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Articles Tagués ‘France’

Épisode 74 – Au sommet de l’Europe*

28 juin 2016
Fraichement arrivé sur le bord du lac Léman en provenance de Corse, je ne m’attardais pas plus longtemps qu’une soirée à Genève avant de sauter dans un bus en direction de Chamonix.
Non pas que je n’aimais pas Genève, bien au contraire, J’ADORE Genève, mais bien parce que je n’avais qu’une seule chose en tête… une très grosse chose en tête… et non je ne parlais pas de mon truc entre les jambes… NON… je parlais plutôt de la grosse crème glacé dominant les alpes à la frontière de la France, l’Italie et la Suisse… la plus haute montagne d’Europe… j’ai nommé le Mont Blanc.
Je mentirais si je disais que l’ascension du Mont Blanc était un vieux rêve. Cela remontait à mon séjour en Asie et à ma lecture du livre « Annapurna; le premier 8000 », ascension historique du 1er sommet de plus de 8000m, 3 ans avant l’ascension du sommet de l’Everest par Edmund Hillary et Tenzig Norway, par une équipe française composée d’alpinistes de la Compagnie des Guides de Chamonix.
Le mandat que je m’étais donné était très clair; j’allais faire tout en mon possible pour atteindre le sommet du Mont Blanc. Plus que jamais, mon objectif dépendait du bon vouloir de Dame Nature; il me fallait une température parfaite sinon je rentrerais bredouille.
LA COMPAGNIE DES GUIDES DE CHAMONIX
L’ascension du Mont Blanc est possible sans guide, et je l’aurais probablement fait ainsi en temps normal, mais je m’étais laissé tenter par la Compagnie des Guides de Chamonix.
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Fondée en 1821, la compagnie est la plus vieille organisation de guides de montagne au monde. D’une durée de 5 jours, leur « Stage Mont Blanc » proposait 3 jours de formation sur glacier en haute altitude pour se familiariser avec les techniques de crampon/piolet/corde, tout en s’acclimatant à l’altitude, suivit de 2 jours de monté/descente du Mont Blanc.
Du haut de ses 4809m, le Mont Blanc était loin d’être mon plus haut sommet. Or, c’était justement l’erreur à éviter avec cette montagne; il ne fallait pas se contenter de regarder les chiffres… cette montagne pouvait être sournoise. En condition hivernale à longueur d’année, on raconte qu’un peu moins de 50% des randonneurs qui tentent l’ascension du Mont Blanc parviennent jusqu’au sommet. Du 50% qui échouent, certains renoncent pour cause de blessure, mal des montagne/altitude, ou en raison du mauvais temps. Ajoutez à cela que la montagne fait entre 5 et 10 victimes par année. Bon nombre de randonneurs/alpinistes plus chevronnés que moi y avait perdu la vie. Tout cela pour dire que c’était le plus grand défi de ma jeune carrière de randonneur en haute montagne.
J’avais beau avoir plusieurs 5000m+, presque 6000m avec le Kilimanjaro, à mon actif, je n’avais jamais eu à négocier des sentiers de haute montagne sur neige/glacier. Comme j’avais l’intention de répéter l’expérience plusieurs fois en Amérique du Sud, je voyais cette formation comme un investissement dans ma santé & sécurité.
SOUS HYPNOSE
Vous êtes-vous déjà senti à la maison instantanément à un endroit où vous n’avez jamais habité. C’est le feeling que j’ai éprouvé à mon retour à Chamonix.
Bien que je déteste tout le fla fla entourant les villes dégoulinants de touristes, peu importe l’endroit où je me trouvais en ville, je n’avais qu’à lever les yeux vers le ciel pour trouver la paix et me rappeler pourquoi j’étais là.
Situé au plus profond de la vallée à 1035m d’altitude, Chamonix est à l’ombre de géants. Collé l’un sur l’autre, le Mont Blanc et ses 2 éternels acolytes, l’Aiguille du Midi et le Glacier des Bossons, m’hypnotisaient. Même quand je marchais en sens opposé, je me surprenais à me détourner pour les fixer.
Du haut de ses 3842m, l’Aiguille du Midi était une formidable montagne pointant vers le ciel. On peut accéder au sommet via un téléphérique et le panorama y est grandiose, ce qui en fait l’attraction touristique no.1 de la vallée.
Faisant figure de négligé, le Glacier des Bossons était celui qui m’impressionnait le plus. Le meilleur moyen de le décrire est d’imaginer une cascade d’eau descendant du sommet du Mont Blanc, cascade qui aurait brusquement mis les freins à mi-hauteur de la montagne… et gelé sur place. En résultait donc une mer de glace… avec une gentille forêt sur la partie basse de la montagne. Ces arbres n’avaient aucune idée que leur paisible existence prendrait brusquement fin si (quand) le monstre juste au-dessus se réveillait.
Le contraste était total; je me trouvais à la chaleur à Chamonix et passait ma 1ère soirée dans le jacuzzi extérieur de mon auberge à contempler le montagnes, alors que dans quelques jours je serais tout en haut à me les geler en conditions hivernales.
Jour 1 – MONTENVERS – MER DE GLACE
30 juin 2016
Après 2 jours de repos à ne rien faire d’autres que fixer les montagnes… et boire de la bière locale, l’action reprenait enfin.
Direction Montenvers (1913m), via un petit train sur un chemin de fer très incliné. Nous descendions ensuite sur la « mer de glace » (glacier) pour faire une journée d’entrainement.
Au 19ème siècle, la gare de Montenvers avait été construite tout juste au-dessus du glacier, mais il fallait aujourd’hui descendre pendant plus de 30 minutes pour atteindre le glacier. Tout au long de la descente, on pouvait voir des panneaux indiquants la hauteurs du glacier à partir de 1820 jusqu’à aujourd’hui. Il devait y avoir une bonne cinquantaine de mètres entre le panneau « 2005 » et la hauteur actuelle.
Les 16 randonneurs inscrits au Stage Mont Blanc avec les Guides de Chamonix passaient la journée sur le glacier en compagnie de guides afin d’apprendre / parfaire les techniques de marche avec crampons, d’encordage et d’utilisation du piolet dans diverses situations; sur glace/neige/roche, sur pente abrupte/légère, en monté/descente, etc.
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En fin de journée, nous étions séparé en groupes de 2 randonneurs (basé sur nos aptitudes) pour être ensuite jumelé à un guide. Ces 2 autres personnes allaient être mon équipe pour les 4 prochains jours.
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Je me retrouvais jumelé avec Arnaud, un jeune suisse hyperactif qui en était à sa 2ème tentative; l’an dernier, il avait dû rebrousser chemin à 4300m en raison du très mauvais temps.
Christophe, le chef guide qui nous avait donné la formation d’aujourd’hui, ne tardait pas à nous choisir. Il nous confiait qu’il voulait une équipe performante avec des gens qui se débrouillaient bien en montagne. C’était un peu compréhensible; il allait devoir s’encorder avec ces clients sur la montagne… et donc mettre sa vie entre leurs mains.
