – Pangong Lake en vue. Le bus s’arrête définitivement à Lukung, premier village sur le bord du lac. Il ne va pas plus loin… Tout le monde s’est alors regardé un peu médusé puisque plusieurs voulaient aller à Spangmik, le village suivant et à plus de 10km. La stratégie saute aux yeux… c’est de l’indien tout craché… afin de soutirer encore plus d’argent au touriste, ils font arrêter le bus un peu avant l’objectif et de là, les gens n’ont pas le choix de marcher ou de prendre un couteux taxi.
Tout le monde était frustré… sauf moi et Jaume. Après avoir descendu nos vélos de l’autobus et constaté qu’ils n’avaient pas trop soufferts, nous les avons enfourchés et avons entrepris de faire la route jusqu’à Spangmik… avec un petit sourire en coin en pensant à tous ceux qui était coincés à Lukung… village s’apparentant plus à un stationnement de centre d’achat où on aurait disposé des campements tout autour.
Les 10km ne se sont pas faits sans peine. La route avait été inondée à plusieurs endroits par le glacier plus haut. À un endroit en particulier, la route avait été envahie par une véritable rivière avec un très fort courant. Nous étions moi, Jaume et un couple sur un scooter à contempler les rapides et à se demander quoi faire, quand j’ai pris mes jambes à mon cou, j’ai mi mon vélo sur mon dos et alors que les 3 autres avaient les yeux fixés sur moi, j’ai entrepris de traverser le torrent. À peine les pieds posés dans l’eau que la force du courant manquait me faire perdre pied et m’emporter dans la petite chute.
Heureusement, ce fut plus de peur que de mal et j’ai passé sans trop de difficulté. Jaume m’a ensuite imité avec succès. Ne restait plus que le couple en scooter. Nous attendions donc de voir comment allait s’en sortir le gars avant de reprendre la route. Heureusement pour lui que nous avons attendu puisqu’il s’est retrouvé en situation très précaire au milieu du torrent. Il ne pouvait plus bouger le petit doigt sans quoi son scooter allait être emporté dans le courant. Ni une, ni 2, Jaume s’est porté à son aide et je l’ai imité quelques secondes plus tard après avoir pris des photos héhé. À 3, nous avons eu toutes nos misères à faire passer l’engin. Au final, tout s’est bien terminé, mais nous avions pris une bonne douche.
Une fois rendu à Spangmik et avoir trouvé un bon homestay pour vraiment pas cher, moi et Jaume, accompagné d’une française qui séjournait au même endroit, sommes allé se promener sur le bord du lac… pour finalement succomber à faire une petite trempette.
Pas si froid que ça…
…
Jour 2 – LE MONDE À L’ENVERS
Info;
– Spangmik (4241m)
– Merak
– Spangmik
– Lukung
– Tangtse (4300m)
Nombre de kilomètre; 62km
Total; 72km
Description;
6h30 – Réveil après une nuit mouvementé.
Il s’est passé cette nuit une histoire complètement folle. Alors que je dormais à point fermé, Jaume, qui partageait ma chambre, a entendu des cris dehors « Nicolas… Nicolas… Nicolas ».
Jaume – « Hey Nik wake up… somebody is crying your name outside (Réveille-toi Nik… quelqu’un est en train de crier ton nom dehors) »
Moi – « What?!? (quoi?!?) »… à demi réveillé et convaincu que j’étais en train de rêver)
Je me suis alors tourné sur le côté et je me suis rendormi.
Pendant ce temps là, Jaume est sorti dehors… pour revenir quelques secondes plus tard avec la française complètement en panique…
Francaise – Quelqu’un m’a enfermé dans ma chambre (il faut savoir que dans la plupart des hotels/guesthouses/etc. en Inde, il est possible de barrer la porte des 2 côtés). J’ai ensuite entendu des jeunes ricaner et cogner dans ma porte comme des déchainés. J’ai alors hurlé ton nom (parce que le nom de Jaume se hurle mal).
Moi – (j’étais sans mot à demi conscient… je n’étais toujours pas sur si je rêvais où non)
Elle a ensuite demandé à passer la nuit dans notre chambre parce qu’elle avait trop peur… ce que nous avons acquiescé.
Peu après, j’ai repris un peu mes esprits et j’ai commencé à réaliser les évènements qui venaient de se passer. Je me suis alors mis à paniquer, mais pas pour les raisons énoncés ci-haut. NON… j’avais maintenant la chienne parce que la française partageait notre chambre… Probablement que mon imagination me jouait des tours à cette heure tardive, mais je me disais que je ne la connaissais pas du tout et qu’elle avait peut-être inventé toute cette histoire de toute pièce pour venir dans notre chambre et nous piquer des choses (le lendemain Jaume me confirmait que sa porte de chambre avait belle et bien été barrée de l’extérieur et que c’est lui qui l’avait débloquée).
C’est très con comme réaction puisque je partage ma chambre avec des étrangers depuis maintenant 5 mois… et même Jaume en qui j’ai confiance… ça fait 1 journée qu’on se connait… Bref, après cela j’ai eu de la misère à dormir.
…
Avant d’entreprendre le chemin du retour que nous avons emprunté la veille en bus, nous sommes allé rouler sur le bord du lac en direction de Mérak, dernier village où les touristes sont permis sur les berges du Pangong Lake (ensuite ça devient une zone strictement militaire puisque trop près du Tibet)
Sur la berge du lac, il n’y avait absolument aucun bruit, aucun vent et le sommet des montagnes étaient couverts de neiges fraiches dus à la pluie de cette nuit. De son côté, le soleil peinait à faire son apparition sous un épais manteau blanc de nuages.
Nous sommes donc allés jusqu’à mi-chemin de Merak, pour passe Spangmik et nous diriger vers Lukung (1er village sur le bord du lac et porte d’entrée/sorti du lac).
Pour ce faire, nous avions beaucoup de crainte de repasser le torrent que nous avions rencontré la veille… mais à notre grande surprise, le glacier dormait toujours (tout comme nous, les glaciers gèlent la nuit et donc les rivières cessent, pour ne recommencer que tranquillement durant l’avant-midi et être à leur apogée quand le soleil plombe en après-midi) et le torrent n’était qu’un vulgaire filet d’eau.
8h30 – Après un déjeuner rapide dans la parking qu’est Lukung, je jetais un dernier regard vers Pangong et nous étions officiellement à commencer notre périple de retour.
Le trajet a consisté en une descente TOUT LE LONG jusqu’à Tangtse. Moi et Jaume n’y comprenions rien. Lors de notre trajet de bus d’hier, nous avions l’impression que la route allait monter toute la journée. On a plutôt descendu pendant plus de 30km non stop de Pangong à Tangtse, dernier endroit offrant de l’hébergement avant l’ascension jusqu’à la ChangLa Pass 40km plus haut. Pas que nous étions déçu, au contraire, mais bon…
Une fois arrivé à Tangtse, tout était fermé jusqu’à 4 heure en raison d’une cérémonie qui se déroulait dans le village d’à côté. On s’est donc tourné les pouces de midi jusque là…
En marchant un peu en ville, on a finalement découvert un Éco Hôtel un peu à l’extérieur du village. Éco étant un synonyme de dispendieux pour moi et Jaume, on a quand même décidé d’aller voir pour rire… et après d’âpre négociation, on est finalement resté à coucher…
Fait cocasse, il y avait un trophée de hockey sur glace dans le lobby de l’hôtel. En discutant un peu avec le manager, j’ai appris que les indiens de la région jouaient au hockey sur les rivières gelés l’hiver et qu’il y avait même une ligue inter-village. J’avais même devant moi l’entraineur de la ville de Tangtse… si quelqu’un m’avait dit que des indiens jouaient au hockey quelque part en Inde pas plus tard qu’hier, je me serais probablement étouffé de rire en prenant mon thé…
On se couche tôt pour entamer l’infâme ascension dès 5h demain matin.
…
Jour 3 – CONTRE VENTS ET MARÉES (au sens propre comme au figuré)
Info;
– Tangtse (4300m)
– Durbuk
– ChangLa Pas (5270m)
– Zingral
– Sakti (3800m)
Nombre de kilomètre; 78km
Total; 150km
Description;
4h30 – Lever pénible du corps; mon cerveau et mon corps savent très bien ce qui les attendent (en fait ils n’en ont aucune idée) et ils ne veulent pas trop se mettre en marche.
Au programme aujourd’hui; une monté de plus de 1000m étalée sur plus de 40km jusqu’à la ChangLa Pass… suivit d’une descente de plus de 1500m sur environ 30km héhé.
5h15 – Après avoir succombé à la tentation de retourner au lit quelques fois, nous voila finalement en route.
Je me suis rendu compte assez vite quand on a commencé à monter que ma journée de vélo avec Jaume allait ressembler à une journée typique de vélo back home avec mon Hairy Bastard préféré Guillaume Fafard; Jaume à des milles en avant et moi qui traine mon piano à la peine derrière. En plus il y a des ressemblances physiques entre vous 2; cheveux semi-long frisés, barbe, lunette et parle beaucoup sans qu’on comprenne trop qu’est-ce qu’il dit.
Je ne suis aucunement du calibre de Jaume. À ma décharge, j’ai 10 jours de vélo dans les jambes et la dernière fois que j’en avais fait avant c’était il y a 9 mois… tandis que lui vit en Espagne et en fait quotidiennement à l’année longue… mais bon, aucune défaite ne tient… je n’étais pas de calibre voila tout.
6h55 -J’ai rejoint Jaume qui m’attends sur le bord du chemin la mine un peu défaite. En effet, il n’y a rien pour se réjouir, le ciel devant nous est noir comme un tableau. Cela n’annonce rien de bon.
Nous décidons tout de même de continuer notre route. Advienne que pourra…
Ajoutez à cela qu’entretemps le vent s’était mis de la partie et avait joint les rangs de l’équipe déjà composé de la montagne et de la température. Nous avancions donc au compte-goutte et chaque coup de pédale nous demandait un effort démesuré pour vaincre le vent. Sur le 1er plateau et le 1er pignon (donc la plus basse vitesse), j’avais du mal à vaincre le vent.
Je n’avais alors qu’une seule envi; tourner les talons, redescendre la montagne et aller me blottir dans mon lit à l’hôtel… mais bon, c’est mal me connaitre de penser que j’allais mettre cette pensé à exécution. Je ne suis pas le plus talentueux, ni le plus agile, je n’ai pas les meilleures jambes… bref, je ne pourrais jamais être un athlète professionnel dans quelconque sport vu mes qualités athlétiques qui se situent dans la moyenne tout au plus… mais si il y a une chose dans laquelle je suis un premier de classe, c’est bien la dureté du mental (ok je pète ma coche des fois, mais c’est pour ventiler héhé); quand je dis que je vais faire quelque chose, je le fais un point c’est tout et je m’y donne corps et âme si il le faut… peu importe les conséquences.
À 8h20 tapant, nous avions fait 26km. J’étais alors complètement détruit. Parfois j’essayais de changer le mal de place en marchant quelques minutes, mais mes jambes étaient tellement molles que je n’arrivais pas à pousser le vélo. À constamment m’agripper et pousser sur mon guidon pour avancer, j’avais l’avant des bras dans le même état. Bref, j’étais dans la condition physique idéale pour les 20 derniers… et les plus durs… kilomètres avant le sommet.
Comme si j’avais besoin de me changer les idées, je me suis fait engueuler par un convoi militaire… oui oui. Alors que j’étais à passer une section de route inondée et que j’étais au beau milieu de mon portage, avec les pieds dans au moins 1pieds d’eau, un convoi militaire comprenant 1 jeep et quelques camions pleins de soldats est arrivé derrière moi. Le jeep en tête a alors commencé à me klaxonner comme un débile. Comme je ne pouvais pas me tasser (l’eau était plus profonde de chaque coté), j’ai continué ma route pour finalement me tasser juste après. C’est à ce moment que le jeep, qui n’avait pas arrêté de me klaxonner entretemps, s’est arrêté à côté de moi et que l’officier en charge a commencé à m’engueuler comme du poisson pourri… Pour résumer ses propos, il m’a dit que ça ne se faisait pas de ne pas de ne pas se tasser quand on se faisait klaxonner. Puisque c’étais un militaire… et qu’il n’était pas seul… j’ai hoché de la tête à chaque 2 secondes et je lui ai donné totalement raison… mais en dedans je bouillais; EILLE CHOSE, j’avais l’ai 2 pieds dans la flotte et il aurait fallu que je stop au beau milieu pour te regarder passer pendant une bonne minutes et + toi et tes estis d’indiens… OUFFF… pour me redonner un peu de pep on aurait difficilement pu trouver mieux… je rageais.
Comme si ce n’était pas suffisant, quelques minutes plus tard j’ai été pris en chasse par 2 chiens qui n’entendaient pas à rire. Je n’ai JAMAIS eu aussi peur de me faire mordre par un chien que par ces 2 là. Normalement, quand un chien te jappe dessus en Asie, tu n’as qu’à japper à ton tour ou à faire un vif mouvement en sa direction et il tourne les talons… pas cette fois. J’avais beau crier de toutes mes forces (je criais pour les faire fuir, mais aussi parce que j’étais mort de peur) et essayer de les botter, j’avais tout de même 1 chien à moins de 1m de chaque coté de moi qui montrait les crocs et qui essayait de mordre mes mollets. J’avais une esti de chienne et je pédalais comme un fou en zigzaguant… Essayez de pédaler comme un fou et de crier comme un débile en même temps à plus de 4000m… Une fois passé leur territoire, ça m’a pris un bon 10min avait de reprendre mon souffle.
9h15 – Il pleuvait à siaux depuis quelques minutes quand une teahouse (un tipi) est apparue dans mon champ de vision. J’ai alors vu un vélo garé juste devant… BINGO
C’est trempé jusqu’aux os que j’ai rejoint mon copain Jaume en train de boire un thé bien assis autour du feu dans la tente…
Très primitive, c’était la tente d’une famille d’éleveur de yaks. Je me serait cru dans une tente au beau milieu du sentier de la nature du zoo de St-Félicien. Moi et Jaume étions bien emmitouflé dans de la peau de yak, autour d’un feu chauffé… à la merde de yaks… au milieu de la petite tente. À ce moment précis, je n’aurais pu demander plus… c’était pour moi le paradis.
Entretemps, la pluie et le vent avaient cessés et après s’être bourré de thé et de 2 grosses miches de pain, nous étions fins près à attaquer la dernière section de l’ascension.
10h00 – Il ne restait plus que 14… petits… kilomètres pour atteindre le sommet.
Comme à l’habitude, j’avais perdu de vue Jaume depuis un bon moment. Peu importe, je ne suis pas ici pour faire une course. Si j’avais essayé d’aller à son rythme et non le mien, je n’aurais jamais vu le sommet, mais le ciel.
Certaines sections étaient tellement à pic que j’ai du souvent marcher. Cependant, dès que je voyais une voiture arriver, peu importe la souffrance, je remontais sur mon vélo.
J’ai aperçu la cafétéria au sommet de la ChangLa Pass. L’énergie du désespoir étant vidé depuis très longtemps, je ne sais pas trop où j’ai puisé toute cette énergie, mais j’ai eu un regain d’énergie immense. Comme quoi tout est une question de mental.
11h30 – LE SOMMET… Rendu là, tout le monde, que ce soit les touristes ou les indiens, venaient nous féliciter et voulait nous serrer la main, essayer les vélos. et/ou prendre une photo avec nous. Ça faisait du bien au moral.
Notre journée de travail était donc TERMINÉE. Il ne restait qu’à descendre 32km.
12h00 – Fini la célébrité… il fallait repartir.
2 heures et 40km plus tard, nous étions bien assis à Karu en train d’attendre un bus en direction de Leh. Oui oui… vous avez bien lu… à attendre un bus pour Leh.
Disons simplement que notre descente n’a pas été de tout repos. J’ai tout d’abord fait un 3ème flat en moins de 24h et ce, de la même façon que les 2 premiers, le pneu a crevé parce que l’enfoiré de mécano à la shop où nous avons loué ces vélos n’a pas mi de morceau de tissu/plastique dans ma roue arrière, de sorte que l’extrémité des rayons perforent le pneu. Je n’ai plus aucune confiance en ce vélo.
Pour ceux qui se le demande, il faut savoir qu’entre le moment où je suis arrivé à Leh de mon trip de vélo Manali/Leh, j’ai du rendre le vélo de montagne que j’avais puisqu’il m’était impossible de prolonger la location (un trip organisé de vélo commençait dans 2 jours et ils avaient besoin du vélo), j’ai donc loué un vélo de merde à la boutique où avait fait affaire Jaume. Si c’était juste de cela, on aurait continué, mais en plus de cela, Jaume a fait une sortie de route… comprendre qu’il a failli se tuer en tombant d’un ravin en ratant une courbe… et il a crochit sa roue arrière. Il lui est donc impossible de continuer avec un vélo dans cet état.
…
LEH – UN PEU DE REPOS… POUR VRAI
Je suis donc de retour à Leh de manière prématuré en raison d’un trip qui fini en queue de poisson… mais d’un autre coté, je ne suis pas trop déçu… je suis à bout de force présentement.
C’est donc un 2ème séjour pour moi ici… bon… le premier ne compte pas trop puisque je suis resté moins de 24 heures et le 2ème a commencé de manière abrupte… à quand une arrivée normale à Leh…
Cette fois, juré craché, je me repose un peu. Même si la plus belle fille du monde vient me proposer une nouvelle aventure demain je vais refuser du revers de la main… euh.
Cette fois, j’ai suivit mon amigo dans sa guesthouse, une auberge tenue par une très sympathique famille dans une grosse maison avec un jardin comprenant des rosiers PARTOUT (ce n’est pas la saison malheureusement Pop). Nous y avons droit à un traitement royale; pain traditionnel, thé à volonté, super omelette le matin, etc.
…
En ce 1er matin officiel à Leh, il n’était pas question de se lever avant le soleil ou de faire quoique ce soit demandant un quelconque effort physique. J’ai donc fait la plus longue grâce matinée que j’ai pu faire depuis des mois… réveil à 8h.
Tout en étant une formidable cité du désert, Leh est avant tout une plaque tournante pour quelqu’un voulant visiter le Ladack. Si j’avais à faire un parallèle entre Leh et un autre endroit où je suis allé, ce serait Pohkara au Népal. Remplacez le super lac par un désert et l’illusion serait parfaite héhé. Plus sérieusement, tout comme Pohkara, cet endroit est fait sur mesure pour les touristes; il y a des restaurants, boutiques, agences de voyage PARTOUT. Pour dire vrai, cela n’arrive pas à la cheville de Pohkara ou Katmandou, mais c’est le jour et la nuit avec Manali.
Histoire de commencer la journée du bon pied et de ne pas perdre la forme, je suis allé monter les interminables marches menant à la Shanti Stupa sur le dessus d’une petite montagne en périphérie de la ville. La terrasse offrait une vue complète et superbe de l’ensemble de la ville et de la vallée.
J’ai ensuite passé l’avant-midi à faire le tour des agences de voyage (pour aller faire un tour dans Nubra Valley) et des boutiques de plein air (pour m’acheter une tente et un sleeping bag pour mon trek en solo dans Zanskar). Après quelques heures de lèche vitrine, j’avais trouvé chaussure à mon pied pour TOUT ce que je cherchais.
Je vais donc jouer au touriste dans Nubra Valley pour 3 jours avec un tour organisé en jeep… ce n’est VRAIMENT pas mon genre de voyage, mais j’ai besoin d’un peu de repos (sans rester à rien faire) avant le début de mon trek.
En après-midi, il n’était plus question de faire les boutiques… non non non… j’avais quelque chose de plus intéressant (suicidaire) en tête; alors que tout le monde se réfugie dans les cafés ou fait la siesta pour fuir la température accablante, moi j’allais plutôt faire un babouche trek et gravir la montagne au milieu de la ville, par un sentier sinueux en terre, pour aller voir le vieux Palais de Leh et la Gompa tout en haut. En fait, peu importe l’endroit où vous vous promenez en ville, si vous n’êtes pas en mesure de voir la Gompa perchée sur la montagne c’est que vous n’êtes pas à Leh.
La visite de la Gompa surplombant la ville vaut le détour (je ne parle pas d’y entrer, mais simplement de se promener tout au sommet de la montagne) et cela représente assurément l’un des moments privilégiés de mon voyage.
En revenant en ville par la vieille ville, je suis tombé sur un sentier souterrain de 100-200m de long… pas dans la terre, mais dans les bâtiments… WOW… un autre de ces endroits découverts en me promenant au hasard dans les rues et qui vont peupler mes rêves…
Bref, ce que certains pourraient une journée bien remplis, moi j’appelle ça une journée de repos héhé…
Sinon, si vous allez à Leh, vous allez souvent entendre « sorry today no power (désolé, il n’y a pas d’électricité aujourd’hui) » et « sorry wi-fi/internet not working today (désolé, internet/wi-fi ne marche pas aujourd’hui) ». Tellement que je commence à croire que le wi-fi est un mythe à Leh. Les restaurants, etc. affichent tous des écritaux wi-fi pour attirer les clients, mais il ne fonctionne jamais.
Et puis finalement, en fin de soirée, j’ai appris que mon tour à Nubra avait été annulé puisque 2 personnes avaient cancellés.
C’est donc meilleure chance la prochaine fois Nubra, je laisse tombée et j’embraye en seconde vitesse avec mon trek dans Zanskar. Après tout, à mon arrivé à Manali, j’avais simplement 2 objectifs; Manali/Leh road en vélo et faire le Zanskar trek.
Il y a tellement de chose à faire aux alentours de Leh que je pourrais rester ici encore 2-3mois.
– Lacs; J’ai vu 2 des 3 plus importants lacs des environs (Tso Kar et Pangong), mais j’ai laissé de coté Tso Moriri.
– Monastère (Gompa); Il y a PLEIN de monastères à visiter (une bonne douzaine), mais j’ai vu les 4-5 plus importants.
– Aller au Kashmir, plus particuliairement à Srinigar et Jammu. C’est cependant une zone sous tension et la fête de l’indépendance approche (le 15 aout) et on m’a déconseillé d’aller au Kashmir dans ces dates.
– Aller dans la Aryan Valley; à mi-chemin entre Leh et Srinigar, un peu à l’écart du chemin principal, se trouve la Aryan Valley. Elle mange quoi en hiver cette vallée? Eh bien, c’est supposément à cet endroit qu’Alexandre le Grand et ses hommes ont arrêté leur conquête de l’Orient et ont élu domicile plus de 1000ans avant Jésus Christ. Si vous allez dans cet endroit aujourd’hui, vous allez voir plein d’Indien blanc, aux yeux bleu et aux cheveux blonds. Ce sont les descendants de ces macédoniens conquérants et depuis près de 3000ans, ce peuple fait très attention pour préserver sa pureté. Il y a 3 villages dans cette vallée et le village de Dha est la principale attraction.
– Trek; il y a des TONNES de trek à faire autour de Leh. Le plus populaire est un trek d’environ 7-9 jours dans la Markha Valley. Sinon, il y a plein de baby trek de 3 jours et moins (c’est comme cela qu’ils sont appelés ici).
– Aller dans la Nubra Valley; le désert comme on se l’imagine. Ne pas manquer les villages de Paramik (pour ses hotsprings) et le village de Hundar (pour ses grandes dunes de sables).
Mais bon, il fait bien qu’il me reste des choses à faire pour une autre fois… parce que c’est sur que je vais revenir un jour.
Il est temps de passer au plat principal…
…
LES DERNIERS PRÉPARATIFS
Autant j’adore faire du vélo, autant cela ne pourra jamais battre les sensations que j’éprouve en utilisant mes pieds comme élément de propulsion, en d’autres mots; en faisant des treks. Alors que je ne peux contrôler complètement certains éléments avec le vélo (bris mécanique, etc.), c’est moi la machine qui me fait avancer et c’est de moi et seulement moi dont je dois m’occuper.
Je m’apprête donc à faire un trek de 3 semaines dans la vallée de Zanskar, l’une des régions les plus reculées de la planète, étant inaccessible 9mois par année. Même si il y en a à quelques endroits pour se ravitailler et dormir tout au long du parcours, il ne faut pas trop compter là-dessus. Je me prépare donc pour un trek en autonomie semi-complète; tente, sac de couchage et réserve de nourriture pour quelques jours (noodles, barres de chocolat, meule de fromage, amandes et abricots séchés… je compte sur les quelques teahouses et villages que je vais rencontrer pour les souper plus consistant).
Ce trek se fait généralement avec un guide et des ânes pour porter tout ce beau matériel, mais il peut aussi s’effectuer en solo. Est-ce que c’est de la folie de tenter le coup en solo? Peut-être, mais vous parlez à quelqu’un qui a fait la route Manali/Leh en vélo et en solo…
Pour moins de 200$, je me suis donc acheté une vraie tente Quechua (équivalent de M.E.C. en France) très légère et compacte, un sleeping bag North Face (copie), une gourde, un super gigantesque couteau (j’ai beau avoir une nouvelle tente et sleeping, mon couteau est mon nouvel objet préféré… je le regarde et je souri… en pensant à qu’est-ce que je pourrais faire au prochain chien qui va essayer de me mordre) et bien sur la nourriture mentionnée ci-haut. Cela devrait représenter le très gros de mes dépenses pour le prochain mois héhé.
Lors de ma dernière journée à Leh, j’ai passé la majeure partie de l’après-midi à redessiner le plan de ma maison pour le prochain mois. Tout comme au Népal, mon sac à dos va devenir ma maison pour au moins 2-3 semaines. Avec les 3 nouveaux venus (tente, sleeping et nourriture), j’ai du revoir l’aménagement et procéder à quelques agrandissements un peu broche à foin. Je me dis que pour le moment ça tient et que je vais avoir des soirées entières à n’avoir que cela à faire sous peu… Bref, c’est un work in progress… je capitalise aussi sur le fait que la nourriture prend beaucoup de place présentement et que je vais la manger au fur et à mesure… le problème va donc se régler par lui-même… au fur et à mesure que le problème de famine va faire surface héhé.
…
AU REVOIR LEH
En ce… euh… on est quel jour de la semaine dont?!? Ahhhhh…
Je disais donc… en ce jeudi 8 aout 2013, je quitte Leh à bord d’un bus un peu crado (on ne change pas une formule gagnante). Je me dirige vers le départ du trek qui se trouve à un peu plus de 4h à l’Ouest dans le village de Lamayuru. Si tout se passe comme prévu, je vais commencer mon trek dès demain…
Officiellement, c’est un trek de 21 jours, mais après avoir parlé avec quelques guides et fait mes propres recherches, je pourrais le compléter en aussi vite que 14 jours puisque je le fais en solo. Bref, l’avenir nous le dira…
L’Ange, sur mon épaule droite, me regarde présentement avec les bras croisés et des gros yeux en me disant « dans quel plan à la con tu t’embarques encore… tout a bien été jusqu’à maintenant, mais à force de tenter le Diable, tu vas finir par te bruler »… et le Diable de sautiller d’impatience sur mon épaule gauche de répondre « vas-y mon bonhomme ».
Je me sens comme si j’étais sur le point de sauter d’un très haut plongeon; tu veux sauter, mais tu as la chienne de faire le move pour te jeter dans le vide.
Voila… je me lance…
On se reparle un de ces jours à la fin aout ou au début septembre…
Jusque là, portez-vous bien et j’essaierais du mieux possible de faire de même…
…
P.S. – C’est fou comment il peut y avoir des français à Leh. Je crois que pour chaque 5 touristes, il y a 3… peut-être 4… français. Je vous ai déjà dit que j’aimais les français… non… ahhh… c’est bien ce que je pensais héhé.
P.S. II – Autant mon best buddy Roark se moquait de moi en me traitant de « caveman » durant les 2 mois que nous avons voyagé ensemble, autant avec Jaume j’étais littéralement un prof d’anglais. Même si il parle mieux en français qu’en anglais, Jaume m’avait demandé que nos conversations se déroulent uniquement en anglais pour qu’il s’améliore. De plus, il me demandait constamment comment dire tel ou tel mot et si sa prononciation était correcte…
P.S. III – Jaume m’a raconté que P.E.T.A., l’organisation qui lutte pour la défense des animaux, menait depuis quelques années une campagne de stérilisation des chiens en Inde… en raison de la surpopulation. Ça dit tout… quand même l’organisation qui est sensé les protéger veut les « exterminer » (mon interprétation), c’est qu’il y a un problème avec ces bâtards. Il ne pourrait pas stériliser les indiens un coup parti (je dis cela comme ça) héhé…
Épisode 21 – Une route pas comme les autres; Manali – Leh à vélo en solitaire
Du 25 juillet au 2 aout 2013
…
Vous vous apprêtez bientôt à découvrir ce qu’on en commun un homme, un petit sac à dos bleu, un vélo de montagne et une contrée désertique…
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TABLE DES MATIÈRES;
PROLOGUE
– MANALI; LES VACANCES SONT TERMINÉS
– LADACK; LITTLE TIBET
– LE DÉCOMPTE EST COMMENCÉ
– Jour 1 – AUCUN RÉPIT – 39km
– Jour 2 – … DE BOUE ET DE POUSSIÈRE – 82km (121km)
– Jour 3 – 2 BLOCS DE BÉTON – 45km (166km)
– Jour 4 – OFF-ROAD – 60km (226km)
– Jour 5 – I’M A POOR LONESOME… BIKERBOY – 56km (282km)
– Jour 6 – NO MAN’S LAND – 76km (358km)
– Jour 7 – TEMPÊTE AU SOMMET – 61km (419km)
– Jour 8 – MONASTÈRES EN FOLIE – 88km (507km)
– Jour 9 – EASY RIDER – 21km (528km)
ÉPILOGUE
– À VAINCRE SANS PEINE, ON TRIOMPHE SANS GLOIRE
– MATÉRIEL NÉCESSAIRE
– BUDGET
– TOP ET FLOP
…
Légende (voir la section info au début de chaque journée);
N – possible de se procurer de la nourriture à cet endroit
E – possible de se procurer de l’eau
G – Il y a des guesthouses
T – Possible de coucher dans une teahouse/camping (tente à louer)
…
PROLOGUE
MANALI; LES VACANCES SONT TERMINÉS
Que signifie le nom Manali en indien?
Aucune idée…
Je sais par contre ce que cela signifie pour moi; 1 mois presque jour pour jour après la fin de mon trek dans l’Annapurna au Népal, c’est le moment de retourner au « boulot ». C’est fini le luxe indien… si luxe il y a… mais bon, n’embarquons pas sur ce sujet épicé…
La préparation fait foi de tout et pour être préparé, je le suis…
Préparé pour faire quoi me demanderez-vous?
Pour faire une ride de vélo de 475km…
Pfff, ya rien là, je roule 100-200km par jour durant les fins de semaine…
Entre les villes de Manali et Leh dans le Nord-Ouest de l’Inde…
Jamais entendu parlé…
En vélo de montagne, sur une route réputée comme étant l’une des plus dangereuses au monde, qui passe au beau milieu d’un désert, au beau milieu de gorges profondes, qui se trouve au minimum à 3500m d’altitude et qui doit franchir 4 montagnes à plus de 5000m d’altitude.
(Bruit de pas qui s’éloignent…)
Ne vous en faites pas, je ne suis pas le premier parfait imbécile à tenter le coup et bien que je le fasse en solo, j’ai planifié mon trip avec une agence de Manali qui se spécialise dans les trips de vélo de ce genre.
…
Avant d’aller plus loin, commençons par le commencement…
Je me nomme Nicolas Paré, je voyage depuis presque 5 mois en Asie et je suis présentement à Manali – Inde à la veille de commencer un trip complètement fou.
FIN
Nahhhh… il manque quelque chose… c’est beaucoup trop concis comme histoire… je vais essayer de faire mieux si vous m’en laissez la peine.
Reprenons donc à partir de la fin de mon dernier épisode…
Après un bus de nuit infernal en provenance de Shimla, je me retrouvais à Manali.
Parlons-en de ce bus…
Quelques 2 heures après le départ, le bus s’est arrêté pour un dernier stop avant la nuit… blanche. À notre descente du bus, moi et les autres touristes à bord avons été en mesure de remarquer que les freins boucanaient comme jamais je n’avais vu des freins fumer auparavant.
Voyant nos regards incrédules pointés en direction des roues, le chauffeur a cru bon de faire quelque chose pour nous rassurer. Il s’est approché d’une d’entre-elles et lui a donné un bon coup de pied… comme ferait tout bon gars qui ne connait rien aux voitures/camions. Il s’est ensuite tourné en notre direction et a fait un signe de tête, un sourire et nous a lancé et un « everything’s fine (tout est parfait) ».
Ouin… mettons…
Vous pouvez me corriger si je me trompe, mais à mon humble avis de non mécano, si il y a quelque chose d’important à avoir sur une route toute en montée et descente c’est bien les freins. Ajoutez à cela que la problème des freins qui fumaient nous a fait remarquer qu’une des roues était très mal fixée à l’essieux… mais ça c’est une autre histoire.
Malgré nos craintes, nous n’avions pas vraiment le choix de remonter dans ce maudit bus… ou bus maudit… puisque l’autre alternative consistait à rester au beau milieu de nul part en pleine nuit.
Une fois de retour sur la route, il valait mieux avoir les yeux fermés durant le trajet parce qu’à la minute où j’étais attentif, je commençais à analyser le moindre bruit et à penser que mon heure avait sonnée.
Je suis finalement arrivé sain et sauf à Manali.
J’oserais dire que c’est le Mont Tremblant de l’Inde; une ville artificiellement créée au pied des montagnes et faite sur mesure pour les touristes… donc je déteste.
L’endroit fonctionne un peu au ralenti en été (donc présentement), mais c’est tout autre chose en hiver puisque c’est l’un des principaux Resort de ski en Inde.
J’ai donc commencé à mettre mon plan à exécution.
Quel plan?!?
…
RETOUR EN ARRIÈRE
Lorsque j’étais à Darjeeling il y a 3 semaines, j’ai ouvert un livre sur le Ladack (Nord-Ouest de l’Inde) et j’y ai lu une toute petite phrase qui a littéralement fait en sorte que je me retrouve présentement à Manali.
Cette phrase parlait de la route Manali/Leh, principal accès terrestre reliant le Nord-Ouest de l’Inde au reste du pays. Cette phrase mentionnait que le bus, le jeep ou la moto étaient les moyens les plus courant de parcourir le chemin, MAIS que depuis quelques années, quelques individus en mal de sensations extrêmes faisaient la route à vélo…
À partir du moment où mes yeux ont lu ces mots, il était clair que j’allais faire cette route à vélo… et ce, sans avoir fait la moindre recherche et avoir ne serait-ce qu’une infime quantité d’information sur la route… En fait, la seule chose que je savais à son sujet était son nom et je pouvais localiser l’emplacement des 2 villes (Leh et Manali) sur une carte.
Le soir même, un peu de recherche sur Internet m’en ont appris un peu plus…
Réputée comme étant l’une des plus belles et des plus hautes (altitude) routes au monde, la route Manali/Leh fait principalement parler d’elle en raison des dangers qui guettent les usagers qui l’empruntent. Fermée plus de 8 mois par année en raison de la neige, nombreux sont les embuches pour la franchir; elle passe en plein désert, plusieurs sections sont très propices aux éboulements (pouvant bloquer la route durant plusieurs jours), il y a quelques montagnes à franchir qui peuvent à tout moment de l’année être bloquées par la neige, certaines sections de la route sont très précaires, il y a un danger réel de mal de l’altitude et bien plus encore.
Pour faire un bref résumé, afin d’être sur que vous me suivez bien, l’idée est de pédaler 475km sur un vélo de montagne, sur une route réputée comme étant l’une plus dangereuse du monde, dans un désert ayant une altitude minimum de 3500m et de passer 4 passes à plus de 5000m. La coupe du trajet fait peur… une vrai étape du Tour de France.
J’ai donc convenu avec moi-même de mettre le tout sur la glace le temps de rejoindre Manali. À partir de là, j’entreprendrais les démarches afin de louer/acheter un vélo, grignoter quelques renseignements sur la route et mener à bien mon projet.
…
RETOUR VERS LE FUTUR
Je suis donc à Manali…
En 2 temps, 3 mouvements, je me suis trouvé un beau petit hôtel à l’écart de tout le brouhaha. Il est maintenant temps de se mettre à l’ouvrage…
Résultat de la 1ere journée; Échec sur toute la ligne…
Je suis entré dans toutes les agences de voyage, boutiques, etc. Avec eux, peu importe ce que tu demandes, la réponse est toujours « 5 minutes » et tu te retrouves à attendre comme un con pendant 1h pour qu’au final ils n’aient rien compris de ce que tu voulais…
À un certain moment, le gars m’avait tellement dit souvent « only 5 minutes (seulement 5 minutes) » que je lui ai dit « next time you say 5 minutes I’ll leave your office (la prochaine fois que tu me dis juste 5 minutes je pars) » et il m’a dit du Tac au Tac « ya ya, wait only 5 minutes (ok ok, encore seulement 5 minutes) « … Je me suis levé sans dire un mot et j’ai crissé mon camp. €st! de gang de faux jetons.
Bref, malgré la quantité incalculable de boutiques et d’agences de trek/voyage, les quelques boutiques qui proposent la location de vélo de montagne ne veulent rien savoir de me louer un vélo pour aller jusqu’à Leh.
Ajoutez à cela qu’il n’y a AUCUN endroit en ville où acheter les quelques éléments dont j’aurais besoin (gourde, etc.). Un peu con vu la réputation de Manali comme étant un endroit de plein air… mais bon, quand on y pense un peu plus, on est en Inde et acheter une bouteille pour y mettre de l’eau à répétition est un concept qui pourrait s’apparenter à de la récupération… et comme je l’ai dit, on est en Inde, pays où le gaspillage règne en roi et maitre.
En fin de journée, quand j’allais pour me chercher un thé, afin de relaxer mes nerfs mis à rude épreuve durant la journée, toutes les pièces du puzzle se sont mises en place. Juste en face du Café, il y avait une boutique de plein air que je remarquais pour la 1ère fois. Il y avait des vélos de montagnes de bonnes qualités devant la porte et c’était mentionné « we help you built your own trip (nous vous aidons à organisez votre propre aventure) ».
Ni une, ni deux, j’étais dans leur bureau. Je leur ai mentionné mon intention de faire la route Manali/Leh en vélo et ils ont commencé à me parler de leur trip organisé qui partait dans 1 semaine. Beaucoup trop cher pour moi, je leur ai demandé s’il y avait d’autre alternative comme louer un vélo et faire le trajet par moi-même… La réponse fut affirmative…
De fil en aiguilles, ils m’ont expliqué tout ce que je devais savoir sur la route; faire le plein d’eau, manger et dormir, avec le nombre de kilomètres qui les séparent.
À chaque endroit où j’aurais un hébergement possible, ce sera un pensez-y bien à savoir si je continu jusqu’au prochain point. Tout sera une question de bien gérer mes forces et de connaitre mon niveau de fatigue afin d’éviter d’avoir à passer une nuit glaciale à la belle étoile.
…
LADACK; LITTLE TIBET
Le Ladack est la région de l’Inde où je m’apprête à mettre les roues. Je vais vous casser les oreilles avec cet endroit et vous faire découvrir quelques uns de ses secrets au cours des prochains épisodes puisque j’ai l’intention d’y rester au moins 1 mois.
Dictionnaire Le Pti Paré
LADACK, nom masculin,
« La » signifiant Passes/Cols (chemin qui passe au sommet des montagnes),
« Dack » signifiant Royaume/Pays/Contré
C’est donc le Royaume des Passes… et vous allez voir que j’en ai franchit pas mal de ces Passes.
Faisant parti de la province indienne Jammu/Kashmir, ce n’est pas une province de l’Inde, mais bien un territoire.
Pour ceux qui suivent attentivement les nouvelles provenant de l’étranger, le mot Kashmir (Cachemire en français) devrait faire allumer quelques lumières dans votre tableau de bord. Territoire au Nord-Ouest de l’Inde, le Cachemire est enclavé entre le Pakistan à l’Ouest et la Chine à l’Est. C’est une zone sous très haute tension puisque le Pakistan revendique aussi ce territoire depuis la création des 2 pays en 1947. Les escarmouches y sont donc TRÈS fréquentes, mais principalement au Kashmir (territoire à l’Ouest de la province et limitrophe avec le Pakistan), tandis que le Ladack (territoire à l’Est de la province et limitrophe avec la Chine… plus précisément le Tibet) est généralement assez tranquille. Malgré tout, il y a une présence militaire très importante.
Le Ladack compte 100 000 habitants, dont plus de 30 000 à Leh, la capitale. En revanche, il y a plus de 150 000 militaires indiens stationnés sur le territoire. C’est tout dire… en fait, si vous êtes au Ladack et que vous ne voyez pas une base militaire, un convoi militaire, un hélicoptère et/ou un jet de combat durant une journée, eh bien vous n’êtes pas au Ladack. Cette présence militaire contraste beaucoup avec le fait que le territoire est l’un des plus beaux endroits au pays, autant en ce qui concerne les paysages que culturellement, et que le moteur économique principal est le touriste.
Parlons-en de sa beauté…
En ce qui concerne les paysages, comment vous expliquer… mmm… ahhh oui…
Lorsque Dieu a crée le monde, au matin du 7ème jour, après 6 jours de dur labeur, il regardait son ébauche et s’est dit « c’est un peu trop banal comme planète, il faut que j’y ajoute un peu de piquant… ».
C’est ainsi que la chaine des Himalaya, l’Iran et le monstre du Lock Ness sont nés.
Après coup il s’est dit « pas si mal, mais ce n’est pas encore pile poil… et si je fessais… ohhh (cri d’extase) ».
C’est ainsi qu’il a eu l’idée de créer un immense plateau désertique à plus de 3500m d’altitude et avec des montagnes PARTOUT.
Hautes montagnes + désert = désert montagneux à très haute altitude. Le Ladack était née.
Vous ne croyez pas? Vous apprenez quoi à l’école condonc?!?
Je continue donc mon histoire…
Puisque le Ladack a été crée à la dernière minute, Dieu n’a pas eu le temps de simuler une année complète puisqu’il devait partir en vacance pour le reste de l’éternité dès le lendemain. C’est ainsi que quelques bugs ont faits leur apparition.