Jour 2 – FUNAMBULE DES NEIGES
1 juillet 2016
Aujourd’hui j’allais réaliser un rêve (un peu con), un rêve vieux de seulement 2 ans, mais un rêve quand même.
Lors de mon passage à Chamonix avec mon pote Julien Fumard en Janvier 2015, nous étions monté à l’Aiguille du Midi. J’avais alors pu admirer de valeureux skieurs quitter le « confort » (il n’y a aucun confort… on se les gèles en été comme hiver) de la station de l’Aiguille du Midi pour s’aventurer sur la très étroite arrête de l’Aiguille du Midi avec leur ski sur le dos. Cette arrête toute enneigée n’était pas plus large que mon cul (en fait moins large que mon cul), avec une drop de plus de 1000m de part et d’autre. Cette arrête ne présentait aucune difficulté technique, mais personne n’était à l’abri de perdre pied, de s’enfarger dans ses crampons, ou d’un coup de vent aussi soudain que puissant. Pas besoin de vous dire (mais je vais vous le dire quand même) qu’il n’y avait pas de seconde chance en cas de chute… c’était GAME OVER. Cette arrête, comme la plupart des montagnes environnantes, avait fauché plusieurs vies.
Bref, j’avais été fasciné de regarder ces skieurs marcher tels des funambules… fascination résultant d’un mix de jalousie et de voyeurisme… voyeurisme dans la mesure où je voulais voir si ils allaient se péter la gueulle. Dès lors, je m’étais promis de marcher cette arrête un jour… eh bien… je vous le donne en mille; ce jour était venu.
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Nous ne franchissions pas cette arrête simplement par plaisir. C’était le meilleur moyen d’accéder au Col du Midi, glacier situé entre l’Aiguille du Midi et le Mont Blanc, et lieu de notre 2ème journée de stage et première journée de randonnée en haute montagne.
Armé de mes crampons, de mon piolet et bien encordé à mon guide et à mon jeune ami, je quittais la plateforme de l’Aiguille du Midi premier de cordé sous le regard de plusieurs touristes incrédules.
Pour la durée de la traversée, mon destin était lié à celui de mes 2 compagnons; une erreur de l’un pouvait être fatale à tous les 3.
J’avais l’étrange feeling de marcher sur un fil (de neige) suspendu dans le vide. La dernière chose à faire était de tenter de franchir l’arrête en vitesse. Il fallait prendre tout son temps. Je profitais pleinement du moment et admirais la vue. Nous étions à plus de 3800m avec une vue imprenable sur Chamonix 2000m plus bas.
Le plus « drôle » dans tout cela; environ au milieu de l’arrête, je chantonnais la chanson « way down we go » de Kaleo. Pour les non anglais, « way down we go » se traduit littéralement par « directement en bas nous allons ». Réalisant la stupidité de la situation, je stoppais net sec de chanter et serrais un peu plus mon piolet.
Passé l’arrête sans encombre, on s’amusais sur le glacier quelques  heures… avant de repasser l’arrête pour retourner à l’Aiguille.
Je vous laisse deviner comment s’est passé la trajet du retour sur l’arrête puisque je n’écris pas cet épisode post mortem…
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Toujours en vie, mais mort de fatigue.
Jour 3 – JOUR DE PLUIE
2 juillet 2016
Le temps orageux et les grands vents ont coupé court à notre journée en montagne. Nous sommes plutôt allé dans un centre d’escalade intérieur.
Jour 4 – LE BALCON DES DIEUX
3 juillet 2016
06.30 – Mon réveil sonne… j’ai les yeux ronds… je me lève d’un coup et me dirige à la fenêtre… bleu… le ciel est bleu sans aucun nuage… Hip Hip Hip…
La réalité me sautait aux yeux; j’allais réaliser l’ascension du Mont Blanc aujourd’hui. J’étais envahi par un mélange de nervosité (que ça commence), de peur (avec tous les accidents qui arrivent sur le Mont Blanc) et d’excitation.
09.30 – Après avoir pris le téléphérique des Houches, suivit d’un train qui donnerait mal au coeur même à ceux qui n’ont pas le vertiges, nous étions au Nid d’Aigle. À 2380m, c’était le terminus du train et le départ de la voie normale d’accès au sommet du Mont Blanc.
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S’en suivait une monté de 800m d’altitude relativement facile, alternant entre cailloux, neige et glace.
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11.15 – Nous franchissions le « Refuge de Tête Rousse » pour se rendre à la base du « Corridor du Gouter ».
Communément appelé « le couloir de la mort », cette paroi rocheuse, frôlant les 70/80 degrés d’inclinaison, était la section la plus difficile / dangereuse du sentier. L’idée consistait à monter en zigzag sur 600m de hauteur au travers d’une zone d’avalanche / glissement de terrain comportant des chutes de pierres en permanence.
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Le Corridor du Gouter était l’endroit le plus meurtrier du Mont Blanc; la plupart des gens qui se tuaient sur la montagne se tuaient ici; soit à recevoir une pierre par la tête ou en raison d’une erreur. Être la personne la plus prudente au monde ne suffisait pas, il fallait avoir la chance de notre coté et être concentré du début à la fin… le moindre moment de relâchement pouvait être fatal.
Et moi dans tout cela? J’avais bien sur peur… ce qui est tout à fait normal; la peur est cette petite alarme dans la tête qui éveille vos sens et vous empêche de faire des trucs (trop) stupides. Si mon heure était arrivé, elle allait arriver, that’s it. Jusque là, je n’allais pas laisser la peur prendre le dessus et j’allais profiter du moment.
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Ce passage obligé menait au Refuge du Gouter, notre objectif de la journée. S’était impressionnant à voir d’en bas; perché en porte-à-faux à 3863m (à moitié dans le vide) tout en haut du corridor du gouter, le refuge se donnait des airs de forteresse imprenable tellement il était juché sur une paroi rocheuse en apparence impossible à franchir.
Tout le long de la monté, je n’arrêtais pas de taquiner mon guide Christophe en disant « quand est-ce qu’on monte? Je ne savais pas que le Mont Blanc était aussi plat que cela… », alors que nous étions en train de monter un mur. Je lui signifiais indirectement que notre rythme était trop lent pour moi. Il me regardait en souriant… sans accélérer le pas… alors qu’Arnaud peinait à suivre le rythme.
À tout moment lors de la monté, on entendait des cris « Attention », « Pierre » venant d’un peu partout en haut ou en bas. S’était chaque fois la même chose; on s’arrêtait un instant pour voir d’où ça venait avec les yeux bien ronds et tous nos sens en alerte, les roches passaient, on poussait un soupir de soulagement, et on repartait.
Je demandais à Christophe de nous raconter des incidents qu’il avait vu sur le corridor. Il nous parlait d’une femme qui avait décroché presque tout en haut du mur et qu’il avait vu tomber jusqu’en bas, de ce guide qui avait reçu une roche par la tête, pensait être ok et découvrait en enlevant son casque que la roche lui avait percé le crâne, et ainsi de suite.
13.25 – Non sans quelques frayeurs, nous parvenions sain et sauf tout en haut du couloir de la mort. Le Refuge du Gouter n’était plus qu’à une centaine de mètres devant. Nous avions réalisé le trajet Nid d’Aigle / Refuge du Gouter en un peu moins de 4 heures, ce que notre guide jugeait excellent vu le temps normal de 5.5 heures.
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À partir de là nous n’avions plus de difficulté majeure pour rejoindre le sommet; ce n’était essentiellement qu’une marche sur la glace/neige avec un dénivelé positif de +1300m. L’ennemi no.1 était dorénavant l’altitude; il fallait prendre de grande respiration et boire beaucoup d’eau pour contrer les effets de la haute altitude.
Le Refuge du Gouter semblait tout droit sorti d’un film de science fiction; sa forme ronde, sa façade métallique et sa position donnant l’impression d’être dans un équilibre précaire sur le bord de la falaise, faisaient penser à un vaisseau spatial qui se serait écrasé dans une plaine enneigé et aurait arrêté sa course à la dernière minute pour éviter de plonger dans le précipice.
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Le Refuge du Gouter était sans aucun doute le plus beau refuge de montagne que j’avais vu de ma vie… rien à voir avec les refuges de merde sur le GR20 en Corse. Le bâtiment était une réussite architecturale sur toute la ligne autant à l’extérieur qu’à l’intérieur. La salle à manger et les dortoirs étaient comparables aux plus beaux auberges jeunesses où j’avais séjourné dans ma vie.
Cela ne s’arrêtait pas là, le balcon extérieur, que j’avais rebaptisé « Balcon des Dieux », valait à lui seul le détour; déjà que le refuge était à moitié dans le vide, le balcon ceinturait le bâtiment avec un plancher fait de grillage métallique. En clair, on voyait le vide sous nos pieds en marchant sur le balcon. Il ne fallait donc pas souffrir du vertige pour apprécier la vue imprenable sur les montagnes environnantes (impossible de voir le sommet du Mont Blanc d’ici), le couloir de la mort tout en bas et la vallée de Chamonix au loin. On voyait même le lac Léman et Genève à l’horizon.
Je passais le plus clair de mon temps sur le balcon à sourire en songeant à quel point ma vie était merdique 😉
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Jour 5 – LE SOMMET DE L’EUROPE
01.30 – Oui Oui… 01.30… le refuge commençait à s’activer. C’était la course pour déjeuner et partir au plus vite.
Ayant réussi à fermer l’oeil quelques heures, je me sentais frais et dispo, malgré un bon mal de crâne et le coeur qui battait à tout rompre même au repos… problèmes dû à ma non acclimatation à la haute altitude. L’adrénaline qui coulait dans mes veines compensait à me faire oublier tout cela.
La journée s’annonçait très longue. Alors que nous avions marché « à peine » 4 heures la veille, le pronostic d’aujourd’hui était de 4 heures de monté jusqu’au sommet, 3 heures de descente pour revenir au refuge, et 3 heures de descente jusqu’au train.
02.30 – Nous étions lancé pour le sommet dans la nuit glaciale. La température était officiellement de -10 degrés Celsius, mais le vent faisait descendre la température ressenti à environ -20.
Nous passions la première 1h30 à monter le « mur des flatulences » en marchant sur le coté en faisant des pas croisés. Le « mur des flatulences » était bien sur mon appellation personnelle… parce que les pets étaient les seuls bruits transperçant le lourd silence de la nuit.
03.45 – Le Dôme du Gouter était atteint. Une grosse ombre en forme de dôme sortait alors de la pénombre devant nous. Pour la 1ère fois, nous avions une vue sur le sommet.
Nous passions ensuite le Refuge Valot à 4362m. Sans gardien, ni chauffage, cet abri rudimentaire était à utiliser en dernier recours lors de tempête ou pour récupérer un petit peu lors de la monté/descente.
2 jours plus tôt, un alpiniste y était mort. Jeune trentenaire (comme moi), et se croyant invincible (comme moi), il s’était tapé 19 heures de monté depuis le Refuge des Cosmiques par mauvais temps. Le Refuge des Cosmiques est situé tout près de l’Aiguille du Midi via un sentier alternatif pour atteindre le sommet. Arrivé au Refuge Valot, son corps avait lâché et il s’était tapé un oedème cérébral. Cela faisait de lui la 1ère victime du Mont Blanc cette saison.
Fin de la parenthèse… Gulp…
S’en suivait la monté du versant « coup de cul »… de son véritable nom… pas mon invention. Mon guide me racontait que c’était la portion la plus incliné du sentier et qu’il lui fallait souvent donner un bon « coup de pied au cul » à ses clients pour qu’ils continuent à avancer. Il n’aurait pas à faire cela avec nous… même si j’avais soudainement arrêté de dire que le Mont Blanc était plat pour me concentrer sur ma respiration.
05.40 – Le sommet était désormais a porté. À ce moment là, plus rien ne pouvait m’empêcher d’atteindre mon but… pas même un orage soudain.
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05.56 – Un dernier pas et il n’y avait plus rien à monter, que de la descente de tous les cotés avec une vue à 360 degrés. L’Europe étaient sous mes pieds… Angleterre non inclus 😉
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Le ciel était alors complètement dégagé avec le soleil qui se réveillait à l’horizon. La température n’aurait pas pu être plus parfaite… une journée « Grand Beau » comme le disent les cousins français. J’avais encore une fois une chance incroyable.
Le sommet du Mont Blanc n’était pas un sommet comme les autres. N’ayant aucun panneau indiquant « Sommet du Mont Blanc – Toit de l’Europe – 3810m », un randonneur sans guide pourrait très bien passer tout droit. Bon… il faudrait que ce randonneur soit vraiment idiot, ou complètement intoxiqué par l’altitude, pour ne pas se rendre compte en regardant autour de lui qu’il n’y avait pas de montagne plus haute… improbable, mais possible.
Cela s’expliquait en raison du fait que le Mont Blanc était recouvert d’une couche de neige/glace épaisse d’environ 20 mètres et que cette couche variait selon les années. Mesuré à chaque année, le sommet du Mont Blanc avait très bien pu être à 3815m l’an dernier…
Le sommet n’était que la moitié du trajet… il fallait maintenant descendre.
En regardant vers l’ouest, on pouvait voir l’ombre que le Mont Blanc projetait sur la vallée; il y avait du soleil partout, sauf dans une gigantesque pyramide d’ombre.
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Une fois de retour au Refuge du Gouter, et avec déjà plus de 6 heures de marche dans les jambes, le plus dur restait à faire; il nous fallait descendre le Corridor du Gouter. Déjà que ça avait été une montée éprouvante, j’anticipais la descente « rock’n roll »… en espérant que l’expression ne soit pas prise au 1er degré.
Contrairement à un chat monté trop haut dans un arbre, il n’y aurait pas de pompier pour nous faire descendre… seulement notre huile de genoux et un peu de jugeote.
J’étais encore une fois premier de cordé; je n’avais rien sauf le vide devant moi. Nous avions à descendre un mur… et par « mur » je voulais vraiment dire MUR. Ce pan de mur en descente est DE LOIN, la section de sentier la plus difficile que j’ai eu à négocier dans ma vie. On ne se le cachera pas; j’avais peur… peur de faire un mauvais mouvement et de me retrouver en bas plus vite que prévu. J’avais failli commettre l’irréparable quelques fois… en pouvant toujours récupérer à minuit moins une.