Quelques bugs comme de la neige en hiver… ben quoi, même si c’est un désert, l’altitude fait en sorte qu’il fait froid et qu’il neige pas à peu près 8 à 9 mois par année. Le territoire se voit ainsi coupé du reste du monde durant tout ce temps (Leh ayant un aéroport, l’accès y demeure limité) en raison de la neige qui bloque le sommet des montagnes et donc les routes.
Voici donc pour les paysages…
Pour de qui est de la beauté culturelle du Ladack, eh bien l’endroit est souvent appelé « Little Tibet (Le Petit Tibet) ».
Véritable paradis sur Terre, on raconte que le Ladack est l’endroit où la culture tibétaine a le mieux subsistée (mieux qu’au Tibet lui-même) depuis l’invasion du Tibet par la Chine.
Bordant le Tibet, sa population est composée en grande partie de tibétains ayant fuit sous le régime chinois oppresseur. D’ailleurs, le Dalai Lama, chef spirituel du Tibet, a élu domicile à Dharamsala tout juste au Sud du Ladack, depuis qu’il s’est enfuit de Lhassa (capitale du Tibet) il y a plus de 60ans.
En fait, si vous passez une journée sans voir d’autocollant, de tuque, de chandail, etc. où c’est inscrit « Free Tibet (Libérez le Tibet) », des drapeaux du Tibet et/ou des photos de Llassa, je vois conseille d’avoir une sérieuse discussion avec votre agent de voyage puisque vous n’êtes pas au Ladack.
C’est donc une description très brève du Ladack. Si je vous ai mis l’eau à la bouche et que vous ne pouvez pas attendre, internet est là… Pour les autres, je vais tâcher de vous faire découvrir plusieurs de ses beautés dans le présent épisode et les suivants…
…
LE DÉCOMPTE EST COMMENCÉ…
Plus que quelques heures avant le départ de ma nouvelle aventure. Je quitte Manali avec le strict minimum, comme lors de mon trip au Népal, laissant le gros de mon stock à mon hôtel où je reviendrais dans un peu plus de 1 mois suite à mon trek dans Zanskar Valley.
Le stress est à son comble et les pires idées me passent par la tête…
Comme si Dieu avait voulu me donner un peu de répit, un petit bonhomme m’a adopté comme nouveau meilleur ami en fin de soirée au resto de l’hôtel. Merci, mais d’avoir un kid qui essai de briser mon IPhone juste avant mon départ ce n’est pas ce que j’appelle relaxant.
Ce que j’entreprends demain est tout sauf une sinécure et j’en suis bien conscient. Je vais surement souvent me demander pourquoi j’ai eu cette idée de « génie » en voyant la prochaine montagne devant moi, je vais même peut-être craquer qui sait.
Ce que je sais aussi c’est que ma préparation est parfaite, que j’ai confiance au vélo que j’ai loué et que je suis excité au plus haut point à l’idée d’entreprendre cette expérience hors du commun.
Bien sur, je mentirais si une partie de moi n’était pas mort de peur. Après tout, ce défi serait déjà colossal si il était à proximité de chez moi et je suis présentement à l’autre bout du monde.
Je ne suis pas à l’abri d’un imprévu… mais comme je le dis souvent, si je voulais ne courir aucun risque, je serais resté bien assis dans mon ancien salon à écouter des films… et même là, j’aurais pu me faire frapper en traversant la rue pour aller chercher des chips au dépanneur… mmm des chips, ça fait longtemps…
De plus, il n’est pas question ici de jouer au Super Héro en voulant à tout prix terminer le parcours dans un temps record. Mon objectif principal est tout autre; profiter le plus possible du paysage.
Bon, trêve de bavardage, c’est dorénavant marqué « pose ton cul sur ta selle de vélo et pédale ».
…
Jour 1 – AUCUN RÉPIT
Info;
– Manali (2050m)
– Palchan (2300m) – N, E, G
– Kothi (2530m) – N, E
– Galuba – N, E
– Mahdi (3320m) – N, E, G
Nombre de kilomètres; 39km
Description;
25 juillet 2013 – 6h du matin
Le réveil sonne sans me réveiller. Depuis déjà 1h, je suis immobile dans mon lit à fixer la fenêtre avec les yeux bien ronds.
Cet alarme, jumelé à des rayons de soleil qui se faufilent entre les rideaux ne peu signifier qu’une chose; c’est le temps de se mettre en route. Plus question de me dire « dans 2 jours je commence mon trip à vélo »… c’est MAINTENANT.
Même si une partie de moi souhaitait ardemment qu’il pleuve à siaux pour retarder l’inévitable, je profite un dernier instant de mon lit, je saute dans la douche et j’enfile le chandail et les shorts que je porterais pour au moins les 5 prochaines semaines… soit lorsque je reviendrais à Manali.
7h30 – J’ai dû me botter le cul à plusieurs reprise, mais j’ai finalement prit mon envol et Manali est déjà quelques kilomètres derrières… euh… quelques mètres je veux dire.
La route longe une rivière et je passe une multitude de villages sans intérêt.
Après avoir résolu le mystère des synthétiseurs au Sri Lanka, je suis maintenant en mesure de vous éclairer sur « où se trouve tous les paires de ski parabolique et les affreux suits des années 80 et 90 ».
La réponse; ils se trouvent dans des boutiques (cabanes en bois) sur le bord de la route juste après Manali en Inde. Le plus drôle c’est que toutes ces boutiques sont présentement ouvertes même si on est en plein été et que personne ne fait de ski.
Il est maintenant 9h30 du matin et jusqu’à maintenant, la route ne m’a laissé aucun répit. Je ne me rappelle pas avoir descendu une cote et les plats sont très rares. Je passe au travers des villages comme on monte les montagnes, soit avec une interminable série de zig zag. En fait, quand je vois une pente de moins de 10 degré devant moi, un sourire s’affiche sur mon visage. Disons que j’aurais pu trouver plus facile comme première ride de vélo en plus de 9 mois.
Alors que je roulais tranquillement dans une très belle forêt de conifères depuis une bonne heure, à faire mes zig zag comme un grand, la forêt s’est éclairci devant moi pour faire place à une immense montagne.
En regardant la montagne, je me suis demandé « est-ce que… OH MON DIEU »…
En plissant les yeux je venais d’apercevoir des voitures sur une route en flanc de la montagne. On aurait dit des voitures/camions miniatures tellement ils étaient petits par rapport à la montagne.
Aucun doute, c’était bel et bien la RohtangLa Pass et je n’y échapperais pas.
Un troupeau de vaches que j’ai croisé avait l’air complètement ébahi de me voir là… « mais kes tu fais icitte sur un vélo » aurait très bien pu me lancer l’une d’elle avec le regard qu’elles me faisaient.
Une fois sur la montagne à proprement dire, puisque depuis le début ce n’était que l’approche, la route était quelque chose; environ 1.5 voitures de large, aucun garde-fou et une mort assurée si tu donnes un coup de volant de trop. Malgré tout, à aucun moment sauf une fois je me suis senti en danger; un esti de touriste sur sa moto louée a pris un virage beaucoup trop serré, ne laissant pas beaucoup de place entre lui et le précipice… et j’étais exactement à cet endroit.
Je m’arrête donc à Mahdi pour la nuit, un regroupement d’une vingtaine de cabane que je n’ose pas appeler bâtiment (1 tente restaurant, une Gompa (monument religieux)… et une très belle guesthouse sorti de nulle part), quelques 17km avant la fin de la montée. J’ai encore beaucoup d’énergie, mais il est déjà 1h, je n’ai pas encore diner et la prochain arrêt ayant des hébergements est à plus de 30km. Bref, ya pas le feu et c’est quand tu essais de trop en faire en étant un peu fatigué que les erreurs arrivent… et ici, les erreurs ne pardonnent pas.
En allant booker ma chambre dans la guesthouse, j’ai eu droit à l’une des discussions les plus loufoques qu’il m’ait été donné d’avoir avec un manager d’établissement;
Moi – « do you have a free room? (avez-vous une chambre de disponible?) »
Manager – « yes (oui) »
(négociation du prix)
Moi – « I’ll take it (je la prend) »
Manager – « ok but if someone book the room, you’ll have to go (parfait, mais si quelqu’un réserve la chambre, il faudra que tu t’en aille) »
Moi – « what?!? But I just booked the room… (quoi?!? Mais je viens tout juste de la réserver…) »
Manager – « no, you just show up and the room was free, but if someone book it you’ll have to go (non, tu t’es présenté ici et la chambre était disponible, mais si quelqu’un la réserve, il faudra que tu partes) »
Moi – ?!? (j’ai eu beau essayer de comprendre sa logique, c’était peine perdu…)
Seul point d’intérêt de Mahdi, l’endroit surplombe la vallée que j’ai montée aujourd’hui. On voit l’ensemble du chemin zigzaguer dans la montagne. Juste derrière, on peut y apercevoir la montagne que j’aurais à monter demain… moins cool.
En allant prendre mon souper au seul resto du trou… euh… village, j’ai aperçu 2 vélos. Quelle ne fut pas ma surprise de rencontrer un couple de belges qui avaient entrepris ce matin de Manali le même périple que moi (je vais seulement les recroiser une fois à Leh puisque leur rythme était très lent).
Au final, j’avais BEAUCOUP de craintes ce matin avant de partir, mais ils se sont complètement dissipés. Malgré la souffrance constante, j’ai eu le sourire fendu jusqu’aux oreilles toute la journée. Les jambes ont très bien répondus, le cardio est à son poste et j’ai le cul en feu… mes fesses devront finir par se résigner à devoir être écrasées sur une selle toute la journée…
Mon rythme a été complètement ridicule; 5h pour faire 40km, mais à ma décharge, je me suis arrêté très souvent pour prendre des photos, j’ai un vélo de montagne et non de route… et j’ai monté environ 1300m. Satisfaction personnelle, à aucun moment je ne suis descendu de mon vélo pour marcher à coté… j’ai pédalé chaque maudit mètre.
Tout au long de la journée, je n’ai pas cessé d’être encouragé par les indiens qui me croisaient en voiture. Alors que la majorité se contentait de me lever le pouce dans les airs hors de la voiture, environ 5-6 voitures se sont arrêtées sur le bord du chemin pour piquer une jasette… et prendre des photos avec moi. Les 3 mêmes questions revenaient toujours;
– « where are you going? (où est-ce que tu vas?) »
Réponse; Leh
– « why are you doing this? (pourquoi tu fais ça?) »… de me demander les indiens ébahis
Réponse; j’alternais entre « because… (parce que…) » ou « why not (pourquoi pas) »
– « why are you staying in Mahdi instead of going over the pass. It’s only 17km? (pourquoi tu restes à Mahdi au lieu de passer Rohtang aujourd’hui. C’est seulement une dizaine de kilomètres?) »
Réponse; aux quelques indiens qui m’ont posé la question, je suis resté muet… parce que si j’avais répondu, ça aurait ressemblé à cela « eille chose… j’ai tu l’air de superman?!? 10km en ascension c’est rien pour un gars obèse à moto… mais en vélo c’est autre chose. Je ne connais que 2 personnes qui, une fois accoutumés à l’altitude, aurait pu faire mieux que moi et ton prénom n’est ni Guillaume, ni Geoffroy ». Ahhhh… juste de vous l’écrire, ça fait du bien…
Enfin, puisque je vais passer beaucoup de temps en tête à tête avec lui, j’ai décidé de baptiser mon vélo. Après y avoir pensé toute la journée (je n’avais que ça à faire), j’ai finalement choisi « Lone », comme dans « alone (seul) ». Que nous le voulions ou pas, Lone et moi allons très bien nous connaitre dans quelques jours. Avec lui, je roule vers le Nord, les lever de soleil sont à gauche et les coucher à droite… si ce n’est pas le cas à un certain moment, il faudra que je me pose de sérieuses questions…
C’est donc un rendez-vous demain à l’aube pour finir l’ascension de ce 1er monstre…
…
Jour 2 – … DE BOUE ET DE POUSSIÈRE
Info;
– Mahdi (3320) – N, E, G
– Rohtang La (3955m) – N, E
– Gramphoo (3340m) – N, E, T
– Koksar (3140) – N, E, G
– Sissu (3120) – N, E, T
– Gondra (3160) – N, E
– Tandi (3100m) – N, E
– Keylong (3350m) – N, E, G
Nombre de kilomètres; 82km
Total; 121km
Description;
Le réveil s’est effectué dans le brouillard le plus total à 5h45. Visibilité ou pas, il ne pleuvait pas, le clairon de cavalerie pour effectuer la charge s’est donc fait entendre (Go Go Go). Je me suis empressé d’aller prendre un petit déjeuner au resto du village (qui ouvrait à 6h) et j’ai ensuite pris la poudre d’escampette.
Au menu d’aujourd’hui, une randonné de 82km… oui oui, le double de la distance d’hier. La journée va se séparer en 2 phases; une 1ère partie très pénible qui consiste à finir la montée jusqu’au sommet (17km – 600m), suivit d’une promenade dans le parc, soit la descente de plus de 850m sur 58km, avec une petite difficulté sur les 7 derniers km avant d’atteindre Keylong, ma destination d’aujourd’hui.
Dès les premières minutes, j’avais la selle bien enfoncée dans le cul. C’est surement une manière pour mes fesses de manifester leur mécontentement. En fait, c’est le seul aspect de mon physique qui ne veut pas coopérer à l’aventure. Mon cardio et mes jambes ont vite compris qu’ils seraient plus forts que jamais après l’aventure… j’ai hâte que mes fesses comprennent qu’elles seront plus fermes héhé…
Très tôt ce matin, le brouillard prenait toute la place, tellement qu’à certains moments je ne voyais pas à plus de 10m devant moi sur la route. Heureusement que tous les voitures, véhicules lourds et moto klaxonnent avant les virages…
Puis, le brouillard a commencé à jouer avec moi, me montrant des sections de paysage par-ci par-là, pour finir par s’estomper complètement… laissant toute la place à un soleil de plomb… pas vraiment mieux.
Avec environ 8km à monter, l’asphalte était devenu une rareté; beaucoup de sections étaient complètement défoncées et à certains endroits on peinait à voir qu’il y en avait déjà eu. Je dois donc sortir mes talents de cycliste off road (je n’en ai aucun). Ajoutez que la pluie de cette nuit à transformée quelques sections en rivière/chute/torrent. Je dois donc faire quelques portages. Quand on se compare, on se console, alors que je transportais mon vélo sur les épaules pour passer une très longue section inondée, une petite voiture est passée et tous les occupants prenaient des photos de moi un peu surpris de ma voir là. Puis, rendu 100m devant moi et toujours dans la boue, le radiateur de la voiture a décidé de rendre l’âme. Une minute plus tard, c’était maintenant à mon tour de passer à coté d’eux l’air amusé en prenant des photos.
Puis, après quelques heures de dur labeur, j’arrivais finalement au sommet. La RohtangLa Pass…
Que signifie Rohtang La? D’une part, comme au Népal, « La » signifie « Passe », dans le sens de chemin pour enjamber la montagne. D’une autre, « Rohtang » signifie en tibétain « tas de cadavres »…
Eh oui, par le passé, beaucoup de gens sont morts au sommet en raison d’une météo imprévisible et en changement constant. Il n’est pas rare de voir une tempête de neige et/ou un blizzard en plein milieu de l’été.
Ahhh… et pour ceux qui se dirait « oh mon Dieu, il monte une montagne de 3900m en vélo », eh bien sachez que la Rohtang La est en quelque sorte le cadet d’une famille de 4 La (passe) que j’aurais à franchir, Baralacha La étant à 4900m, Lachulung La à 5050m et le grand frère Taglung La pointe à 5360m. Bref… je n’ai encore rien vu héhé
Sinon, je n’ai aucunement ressenti les effets de l’altitude durant l’ascension; le cardio ne s’est jamais emballé et je n’ai jamais eu le souffle court. Pourtant, à pareille altitude au Népal, je n’avais pas feelé une journée complète, je devais prendre une grande respiration avant de boire et j’avais un mal de tête permanent. Une femme m’a expliqué hier que l’acclimatation à l’altitude peut durer jusqu’à 3 mois après notre départ de la zone en haute altitude. Puisque j’ai fini mon trek au Népal il y a 1 mois, je suis encore ok.
Une fois quitté Rohtang, le trafic est devenu inexistant. Il faut savoir qu’aller au sommet de la RohtangLa Pass est une attraction touristique très courue par les indiens (fouillez-moi pourquoi), mais ils n’en ont rien à f@utr£ d’aller plus loin… à mon plus grand plaisir.
Je peux donc me concentrer entièrement à apprécier la descente et à dévaler une route en parfaite condition entouré de montagnes aux sommets enneigés. J’ai alors fait un acte de foie envers Lone. Puisque je ne le connais pas encore, il aurait été risqué de dévaler le chemin à pleine vitesse… mais je l’ai fait quand même. Pendant plus d’une heure, je me suis laissé guidé par la route qui zigzaguait dans la montagne; un coup de frein par-ci, un coup de volant par là. En fait, le plus dur était de garder les yeux sur la route… avec le panorama qui m’entourait c’était tout sauf facile. Pour ajouter au moment, c’était le silence radio le plus total; aucun autre son que le bruit des roues de mon vélo, le vent et quelques chutes… pas moi… l’eau.
Le sentiment de liberté que j’ai ressenti durant cette descente est tout simplement indescriptible… Je partais à rire à tout moment en pensant au truc de fou que j’étais en train de faire au milieu de nul part en Inde. Bref, vraiment pénible héhé… j’avais l’adrénaline dans le tapis et c’était vraiment grisant… et il me reste 3 descentes pires (mieux) que celle-là jusqu’à Leh.
La vallée dans laquelle je viens d’aboutir est située entre RohtangLa et BaralachaLa (mon prochain grand défi dans 2 jours).
Une fois descendu la montagne et arrivé à Gramphu, je ne sais pas ce qu’il y avait là, mais d’un coup je me suis retrouvé prisonnier d’un énorme embouteillage. Pour les 6-7km séparant Gramphu de Koksar, je roulais à la file indienne derrière une jeep et devant un camion citerne… le feeling était pas super… Ahhh, vous m’excuserez de me pas avoir pris de photos puisque j’étais beaucoup trop occupé à lutter pour ma survie. Ajoutez à cela qu’on aurait dit un cross-country tellement la route était devenue cahoteuse. Heureusement, c’était en descendant, je n’avais donc pas à pédaler, simplement tourner le guidon, freiner et tourner la tête pour m’assurer que le camion derrière moi fessait de même.
À un certain moment, la route était complètement bloquée en raison de travaux. Devant nous se dressait une mer de boue avec quelques pelles mécaniques, etc. Nul doute, la circulation allait être bloquée pour un très long moment. Ni une ni 2, j’ai zigzagué entre tous les véhicules devant moi et j’ai commencé à passer au travers des travaux en portant mon vélo. En plus de caller de 1 pied et + à certains endroits, j’avais la chienne des pelles mécaniques, etc. Pas besoin de dire que j’étais petit dans mes shorts. N’empêche, j’ai passé au travers du kilomètre sans encombre et j’ai ensuite pu avoir le chemin complètement à moi jusqu’à Koksar.
11h00 – Koksar – Léger pit stop pour reprendre les forces éparpillées dans la montagne. Encore 45km à faire avant Keylong… la journée était loin d’être terminée. Il me restait encore un bon 6h de clarté, donc tout était sous contrôle.
Après Koksar, la route suivait une magnifique rivière d’un bleu glacial dans le fond d’une magnifique vallée. La route consistait en de très courte montée et de très longues descentes sur des faux plats… parfait pour quelqu’un d’un peu fatigué, ne voulant pas trop forcer et ne voulant pas faire le fou sur des pentes hyper abrupte. Comme si ce n’était pas assez, la route était en parfait état et j’avais le vent dans le dos… que demander de plus?!?
J’ai passé au travers d’un charmant petit village du nom de Sissu, avec une superbe forêt de feuillus, qui font une sorte de haie d’honneur de part et d’autre du chemin. De l’autre coté de la rivière, une chute très haute et à fort débit fait retentir son rugissement jusqu’à très loin dans la vallée.
Tout au long du chemin, un changement s’opérait tranquillement, mais surement au niveau de la végétation; plus j’avance et plus ça commence à ressembler à un désert. Paradoxalement, quand je regarde les montagnes autour, il y a de plus en plus de glaciers en hauteur.
Bien que majoritairement en descente, les derniers 20km ont été les plus durs de la journée; je n’avais plus beaucoup d’énergie, j’avais de la misère à me concentrer et à garder les yeux sur la route et 1km sur 2 était en chantier. Les risques de tomber d’une falaise étaient nul, mais ceux que je fasse un faux mouvement et que je freine avec le frein avant (très sensible)… et donc passer par dessus le guidon, était très grand…
Puis, Keylong s’est finalement pointée à l’horizon. La ville me semblait très proche, mais on m’indiquait 6km sur le bord de la route. J’ai fini par comprendre pourquoi…
La ville était effectivement très proche, mais juste avant d’y arriver, il y a une rivière et il faut faire un très grand détour pour aller chercher le pont… j’aimerais avoir devant moi le sans génie qui a pensé que ce serait une excellente idée de faire faire un immense détour à la route. À la vue de cette vision d’horreur, mon moral, qui était excellent jusque là, est tombé en miette et a emporté avec lui toute l’énergie qu’il me restait. En bon français, j’ai frappé un mur… mes jambes ne voulaient plus avancer et j’étais plié en 2 tellement j’étais exténué. Je n’ai eu d’autre choix que de descendre du vélo pour marcher les derniers kilomètres… au grand dam de mon égo.