Pour détendre l’atmosphère, Christophe me lançait un « est-ce que tu trouves encore le sentier trop plat? »… et moi de répondre « oui… beaucoup trop plat… mais plat vertical ».
Arrivé au « Refuge de Tête Rousse » sain et sauf, je lançais à mes compagnons « qui l’eu cru… nous sommes toujours en vie » avec un rire rempli de soulagement. Je n’avais jamais douté que nous serions en bas de la montagne avant la fin de la journée… mais j’avais eu quelques craintes à savoir si nous serions en bas… vivant.
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La pression tombait… à partir de là, il n’y avait plus « aucun » risque; ne restait plus qu’à se laisser glisser sur la neige (parfois littéralement) jusqu’au train 1h plus bas.
11.30 – La gare du Nid d’Aigle était à portée. Le trek était terminé.
Notre guide regardait sa montre avec étonnement. Il nous disait qu’il était normalement de retour à cette gare entre 14.00 et 17.00, et que nous étions probablement son groupe le plus rapide.
À moins que le train ne manque de frein, nous allions vivre un autre jour…
EPILOGUE
Un jacuzzi, quelques bières et une bonne nuit de sommeil plus tard, j’étais dans le train « Mont Blanc Express » à quitter la « Vallée Blanche ». Par la fenêtre, je fixais l’Aiguille du Midi et au Mont Blanc.
J’avais un immense sourire… un sourire ayant une signification différente des sourires précédents; à les regarder d’en bas, je devais me pincer pour croire que j’étais vraiment allé tout en haut.
Le Mont Blanc n’était pas mon sommet le plus haut (à ce jour c’est toujours le Kilimanjaro), mais assurément le plus difficile. Des 16 randonneurs inscrit au Stage Mont Blanc en même temps que moi, seul 7 s’étaient rendus au sommet.
Moi qui était blasé et qui n’avait qu’une seule idée en tête après avoir fini le GR20 (épisode précédent); rentrer au plus vite au Canada, j’avais finalement passé les 5 plus beaux jours de mon voyage sur le Mont Blanc et ses environs… 5 jours qui faisaient passer le reste de mon voyage pour une promenade dans le parc tellement le niveau de difficulté/dangerosité avait été grand.
Je quittais les Alpes Françaises avec une excitation sans borne pour mon voyage en Amérique du Sud, voyage où je planifiais collectionner les sommets enneigés de plus de 5000/6000m.
Allez… cap sur Toulouse dans le sud de la France avant de rentrer 1 mois au Canada.
On se reparle en direct de Bogota/Colombie début aout.
P.S. – Un gros MERCI à mon guide Christophe Bougon pour nous avoir mené au sommet et retourné sur le plancher des vaches sain et sauf… et pour avoir enduré toutes mes blagues stupides avec le sourire et la bonne humeur.
*Sommet de l’Europe si l’on exclus la Russie de l’Europe. Le Mont Elbrus dans la chaine des Caucase est plus haut). Certains pourraient dire que c’est la Russie qui s’exclut elle-même de l’Europe… mais bon, je ne parle pas de politique.

Épisode 73 – GR Vins (20)

12 juin 2016
Dans la catégorie « À éviter », il y a bien sur les très évidents;
– Donner un coup de pied dans un nid d’abeilles,
– Fumer une cigarette en faisant le plein à la station service,
– Nager avec des requins si on saigne abondament,
Il faut maintenant ajouter à cette liste;
– Arriver à Calenzana un dimanche.
Calenzaquoi? Calenzana… le village situé au départ de la randonnée du GR20… si vous faites le GR dans la direction Nord/Sud.
Pourquoi? Pour la simple raison que l’endroit ressemble à une ville fantôme le dimanche; tous les services, ou presque, sont fermés (épicerie, etc.). Il nous était donc impossible d’acheter des provisions pour le GR.
Peu nous importait, ce n’était pas une absence de ration qui allait nous empêcher moi et Tanzi (venue directement de Dubai pour m’accompagner dans mes aventures en Corse) de commencer le GR20 tel que prévu à la première heure le lendemain matin. Nous allions partir aux premiers rayons de soleil et mettre notre destin entre les mains de la montagne.
CORSE ET GR20 POUR LES NULS
La Corse est une île au large de l’Italie, tout juste à coté de l’ile de Sardaigne dans la mer Méditerrannée. L’ile est un territoire francais, mais conserve une très forte influence italienne témoignant de ses origines (les noms de villes, montagnes, de familles sont italiens).
Créé au début des années 70, le GR20 est un sentier de randonnée dans les montagnes du Parc Naturel Régional de Corse. Le parc englobe presque tout le centre de l’ile et plus de 1/3 de la superficie totale de la Corse.
Le GR20 coupe en diagonale la Corse du Nord-Ouest (Calenzana) au Sud-Est (Conca) et fait environ 200km.
« Le GR20 a été concu au départ dans un esprit sportif, spartiate avec peu de confort, se pratiquant en autonomie. »
Le sentier a longtemps été réservé à un public averti marchant en autonomie complète (transporter sa nourriture, tente, sleeping… tout quoi) capable de porter des sacs de 25kg (mon sac en fait 5kg). C’est aujourd’hui loin d’être réservé à l’élite des marcheurs puisqu’il a depuis été « démocratisé » (facilité… facilité ne veut pas dire facile) avec l’ajout de gite et la vente de nourriture. Il est aujourd’hui fréquenté par une HORDE de randonneurs de tous les niveaux (surtout des vieux sans trop d’expérience si vous voulez mon avis). La portion Calenzana/Vizzavona (environ au centre de l’ile) est réputée comme étant la plus difficile passant par plusieurs hauts sommets frolants les 3000m. En contrepartie, la portion Vizzavona/Conca est réputé plus « facile », mais les distances y sont plus longues.
Bref, vous comprenez un peu dans quoi je m’étais embarqué. On ne parle pas de pèlerinage ou de marcher un GR quelconque, il s’agit de marcher le GR20, un sentier qui a la réputation d’être LA randonnée la plus difficile d’Europe.
On allait bientôt en avoir le coeur net et voir si ce qualificatif était méritée.
FLASHBACK DEPUIS COMPOSTELLE
Il s’était écoulé 6 jours entre la fin de mon Camino de Santiago (6 juin) et le début de mon GR20 (13 juin). 6 jours où j’avais fait tout en mon possible pour limiter les activités physiques afin de guérir mes blessures, faire la paix avec mes pieds et être dans une forme optimale pour le GR20.
En Suisse…
Genève… avec un coucher de soleil parfait sur le bord du lac Léman,
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Lausanne… un peu déçu de cette ville.
En Corse…
Bastia… avec sa vieille ville organisée autour d’un port surveillé par une citadelle perchée en haut d’une colline en bord de mer.
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Corte… et son intrigante citadelle en porte-à-faux sur un rempart rocheux dominant la ville,
Bonifacio… une ville défiant la gravité en surplombant la mer du haut de ses  falaises de calcaires.

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L’escalier du roi Aragon, qui descent jusqu’au niveau de la mer, peut-être l’escalier le plus intense que j’ai monté/descendu, est quelque chose à ne pas manquer.
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Je n’ai surtout pas chaussé mes souliers de montagne pour;
– marcher 1 journée (20-30km) dans les vignobles en terrasses de Lavaux. Situés entre Lausanne et Montreux et classés patrimoine mondial de l’UNESCO, ces champs de vignobles en terrasse vieux de plus de 1000ans surplombent le lac Léman. Véritable labyrinthe parsemé de petits villages, on se surprend à y marcher durant des heures,
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– faire un trek de 11km, +1200m -1200m, tout sauf une prommenade de santé, jusqu’au sommet de la plus haute montagne surplombant Corte pour y voir l’Arche (rocheux) de Corte,
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– marcher dans les Balanques de Piana, surprenant site de l’UNESCO sur la cote Ouest de la Corse,
– faire une « petite » randonnée matinale de 8km, +600m -600m en bord de mer jusqu’au sommet d’une grosse roche surnommé Capo Rosso, pour y admirer son vieux fort… et la vue sur la mer en contrebas.
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Ajoutez à cela que j’avais loué une voiture pour faire le tour de l’ile durant 4 jours… une voiture manuelle. Mon expérience en conduire manuelle se résumait à quelques fois il y avait 4 ans et cela n’avait pas vraiment été couronnée de succès. Je me retrouvais donc à conduire en Corse, une ile montagneuse, à constament monter/descendre et où les routes droites n’existaient pas. Plus de peur que de mal…
Bref, vous avez tous compris que je commencais le GR20 bien reposé 😉
JOUR J – RETOUR AU BOULOT
13 juin 2016 – Calenzana
06.30 – Le réveil sonne… la vérité me sautait au visage, à peine terminé le Chemin de Santiago que je reprenais du service.
Après avoir enchainé coup sur coup la Grande Traversé de La Réunion (plus de 150km) et le Camino de Santiago (plus de 800km), je tentais de compléter la trilogie en marchant le GR20 en Corse (plus de 200km)…
Mes pieds, qui portaient encore les cicatrices douloureuses du Camino, retournaient dans leur boureau et je remettais Boule de Quille sur mon dos.
Après avoir arpenté les petites rues de Calenzana, le début du sentier se trouvait maintenant devant nous. Je ne pouvais plus reculer… enfin… j’aurais toujours pu, mais cela n’aurait pas été très viril aux yeux de Tanzi.
Nous dévorions les 7 premiers km à un bon rythme; en 2 heures, nous avions atteint facilement le col Bocca u Saltu à 1250m.
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Le GR20 prennait véritablement son envol à partir de ce moment. Après avoir marché dans une très belle forêt de pins, le sentier montait désormais dans une zone d’éboulement. Un faux mouvement et j’allais ajouter une cicatrice (ou pire) à ma collection. Je me rendais compte que mon corps n’avait pas bien (pas du tout) récupéré depuis la fin du Camino de Santiago… un peu normal puisque je ne lui avait pas laissé l’occasion de reprendre son souffle.
12.05 – Arrivé au refuge sain et sauf 5h15 après notre départ, il n’y avait maintenant plus qu’à admirer le paysage et attendre le souper… 6h plus tard. Le campement était situé sur un faux plat à mi-hauteur d’une vallée, et offrait une vue sur la mer loin en contrebas.
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Après avoir passé l’après-midi à faire la sieste au soleil, je décidais de monter jusqu’au sommet de la montagne derrière le refuge pour me mettre en apétit (comme si j’en avais besoin). Alors que la montée se faisait sans problème, la descente était pénible; j’étais mort de faim et le sentier était glissant… j’avancais à pas de tortue (vous avez déjà vu une tortue en montagne… ouais… c’est ça).
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Pour le souper on nous servait des lentilles à la sauce tomate. Même moi, qui suis NUL en cuisine, n’oserais pas faire ce mix… et surtout charger 20 euros (+/-27$) pour le plat. La cuisinnière interprétait ma demande pour un 2ème plat comme si j’aimais sa cuisine (elle était toute contente). La vérité c’est que j’étais mort de faim et que j’aurais passé au travers d’un sac de croquettes pour chien si elle me les avait servi.
RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Calenzana
Altitude de départ; 280m
Arrivé; Refuge Ortu di u Piobbu
Altitude d’arrivé; 1560m
Distance; 11km
Dénivelé; +1360m -60m
JOUR 2 – L’ESPRIT EN PAIX
14 juin 2016 – Refuge Ortu di u Piobbu
À notre réveil, la vue panoramique que nous avions le veille à partir du refuge avait fait place à un mur blanc; une mer de brouillard.
Nous avions décidé de prendre un sentier alternatif pour nous éloigner des foules, éviter le grand vent et alonger notre randonnée (14km au lieu des 7.5km annoncé pour le sentier officier).
Le sentier descendait en serpentant au travers d’une forêt de pins. Arrivé tout en bas à l’Auberge de la Forêt, il était maintenant temps de remonter de l’autre coté.
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12.45 – Arrivé au refuge de Carozzu, notre refuge du jour. Perché a à 1270m dans une cuvette formée par la montagne qui se refermait sur 3 cotés pour s’ouvrir seulement sur une vallée plongeant vers le bas (d’où nous arrivions), avec la mer tout au loin.
À écouter tous les autres randonneurs dire oh combien le sentier du jour avait été difficile, je m’en voulais d’avoir pris un chemin « facile »… même si mon intention était bonne; faire plus de km.
J’allais passer le reste de l’après-midi à me reposer… ERREUR… vous me prenez pour quelqu’un de rationel?
Je décidais de faire une marche punitive jusqu’au sommet de la montagne derrière moi sur le sentier GR20 que nous aurions dû prendre. Je voulais m’enlever le gout d’avoir triché de la bouche.
J’avais l’impression de voler sur le sentier… même si je montais… comme si j’étais poussé par un sentiment d’urgence… ou par le fait que je n’avais pas de sac à porter.
Le sentier était comme je l’imaginais; difficile et extrèmement casse-gueulle. Il le fallait pour que 6km aient pris plus de temps à des gens de mon niveau, qui étaient partis plus tôt que nous et arrivé à Carozzu après nous.
Nous montions dans un glissement de terrain avec une quasi absence de prises solides pour les pieds. Pour chaque 3 pas que je montais, j’en descendais 1. C’était comme de la danse en ligne… mais en plus amusant 😉
Mon « moi du futur » (qui allait devoir redescendre jusqu’au refuge un peu plus tard) détestait mon « moi du présent » et son orgeuil mal placé.
Le sentier était tellement casse-gueulle que j’avais croisé une fille en larme. Elle descendait au refuge Carozzu et me demandait si elle était au bout de ses peines. Elle était malheureusement tout en haut du mur et bien loin de voir la lumière au bout du tunnel.