16h pile – Après 9h de vélo, j’arrive enfin à destination. J’ai rapidement trouvé une guesthouse vraiment pas cher et je fais le mort sur mon lit pendant une bonne demi-heure, incapable de faire quoique ce soit d’autre. J’étais VIDÉ, autant physiquement que psychologiquement, comme rarement je l’ai été dans ma vie. Ajoutez à cela que moi et Lone sommes recouverts de boue de la tête au pied.
82km sur un vélo… de montagne; Check.
Keylong est la plus grosse ville… et probablement la dernière… que je vais rencontrer jusqu’à Leh. Elle joue le rôle de capitale de la région de Lahaul et a la particularité d’être laissé complètement à soi-même (donc isolé) en hiver. En effet, les accumulations de neige sont si importantes que les 2 cotés de la vallée dans laquelle elle se trouve sont complètement bloqués. Pour vous donner une idée, on est présentement au milieu de l’été et on se croirait au mois d’octobre au Québec et tous les sommets environnants sont recouverts de neige…
Il n’y a qu’une seule et unique chose à dire à propos de cette journée; autant dans la montée, dans les mers de boue, que dans la descente, je me suis amusé comme un petit fou… bien que j’avais très hâte d’arriver à la fin.
J’en ai parlé un peu hier, mais je voudrais saluer encore une fois la gentillesse des gens ici. C’est complètement fou le nombre d’encouragement que j’ai pu avoir durant cette journée des plus éreintante…
Aussi, je n’oserais jamais appeler les indiens d’ici Indien. La majorité d’entre eux aiment mieux se faire appeler tibétain et c’est tout à leur honneur. En fait, ils sont complètement différent des indiens. Tous comme les népalais, la plupart du temps ils n’osent pas déranger et quand ils le font, c’est généralement simplement pour me dire bonjour et me serrer la main. Il y a un respect mutuel entre eux et moi… ce qui n’existera jamais avec les vrais indiens.
J’aimerais aussi remercier Lone. Hier c’était tout en monté, alors il n’y avait pas trop de danger, mais aujourd’hui, j’ai joué au casse-cou avec un vélo que je ne connais pas, comme si ca faisait des années que je l’avais. Il a très bien répondu à toutes les fois… si il avait mal répondu ne serait-ce qu’une seule fois je serais à l’hôpital ou pire présentement.
Bon… je dois aller nettoyer mon vélo… on se rejase demain.
P.S. – Le mot manquant au début du titre de la journée est « COUVERT… ».
P.S. II – J’aimerais tellement avoir une Go-Pro présentement. Je vais devoir refaire cette route un jour pour remédier à la situation. Des intéressés?!?
…
Jour 3 – 2 BLOCS DE BÉTON
Info;
Keylong (3350m) – N, E, G
Gemur – N, E, G
Jispa (3200m) – N, E, G
Darchu (3400m) – N, E, T
Patseo (3840) – N, E, T
Nombre de kilomètres; 45km
Total; 166km
Description;
5h30 – J’ai les yeux bien ronds même si mon cadran ne sonne que 15min plus tard. J’aurais bien aimé partir avec le lever du soleil, donc vers 5h, mais les restaurants n’ouvrent qu’à 6h et ce serait du suicide de ne pas manger…
Pour aujourd’hui, j’ai en tête une journée plutôt facile afin de donner un break à mon corps meurtri par les derniers jours. Le plan est donc de me rendre jusqu’à Patseo, quelques 45km plus loin et à mi-hauteur de la BaralachLa Passe… que je garde pour demain. Si mes jambes et mon vélo me le permettent, je pourrais tenter de rejoindre ZingZingBar à 4170m et donc au 2/3 de la Passe, mais ce serait ajouter 20km à ma journée et on m’a parlé en bien de Patseo… On verra bien.
En cherchant un restaurant ouvert à 6h du matin, je suis tombé sur Jarrod – Australien, 43ans, père de famille, Cyclinginthinair.com – qui se sauve une fois par année pour faire un trip de vélo autour du monde. Nous avons donc décidé de faire équipe.
Je me suis cependant vite rendu compte que nous n’étions pas du même calibre. Peinant à rester dans sa roue, c’est moi qui donnait l’impression d’être le plus vieux sur la route. À ma décharge, il revenait d’une journée de repos à Keylong et avait son propre vélo… 2 avantages non négligeables.
La route était tout simplement superbe ce matin, principalement en descente, zigzaguant le long d’une falaise très escarpée et suivant la rivière.
En chemin, nous avons rencontré une suisse qui faisait la route Leh-Manali (donc le chemin inverse) toute seule. Pour ceux qui pense que je suis hardcore à faire ce trip tout seul, en plus de voyager seule en Inde, elle fait ce trip de débile dans le sens le plus difficile.
On passe au travers de très beaux petits villages (Gemur et Jispa) au fond de la vallée. Puis, arrive le très laid village de Darcha, avec sa dizaine de cabanes restaurants construites à la va vite et disposées de part et d’autre d’une rivière. Je n’y aurais pas passé une seule seconde si je n’avais pas eu à m’enregistrer au bureau de contrôle. Seule chose notoire, c’est le dernier village avant 250km. Tous les autres endroits où j’irais à partir de maintenant et jusqu’à Rumtse ne sont que des campements temporaires installées durant l’été. Darcha est aussi le début/fin du Zanskar trek. C’est donc ici que j’aboutirais dans environ 1 mois.
À partir de là, il fallait se mettre au travail et monter péniblement la montagne. La route se résumait alors à de la terre ou en de rare cas de d’asphalte.
Ne pouvant suivre le rythme de Jarrod, je l’ai prié de continuer sa route puisque je ne voulais pas être un boulet. De toute façon, nos styles étaient incompatibles; lui voit ce parcours comme un sprint, voulant se rendre le plus rapidement possible à Leh, tandis que moi j’ai rangé mon esprit de compétiteur et je vois le parcours comme un marathon, afin d’admirer le plus possible le paysage.
Après environ 1h d’ascension, la route a bifurquée dans une nouvelle vallée et a changée du tout au tout. Fini le cross-country, c’était dorénavant une route principalement en descente et récemment asphaltée.
Juste avant d’arriver à Patsio, j’ai croisé 2 indiens d’au moins 60-70ans qui faisaient aussi la route Manali/Leh à vélo, tout en étant accompagné par toute une équipe dans une jeep. Pour l’un d’eux c’était la 3ème fois.
11:20 – Avec 45km dans le corps, j’arrivais à Patseo, rien de plus qu’un trou au milieu de nul part dans une vallée semi pas mal beaucoup désertique. Le paysage est très accidenté et la végétation, quand il y en a, ne dépasse pas les 10cm. Il n’y a absolument rien ici mis à part une tente restaurant et 3-4 tentes pour dormir près d’un beau petit lac, 2-3 cabanes par-ci, par-là et une sorte de petite ferme.
J’avais donc un très gros dilemme. D’un coté, j’éprouvais beaucoup de problème avec mon vélo depuis le début de la matinée (la chaine débarquait souvent). Ajoutez à cela qu’on aurait dit que mes jambes étaient faites de béton (j’aurais peut-être dû prendre une journée de repos à Keylong) et que mon cul ne pouvait tout simplement pas supporter ma selle une seconde de plus.
En revanche, il n’était pas encore midi quand j’ai fini de luncher et le prochain stop était à environ 15km.
J’avais donc l’option de prendre une demi-journée de congé dans un bel endroit ou continuer tranquillement jusqu’à ZingZingBar un peu plus haut et espérer que ce soit aussi beau.
Après de vive négociation avec le propriétaire, nous en sommes venus à un accord. Il a commencé à 1000rs sans rien d’autre, il m’a ensuite proposé 500rs + déjeuner inclus quand il voyait que je remettais mon sac à dos… pour finalement lancer 250rs diner et déjeuner inclus lorsque j’enfourchais mon vélo. À ce moment, je suis descendu de mon vélo et je me suis dirigé vers la tente qui allait être ma maison pour la nuit.
J’écoute donc ma raison afin de permettre à mon corps de souffler un peu. Après tout, il le mérite bien; j’ai fait jusqu’à maintenant 160km en 3 jours… en vélo de montagne… après avoir enfourché un vélo pour la dernière fois il y a plus de 9 mois. J’ai tout mon temps et la santé est l’une des seules choses, avec l’argent, qui peut écourter mon voyage.
Au final, je suis tout fin seul au milieu de nul part avec la famille qui s’occupe de l’endroit (mari/femme et très jeune enfant). Ce soir sera ma nuit la plus rustique en Asie; aucun électricité, pas la moindre cabane ressemblant à une toilette et une tente offrant zéro confort.
Je troc donc mon vélo et mes bottes de montagne pour enfiler mes flip flop et faire un peu de babouche-trek dans les montagnes environnantes.
L’endroit est formidable et si je ne me retenais pas, je prendrais des photos à toutes les 10 secondes… ahhh, on me souffle à l’oreille que c’est ce que je fais depuis maintenant 3 jours. C’est déchirant puisque je ne sais pas quand j’aurais de l’électricité à nouveau et il me faut rationner les batteries si je veux pouvoir écrire et surtout prendre une tonne de photos. Je suis d’ailleurs présentement à écrire le récit de cette journée assis sur une grosse roche au beau milieu de nul part. Le soleil est tellement chaud que je préfère mettre mon chandail à manche longue et ma capuche… À ce sujet, il y a 3 jours j’avais un bronzage parfait, mais c’est de l’histoire ancienne. Même si j’étais déjà hyper bronzé, mes bras sont maintenant rendus rouges et j’ai l’air d’un habitant.
J’en ai aussi profité pour laver mon linge couvert de boue dans le lac. Mon intention première était d’y faire une saucette, mais j’ai changé d’idée après 10min à laver mon linge. J’avais les pieds et les mains complètement engourdis. Le manager m’a ensuite expliqué qu’il avait essayé d’ensemencer le lac il y a quelques années, mais que les poissons étaient tous morts… je sais ben pas pourquoi…
Bon, je déconnecte pour aujourd’hui. Je viens d’avoir l’idée d’aller m’assoir en bordure du lac sur une chaise de camping avec les pieds dans l’eau. Pas très stable, ni très chic, mais un très bon moyen de contrer la chaleur extrême puisque ce n’est pas dans ma tente, qui s’apparente à une serre présentement, que je vais trouver le confort. En effet, entre 12h et 4h, quand le soleil est à son maximum, tu ne veux tout simplement pas être dehors. J’ai fait l’expérience 2 fois jusqu’à maintenant et malgré de la crème solaire, tu cuis littéralement sur place. Paradoxalement, dès que le soleil disparait derrière les montagnes, il commence à faire un froid de canard. Le vent que tu aimais tant quelques heures plus tôt devient ton pire ennemi. J’anticipe donc une nuit glaciale.
…
Jour 4 – OFF-ROAD
Info;
Patseo (3840m) – N, E, T
ZingZingBar (4050m) – N, E, T
Baralacha La (4895m)
Baratpur – N, E, T
Sarchu (4300m) – N, E, T
Nombre de kilomètres; 60km
Total; 226km
Description;
4h45 – J’aperçois les 1ères lueurs du soleil et mes yeux deviennent bien ronds. Il n’est pas question de rester une seconde de plus dans ce qui me sert de lit.
5h00 – Mon matériel est déjà tout remballé et je suis fin près à entamer ma journée. Seul hic, le cuisinier n’est pas réveillé. Je m’étais pourtant entendu avec lui pour prendre mon déjeuner à 5h.
5:20 – Assez c’est assez… je laisse la somme que je dois sur mon lit et je prends la poudre d’escampette. Sans avoir déjeuner et sans eau, mon but est de rejoindre ZingZingBar pour y prendre mon petit déjeuner. Ce n’est pas une décision hyper logique, mais bon, je ne suis pas réputé pour mes décisions pleines de sens, au contraire, j’agis par instinct… et là mon instinct me dit d’engranger le plus de kilomètres possibles avant que le soleil se pointe et brule tout sur son passage.
Tout juste après avoir quitté mon campement, la route passait au travers d’une base militaire. Les militaires se sont alors fait un plaisir de me saluer tout sourire et certains couraient même à coté de moi. La situation était surréaliste héhé.
Durant cette 1ère heure, je n’ai rien croisé sur la route (jeep, camion, vélo). Peu importe dans quelle direction je regardais, c’était la nature à l’état sauvage et mis à part la route, il n’y a aucune trace de civilisation. J’étais alors seul au monde entouré de ces montagnes gigantesques, tout petit sur mon vélo au fond de la vallée sans le moindre bruit. La sensation est extraordinaire.
6h25 – J’avais finalement un bon petit déjeuner devant moi dans un Dhaba (sorte de restaurant TRÈS BASIC) à l’entrée de ZingZingBar.
De ZingZing (j’adore dire ce nom) j’entame officiellement les hostilités avec la BaralachaLa Pass, la 3ème plus haute passe du trajet à 4894m. Ensuite ce sera une descente infernale, suivit d’un plat pour rejoindre Sarchu, mon pit stop pour la nuit.
7h00 – Il est temps de repartir. Le soleil commence alors à franchir la cime des montagnes, éblouissant tout sur son passage.
Quelques 6km plus loin, après avoir passé une tente de mécanique automobile (?!?) perdue au milieu de nul part, je suis tombé sur un regroupement de 5-6 tentes restaurants offrants de l’hébergement; la branche « touristique » de ZingZingBar. L’endroit n’a pas du tout le charme de Patsio, mais pour ceux désirant prendre un peu d’avance pour le jour suivant, c’est une bonne alternative.
10h00 – Après une ascension difficile, mais constante, la BaralachaLa est vainc… attendez une minute, on me murmure que l’endroit où je suis présentement n’est pas le sommet. C’est donc dire que la montagne que je me figurais être le sommet depuis bientôt 3 heures, celle dont je me disais constamment « je vais t’avoir ma maudite », n’est rien d’autre qu’une étape avant le sommet. J’étais alors complètement démoralisé… et je n’avais plus d’eau.
10:45 – Après avoir passé un très beau lac (eau malheureusement stagnante… pas question d’en boire), une ferme abandonnée et monté une autre centaine de mètres, je pouvais finalement dire mission accompli. Un monument avec des drapeaux de prière se trouvait sur le bord de la route et celle-ci commençait â descendre tout de suite après… je crois bien que c’est le sommet héhé.
D’en haut, je pouvais déjà apercevoir un campement fait de tentes bleus tout en bas de l’autre côté. C’était assurément Baratpur… mon oasis. J’allais pouvoir m’y gaver et boire autant d’eau que je le voulais.
Ma journée de travail était donc terminée. Il ne me restait plus qu’à apprécier le fruit de mes efforts avec une descente de plus de 30km, entrecoupée de quelques coups de pédale par ci, par là. Je rangeais donc ma force physique, au profit de ma dextérité et d’une concentration accru (en montant tu n’as pas à penser, tu as simplement à pousser, en descendant c’est tout le contraire sur ces routes). Faite de sable ou d’asphalte encore une fois complètement défoncée et avec le soleil qui plombait (j’avais de la difficulté à percevoir les trous)… ajoutez à cela 2 chutes à traverser. Dans l’une d’elle, j’avais mal jugé la profondeur et je me suis ramassé avec de l’eau jusqu’aux genoux… avec mon vélo sur mes épaules.
11:15 – « Downtown » Baratpur. L’endroit est pour le moins spécial. Il y a 8 tentes restaurants/hôtel. Chaque endroit offre la même maudite affaire et au même prix… pas moyen de négocier. Pour ce qui est des tentes, chacune est une grosse pièce pleine de lits alignés de part et d’autre d’un corridor central… durant le jour l’espace sert de restaurant. Avec les toiles bleus servant de toit, l’effet est des plus particulier à l’intérieur… on se croirait dans un Rave.
Midi tapant, après avoir fait le plein d’énergie, c’est sous un soleil d’enfer et habillé d’un chandail à manche longue et de mitaine (j’aime mieux crever de chaleur que d’empirer mes coups de soleil… de toute façon il y a un bon vent) que je continu ma descente jusqu’à Sarchu.
Le chemin entre Baratpur et Sarchu était tout simplement INCROYABLE. Tout juste après le campement, la route s’engage dans une très belle gorge en faux plat descendant tout le long. Complètement désertique, avec des roches aux teintes orangés multiples, il n’était pas question ici d’avoir une seconde d’inattention. Sur cette route à peine large comme une voiture, en bordure d’une falaise et où l’asphalte était un concept très obscur, un faux mouvement pouvait mener directement dans la rivière quelques dizaines de mètres plus bas. J’ai donc encore une fois du sortir mes talent de cross-country.
2:00 – Fin du parcours pour aujourd’hui. Bien que j’ai encore beaucoup d’énergie, que mon vélo est top shape et que mes jambes sont au rendez-vous, je suis arrivé à Sarchu, mon objectif de ce matin. J’aime donc mieux me « retirer » en pleine forme et reprendre où je l’ai laissé demain que de trop pousser et être une loque humaine demain. Après tout, ya pas le feu… et le prochain endroit « habitable » est à plus de 48km… après une autre passe.
Sarchu est en fait une plaine verdoyante d’environ 10 km de long par 1km de large entourée de montagnes aride et aux couleurs multiples. Je ne passerais pas par quatre chemins; c’est sublime. Tout au long des 10km de plaine se trouvent une multitude de campement.
Durant les 3 mois où la route Manali/Leh est ouverte, Sarchu sert de halte pour la majorité des jeeps et bus transportant des touristes de Manali à Leh et vice-verca. En effet, le trajet entre les 2 villes est d’une durée d’au moins 22h et rare sont les transports qui offrent de le faire d’une shot sans arrêt (je déconseille à quiconque de faire ce trajet sans arrêt puisque ce serait passer à côté de toute la beauté que peut offrir cette magnifique route)… et Sarchu, en plus d’être très beau, se trouve environ à mi-chemin.
C’est donc le relais le plus important entre les 2 villes. Sur une distance d’environ 10km, vous ne voyez qu’une succession de campements pour tous les gouts; allant du campement 5 étoiles, au campement dortoir (les plus luxueux se trouvent en début de plaine vers Manali et plus on avance vers l’autre côté et plus on descend de budget). Pour vous donner une idée, je crois que le campement le plus chic peut revenir à 40$ la nuit en occupation double (déjeuner et souper inclus), tandis que le plus cheap revient à 2$ (rien d’inclus).
Tout comme Patsio, ZingZingBar, Baratpur et les suivants, les campements sont installés pour 3 mois et ils sont ensuite démontés. C’est donc dire que si quelqu’un avait l’idée de faire la route dans un mois autre que de la mi-juin à la mi-septembre, en plus de se buter à 4 passes complètement bouchées par la neige, il devrait faire son trip en autonomie complète (tente, sleeping et nourriture).
Pour ma part, j’ai opté pour le 2ème campement en arrivant de Manali… héhé. J’ai une super belle tente (elle me fait penser au vieux film de safari en Afrique) avec salle de bain incluse et de l’électricité (une rareté très bienvenue pour recharger mon IPhone et ma caméra). J’aurais assurément pu trouver moins cher, mais bon, un peu de luxe pour seulement 10$ (diner et déjeuner inclus) après une journée comme aujourd’hui et la tente dans laquelle j’ai couché hier est le bienvenue pour mes vieux os. Il était beaucoup plus cher, mais j’ai réussi à négocier à la baisse avec mon air de chien battu.
Si il y a bien quelque chose dont je dois me préoccuper durant ce genre d’aventure c’est bien ma santé. J’ai beau vouloir monter une montagne demain, si mon corps dit non et que je m’obstine, ça ressemblera à mon jour 2 entre Mahdi et Keylong et je n’ai pas l’intention que ça se reproduise…
C’est donc l’heure de la sieste…
Pour ceux qui pourrait dire « yé ben paresseux lui », je vous rappelle que je me suis levé à 4h45 (il y a 9h), que j’ai fait 68km de vélo de montagne en haute altitude durant environ 8h et qu’il fait un soleil de plomb dehors (j’aurais pu compter les nuages que j’ai vu aujourd’hui tellement le ciel était d’un bleu clair).
Sur l’heure du souper, j’étais l’attraction dans le campement. J’étais le seul fou faisant le trajet en vélo avec 4 groupes tous droit sorti de minibus. Ils voulaient donc tous savoir qu’est-ce qui m’avait passé par la tête, comment c’était, etc. Cela m’a permit de sortir de mon isolement et de faire la connaissance d’un très sympathique couple d’indo-canadien et de 2 jeunes allemands en direction de Leh. Qui sait, peut-être que nos routes se croiseront à nouveau…
Le soir venu, le ciel était complètement exempt de nuage. En l’absence totale pollution lumineuse et à l’altitude où nous sommes présentement, je n’ai jamais vu un ciel aussi rempli d’étoile et avec autant de nuances de couleurs.
Sans tambour, ni trompette, à 4300m, c’est quand même le 2ème plus haut endroit où je vais dormir dans ma vie… jusqu’à maintenant.