Mon sentiment de culpabilité s’envolait presque entièrement lorsque j’atteignais le sommet du col Bocca Innuminata à 1865m. J’avais monté 600m et marché 2.5km depuis mon départ de Carozzu. Il me restait à défaire mon chemin pour retourner au refuge. Plus facile à dire qu’à faire.
Ce soir, le souper s’améliorait un peu; du spaghetti à la sauce tomate. Loin d’un repas étoilé Michelin, mais une petite amélioration.
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RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Refuge Ortu di u Piobbu
Altitude de départ; 1560m
Arrivé; Refuge de Carozzu
Altitude d’arrivé; 1270m
Distance; 14km (+5km)
Dénivelé; -1060m +770m (+600 / -600m)
Jour 3 – LE SINGE DES MONTAGNES
15 juin 2016 – Refuge de Carozzu
Connaissez-vous le singe des montagnes? En avez-vous déjà vu? J’imagine que non puisque c’est une espèce très rare que l’on retrouve presque uniquement sur les sentiers du GR20 en Corse. Ces humanoides mi-singe, mi-tortue qui avancent avec leurs pieds et leurs mains et qui transportent leur maison sur le dos. Eh bien nous n’en avons pas simplement vu, nous en sommes devenu aujourd’hui. Pas le choix si on voulait passer au travers de cette journée en un seul morceau vu la grande difficulté du parcours, qui s’apparentait plus à de l’escalade qu’à de la randonnée.
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Le sentier ne pardonnait tout simplement pas. Parti à 07.00 tapant, les premiers km se passaient à monter dans un canyon abrupte et parsemé de grosses roches. Une fois au col Bocca Muvrella à 1980m, nous avions parcouru 3km en un peu plus de 2h30.
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Par la suite, le sentier longeait la paroi avec des sections encore plus techniques. Il n’était pas rare d’avoir à descendre une paroi rocheuse de 8/10m de haut avec des appuis limités et aucune corde/chaine. Alors que je donnais l’impression d’être un enfant dans un magasin de jouet… j’avais le sourire fendu jusqu’au lèvre… je croisais beaucoup de randonneurs avec le regard crispé par la peur. Et pour cause, un faux mouvement et c’était une chute de quelques mètres… ou pire. Le GR20 n’est pas un sentier de randonnée qui prend par la main. Il faut en fait l’agriper à 2 mains si l’on veut avoir une chance de succès/survi.
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L’ascension d’un 2ème col nous mettait exactement à 2000m. On pouvait alors voir le refuge du jour tout en bas… loin tout en bas… qui donnait l’impression de pouvoir être atteint en 15 minutes… quand il nous fallait finalement 1h30 pour négocier le sinueux parcours d’escalade tout en descente.
11.45 – La journée de travail était véritablement terminée avec le refuge de Ascu devant nous. Nous bouclions les 5.5km en 4h45… en étant parmi les plus rapides.
Perdu dans les montagnes aux sommets enneigés et accessible par la route, Ascu est une petite station de ski l’hiver et se transforme en refuge du GR20 le reste de l’année. L’un des sommets qui l’entoure, le Monte Cinto, est le plus haut sommet de la Corse à 2700m.
Nous passions le reste de la journée à boire. Pour ceux qui lisent attentivement mes aventures depuis mon départ de Dubai, vous en êtes peut-être déjà venu à la conclusion que j’étais (re)devenu alcoolique. Vous n’avez pas tort… mais en montagne il y a 2 choses à faire; marcher et boire. Je bois mon 50/75cl de vin quotidiennement depuis 3 mois et j’ai quand même perdu plus de 10kg. Ce n’est pas aujourd’hui que je vais changer une formule gagnante 😉
RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Refuge de Carozzu
Altitude de départ; 1270m
Arrivé; Refuge de Ascu Stagnu
Altitude d’arrivé; 1420m
Distance; 5.5km
Dénivelé; +800m -640m
Jour 4 – BEAUTÉ FATALE
16 juin 2016 – Refuge de Ascu Stagnu
Lorsque j’avais procédé à la réservation des refuges avant de quitter Dubai, j’avais cru bon de doubler une étape aujourd’hui (faire 2 étapes en 1 journée). C’est assez commun sur le GR20… mais je ne crois pas que beaucoup de randonneurs doublent ces 2 étapes. Je ne sais pas trop à quoi j’avais bien pu penser.
La 1ère étape, longue de « seulement » 9.1km, montait jusqu’au toit de la Corse et avait un panneau où était écrit en grosses lettres « sentier hautement technique… 8-10heures ». Si ce sentier avait la mention « technique » et que le sentier d’hier ne l’avait pas… gulp…
Si nous étions toujours en 1 seul morceau à l’arrivé, la 2ème étape, longue de 6.5km, allait nous attendre les bras grand ouvert pour terminer le travail. Au total on parlait de seulement 16.6km de marche, mais d’environ +2000m et -1000m de dénivelé.
J’avais eu du mal à dormir tellement j’étais anxieux. Tout seul je n’aurais pas eu de problème, mais j’avais Tanzi avec moi et je me sentais responsable.
Peu importe, il n’y avait qu’une seule chose à faire; marcher.
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05.50 – Nous prenions la route avec un ciel bleu exempt de nuage. Les montagnes semblaient nous dire « Venez! ». Nous n’allions pas refuser leur invitation.
Premier sur le sentier, c’était le calme avant la tempête; les oiseaux chantaient, le soleil ne nous avait pas encore atteint et le sentier était facile. On se dirigait tranquillement mais sûrement vers le fond de la vallée, vallée qui n’était ouverte que sur un seul coté… celui dont nous arrivions… les autres cotés étant fermés par des parois rocheuses quasi verticales. Nous couvrions les 2 premiers km en moins de 1h. La suite devait nous prendre beaucoup plus long.
Après quelques minutes de monté éreintante, il était maintenant clair que le sentier était devenu un « non sentier », dans la mesure où il n’y avait pas vraiment de sentier tout tracé pour monter la paroi verticale; il fallait simplement faire de son mieux pour passer d’un drapeau rouge/blanc à l’autre. Le grand vent transformait tout mouvement en spectacle de haute voltige et tout équilibre était précaire.
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Une fois cette première paroi montée, nous débouchions dans une nouvelle vallée plus haute et toujours ceinturée de montagnes aux parois plus verticales qu’horizontales.
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Il n’y avait alors aucune trace de vie (humaine) autour de nous. Nous étions entouré de la nature à son état brut, la Beauté à l’état naturel… et hautement dangereuses. Cette Beauté n’attendait qu’un moment de relâchement de notre part pour nous faire un coup sournois aux conséquences imprévisibles.
D’ailleurs, il y a presque 1 an jour pour jour se produisait l’une des plus grande catastrophe du GR20 à proximité de où nous nous trouvions. Mi juin 2015, les montagnes étaient encore chargés de beaucoup de neige après un hiver rigoureux. Des températures extrêmement chaudes faisait se déclencher une avalanche qui emportait au moins 5 randonneurs avec elle. On retrouvait les corps seulement quelques jours après.
08.00 – Après 3.5km (1.5km d’ascension en 1h30), nous avions atteint un nouveau plateau à 2150m.
Par la suite, le sentier n’en finissait pas de monter, et plus ça montait plus ça devenait technique. Je ne ressentais plus la fatigue tellement j’étais boosté par l’adhrénaline. Un peu avant le sommet, la pente était devenue tellement raide, qu’il fallait toujours être en position plié vers l’avant pour ne pas perdre l’équilibre et se faire renverser vers l’arrière. Toute cette ascension finale se faisait dans un champ de cailloux vertical, avec certains passage dans la neige en guise de répit.
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09.20 – 2600m… nous avions atteint le sommet du sentier… un endroit TOTALEMENT inhospitalier, formé de roches de toutes formes et grosseurs, agrémenté d’un vent à écorner les boeufs et d’une température glaciale… même si le soleil rayonnait de tous ses feux dans un ciel sans nuage.
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De là, le Monte Cinto, sommet de la Corse, était à 1km allé. Nous y voyons peu d’intérêt puisque nous avions déjà un formidable panorama à 352 degrés de là où nous étions.
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Désormais en mode descente sur le versant opposé, nous étions exposé au grand vent à traverser une mer de cailloux sur 3km. Un pas nonchalant et votre pied se posait au mauvais endroit. Au départ amusant, on en venait vite à se lasser à constamment perdre pied.
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12.10 – Fin de la 1ère étape avec notre arrivé au refuge Tighjettu à 1683m et 9.1km dans les jambes. Cela n’était pas le temps de s’appitoyer sur notre sort. Une courte pause et nous étions de retour sur le sentier. La 2ème étape du jour se décortiquait en 3 temps; une descente toute en douceur dans une vallée longeant une rivière, suivit d’une agréable (c’est possible) monté dans une forêt de pins… et d’une beaucoup moins agréable montée assez technique sur des parois rocheuses pour rejoindre le col du Bocca Foggiale à 1962m. Cette dernière partie se révélait une véritable torture pour mes pieds, alors que mon cardio avait lâché prise il y a bien longtemps.
16.30 – Fin du calvaire. High Five à Tanzi pour célébrer le fait que cette journée tant redoutée était désormais chose du passé. Avant même d’avoir retiré mes souliers, je me dirigais à l’intérieur du refuge et commandais une bouteille de vin (le gars connait ses priorités).
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RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Refuge de Ascu Stagnu
Altitude de départ; 1420m
Arrivé; Refuge de Ciottulu di I Mori
Altitude d’arrivé; 1991m
Distance; 16.6km
Dénivelé; +1700m -900m
Jour 5 – DÉROULE LE TAPIS ROUGE
17 juin 2016 – Refuge de Ciottulu di I Mori
De très forts vents et une pluie dilluvienne avait frappés le refuge une bonne partie de la nuit. On pouvait donc s’attendre au pire pour cette journée de marche.
06.30 – À notre réveil, tout avait cessé. Ne restait qu’un sentier détrempé, un très fort vent et un épais brouillard (c’était déjà bien assez si vous voulez mon avis). Les Dieux de la marche étaient véritablement de notre côté.
Après avoir marché un bon moment sans rien y voir, nous descendions sous la nappe de brouillard pour  découvrir le paysage qui s’y cachait. Nous avions devant les yeux un paysage complètement différent des derniers jours. Alors que nous avions pris l’habitude de marcher de sommet en sommet, nous étions désormais à serpenter entre les montagnes dans une contrée de collines recouvertes de verdure et de roches. Le sentier nous guidait tout en bas de la vallée vers le seul endroit lumineux. C’était comme marcher dans un tunnel en se dirigant vers la source de lumière tout au bout.
Après quelques 2 heures de marche, l’horizon s’ouvrait devant nous; le brouillard au-dessus de nos têtes laissait toute la place à un ciel bleu, et les montagnes, qui agissaient tels de murs étouffants, s’élargissaient pour laisser place à une immense forêt.
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Après 10km de balade, le sentier commencait à monter. Que serait une journée sur le GR20 sans une ascension d’au moins une montagne? Celle-ci n’était qu’une formalité et à 12.10 nous étions au sommet du col Bocca a Reta à 1883m.
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Tout de suite après, le sentier descendait vers un grand lac entouré d’un étrange pâturage ressemblant étrangement à un vert de terrain de golf.
On se doutait que le GR20 n’allait pas nous laisser finir la journée aussi facilement et qu’il nous réservait une petite surprise pour la fin… du genre monté éreintante sur les 2-3 derniers km.
Et puis boum… on apercevait le refuge du jour au détour d’une grosse roche… perché… tout en bas de la vallée… avec un sentier hyper pénard traversant une plaine… comme si le GR avait déroulé le tapis rouge (vert) pour nous acceuillir au refuge.
Trève de célébration, même facile, il fallait tout de même les marcher ces 2km.
14.10 – Aussitôt arrivé au refuge de Manganu à 1600m, que nous étions prêt à repartir. Je ne sais pas d’où ils sortaient, mais je n’avais jamais vu autant de gens dans un même refuge de montagne. Le terrain de camping ressemblait à un parking de centre-d’achat un samedi après-midi.
Le refuge n’était guère mieux avec un dortoir constitué de matelas pas très large collés l’un sur l’autre. Cela voulait donc dire que je risquais fort de me réveiller nez à nez… ou même en cuillère (frisson de dégout)… avec le suisse dormant à coté de moi.
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Pas cool quand tu avais une grosse journée de marche dans les jambes et que tout ce que tu désirais était de relaxer.
RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Refuge de Ciottulu di I Mori
Altitude de départ; 1991m
Arrivé; Refuge de Manganu
Altitude d’arrivé; 1600m
Distance; 23km
Dénivelé; +650m -1050m
Jour 6 – SUR LE DOS D’UN DRAGON
18 juin 2016 – Refuge de Manganu
05.40 – Tout était déjà rangé et nous étions en route. Encore une fois nous allions doubler les étapes. Au menu 18km de marche, plus de +1800m de monté et -1200m de descente.
Le premier test de la journée ne tardait pas avec l’ascension d’un mur de pierres sans véritable sentier; il s’agissait de choisir les bonnes pierres pour s’agriper et monter jusqu’en haut. L’exercise se révélait ardue avec un cerveau encore sur l’oreillé. Quoi de mieux que d’éprouver un sentiment de danger après avoir perdu l’équilibre et manqué se fracasser le crâne pour être bien réveiller… je vous jure que c’est plus eficace que le plus fort café du monde.
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On montait sans relâche jusqu’à une vallée fermée de tous les cotés par des murs rocheux (un sentiment de déjà vu).
Il n’y avait pas de solution magique; on reprenait la séance de semi-escalade où nous l’avions laissé il y a 2 jours en s’efforçant de suivre les drapeaux.
07.40 – Après avoir réalisé l’ascension complètement à l’ombre, nous étions baigné dans la lumière en arrivant au col Bocca à la Porte à 2220m. En un instant, nous passions d’une vallée exposé au vent, sans soleil et où tu te les gèles, à un versant au plein soleil où tu sus à grosses goutes.
La vue du col était sublime; entouré de montagnes avec des lacs à l’eau bleu clair en contrebas.