P.S. – Aujourd’hui, un chien s’est mi dans la tête de me suivre à partir de Baratpur et ce jusqu’à Sarchu. À chaque fois que j’arrêtais pour prendre des photos, il me regardait tout piteux et chialait pour que je lui donne quelque chose. Pauvre cabot, tu es tombé sur le mauvais gars. J’ai peine à subsister avec mes réserves d’eau et de nourritures, pas question de partager… et même si j’avais de l’excédent, JAMAIS je ne t’en donnerais. Depuis que je suis en Inde, l’un de mes plus vieux rêves est de botter un chien de toutes mes forces pour passer toute la frustration des heures de sommeil perdues (qui se comptent surement en jour jusqu’à maintenant) en raison de toi et tes semblables qui jappez à tue-tête toute la nuit. D’un coté, c’est dur de demander aux indiens de dompter leurs chiens, quand eux-mêmes sont bien souvent des bâtards sans aucune manière. Détrompez-vous, je n’ai pas l’intention de le tabasser, il va simplement mourir de faim si il me suit. Au fait, j’adore les animaux, mais passez 5mois en Inde/Népal/Sri Lanka et vous aurez le même état d’esprit que moi.
…
Jour 5 – I’M A POOR LONESOME… BIKERBOY (chanson thème de Lucky Luke)
Info;
– Sarchu (4300m) – N, E, T
– Gata Loops (from 4360m to 4620m)
– Nakee La (4740m)
– Whiskey Nalla (+/-4600m) – N, E, T
Nombre de kilomètres; 56km
Total; 282km
Description;
Après une nuit glaciale ponctuée de courts instants de sommeil, gracieuseté du gros Koréen qui ronflait dans la tente juste à coté, suivit d’un déjeuner léger, j’ai dit au revoir à mes nouveaux amis et je me suis mis en route.
Aujourd’hui sera soit une journée très facile jusqu’à Whiskey Nullah (48km), soit une journée pénible jusqu’à Pang tout juste après la LachulungLa et qui pointe à plus de 5000m. Tout cela dépendra de l’heure à laquelle je vais arriver à Whiskey.
Tout juste après Sarchu, je traversais la rivière et fessais mon entrée officielle au Ladack (j’étais jusque là en Himashal Pradesh)… aucune différence héhé.
Les 2 premières heures de vélo ont été jouissifs; route quand même bien pavée tout en descente dans une plaine. Le paysage qui m’entourait était tout droit sorti d’un vieux Western Spaghetti des années 50-60. J’avais l’impression que John Waine et/ou Clint Eastwood allaient sortir de nul part sur leur cheval. Que demander de mieux pour commencer la journée?
8:10 – Première difficulté de la journée avec l’ascension des Gata Loops; série de 21 zigzag totalisant 10km et un peu plus de 300m d’ascension. Cela devrait se faire les 2 doigts dans le nez. En plus, le soleil n’a toujours pas franchit les montagnes. J’ai donc une fraicheur additionnelle non négligeable comme allié. Malgré tout, il fait déjà une chaleur d’enfer. J’en donc encore une fois revêtu mon costume de femme musulmane; rien ne dépasse excepté mes mollets et ma face (ce n’est pas un voile intégral). Aussi, le ciel est totalement exempt de nuage. C’est comme si Dieu avait décidé de ne rien mettre sur le canvas du ciel… mis à part la Lune, qui disparait peu à peu.
9h40 – Les Gata Loops sont choses du passé. Je me trouve désormais à 4667m d’altitude, mais l’ascension n’est pas tout à fait terminée… oh que non, c’est mal connaitre le Ladack de penser cela. Il me fallait encore monter pour atteindre la NakeeLa, petite passe secondaire.
11:20 – Complètement à bout de force, j’aperçois des drapeaux de prières au tournant d’un virage. Cela ne peut dire qu’une seule chose; je suis arrivé au sommet… j’ai finalement vaincu NakeeLa sur 1 genou. Même en pleine forme, cette Passe est de loin la plus difficile des 3 que j’ai faites jusqu’à maintenant. Ce n’est pas en raison de difficultés quelconques, mais plutôt parce que le dernier point de ravitaillement avant de s’y attaquer est à plus de 40km.
Disons que ça n’a pas été une partie de plaisir comme je l’avais envisagé; le cardio, la tête et les jambes sont là, mais ce matin en voulant aller me resservir une tasse de thé, je me suis solidement pété le genou droit sur le coin d’une table. Au départ, je ne ressentais rien, mais quand j’ai commencé à monter, et donc à forcer des jambes, une vive douleur est apparue.
L’ironie dans tout cela c’est que Nakeela n’est même pas considérée comme une Passe à part entière en raison du fait que tout de suite après, on descend de 200-300m sur 5-6km, pour tout de suite entamer la montée de la LachulungLa pointant à 5065m et bien visible du haut de Nakeela.
Au moment d’amorcer ma descente, je n’avais qu’une seule chose en tête; MANGER. Pour ceux comme moi qui seraient désespérément à la recherche de nourriture, il existe un campement TRÈS TRÈS de base nommé Whiskey Nullah entre les 2 passes. L’endroit comprend un total de 2 restaurants et 6 tentes… on peu même y coucher.
En fait, je crois que l’expression « au milieu de nul part » a été inventée pour décrire cet endroit. De la façon dont le camp est organisé, j’ai l’impression d’être avec des gitans.
J’étais bien assis à manger à Whiskey (ils ne vendent pas d’alcool) quand j’ai vu s’arrêter 8 cyclistes avec un guide… et un gros autobus Full Equip. En discutant avec l’un d’eux, il était complètement renversé que je fasse le trip en solo. De mon coté, j’étais aussi complètement renversé de l’entendre; ils n’ont pas à transporter de sac sur leurs épaules ou sur leur vélo et en cas de faiblesses, ils peuvent « skipper » une partie du trajet et se reposer dans le bus climatisé. On appelle ça le gros luxe…
Je les regardais monter la montagne que je venais de descendre (heureusement ils n’allaient pas dans le même sens que moi… c’est donc la dernière fois que je les vois) et malgré tous leurs beaux artifices, la plupart peinaient beaucoup dans une section que je qualifierais de facile. J’ai ensuite regardé le bus quitter avec à son bord 4 des cyclistes… P A T H É T I Q U E. Quand je pense que ces cyclistes vont se « vanter » d’avoir fait la route Manali/Leh à vélo, ça me donne le goût de vomir à penser à tout le jus de genou que j’investi dans l’aventure. Bref, c’est dommage, mais l’argent peut acheter n’importe quoi… et dénaturer les exploits.
Moi dans tout cela, durant tout mon lunch, je jonglais avec l’idée de passer la nuit à Whiskey ou faire l’ascension de la Lachulung La. D’une part, bien que l’ascension ne semble pas si difficile, une affaire de 2-3h, je ne sais pas qu’est-ce qui m’attends de l’autre côté. De plus, mon genou me fait souffrir même au repos et j’aime bien l’idée de dormir ici. Ce serait ASSURÉMENT mon nouveau record d’endroit perdu pour coucher (Patsio a l’air d’une ville à côté d’ici).
Après quelques minutes de délibération, j’ai décidé… de passer la nuit dans ce trou. Je suis curieux de voir cet endroit à la tombé de la nuit… et d’être entouré de 4 indiens/tibétains avec qui je suis incapable de communiquer sauf par signes. C’est le genre d’expérience que je n’ai pas encore tentée et ça me stimule au plus haut point.
La « chambre » qu’on a mi à ma disposition est donc une tente tipi dans laquelle on a disposé un matelas de sol… et il n’y a pas de porte d’incluse dans le deal. Pour ce qui est de mes 2 oreillers, je suis convaincu que ce sont des sacs de riz.
Sinon, pas besoin de me poser la question à savoir s’il y a des bibites de lit, j’ai déjà ma réponse… L’endroit, quoique très crasseux, me fait de l’effet et de toute façon, je suis probablement plus sale que tout ce qui se trouve dans la tente…
J’ai donc passé l’après-midi à ne rien faire dans ma tente pour reposer mon genou. J’en ai profité pour avancer mon livre 20000 lieux sous les mers de Jules Verne…
Je me disais constamment « et si j’avais… continué mon chemin, monté la Passe et fait les 29km qui me séparent de Pang », prochain campement et endroit réputé pour être très hospitalier. À chaque fois que j’avais ces pensées, je n’avais qu’à bouger le genou pour me rappeler pourquoi j’étais dans un trou avec 4 tibétains (le drapeau du Tibet flotte fièrement devant le campement). Pour me rassurer encore plus que j’avais fait le bon choix, j’ai décidé de suivre une jeep qui partait du campement jusqu’en haut de la montagne. Ça lui a pris 45min… et moi qui croyais que c’était une petite montagne en la regardant… comme quoi la perception ici peut-être trompeuse.
Je vais donc passer la nuit à me les geler, mais cette fois, puisque j’ai lu/dormi toute l’après-midi, je me promets de m’assoir dehors une fois la nuit tombée pour admirer les étoiles. Il faut bien que ça serve à quelque chose d’être dans un trou (absence totale de lumière).
..
Jour 6 – NO MAN’S LAND (Pas âme qui vive)
Info;
– Whiskey Nalla (+/-4600m) – N, E, T
– Lachulung La (5065m)
– Pang (4530m) – N, E, T
– Morey Plains (4700m)
– Tso Kar Lake (4500m) – N, E, T
Nombre de kilomètres; 76km
Total; 358km
Description;
Dans le genre d’endroit où j’ai couché, le temps perd toute signification. Peu m’importe de savoir quelle date, quelle jour de la semaine et qu’elle heure il est. La seule chose qui importe est de savoir si le soleil est debout ou couché et donc, si je peux continuer mon chemin ou dormir.
Sans réveil-matin (iphone mort), je me suis réveillé aux 1ères lueurs du soleil qui pénétraient dans ma tente… et surtout aux camions qui passaient. À ce moment là, les camions utilisaient encore leurs phares de nuit et la Lune était bien visible. J’en ai donc déduit qu’il devait être autour de 5h (les camions ne roulent pas durant la nuit sur cette route).
Quelques minutes plus tard, toutes mes affaires étaient emballées et j’étais près à commencer l’ascension. Il faut savoir qu’à l’endroit où je dormais, il commence à servir les déjeuners vers 7h… beaucoup trop tard pour moi. J’ai donc décidé d’attendre jusqu’à Pang quelques 29km plus loin.
Toute l’ascension (seulement 5km) s’est faite sous un froid de canard puisqu’aucun rayon du soleil n’était sur ce flanc de montagne. L’ascension n’était pas très difficile puisque la majeure partie du travail avait été fait la veille lors de l’ascension de la NakeeLa. Cependant, pour la 1ère fois du trip, l’altitude se fessait sentir; je respirais très péniblement et j’avais beaucoup de mal à retrouver mon souffle. À 5065m, le sommet de la LachulungLa ne comporte aucun intérêt.
Après Lachulung, 24km de descente non stop m’attendaient jusqu’à Pang… et mon petit déjeuner. C’était des conditions off-road, du vélo de montagne à l’état pur puisque la route était en terre et très cahoteuse. À ce moment, j’ai eu une pensée pour ceux qui font le trajet en vélo en sens inverse. Autant je m’amusais comme un petit fou à descendre, autant j’aurais sacré à monter dans ces conditions.
Jusqu’à Pang, j’ai presque eu la route à moi tout seul, ne voyant que 2 ou 3 jeeps/camions. Je m’en suis donc donné à coeur joie. Après tout, je n’étais pas le seul à vouloir arriver à Pang A.S.A.P., mon estomac grondait. Le genou dans tout cela? Il me fessait encore souffrir, mais ce n’était rien comparativement à la veille.
Du sommet de la montagne jusqu’à Pang, j’ai donc avalé les kilomètres à un rythme effréné… tout en arrêtant à toutes les 30secondes pour admirer le paysage et prendre des photos. Le spectacle auquel j’ai été convié m’a laissé bouche bée. La route passait dans une gorge très serré entouré de montagne d’un rouge/orangé aux arrêtes tranchantes comme des couteaux; on aurait dit une cathédrale sculptée par la nature (sans plans et devis donc c’est tout croche). Avec le jeu d’ombrage dû au fait que j’y passais en début de matinée, et que le soleil n’illuminait pas tout de manière uniforme, c’était magique. Puis ce qui devait arriver arriva… j’ai manqué de batteries avec un peu moins de 10km à faire jusqu’à Pang. C’était vraiment frustrant puisque la route venait de sortir de la cathédrale et suivait désormais une petite rivière quasiment asséchée et entourée de montagnes de sable formant des espèces de pyramides.
8h50 – Je me retrouvais à pédaler au centre de Pang. L’endroit n’est pas vraiment digne d’une carte postale, au contraire. On m’avait vanté l’endroit en disant que ça avait beaucoup de charme… eh bien je le cherche encore. Selon moi, c’est aussi charmant qu’un pitbull… ce sera donc un très bel endroit pour ceux qui aime cette race de chien. L’endroit est une succession de campement, comprendre restaurant/hôtel, le long d’une rivière. Seul hic, le site est un vrai chantier et c’est très bruyant. Il y a aussi beaucoup d’hébergement, l’endroit doit donc grouiller de touristes le soir venu. Je suis donc très content de ma décision de rester à Whiskey hier.
Arrivé là-bas, je n’avais qu’une seule et unique chose en tête; trouver une prise de courant qui fonctionnait durant le jour… et manger. Si c’est déjà difficile de trouver une prise, c’est mission impossible d’en trouver une qui fonctionne le jour puisque l’électricité est généralement produite avec des génératrices et ils ne les allument que le soir venu.
Ceci étant dit, j’ai quand même tenté le coup. À mon arrivé à Pang, la communication était difficile avec les habitants, j’ai donc sorti mon adaptateur de courant et je l’ai montré à tout le monde. Ils ont fini par m’indiquer une maison de pierre plus haute sur la colline. Par miracle, la maison était un restaurant… qui fonctionnait à l’électricité toute la journée.
EUREKA
J’ai donc fait un pit « battery » stop un peu plus long qu’habituellement, histoire de recharger mes batteries et celles de mes appareils.
10h30 – Une fois le plein d’énergie exécuté, j’ai enfourché mon vélo, posé mes fesses là où elles se doivent d’être et pris la direction du Tso Kar Lake quelques 40km plus loin. Juste avant de partir de Pang, il m’est passé par la tête de remonter le sentier que j’avais emprunté plus tôt pour aller prendre des photos… mais cette idée est ressortie aussi vite héhé…
La température tempéré/froide de ce matin avait désormais fait place à une chaleur torride sous un soleil prenant bien soin de se faufiler partout afin d’éliminer toute traces d’ombres. De plus, comparativement à hier, le ciel d’aujourd’hui était recouvert de ses plus beaux nuages. Autant hier j’étais content de voir un ciel exempt de tout nuage, autant aujourd’hui j’étais heureux du contraire. En effet, les nuages ajoutaient au paysage en nuançant les couleurs des montagnes avec un jeu d’ombres.
Après une ascension courte, mais pénible… vous savez quand vous allez dans l’eau un peu trop tôt après avoir mangé et que vous avez une crampe… eh bien quand vous vous êtes bourré la face, que vous êtes parti tout de suite après et que vous n’aviez pas remarqué que la route montait abruptement tout de suite en partant…
Je disais donc; après une ascension courte, mais pénibles, je me retrouvais à 4700m dans les « Morey Plains », une plaine offrant des vues à perte de vue de chaque coté. Exception faite des bergers et de leur troupeau, il n’y a pas âme qui vive dans cette contrée désertique pas très large (quelques km), longue de 60km et entourée de montagnes exemptes de végétation.
Il ne me restait donc qu’une seule chose à faire; suivre la merveilleuse ligne noire tracée par l’homme au beau milieu de la plaine et parcourir les 42km qui me séparait du prochain relais, qui était aussi mon stop pour la soirée… en souhaitant que le vent demeure dans mon dos et qu’il me pousse sur cette pente descendante (paresseux vous dites…).
Le trajet se faisant sans trop d’effort, je pouvais vaquer à mes activités préférés; me faire intoxiquer par le gaz d’échappement des camions lourds qui passaient, passer au travers d’un troupeau de chèvres/brebis… je ne sais pas trop bon… qui se trouvait au milieu de la route, me faire klaxonner par de foutus véhicules même si la route est large comme 3 camions et que je roule sur le bord de l’accotement. C’est pas mal ça… Est-ce que j’oubli quelque chose… je ne pense pas… ahhh oui… shit j’ai oublié… ça va me revenir… mais bien sur comment j’ai pu ne pas y penser; admirer le formidable panorama qui défilait sous mes yeux beaucoup trop vite à mon gout (Le dernier point était de loin le plus intéressant).
Comme toute bonne chose a une fin, la superbe ligne noire a fini par se transformer en une horrible ligne grise. En bon québécois du Lac St-Hean, c’est devenu une route en planche à laver. Je me retrouvais donc bien malgré moi au beau milieu d’un mauvais remake de « Casse-Noisette » quelques 10-15km avant ma destination (ce que je ne savais pas, c’est que ça prendrais beaucoup de temps avec que je revois ma ligne noire adorée…).
Peu après, j’ai fait la rencontre d’un vieil homme à vélo, tout seul et allant dans le sens contraire. J’en ai donc profité pour lui demander s’il savait où se trouvait l’embranchement pour se randre au Tso Kar Lake. Il m’a alors répondu qu’il y avait justement séjourné hier et qu’en quittant ce matin, il s’était trompé de direction et avait roulé 3h en direction de Leh au lieu de Manali. À ce moment même, j’ai eu un coup de téléphone de la part de mon département « instinct ». Le message était assez clair « mon gars, vas-tu vraiment suivre les indications d’un gars qui ne sait pas faire la différence entre le Nord et le Sud, entre le chemin qu’il a emprunté la veille et un nouveau chemin?!? Écoute-moi dont à la place… est-ce que je t’ai déçu jusqu’à maintenant?!? ».
Je dois admettre que cette remarque n’est pas tombée dans l’oreille d’un sourd. J’ai donc coupé court à la conversation et je lui ai souhaité bonne chance. Après tout, il en aura besoin. Au moment où je l’ai rencontré, il devait être 15h. Il voulait se rendre à Pang (de toute façon il n’avait pas trop le choix, il n’y a rien entre ici et là), donc il avait 42km à faire contre le vent et sur un route en ascension constante…
J’ai donc continué un peu mon chemin pour voir une route de terre qui allait vers la droite et donc, qui déviait de la route principale. Sensé être pas mal rendu à la jonction avec la « route » du lac, et puisque celle-ci était sensée être sur la droite, je me suis dit que ça ne pouvait pas être une coïncidence. J’ai donc emprunté cette route de terre/sable… bref, pas une route… qui semblait mener nul part et qui se décuplait en plusieurs petits sentiers à tout moment. Gardant le centre tout le long, j’ai finalement aperçu la terre promise et un campement fait de tentes blanches. Sachant que c’était le seul campement à des miles à la ronde (j’ai appris par après qu’il y avait un village de l’autre coté du lac avec un campement moins cher) et que je n’avais ni l’énergie, ni la volonté de continuer mon périple plus loin aujourd’hui, je m’attendais au pire en ce qui concerne le prix (le mot monopole vous dit quelque chose).
J’y ai effectivement goutté, mais j’ai sorti la seule carte que j’avais dans mon jeu et qui risquait de les toucher droit au cœur (sortez les violons). Je leur ai dit que si je payais le montant qu’ils voulaient que je paie, je n’aurais plus assez d’argent pour me rendre jusqu’à Leh (ce qui est complètement faux). Résultat; j’ai eu la tente à moitié prix héhé. C’est encore cher, mais c’est dans mes cordes et en prime, je couche dans une superbe tente avec électricité et j’ai le diner et déjeuner all you can eat d’inclus (Croyez-moi, je vais leur faire honneur).
Je vais donc profiter de la vie des gens riches et célèbres ce soir et essayer de reprendre des forces du mieux que je peux puisque demain s’annonce comme étant peut-être le jour le plus difficile du parcours avec un trajet d’environ 70km et l’ascension de la TaglungLa Pass qui pointe à 5300m. Il s’agit de la dernière difficulté du parcours et après ce sera tout en descente jusqu’à Leh durant environ 100km.
Pour l’heure, je compte bien continuer de terroriser les petites madames du campement; les résidents du camp sont en très grande majorité des couples de personnes âgées… quand je me suis pointé sur mon vélo, ça a crée tout un émoi et certains petits vieux ne cessent de me dévisager comme si j’étais un extraterrestre.
Au souper, je me suis rapidement rendu compte que je n’étais pas à ma place; j’étais de loin le plus jeune (même avec ma barbe de pas propre qui me donne 10ans de plus) et le souper était un buffet servi dans de l’argenterie.
Il fait donc encore un froid d’enfer pour aller me coucher. Consolez-vous gens du Québec si vous n’avez pas un bel été, ici nous sommes au milieu de l’été et 0 la nuit est une température tout à fait normale.
Le jour qui se termine est assurément le plus spectaculaire depuis le début (les jours 1, 2 et 4 ne sont pas très loin) et probablement l’un des plus beau (en terme de beauté) de ma vie. J’étais déjà complètement subjugué par ce que j’avais vu durant l’avant-midi (les photos ne rendent pas justice à mon avant-midi), Dame Nature a décidé de sortir tout son kit pyrotechnique afin de m’en mettre encore plus plein la vue en après-midi. En fait, depuis Baratpur (milieu du jour 4) le paysage ne cesse de me couper le souffle. Les premiers jours étaient super aussi, mais ils ne se situent pas dans la même catégorie.
À l’image du film « le jour de la marmotte » avec l’excellent Bill Murray, j’aimerais pouvoir revivre encore et encore et encore le jour que je viens de vivre… je finirais probablement par me lasser de faire du vélo seul, mais bon…
…
Jour 7 – TEMPÊTE AU SOMMET
Info;
– Tso Kar Lake (4500m) – N, E, T
– Morey Plains
– Debring (4570m) – N, E, T
– Taglung La (5350m) – N, E
– Rumtse (4325m) – N, E, G
Nombre de kilomètres; 61km
Total; 419km
Description;
Tout d’abord, si vous trouvez que mon titre sonne comme un mauvais film de série B, vous avez visé juste et sachez que c’était mon intention. Vous saurez un peu plus loin pourquoi.
Commençons par le commencement…
Ce matin, j’ai été très paresseux… je me suis levé à 5:20. À ma grande surprise, le soleil avait déjà franchit les petites montagnes à l’Est de la vallée et tout était clair.
Somme toute, la nuit avait été froide, mais pas glaciale. J’ai donc été rapidement remis sur Terre avec le vent glacial qui m’a accueillit en sortant de ma tente.
Un petit déjeuner copieux, puis je remballais mes trucs pas vraiment en vitesse (je ne voulais pas vraiment quitter ce campement) pour reprendre la route à 6:15.
First thing first, je devais rejoindre la route principale via le chemin de terre que j’avais emprunté pour me rendre ici. Plus facile à dire qu’à faire puisque sur 5km, c’était essentiellement en monté et en sable. Autant dire que j’avais toutes mes misères et que j’ai marché la majeure partie.
Je retrouvais donc la route telle que je l’avais laissée hier; aucune ligne noire à l’horizon. Je pouvais donc peaufiner mon numéro solo de casse-noisette commencé la veille. Quel spectacle ce sera. Cela dit, ça ne doit guère être plus amusant en moto, jeep ou autobus…
Après une quinzaine de kilomètres et une fois passé Debring, village (je dis le mot village en me pinçant le nez) moribond en bord de route, il n’y avait toujours aucune trace de ma ligne noire. J’avais portant fini ma répétition et j’étais fin près à entamer mon numéro; l’ascension de la TaglungLa, pointant à 5350m, sur 24km.
Un peu après Debring, la route nous amène dans une vallée en cul de sac. On voit alors très bien la route monter jusqu’au sommet de la montagne qui nous fait face. À la vue de cette vallée, j’avais beaucoup de misère à croire que le sommet de la Passe était cette « petite » montagne devant moi. Il me restait plus de 600m à monter et un peu moins de 20km à parcourir et j’étais convaincu qu’en 1 heure, 2 gros max, je serais en haut.
Eh bien, je n’aurais pas pu être plus dans le tort. Après 3 heures d’ascension, il me restait toujours une bonne distance à parcourir et je n’avais plus aucun doute à savoir que c’était bel et bien la Passe.
J’ai lu dans un article il y a quelques semaines que dans un environnement sans trop de pollution (comme ici), l’œil est facilement trompé en ce qui concerne les distances. En effet, nos yeux sont habitués d’évoluer dans des environnements où la pollution est omniprésente. Ils ont donc de la misère à s’adapter. J’ai très mal expliqué le concept, mais sachez que c’est vrai.
L’ascension fut des plus pénibles, j’oserais dire la section la plus pénible du trajet, non pas en raison de l’altitude ou de ma condition physique, mais bien en raison de l’état pitoyable de la route. J’avançais à pas de tortue sur cette route de gravelle au mieux en planche à laver.
10:30 – Je touche presque au but. Je suis droit devant la Passe et il ne me reste qu’un virage à faire… ne sortez pas les tambours et trompettes trop vite, il m’en reste pour au moins 1h avec le dernier bout « droit » (croche).
Depuis le début de mon ascension, le soleil a tranquillement fait place à des nuages d’un gris argenté. Tout juste avant le sommet, ce qui devait arriver arriva…
Des nuages d’un gris argenté ça vous fait penser à quoi?!?
1 morceau de robot à celui ou celle qui a dit « ça me fait penser à l’hiver »… Bingo
Un bon 2 kilomètres avant le sommet, je me suis fait cueillir par une tempête de neige (J’aurais souhaité des confétis, mais bon, on va faire avec ce qu’il y a en stock).
Durant un lap de temps d’environ 20min, la neige a gagné en intensité au point où j’en ai eu toute une chienne. J’étais au milieu de nulle part… que faire si la neige persistait ou même pire, s’accentuait?
Puis, tout d’un coup, elle a cessée aussi vite qu’elle avait commencé… pour recommencer de plus belle quelques minutes plus tard.
Pas besoin de vous dire que j’étais petit (pas juste en raison du froid) dans mes shorts à ce moment. J’avais plein d’idées sombres qui me passaient par la tête;
« Y-a-t’il un pire endroit qu’à plus de 5000m d’altitude pour être pris dans une tempête… mis à part l’Everest?!? »
« Après tout ce chemin, tu vas mourir gelé au sommet de la dernière montagne »
« Coudonc, est-ce que je suis dans un mauvais remake de 127heures… à la différence que je suis pris au sommet d’une montagne et que je vais perdre un bras à cause du froid »
Et puis, comme si ce n’était pas suffisant… BANG… mon pneu arrière a éclaté…
Nahhh… je vous taquine (pas pour la neige… pour le pneu).
L’heure que j’ai passée sous la rafale de neige n’a vraiment pas été la plus belle de ma vie, loin de là. Puis, comme si c’était arrangé avec le gars des vues, la neige a cessée 100m avant le sommet. Cependant, la température était restée; il faisait un froid d’enfer. Je n’ai jamais souhaité autant voir le soleil qu’à ce moment.
11h30 – Je peu enfin souffler un peu… le sommet est vaincu. C’est donc un 4/4. Le sommet est particulièrement occupé comparativement aux 3 autres. En plus d’une Gompa (temple), d’un bâtiment en ruine et d’une espèce de rond point, il y avait un vendeur de thé, quelques motards indiens et un homme avec ses ânes.
Je suis donc à 5350m, le 2ème plus haut endroit où je suis allé dans ma vie jusqu’à maintenant. Comparativement à la 1ère fois, je me sens extraordinairement bien… si on fait abstraction de la situation qui prévalait il y a quelques minutes.
Mention toute spéciale lors de mon ascension aux ESTIS DE CAVE de chauffeur de jeep/minivan qui passaient à 1 pied de moi à pleine vitesse en sens inverse. À un certain moment, j’avais l’intention de me faire une provision de roches et d’en pitcher dans leur pare-brise. J’aurais bien aimé voir un de ces chauffeur s’arrêter et venir à ma rencontre… je lui aurais défoncé le crâne… Mais bon, ceci était dit, c’est un autre de mes rêves indiens qui ne se réalisera pas (heureusement). L’attitude de ces conducteurs fait honneur à la réputation que je me suis faite à propos des indiens; une gang de sans génie.
Après la Passe, ça devenait un jeu d’enfant jusqu’à la fin puisque la route descendait continuellement jusqu’à Leh, 110km plus loin.
La montagne me réservait alors une surprise des plus inattendus. Quelques kilomètres après le sommet, la ligne noire est réapparue. Fini la gravelle et casse-noisette. J’allais pouvoir apprécier pleinement les 1200m de descente sur 30km dans un décor surnaturel en raison de la lumière hivernale.
Imaginez-vous un instant descendre à très bonne vitesse, sans avoir à pédaler, pendant plus de 1 heure… dans un décor à couper le souffle. GRISANT
Entretemps, la température s’était calmée et le soleil revenait tranquillement à l’avant-plan. Je crois que la neige était une sorte de test final; Dieu et Dame Nature gardent un oeil attentif sur les énergumènes qui tentent de faire la route Manali/Leh à vélo. Une fois presque rendu au sommet de Taglung, leur plus « effrayante » création, ils envoient la neige en se bidonnant afin de valider si le candidat mérite vraiment de finir le parcours. Ceux qui rebroussent chemin, ou pire qui font de l’auto-stop, sont recalés.
2:00 – La route m’a mené sans trop d’effort jusqu’à Rumtse, petit village charmant où j’ai décidé de passer la nuit. Il y a un bon choix de restaurants/hôtels et quelques sites de camping. Rumtse marque le retour à la civilisation dans la mesure où c’est le premier endroit depuis Darcha où les habitants résident à l’année et où ce sont de vrais bâtiments et non simplement des campements en toiles.
À noter que même si l’auberge (un bâtiment en terre cuite en sous-sol et non en hauteur… eux ils ont compris l’affaire avec cette chaleur) où je me trouve offre des douches avec eaux chaudes, que la dernière douche que j’ai prise remonte à il y a 5 jours et que la poussière est devenue comme une seconde peau, je ne sais pas trop pourquoi, mais je n’ai pas envi de prendre une douche (je suis sur que vous êtes content que je partage l’info avec vous). Pourquoi, je sais pertinemment qu’à la minute où je vais enfourcher mon vélo pour la dernière fois demain matin (snif snif), je vais être tout sale… et je me suis a-taché à toutes les traces d’huile que j’ai sur les jambes héhé. Comprenez moi bien, à mon arrivé à Leh demain quand ce sera fini, c’est officiel que ce sera la première chose que je vais faire…
Bon allez, un peu de repos et on va clore cette autre aventure en beauté demain.
…
Jour 8 – MONASTÈRES EN FOLIE
Info;
– Rumtse (4325m) – N, E, G
– Samosa (4136m) – N, E, G
– Gya
– Miru
– Upshi (3400m) – N, E, G
– Karu (3350m) – N, E, T
– Stakna – N, E
– Thiksey (3260m) – N, E, G
Nombre de kilomètres; 88km
Total; 507km
Description;
5h30 – Je prends la route sans avoir déjeuner (personne n’était réveillé en ville). Un peu après Rumtse et jusqu’à Upshi, quelques 30km plus loin, je suis sur le cruise control (en descente constante) au travers d’une gorge très étroite, faites de montagnes de sables bourgognes. Je ne m’y sens pas des plus confortable en raison des montagnes très abruptes tout juste en bordure de la route… un éboulement est vite arrivé.
Tout juste avant Upshi, la route sors de la gorge pour déboucher sur une immense vallée, une vallée qui me conduire directement jusqu’à Leh.
6h50 – Upshi; le village se résume est un espèce de rond point autour duquel se trouve une vingtaine de restaurants. En fait, il n’y a que ça comme bâtiment et pour tout dire, ça ressemble à une petite ville western.
C’est l’heure du déjeuner…
Dès mon arrivé, je me rends vite compte que je suis le seul touriste en ville (le touriste normal ne se réveille que vers 8h). C’est facile, tous les restaurateurs me regardent et je ne sais pas trop quoi faire et dans lequel aller. Finalement, une jeune femme me regarde avec le sourire… mon choix est fait héhé.
7h10 – Aussitôt arrivé, aussitôt reparti. Après tout, j’ai une grosse journée devant moi; je veux visiter au moins 3 monastères, dont 2 qui nécessitent des détours, et cela nécessitera un bon 50km de vélo.
Le chemin à partir de Upshi est sans aucun intérêt, mis à part si vous aimez les installations militaires…
8h10 – Arrivé à Karu. De là, je peux commencer mon pèlerinage bouddhiste.
Dans un premier temps, direction Hemis Gompa, très haut perché dans la montagne (parce que non, les monastère ne sont pas au creux des vallées près des rivières) à quelques kilomètres de l’autre côté de la rivière, l’un des plus connus et le plus gros de tout le Ladack.
Une rumeur veut que Jésus… oui oui, notre bon fils de Dieu… ait été un moine durant très longtemps à Hémis avant de revenir en Occident (vous savez, les 28-29 premières années de sa vie au sujet desquels nous ne savons rien). Une autre rumeur veut qu’il soit retourné ici lorsqu’il est ressuscité… brrrrrr (bruit de gars qui s’étouffe)… et que son tombeau se trouve quelque part dans les murs du monastère. Il n’y a jamais de fumée sans feu, mais bon…
J’entame donc l’ascension. Après un certain temps à rouler, je m’inquiétais de fait que je ne croisais aucune voiture; est-ce qu’on est dimanche? Est-ce que c’est fermé?? Est-ce que je suis en train de monter cette foutu cote pour rien moi la?!?
Après environ 1h d’ascension depuis Karu et après avoir passé un petit village charmant du même nom (Hemis, pas Karu), j’ai finalement atteint Hemis. Le monastère se trouve dans un repli de la montagne sur le coté de la vallée et est complètement caché jusqu’à la dernière minute. Il n’a l’air de rien de l’extérieur, mais sa cour intérieure surprend.
En entrant dans la grande salle, les moines étaient en train de prier. Moi, gros touriste colon qui n’avait pas vu l’écriteau « no photography » à l’entrée du temple (au moins j’avais enlevé mes souliers), je fessais le tour en prenant une tonne de photos et vidéos… Peu importe, personne n’est mort à cause de cela à ce que je sache héhé.
Sinon, j’ai un grand respect pour les bouddhistes dans la mesure où même si leur bâtiments est très vieux, les gabarits sont quand même assez grand pour que je ne me pète pas la têt… ouch… j’ai peut-être écris trop vite.
J’ai aussi eu quelques sourires en coin lors de ma visite;
D’une part lorsque j’ai vu un moine sortir un téléphone intelligent d’en dessous de sa robe, toge, machin chose rouge jaune… appelez ca comme vous voulez bon…
D’une autre, je trouvais très drôle de voir des lumières de Noel cheapette digne du Dolarama dans un lieu aussi sacré.
Check; pisser dans un recoin d’un temple bouddhiste… parce que je ne trouvais pas les foutus toilettes dans le labyrinthe de corridor et que j’avais très envi… c’étais mes shorts ou le temple et je crois avoir fait le bon choix… anyway ça va sécher (j’espère que ce n’était pas sur le mur derrière lequel Jesus est caché).
Après être redescendu à Karu et évité un poste de contrôle, il fait un permis pour emprunter la route que j’ai prise, j’étais en route vers le 2ème temple sur ma liste; la Chemde Gompa.
J’étais sur à 80% que le monastère était environ au kilomètre 8 sur cette route… par contre, après 4km, j’étais sur à 100% que c’était un plan de nègre d’aller là. Il faisait chaud comme dans mon cul et je ne voyais rien à l’horizon. Je commençais à avoir des pensées comme « hier t’a failli crever de froid en haut d’une montagne et regarde où tu viens de te fourer… tu va mourir de chaleur dans un désert ». Je me suis alors dit que si je n’avais rien vu après 8km, j’allais rebrousser chemin parce que ce n’était pas plus loin c’était sur… loin.
6km…
7km…
Toujours rien à l’horizon…
Puis, j’ai vu une forêt apparaitre au milieu de la vallée. Je me suis alors dit « bingo, je me souviens qu’il y avait une forêt comme ça devant le monastère (sur la photo que j’ai vue). Durant les 10 minutes qui ont suivit, j’avais les yeux 1sec sur la route, 10 secondes sur la forêt… j’espérais voir apparaitre le monastère… en vain.
Tel que promis à moi-même, je me suis résigné à tourner les talons après avoir dépassé le 8ème km… « c’est pas vrai que tu vas mourir ici et comme ça ».
BANG… « ESTI YÉ LÀ » (désolé pour les âmes sensibles, mais c’est réellement ce que j’ai crié en me tournant la tête)
J’avais tellement eu les yeux rivés sur un seul et unique point durant les dernières minutes que je n’avais pas vu le temple tout juste à côté de moi… et que je l’avais même dépassé…
Un problème de résolu…
Encore une fois, mon département de « l’instinct », jumelé à celui de « l’insouciance » ont fait du bon boulot.
Un autre problème pointait cependant à l’horizon; je voyais le monastère sur la colline et la forêt l’entourant… mais pas moyen de trouver la foutu route y menant. Puis, à un certain moment en continuant un peu plus loin, j’ai vu une belle allé asphaltée, entourée de feuillus et descendant je ne sais où. Je me suis alors dit « c’est maintenant où jamais… si ce n’est pas là, je laisse tombé ».
J’ai donc descendu l’allé pour déboucher sur une plaine avec le monastère direct dans la face. Plus aucun obstacle entre moi et lui. Juste ce moment a valu les 8km de questionnement et les 8 suivants pour retourner sur la route principale.
WOWe
Perché sur une petite montagne, ce monastère est l’une des plus belles images que j’ai pu voir en Asie (les photos ne lui rendent pas justice).
Comme je l’ai dit plus tôt, ce monastère est sur une route où il faut se procurer un permis (la route du Pangong Lake). Il n’y a donc aucun touriste à l’horizon, ce qui contraste énormément avec le monastère de ce matin où il pleuvait des jeeps et des minivans.
Malheur pour moi, je suis arrivé au début de la période de lunch (monastère fermé) d’une durée d’une heure. Je ne pouvais pas me permettre d’attendre 1h ici puisqu’en cas de problème, il n’y a aucune guesthouse dans les environs. De toute façon, j’ai plus souvent qu’autrement été très déçu par l’intérieur de majestueux bâtiments et quand tu as vu l’intérieur d’un monastère, tu les as tous vu.
Je me suis donc trouvé un arbre le long de la route à un endroit que me permettrait d’avoir un peu d’ombre et une vue sur le monastère… et j’ai mangé mes provisions; 2 sacs de biscuits…
Énergisé comme jamais (voir le sarcasme), j’entamais le dernier droit de ma promenade d’aujourd’hui, environ 16km jusqu’à Thiksey, un village avec supposément le plus beau monastère du Ladack, où je me propose de passer la nuit.
Bon… Allez… Tous ces km ne se feront pas tout seul, tu n’as pas les meilleures jambes du monde présentement et l’huile qui s’est renversée dans ton sac il y a 2 jours fait en sorte que ta chaine de vélo n’est plus jeune jeune non plus (elle débarque souvent)… Cesse de contempler ce majestueux monastère et en route (de me dire mon cerveau).
En redescendant vers Karu, donc pour rejoindre la route principale, je me suis rendu compte à quel point j’avais pu monter en altitude entre Karu et le temple. Alors qu’en montant j’avais l’illusion que c’était légèrement incliné, en descendant, ça ne fessait pas de doute; la pente était très forte. Je comprends maintenant pourquoi quand j’avais l’impression que ça descendait un peu et que je me mettais sur le 2ème ou 3e plateau, je n’avançais pas… et ça me décourageait… c’est tout simplement qu’il n’y avait pas de descente… Foutu illusion du désert. J’avais garde d’être fatigué comme jamais et de juger contre ma chaine de vélo qui ne marchait plus. La vérité c’est que mon vélo marche très bien et que cette pente est probablement la plus forte que j’ai eu à monter de tout le trajet. Autant vous dire que j’en ai doublement profité lors de la descente.
1h00 – En 2 temps, 3 mouvements… peut-être 4… j’étais de retour à Karu et sur la grand route en direction de Thiksey. Cette fois, il n’y avait pas de détour ou de route secondaire à prendre, le village et le temple se trouvait directement sur la route de Leh.
Je retrouvais donc mon bon vieux désert comme je l’avais laissé ce matin, exception faite de la couleur des montagnes qui était dorénavant un mélange de rosé/blanc.
Puis, j’ai commencé à apercevoir au loin un espèce de château blanc sur le dessus d’une montagne au loin. J’ai fini par comprendre que c’était la Stakna Gompa. Perché sur une petite montagne au milieu de la plaine, le monastère est parmi les plus vieux du Ladack. Cela dit, il est de très petite taille et il semblait rapetisser et perdre du lustre plus j’avançais vers lui. Malgré tout, c’est un très beau bâtiment, mais il était hors de question que je monte le visiter… mes jambes, surtout mon genou droit, ne me l’auraient jamais pardonné. Ils m’auraient dit « ma te dire ques qui a en haut mon pti gars… ya de vieilles poutres, des gars en jaquettes qui prient et qui parlent au cellulaire et c ça ». Vous avez bien raison les gars…
Je me suis donc approché de très près pour prendre des photos et sans plus.
Quelques kilomètres après, j’ai finalement abouti à Thiksey. Vous aurez compris depuis le temps que chaque village a adopté le nom de son monastère. Réputé pour être le plus beau monastère du Ladack, architecturalement parlant… et c’est vrai, la Gompa occupe la totalité d’une petite montagne et semble en très bon état comparativement aux autres que j’ai vu. On m’a expliqué que ce monastère est le plus riche du Ladack et qu’il appartient à l’ordre bouddhiste le plus puissant (il existe 4 ordres bouddhistes… Harry Potter n’a rien inventé avec ses 4 maisons). Tout comme Chemde, le monastère se trouve tout en haut de la colline et les autres bâtiments sont les résidences des moines, ou Lama comme ils se nomment.
J’arrête donc pour la nuit dans le seul hôtel du village… un des rares hôtels que j’ai vu en Asie jusqu’à maintenant qui pourraient répondre aux standards de l’Occident… même très avantageusement. Bien sur, je l’ai eu pour des peanuts… un peu plus cher que mon budget habituel, mais tout de même ridicule (environ 10$) pour la qualité de ma chambre.
Quand j’ai pris ma douche… oui oui, j’ai pris ma douche… et que je me suis regardé dans le miroir, je me suis imaginé ce qu’à bien pu penser le gérant de cet hôtel chic quand il m’a vu arriver devant lui. Pour vous aider à imaginer la scène, c’est comme si un gars habillé en bucheron… avec la hache, la chemise carottée et qui avait passé 1 semaine dans le bois sans eau ni électricité… arrivait dans le lobby du Hilton ou du Concorde à Québec pour demander une chambre pour la nuit. J’avais l’air aussi détruit que ça; ma face est pareille à ce que je ressemblais à la fin de mon trek au Népal, mes vêtements sont extra sales, j’ai un sac à dos couvert de boue sur le dos, mon vélo de montagne traine devant la porte du lobby et j’ai la lèvre inférieure d’un gars qui s’est fait péter la gueule par Mike Tyson (ahhh… je voudrais tant réécouter Hangover) en raison d’un coup de soleil. Bref, pas chic…
C’est un retour à la civilisation qui fait du bien. Autant être coupé de tout… et par tout je veux dire TOUT; confort (dormir sur un drap posé sur le sol dans une tente sans porte), électricité/internet, communiquer par signe parce que personne ne parle anglais, imaginez tout ce qui vous entoure et que vous prenez pour acquis…
Depuis Rumtse, c’est-à-dire depuis ce matin, le paysage a changé par rapport aux autres jours. Un point différencie principalement le « avant Rumtse » du « après Rumtse »; il y a de la vie ici. En effet, bien que les montagnes tout autour soient complètement désertiques, le milieu des vallées est composé de champ. Tout au long de la journée, la route que j’ai arpenté passait au travers d’un épais couvert végétal d’une couleur vert/jaune. C’était tout simplement magnifique de se promener au travers d’un paysage aussi contrasté; le néant en hauteur et la vie en profondeur.
Demain, ce sera le dernier sprint jusqu’à Leh (moins de 30km) en visitant les 2-3 monastères qu’il me reste à voir sur le chemin. Bon… mon Iphone est bien branché, je vais me gâter un peu et écouter un peu de musique… ahhh ça fait trop longtemps…
…
Jour 9 – EASY RIDER
Info;
– Thiksey (3260m) – N, E, G
– Shey (3250m)
– Choklamsar
– Leh (3400m)
Nombre de kilomètres; 21km
Total; 528km
Description;
Et une petite dernière (journée) pour la forme…
Même si mes jambes et mon esprit crient déjà victoire, que mon estomac rêve de manger autre chose que du riz, tout ce beau monde (oui oui, je parle de mes 3 Amigos les parties du corps) savent que même si c’est une journée facile, ce n’est pas fini tant que ce n’est pas fini… un accident est vite arrivé.
Au programme d’aujourd’hui; je me lève vers 5h pour être le premier à visiter le monastère où je me trouve (Thiksey) dès son ouverture à 6h. Ensuite, j’enfourche une dernière fois ma bécane et plein gaz sur Leh quelques 30km plus loin.
Après une petite grâce matinée bien mérité, j’ai entrepris de monter jusqu’au monastère peu après son ouverture à 6h. Rendu là-bas j’étais empli d’une paix intérieure. Beaucoup de moines étaient à entonner des chants dans les diverses salles du monastère.
De la place centrale tout en haut de la colline, on peu avoir un super 360 degrés de la vallée; verte le long de la rivière et complètement désertique partout ailleurs.
Pendant plus d’une heure, je me suis laissé imprégner de cette atmosphère en étant le seul blanc dans tout le monastère; moi avec une tonne de moines.
Ensuite, ce n’est pas que je n’aime pas les gars qui tapent n’importe comment sur des tambours et qui font des monologues interminables dans une langue qui m’est complètement inconnue, mais il fallait penser à redescendre pour satisfaire mon estomac vorace.
Fait inutile… par un heureux hasard, j’ai découvert que les moines portent quelque chose en-dessous de leur jaquette. Ils ne sont donc pas comme les écossais en kilt… Croyez-moi, je n’ai pas cherché à investiguer, mais quand un vieux moine entreprend de sa gratter la poch… euh… de se gratter à quelque part là… ben vous ne pouvez faire autrement que porter votre regard en dessous de sa… et voir qu’il porte des shorts.
8h20 – Je quitte finalement Thiksey en direction de Shey quelques kilomètres plus loin.
Ancienne capitale du Ladack, Shey comporte un palais en ruine… sur une montagne… encore. Un château en ruine s’étend telle une trainé de poudre jusqu’en haut de la montagne, mais le sentier est pour le moins dangereux. En temps normal il m’aurait fait plaisir de monter jusqu’en haut juste pour le fun de dire que j’ai suis allé, mais vu l’état de mon genou droit qui ne s’améliore pas, j’aime mieux ne pas prendre de chance. Mis à part une grosse Stupa couronné d’or (vous savez les gâteaux blancs), ce n’est pas le plus bel endroit que j’ai vu.
(C’est fou comment les photos peuvent être trompeuses. Je trouve les photos que j’ai prises de Shey intéressantes, mais je sur place je n’avais pas trouvé ça beau. Au contraire, les photos que j’ai pris de Chemde (jour 8) sont très ordinaires, mais c’est l’un des plus beaux endroits où je suis allé… voila, c’est dit)
La visite fut donc beaucoup plus expéditive que je ne l’aurais imaginé et à 9h tapant, je me retrouve à moins de 16km de Leh.
En chemin, je croisé Choklamsar, le dernier village qui me sépare de Leh. Bien que l’endroit ait le charme d’une pomme pourrie, c’est là que se trouve la plus grande école de moine de tout le Ladack en plus d’un centre pour les réfugiés tibétain. Il y a même un village pour enfants…
À partir de là, il ne restait plus que 5km à mon périple… mais ils ont été les pires de tout le trajet. C’est comme si j’avais fait du vélo sur l’autoroute 20 ou 40 en plein samedi… il y avait du trafic là mes amies et en plus c’était dans une côte en montant. Autant dire que j’avais un peu la chienne..,
11h pile… Après avoir cherché un peu, je trouve enfin une guesthouse beau/bon/très pas cher. Mon sac et moi sommes défaits sur mon lit et j’ai peine à croire que je ne roulerais plus en vélo à partir de maintenant.
Cette formidable aventure est T E R M I N É
Maintenant arrivé à Leh, seulement 30000 habitants, mais endroit très touristique, je prévois prendre quelques jours de repos et végéter à rien faire, pour ensuite finaliser les détails de mon trek dans la vallée de Zanskar et finalement m’envoler pour 3 semaines de marche…
Pour la suite, c’est pour une autre histoire…
Ahhhh… j’oubliais presque… maintenant que je ne suis plus sur mon vélo, le prochain indien qui me klaxonne pour rien, je lui dévisse la tête et je la lui mets dans le cul. Ces foutus enfoirés savent très bien à quoi sert le klaxon et la pédale d’accélérateur, mais n’ont aucune idée qu’il existe une autre pédale à coté pour ralentir. La courtoisie au volant est un phénomène obscur pour eux… s’ils ont la chance de passer sur la voiture d’en avant pour gagner 1mètre, ils vont le faire…
…
ÉPILOGUE
À VAINCRE SANS PEINE, ON TRIOMPHE SANS GLOIRE
Pour souffrir j’ai souffert, mais la récompense était plus que je n’aurais pu l’espérer au départ…
9 jours – 528km – Altitude moyenne de 3500/4000m – 3 Cols à +/-5000m – Beaucoup d’huile de genoux – Aucune accident, mais BEAUCOUP de frayeurs
Ce n’est pas compliqué, je souhaite à tout amateur de vélo de faire cette route un jour.
Avant le début de mon trip, j’entendais les gens parler en bien de Manali et surtout de Leh, mais rarement quelqu’un mentionnait un seul mot sur la route entre les 2 pôles touristiques. C’était comme si cette route était comme toute les autres routes et que c’était simplement un mal obligé pour se rendre d’un endroit à l’autre…
FAUX… Cette route n’est pas comme les autres routes; c’est l’une des plus belles et plus dangereuses route au monde… et un paradis pour le vélo de montagne.
Il y a 4 façons de faire cette route;
1. Mode Hardcore; en vélo,
2. Mode Expert; louer une moto (tu peux t’arrêter où tu veux et prendre le temps qu’il te faut pour faire le trajet),
3. Mode intermédiaire; prendre un jeep ou une minivan (le moyen le plus utilisé… tu te retrouve avec environs 10 personnes et le trajet se fait sur 2 jours… tu ne peux pas t’arrêter où tu veux, mais au moins tu peux profiter un peu du paysage)
4. Mode Paresseux; prendre un autobus (le trajet se fait d’une shot… pour ceux qui se foutent de voir ou pas le paysage).
Si vous optez pour le mode hardcore, sachez que vous serez de loin le plus petit mammifère de l’écosystème. Il faudra vous méfier en permanence des camions lourds (gros, lents et bruyants), des jeeps/minivans (rapides et plus ou moins bruyants) et des sournoises motos (rapides et bien souvent silencieuses).
Aussi, il faudra vous habituer à vous faire lancer des regards comme si vous étiez le dernier des crétins… C’est peut-être vrai (que vous êtes crétin), mais vous avez la lucidité de constater que cet endroit est absolument merveilleux et qu’il vaut la peine (c’est le cas de le dire) d’y passer le plus de temps possible.
Voici donc un petit test pour savoir si vous êtes peut-être fait pour ce genre de trip;
– Vous avez de bonnes aptitudes en vélo de montagne et/ou vous êtes un peu fou dans la tête,
– Vous n’avez pas peur de mourir de soif,
– Vous n’avez pas peur de partager la route avec des camions, jeep et moto qui se foutent de vous plupart du temps,
– Vous aimez respirer le gaz d’échappement des véhicules lourds,
– Le confort n’est VRAIMENT pas votre truc,
– En regardant une montagne le matin, vous vous dites « j’vais te monter en vélo aujourd’hui toé »,
– Vous aimez les sensations fortes, vivre des expériences hors de l’ordinaire, jouer au funambule sur la mince ligne qui sépare « aventure »/ »danger »/ »truc complètement stupide »,
– vous aimez les déserts, les hautes montagnes, bref les paysages comme on en voient juste à la télé,
– pour vous le mot hygiène se résume à vous brosser les dents… vous acceptez de ne pas prendre de douche durant au moins 1 semaine et d’être constamment sale et couvert de boue et de poussière,
– dans le même ordre d’idée, puisque votre priorité est d’avoir le moins de stock possible et qu’il fait très froid la nuit, vous acceptez de porter vos vêtements 24h/24 pendant quelques jours.
Si vous avez répondu positivement à la plupart de ces affirmations, vous êtes presques prêt pour l’aventure… ne reste plus qu’à travailler à améliorer les points que vous avez répondu par la négative…
…
MATÉRIEL NÉCESSAIRE
Dans les conditions actuelles, il est totalement impossible de faire cette route en vélo de route et probablement suicidaire de la faire en hybride. Il vous faut donc un bon vieux vélo de montagne.
Voici donc ce que contient mon sac;
– Vêtements longs et légers pour le jour afin de vous protéger du soleil. N’oubliez pas les gants. Le soleil tape en tab… (croyez-moi sur parole),
– Lunette de soleil (essentiel)
– Vêtements chauds pour la nuit (chandail, tuque, gants, bas),
– Caméra + recharge + adaptateur,
– Lampe frontale,
– Trousse de premiers soins,
– 1 ou 2 bouteilles/gourdes d’eau. À ce sujet, il est très facile d’acheter des bouteilles d’eau tout au long du parcours, mais d’avoir un kit de purification peut vous sortir du trouble,
– Barres de chocolats (en Inde, vous avez bien souvent le choix entre Snicker’s et Mars… tandis que les Mars s’écrapoutissent dans votre sac, les Sniker’s restent bien droite…),
– Passeport (vous en aurez besoin pour vous enregistrer lors des 2-3 postes frontaliers),
– Matériel pour entretien vélo (huile, chambre à air de rechange, etc.). Vous aurez à laver votre vélo, notamment la chaine, au moins 1 fois au 2 jours sinon 1 fois par jour avec toute la poussière qu’il y a ici,
OPTIONNEL (je n’en avais pas);
Tente et sleeping bag – Il y a des accommodations tout au long du parcours.
Le nerf de la guerre dans un endroit reculé comme ici est la gestion des batteries des appareils électroniques… principalement votre caméra. En effet, les prises de courant sont TRÈS RARE entre Manali et Leh (exception faite de Keylong, Rumtse et Thiksey). En fait, si vous en voyez une, même si votre caméra a encore un peu de batterie, c’est marqué « ne prend pas de chance et charge ton cossin » parce que tu peux passer 2 jours sans en revoir une.
Pour les intéressés, je vous recommande cette lecture (mon guide);
– Ladack Kashmir Manali, The Essential Guide, Partha S Banerjee (auteur), Milestone Himalayan Series (éditeur)… Il ne parle pas du trajet en vélo, mais parle de tous les endroits le long de la route… en plus de parler des nombreux treks possibles dans le Ladack.
Sinon, quand je suis arrivé à Manali, je n’avais pas de vélo et pas vraiment d’idée comment organiser mon trip. Je suis alors tombé sur la compagnie « Himalayan Trails » qui se trouve dans une petite rue de Old Manali. J’y ai loué mon vélo et ils m’ont bien expliqué tout le parcours. Je les recommande à 110%; http://www.himalayantrails.in ou encore info@himalayantrails.in
…
BUDGET
J’ai fait la route Manali/Leh en 9 jours et j’ai pris mon temps. Je ne vous donnerez donc pas un budget pour le trip au total, mais bien pour un jour typique puisque les plus extrême pourraient le faire en 5 jours et moins et les plus pépères en 9 et plus.
Repas
Prévoyez environ 150rs pour chaque repas (déjeuner, diner et souper). Avec cela, vous devriez au moins avoir une bonne assiette, une bouteille d’eau et un thé/café.
Hébergement
C’est très variable. Si vous avez votre tente, vous allez pouvoir vous en sortir avec environ 100rs pour un site. Si vous n’avez pas de tente comme c’était mon cas, vous allez pouvoir vous en sortir pour environ 400rs (bien souvent le souper et le déjeuner sont inclus dans ce prix).
Vous vous en sortirez très bien avec environ 800rs par jour (été 2013). À noter qu’il n’y a pas vraiment de basse saison puisque la route est ouverte seulement 3 mois par années.
Ajoutez un 400-500rs (300rs si vous voulez un vélo cheap) par jour pour la location d’un bon vélo à Manali où à Leh si vous n’apportez par le votre.
…
TOP ET FLOP
Top 5 plus belles sections de route;
– Manali à Rohtang La (Jour 1 et 2)
– Baratpur à Sarchu (Jour 4)
– Lachulung La à Pang (Jour 6)
– Morey Plains (Pang à Tso Kar… Jour 6)
– Taglung La à Rumtse (la descente de vélo de votre vie… Jour 7)
Bels endroits pour passer la nuit (Manali et Leh non compris);
– Sissu
– Keylong
– Jispa
– Patsio (beau lac et très beau panorama… tente ordinaire)
– Sarchu (un incontournable… des campements pour tous les gouts/prix)
– Whiskey Nullah (endroit très ordinaire, mais couchez là pour la section de trajet Lachulung La à Pang tôt le matin)
– Rumtse (sympathique village… euh… rue de 8-10 bâtiments je veux dire)
Endroits à éviter pour passer la nuit;
– Gramphu et Koksar (continuez jusqu’à Sissu même si vous êtes un peu fatigué… route toute en descente)
– Darcha (restez à Jispa juste avant où faites un bon effort jusqu’à Patsio)
– ZingZingBar (restez à Patsio juste avant)
Endroits qui m’ont laissé de marbre;
– Pang (bofff… mais beaucoup d’option d’hébergement)
– Tso Kar Lake (couteux)
– Debring
CE N’EST PAS LA DESTINATION QUI IMPORTE, C’EST PLUTÔT LE CHEMIN QU’ON PREND POUR S’Y RENDRE…
Épisode 20 – Chandigarh; une grosse banlieue sans âme
17 juillet 2013 – 10h30 du matin
Chandigarh… la « Mecque » de l’architecture en Inde…
Arrivé ici depuis 1h, je ne suis pas en train de planifier quelconque visite architecturale que ce soit… NON
Je suis plutôt hypnotisé par le ventilateur qui tourne au plafond de ma chambre. En fait, c’est la seule chose que mon corps me permet de faire… toutes mes forces m’ayant littéralement abandonnées.
Je meurt donc à petit feu dans la chambre no.15 de l’hôtel Satyadeep… pour ceux qui voudraient y faire un pèlerinage…
Ahhh… vous pouvez donner mon corps à la science… ou le bruler dans la Gange (ça sauverait les frais pour me rapatrier au Canada)… ahhh pi faite dont ce que vous voulez bon…
Je meurt… Eeeereregruuhgeee… .. .
FIN
…
LA JOURNÉE AVAIT POURTANT TELLEMENT BIEN COMMENCÉ…
Remontons quelques heures avant ma mort, au moment où j’allais quitter Lucknow pour me rendre à Chandigarh via un train de nuit…
Un peu avant de me rendre à la gare, j’ai appris que la dame, architecte et professeur à l’université de Chandigarh, qui devait m’héberger lors de mon séjour, devait se rendre en catastrophe à Delhi quelques jours afin d’y rencontrer truc machin… Bref, défaite ou dure réalité, mon hébergement tombait à l’eau.
Je me retrouvais donc dans un train en direction d’une ville inconnue, sans la moindre idée de qu’est-ce que j’allais faire et où j’allais dormir… la routine quoi.
Le hasard fait cependant très bien les choses…
En me réveillant le lendemain matin dans le wagon de 1ère classe (j’étais bien loin de ma classe « sleeper » habituelle; air climatisé, couvertures, oreiller, vitre dans les fenêtres, 4 par compartiment au lieu de 6, prises électrique et aucun vendeur ambulant), un vieil homme d’environ 80ans ayant dormi sur la couchette en-dessous de la mienne a entreprit la conversation avec moi.
Monsieur – « Where are you from? (de quel pays êtes-vous?) »
Moi – Canada
Monsieur – « where are you going? (quelle est votre destination) »
Moi – Chandigarh
Monsieur – « ohhh, that’s where i’m going to… What are you going to do in Chandigarh?!? no tourist go there except those who are architect… Are you architect?!? (ohhh, c’est là que je vais aussi… Pourquoi allez-vous à Chandigarh?!? Aucun touriste autre que des architectes ne vont là-bas… Êtes-vous un architecte?!?) »
Moi – « Yesss… Behind this ugly beard is hidden an architect (oui… derrière cette monstrueuse barbe se cache un architecte) »
Il a ensuite entreprit de me dire tous les endroits à ne pas manquer à Chandigarh…
Après avoir eu une liste détaillée de tous les endroits à voir architecturalement parlant, une question me brulait les lèvres;
Moi – « Are you architect? (êtes-vous un architecte) »
Monsieur – « Yes I am (Oui… avec le sourire) »
Au fil de la discussion qui a suivit, j’ai appris qu’il était désormais à la retraite, mais que durant sa carrière, il avait travaillé dans le bureau de Le Corbusier en tant que jeune stagiaire durant la construction de Chandigarh, qu’il avait été le directeur de la faculté d’architecture de l’université Panjab pendant plus de 10 ans jusqu’en 2002 (à Chandigarh… l’une des plus reconnues au pays) et qu’il avait aussi été vice-président de l’ordre des architectes de l’Inde.
Bref, un hasard qui fait bien les choses; je book un billet en première classe puisque je veux absolument partir à cette date et que ce sont les seuls billets disponibles… et je m’adonne à coucher juste au dessus de cet homme là.
Après lui avoir dit que je n’avais aucune idée où j’allais coucher, il m’a offert un lift jusqu’en ville. Son chauffeur allait venir le chercher à la gare et il connaissait un hôtel qui m’irait parfaitement… à 3000rs la nuit (2x mon budget pour une journée). Le fait que je voyage en AC2 lui envoyait vraisemblablement un mauvais message à propos de ma situation. Un peu gêné, je n’ai pas osé lui dire que je cherchais plus entre 500 et 1000rs… j’ai donc acquiescé à son offre.
En chemin, il a tenu à me faire visiter le « Centre Le Corbusier ». Désormais transformé en musée, c’est l’endroit à partir duquel Le Corbusier et son équipe travaillaient lors de la conception de Chandigarh. Si j’avais encore le moindre doute à savoir si le vieil homme était véritablement architecte, eh bien il n’en subsistait plus aucuns lorsque j’ai vu les employés du Centre quasiment se prosterner devant lui… Il m’a alors bien humblement fait passé outre le système de sécurité pour me faire visiter le complexe admirablement bien préservé.
En poursuivant notre route, j’ai finalement réussi à lui faire comprendre subtilement que l’hôtel ou il voulait m’amener était hors de prix pour moi. Entretemps, j’avais fait des recherches dans mon Lonely Planet et j’avais trouvé le secteur où aller pour trouver un hôtel décent et à bon prix. Je lui ai donc demandé de m’y déposer.
Juste avant de se dire Au Revoir, il a tenu à me dire qu’en temps normal cela lui aurait fait plaisir de m’héberger, mais que présentement c’était impossible pour des raisons familiales. Il a toutefois tenu à me donner sa casquette de l’Ordre des Architectes Indien (qui ne me fait pas du tout) en me disant que si je la portais, cela me faciliterait la vie et pourrait même m’ouvrir des portes…
Tout au long du trajet depuis la gare, en passant par la visite du Centre Le Corbu, je n’arrêtais pas de faire le parallèle avec le Québec; c’est comme si j’avais rencontré Émilien Vachon (ancien directeur de la faculté d’architecture) dans un train et qu’il m’avait proposé son aide. Cette anecdote ne dira absolument rien à ceux qui ne connaissent pas le personnage, mais pour ceux qui ont étudié avec moi, je trouve l’image très drôle; moi (avec mon linge tout croche, ma barbe de pas propre et mes 2 sac à dos de backpacker’s) attendant une voiture de luxe avec un homme d’un certain âge à l’apparence exemplaire et très respecté de ses pairs.
Ajoutez à cela que depuis mon réveil dans le train, je ne feelais pas, mais pas du tout; malgré une très bonne nuit de sommeil, j’étais bouillant de fièvre, la tête voulait m’exploser et j’étais à bout de force. Puisque je n’avais aucun problème au niveau de l’estomac, j’en ai déduit que le sans génie que je suis devait maintenant payer pour la dernière semaine passée à marcher toute la journée sous un soleil de plomb et une humidité écrasante sans la moindre protection. Je ne connais aucunement les causes et effets, mais je suis convaincu que je fais une insolation.
Bref, au lieu de visiter Chandigarh tel que prévu, j’ai passé ma première journée à agoniser. J’aurais pu manger un boeuf tellement j’avais faim, mais le moindre effort me demandait de remuer vents et marrées.
…
L’INDE D’EST EN OUEST
Pendant que j’agonisais, j’ai quand même réalisé quelque chose…
Depuis mon départ de Darjeeling il y a un peu plus d’une semaine, j’ai littéralement contourné le Népal par le Sud et traversé l’Inde d’Est en Ouest.
Alors que Kolkata est une mégapole dynamique, bourdonnante et troublante, Varanasi est probablement l’endroit le plus sacré… et sale de toute l’Inde. Mon arrivé à Chandigarh contraste donc au plus haut point puisque la ville est renommée comme étant l’endroit le plus cher de tout le pays. Le contraste est tellement marqué que c’est comme si je disais que les gars et les filles sont pareils. Oui, ils viennent de la même planète, comme les 3 villes sont en Inde, mais il n’y a aucun autre comparatif possible.
…
LE JOUR SUIVANT, IL EST RESSUSCITÉ D’ENTRE LES MORTS
Après une journée complète passée dans mon lit sans manger, j’étais curieusement Top Shape et fin près à redevenir une architecte… l’instant de 2 journée.
Après seulement 10min de marches, un constat s’impose; Chandigarh n’est pas en Inde. Je sais que si vous regardez une carte, c’est en Inde, mais c’est un peu comme le Vatican ou Monte-Carlo pour l’Italie et la France; les gens utilisent peu ou pas de klaxon, la pollution est quasi inexistante (les gens se servent même des poubelles… quand je vous dis qu’on est pas en Inde) et les espaces verts sont omniprésents.
Sans jamais avoir regardé de photos de l’endroit avant d’y mettre les pieds, l’image mentale que je m’étais faite de la ville ne pouvait pas être plus différente que ce que j’ai pu voir. Je m’imaginais une ville très densément peuplée avec des immeubles à étages partout… Je me retrouvais plutôt dans une ville banlieue, où les arbres sont Rois et où, mis à part le secteur commercial (city center) je n’ai pas vu le moindre bâtiment dépasser la cime des arbres. Pour être dans le champ, j’étais dans le champ pas pour rire…
Construite selon le plan d’urbanisme réalisé par Le Corbusier (pour les non architecte, c’est l’un des architectes les plus influents du 20ème siècle), Chandigarh semble figée dans le temps et tout droit sorti d’un livre d’histoire ou d’un manuel du parfait petit urbanisme… des années 50-60.
Délimité au Nord-Ouest par une rivière et au Nord-Est par un immense lac artificiel, Chandigarh est un immense carré ayant été quadrillé en 65 plus petits carrés appelés « secteur ».
Chaque secteur, qui possède une vocation et une règlementation qui lui est propre, est ensuite généralement subdivisés en 4 à l’aile de 2 artères secondaires passant d’Est/Ouest et Nord/Sud. À noter que la fin de ces artères secondaires ne coincide pas avec le début de l’artère secondaire du secteur adjacent. En d’autre mots; la route n’est pas continu… probablement par souci d’éviter que ces artères ne deviennent des circulations principales avec le temps.
Les circulations principales sont plutôt joué par de grands boulevards ceinturants chaque secteur… ayant pour effet un peu pervers (vous saurez pourquoi ci-bas) de bien les délimiter l’un de l’autre. Au final, un immense rond point se trouve à chaque intersection de 4 secteurs.
Voici donc pour le concret… place maintenant à l’analyse personnelle…
C’est bien beau tout planifier au quart de pouce, mais je crois qu’en chemin on a oublié de donner vie à la bête. Il manque ce je-ne-sais-quoi qui donnerait la vie à ce « monstre » créé par Dr. frankenstein.
Sans vouloir être méchant, tout au long de mon parcours de la ville, j’avais l’impression d’être dans mon une grosse banlieue sans âme.
Bien que les arbres et la circulation piétonne aient une place prépondérante dans l’aménagement, je trouve que Chandigarh est une ville froide, sans vie et faite sur mesure pour la voiture.
Lorsque je discutais avec le vieil architecte et que je lui avait mentionné que j’avais l’intention de marcher Chandigarh, il m’avait répondu avec un sourire en coin « bonne chance mon jeune ami, la ville n’est pas faite pour les piétons ».
Eh bien, après 2 journées à arpenter les rues, j’ai dû marcher entre 15 et 20 secteurs, je dois admettre qu’il avait raison… Bien qu’il y ait des trottoirs partout, chaque secteur, mis a part le 22 et 17, est très imperméable.
Bien courageux… ou fou… est le piéton qui entreprend de traverser d’un secteur à l’autre. Mis à part les 2 artères au centre de chaque secteur, ils sont bouclés au quart de tour. J’avais beau voir le musée d’architecture de l’autre coté de la rue, il m’a quand même fallu 20min pour me rendre jusqu’à l’entrée, gracieuseté du demi-mur de brique et des barbelés qui font le tour du secteur. À la fin, ça devient frustrant.
Aussi, mis à part le Le Corbusier Center, la grande majorité de la ville a très mal vieilli. C’est souvent ce qui arrive avec l’architecture dite Moderne… à moins d’un entretient minutieux (les mots « entretient » et « Inde » ne vont pas du tout ensemble… c’est comme si je disais « chat » et « chien »).
Enfin, bien qu’il y ait BEAUCOUP de végétation, c’est plutôt la mer de béton qui retient l’attention tout au long de notre parcours dans la ville.
Mais bon, ceux qui pourrait s’offusquer de mon analyse pourront se demander qui je suis pour émettre cette analyse. En effet, je ne suis qu’un simple architecte en voyage, ou un voyageur qui travaille comme architecte de temps en temps. Je ne me rappelle plus trop… c’est l’oeuf ou la poule qui est venu en premier?!?
Donc, sauf pour mes amis architectes, pour lesquels Chandigarh représente une utopie devenue réalitée, je ne conseille à aucun autre touriste de mettre les pieds là-bas… Il n’y a rien à faire et les prix sont élevés…
Cependant, si vous y poser tout de même les pieds, il y a quand même une petite perle à ne pas manquer; le Rock Garden. Ce que je croyais être un attrape touriste au départ, s’est transformé en une très belle promenade dans un espèce de labyrinthe linéaire. J’oserais comparer l’endroit au Parc Guell (Gaudi – Barcelone). L’artiste réalise ses sculptures avec des objets recyclés et le résultat est très intéressant. Gens de 4’6 » et +, attention à votre tête… le moindre petit moment d’inattention et vous en serez bon pour un mal de tête…
Le bâtiment « Gandhi Bavan » qui se trouve sur le site de l’université Panjab voudrait aussi le détour si il avait été mieux entretenu.
Sinon, pour tout maniaque de l’architecture Moderne, c’est assurément l’endroit où aller.
…
L’HISTOIRE DE CHANDIGARH
Après vous avoir bourré le crâne d’une analyse personnelle de la ville sans véritables arguments, voici maintenant des FAITS.
Pourquoi Chandigarh a été construite.
À cet effet, une visite au Chandigarh Architecture Museum (le bâtiment est une adaptation de la structure imaginée par Le Corbusier à Zurich en 1965) consacré uniquement sur Chandigarh, nous en apprend beaucoup.
Tout commence avec l’Inde qui accède finalement à l’indépendance en 1947. À ce moment, la grande colonie britannique de l’Inde est scindée (ils appellent cela la « grande partition ») en 2 pays; l’Inde et le Pakistan.
Cette indépendance, jumelé à la partition du territoire fait en sorte que la province du Punjab se retrouvait sans capitale… puisque sa capitale d’alors (Lahore) se trouvait maintenant en territoire pakistanais.
Au même moment, un très grand nombre de réfugiés affluaient en provenance du Pakistan et aucune ville de la province n’avait les infrastructures pour les accueillir ou même revendiquer le titre de capitale de la province.
C’est à ce moment qu’est né l’idée complètement extravagante de construire une nouvelle capitale « from scratch (de zéro) »… idée soutenue par le premier 1er ministre de l’Inde, Jawaharlal Nehru qui voyait en cette nouvelle capitale provinciale un symbole; « let this be a new town symbolic of the freedom of India, unfettered by traditions of the past… an expression of nation’s faith in the future (faisons en sorte que cette nouvelle ville soit le symbole d’un Inde Libre…) ».
Puisque l’Inde n’avait pas vraiment de professionnels capables de remplir la commande, le gouvernement s’est tourné vers 2 architectes américains; Albert Mayer et Matthew Nowicki, 2 architectes ayant déjà fait de nombreux projets en Inde.
Le plan original de ces 2 architecte était de concevoir une « Garden City » aux formes très courbes, suivant la topographie du terrain, avec notamment 2 parcs linéaires traversant de long en large la ville.
L’histoire prit une tournure tout autre quand Nowicki mourut dans un accident d’avion en 1950. Après cela, Meyer ne se sentait plus la force de mener le projet à terme et rendit son tablier.
Le gouvernement indien se lança alors à la recherche d’un/des architecte(s) étant capable de remplir la commande… et en 1951, Le Corbusier et son équipe prenaient les commandes du projet… jusqu’à sa mort en 1965.
Selon le nouveau « Master Plan » de Le Corbusier, la ville prenait des formes très rigides; chaque secteur aurait la même forme et dimension (rectangle de 800m x 1200m). Tout était pensé autour de 4 fonctions primaires; « Living (vivre) », « Working (travailler) », « Circulation » et « Care of Body and Spirit (prendre soin du corps et de l’esprit) ».
…
EN ROUTE… euh… TRAIN POUR SHIMLA
S’en est fini de Chandigarh. Je prend mon dernier train pour un très long moment. Serpentant dans les montagne, l’Himalayan Queen est un « Toy Train (train jouet) » site de l’UNESCO, tout comme celui de Darjeeling il y a quelques semaines. Il relie Kalka, petite ville à 30min de Chandigarh et Shimla, ma destination, une ville de montagne où la haute société indienne envoit ses enfants pour étudier (il y a des collège et une université très huppés).
Mais avant, n’oublions pas le train. Le trajet de l’Himalayan Queen est réputé pour ses NOMBREUX tunnels; sur 96km de trajet, il y en a 102… Certains tunnels sont de simples arches qui vous font simplement passer un gros rocher, tandis que d’autres peuvent être trèèèès long et vous transportent en quelques secondes d’une vallée à une autre.
Le trajet comprend aussi 988 ponts. Bref, le trajet de 4h est réputé comme étant l’une des plus belle promenade en train en Inde (ce n’est pas rien… c’est le 2ème plus grand réseau ferroviaire au monde après celui de la Chine). De quoi mettre l’eau à la bouche.
Ce train m’a permit de faire la connaissance de 2 couples (qui ne se connaissaient pas non plus) qui en sont à leur premier balbutiement en Inde (ils sont tous les 2 arrivés il y a 3 jours); Aurélien et Noémi de Montpellier et Peter et Larenka de République Tchèque. Pas besoin de dire que lorsque je leur ai mentionné que je voyageais dans les environs de l’Inde depuis maintenant 5 mois, ils m’ont posé une tonne de questions.
Le wagon où je me trouvais était assez tranquille… trop tranquille… une tonne de touristes restant à leur place comme de bons petits soldats. C’est à ce moment que je me suis levé, j’ai ouvert la porte du wagon et je me suis installé dans mon « bureau » à demi sorti à l’extérieur… le voyage en train à la manière indienne quoi. Mes nouveaux compagnons en étaient très surpris.
Outre les tunnels, le trajet est rendu intéressant par le fait que le train s’arrête dans plein de petites gares de montagnes. On peu alors descendre, admirer les lieux… et se gaver de fastfood indien.
À ce sujet, lors d’un arrêt à une gare quelconque, j’ai été m’acheter de la bouffe indienne à un stand local un peu louche. En revenant dans le train, l’un de mes nouveaux amis, qui m’avait vu faire, m’a demandé si j’avais peur d’avoir des problèmes avec mon estomac. Je l’ai regardé avec un sourire en coin et je lui ai demandé si il lavait tout ce qu’il mangeait et pelait lui-même ses fruits et légumes… et la réponse fut affirmative… héhéhé… je suis en Inde depuis tellement longtemps que j’en oubli comment être un bon touriste… Je mange n’importe quoi, la plupart du temps avec mes mains et j’oubli bien souvent de les laver avant. Seule chose non négociable; l’eau. Je ne plaisante pas avec l’eau… je la traite ou je l’achète en bouteille.
Malgré tout, peu importe comment belle soit la promenade de train, c’est toujours la même chose avec les trains de jour, après 2h, la plupart des gens dorment et la seule chose que tu veux c’est arriver au plus cr!ss. Que voulez-vous, les trains sont de véritable somnifères (avis aux insomniaques).
Au final, ce train bat haut la main les plus beaux trains que j’ai pu prendre au Sri Lanka et le trajet de Darjeeling (c’est difficile à comparer puisque le paysage était obstrué à Darjeeling).
…
LA CRÈME DE LA CRÈME INDIENNE
Ma première impression en arrivant à Shimla… ben voyons, est-ce que je suis de retour à Darjeeling. On dirait que Shimla est sa soeur jumelle… en un peu plus propre et un peu plus occidentale.
Comment décrire l’endroit en 1 mot; tranquillité. Tout comme sa voisine Chandigarh, l’endroit détonne par rapport au reste du pays. Cependant, l’endroit transpire l’histoire et ses racines coloniales britanniques sont bien mises de l’avant; la ville est remplie de manoirs et très beaux édifices centenaires. Ahhh… il y a des singes PARTOUT… et mention spéciale au fils électriques qui sont toujours partant pour te scraper une vue.
La ville ressemble à une route allant jusqu’à l’infini sur le sommet des montagnes. Tout au long du parcours, tu vois des bâtiments au loin, mais en marchant tu te retrouves toujours dans une forêt de conifères gigantesques. La raison?!? La plupart des bâtiments sont adossés à la montagne de sorte que quand tu marches, tu n’a pas l’impression d’être dans une ville puisque tu vois des bâtiments sur un coté de la route, mais une vue sur la vallée et plein d’arbres tout autour.
Tandis que la haute société indienne réside à Chandigarh, c’est à Shimla qu’elle envoit étudier ses enfants.
En se levant le lendemain, nous (moi et les 2 couples rencontrés dans le train) avons mis le cap sur le Jakhoo Temple… mieux connu sous le nom de Monkey Temple (il y a des monkey temple partout). C’est une ascension d’un bon 400m avec des sections très inclinées. Au final, tu arrives en haut de la montagne, il y a une statue très laide, hyper grosse et de couleur très discutable (j’espère qu’ils ont eu un spécial sur la couleur et que c’est pourquoi ils l’ont choisi). La particularité de ce temple; il y a une quantité industrielle de singes et ceux-ci n’entendent pas à rire. Ils profitent du moindre moment d’inattention pour vous piquer vos trucs (caméra, bouteilles d’eau, chapeau, virginité, etc.). Pour le dernier point ça reste à valider, mais les autres sont véridiques.
Un peu avant d’arriver au sommet, il est donc possible de louer des bâtons de bois… oui oui… louer des bâtons bien ordinaire… même pas magique… en bois. Ne voulant pas prendre de chance, étant accompagné de touristes fraichement débarqués en Inde, c’est ce que nous avons fait.
Convaincu qu’avec un bâton de bois j’avais revêtu une espèce de cap de Super Héros craint et invincible (j’ai écouté beaucoup de films de ce genre récemment à la TV), je suis allé au devant de ces petits monstres. J’ai vite compris que je n’impressionnais pas ces boules de poils avec un vulgaire bâton quand je l’ai pointé vers un singe, en apparence inoffensif, et qu’il s’est mi en mode « je vais montrer à ce blanc-bec qui est le boss des bécosses icitte ». Heureusement, plus de peur que de mal, mais disons qu’à partir de ce moment, j’ai cessé de les prendres pour de petits toutous mignons tout plein et j’ai haussé ma garde.
De retour en ville, moi et le couple de français avons décidé d’arpenter les magnifiques petites rues de la ville… pour tomber… sur… un… mariage Hindu. Au départ, nous étions peu enclin à l’idée de « crasher » un mariage, mais le père de la mariée est venu nous chercher, en me tirant par le bras, quand il a vu que nous allions continuer notre chemin. Difficile de dire non dans de pareilles circonstances.
C’est donc dire que mes 2 amis français, habillés pour faire une randonnée, et moi, ma barbe de bucheron, mes flip flop et 2 morceaux de tissus crasseux qui ont autrefois pu être appelés Chandail et Short (j’ai même un trou de souris bien visible sur le coté de mes shorts… j’adore ce trou, il me sert de porte-doigt), nous nous retrouvions catapulté au beau milieu d’un gros party Hindu où tout le monde était sur son 31.
Une fois entré à l’intérieur, ils ont entamé l’opération « gavons les blancs de tout ce qu’on peut trouver ». Nous tentions de leur expliquer que nous venions à peine de sortir de table… en vain. Les assiettes se succédaient dans nos mains à un rythme effréné.
Une fois les mains vides, la phase 2 pouvait débuter; tous et chacun présent au mariage voulaient se faire prendre en photo avec nous et les « which country? (quel pays?) » fusaient de toute part.
Clou du spectacle; nous avons été invité à aller rencontrer Le et La marié qui se trouvaient dans une pièce adjacente. Si nous étions gêné d’entrer dans le mariage, nous étions TRÈS mal à l’aise à l’idée d’aller rencontrer les mariés… mais ils ont tellement insisté que ça aurait été une véritable insulte de leur dire non.
La prochaine étape était de nous faire danser devant tout le monde… et c’est à ce moment que nous avons pris la poudre d’escampette…
Après s’être invité à des funérailles il y a quelques semaines à Darjeeling et maintenant le mariage, je me demande quelle sera la prochaine étape… un baptême?!?
…
J’ai passé ma seconde journée à attendre que la journée finisse pour prendre un bus de nuit pour Manali…
Qu’est-ce que je fais quand je n’ai plus de chambre et que je dois tuer toute une journée? Je fais ce que je sais faire de mieux; je laisse mon stock à l’hôtel, je range ma carte de la ville, je sors ma bousolle mentale et j’entreprend de me perdre dans toutes les petites rues de la ville… ce qui signifie dans le cas présent monter et descendre une montagne de tout bord, tout coté, toute la journée.
Pour ce faire, j’ai sorti ma cape de touriste 2.0 et ma face de cul afin de ne pas me faire achaler par des indiens en mal de photos avec un blanc ou des vendeurs de cossins.
À la fin de la journée, Shimla, comme la plupart des villes où je suis allées, n’a plus aucun secret pour moi. J’ai même découvert que la ville avait une patinoire naturelle, la seule en Asie du Sud-Est, mais elle était fermée le jour où je suis passé.
On se reparle un de séjour… (trouvez l’erreur dans cette phrase… petit test pour voir si je ne vous ai pas trop endormis avec mon texte).
P.S. – Dans la catégorie « tout le monde s’en fou », j’ai séjourné dans le même hotel que le Directeur de la Banque Centrale de l’Inde… bref, un gars vraiment important ici. Mon hôtel n’avait pourtant rien de bien spécial et était tout sauf chic, mais il était là. J’en ai donc profité pour piquer des jasettes avec lui (c’est lui qui est venu me parler en 1er) et il m’a donné des conseils sur les treks que je m’apprête à faire. Un chic type…