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Les réjouissances étaient de courte durée alors que le sentier repartait de plus belle avec certaines des sections les plus technique de tout le GR20. Encore aujourd’hui, le sentier ne fairait aucun prisonnier… que des vainqueurs et des victimes.
S’en suivait une 2ème ascension à 2170m… avec beaucoup de sections dans la neige.
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Et une 3ème à 2210m…
Suivit d’une descente aux airs de balade du dimanche jusqu’au refuge Petra Piana à 1842m.
10.40 – La 1ère étape était dans la poche; 8.3km en 4h. Pas mal pour ce qui devait être une étape d’un jour pour la plupart des randonneurs. Pour nous ce ne serait qu’une halte avant de repartir de plus belle.
Motivé par l’attrait d’un sentier plus court, on optait pour la variante du GR20 passant par les sommets au lieu de contourner les montagnes par la vallée. Sentier plus court, mais beaucoup plus technique.
Sage décision puisque cette variante entre Petra Piana et Onda est probablement la plus belle section du GR20 que j’avais marché à ce jour. Le sentier avait des airs de montagnes russes, allant de sommet en sommet… comme si nous marchions sur l’arrête dorsale d’un dragon en se frayant un chemin au travers de ses épines… pour atteindre notre 4ème sommet du jour à 2035m… redescendre drastiquement… et remonter vers un 5ème sommet à environ 2000m.
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S’en suivait une descente sur un versant peu rocailleux de la montagne. Nous avions tout le loisir d’admirer en long et en large la chaine de montagne qui nous faisait face, avec notre refuge du jour tout en bas et une sentier qui montait tout en haut, sentier que nous aurions à fouler dès demain.
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14.40 – Exactement 8 heures, 15km, +1700m et -1200m après notre départ, nous foulions le plancher du Refuge de l’Onda à 1431m.
Le refuge était tout aussi merdique que les autres précédents… à la différence (majeure) d’être juste à coté d’une bergerie. Résultat; nous aurions enfin un bon repas (PAS de pâtes) faits de produits de la ferme.
RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Refuge de Manganu
Altitude de départ; 1600m
Arrivé; Refuge de l’Onda
Altitude d’arrivé; 1431m
Distance; 15.1km
Dénivelé; +1700m -1200m
Jour 7 – TERMINUS VIZZAVONA
19 juin 2016 – Refuge de l’Onda
06.30 – Ce matin on se gâtait un peu; grâce matinée jusqu’à 06.30… ouuuuu
Je n’avais AUCUNE envi de marcher. Mon cerveau se croyait déjà arrivé à Vizzavona, 10km plus loin et mi-parcours du GR20. Je salivais déjà à l’idée de dormir dans une chambre d’hôtel douillette (PAS un dortoir et PAS de ronfleur).
Pour une 4ème journée de suite, tout le monde nous annonçaient des torrents de pluie. En sortant du refuge, je ne pouvais que me résigner et leur donner raison; le ciel était sombre vers le Nord. Heureusement pour nous, nous allions vers le Sud et le ciel était bleu. Dame Nature était encore de notre coté.
08.30 – Après 1h30 d’ascension sans histoire, nous étions au sommet du mont Muratellu à 2020m.
Ne nous restait « plus que » 1200m à descendre jusqu’à Vizzavona. Chaque pas que nous faisions nous rapprochait d’une bonne douche chaude… une 1ère depuis le départ.
11.30 – Terminus Vizzavona. Ce village représentait la fin du parcours pour Tanzi qui allait quitter pour Ajaccio sur la cote dès demain, afin de repartir pour Dubai.
Nous étions tombé dans un vieil hôtel plein de charme à la décoration rétro-chic et dirigé par une grande famille… vous savez quand il y a une tonne de vieilleries un peu partout… il y avait même une vieille dame assise dans un fauteuil à la réception. Celle-ci donnait l’impression d’être morte et empaillée là tellement elle n’a jamais bougé de TOUTE la journée.
Pour tout dire, j’avais l’étrange impression d’être dans la maison de « La Famille Adams » (vous savez les vieux films où il y avait une main qui marchait toute seule).
RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Refuge de l’Onda
Altitude de départ; 1431m
Arrivé; Hotel Monte D’Oro (Vizzavona)
Altitude d’arrivé; +/-900m
Distance; 8.4km
Dénivelé; +700m -1200m
Jour 8 – À COURT D’ARGENT
20 juin 2016 – Vizzavona
Arrivé à Vizzavona avec 0.5 euros dans mes poches, j’étais convaincu d’y trouver un guichet automatique.
ERREUR
J’avais fait la faute de penser que Vizzavona était une ville. C’était en fait un village… que dis-je… un trou perdu au milieu des montagnes avec un gare et une demi-douzaine de bâtiments.
Résultat; le guichet le plus près se trouvait à Ajaccio ou Corte… à 1 heure de train de Vizzavona dans un sens ou dans un autre.
« Tu n’as qu’à demander à un commercant de surfacturer ta carte de crédit et te redonner le tout en liquide » que quelques-uns d’entre-vous pourriez penser. Sachez que j’y avais pensé aussi… mais que c’était sans prendre en compte la « générosité » légendaire des Corses. En d’autres mots, il en était hors de question.
Aussi con que cela puisse sembler, j’étais en route pour Ajaccio avant l’heure (j’allais quitter le Corse par Ajaccio après avoir complété le GR20)… un mal pour un bien puisque j’avais entendu beaucoup de bien de ce chemin de fer passant par les montagnes, et j’allais pouvoir accompagner Tanzi à Ajaccio.
Le chemin de fer comportait de multiples tunnels, dont un de plus de 2km+.
Avez-vous déjà vu un train arrêter à chaque croisement de route, l’un des conducteurs descendre et stopper les voitures? Non?!? Eh bien c’est que vous n’avez jamais pris un train en Corse. Les Corses n’ont pas tout à fait compris le concept de train…
Une fois passé au guichet, j’étais sur mon départ avec le prochain train pour Vizzavona quand je décidais sur un coup de tête de rester à Ajaccio pour la nuit. Tanzi ayant choppé un début de bronchite, je me sentais mal de la laisser seule une nuit à Ajaccio avant son vol.
J’allais donc passer la nuit à Ajaccio, prendre le 1er train pour Vizzavona le lendemain et me taper 2 journées de marche en 1. J’allais probablement le regretter demain… mais pour l’heure j’avais une confortable chambre d’hôtel qui m’attendait pour une 2ème soirée de suite… il ne fallait pas trop y prendre goût.
En voyage comme dans la vie de tous les jours, il faut savoir improviser et être flexible dans son horaire pour s’ajuster aux imprévus et transformer une situation malheureuse (au premiers coup d’oeil) à son avantage.
Ajaccio est une ville cotière sans grand intérêt, mis à part pour ceux qui aiment la plage et/ou ceux qui font une fixation sur les petits bonhommes voulant conquérir le monde. Je parle bien sur du petit bonhomme d’entre-tous; Napoléon Bonaparte. Née dans la capitale de Corse il y a un peu plus de 200ans, nombreuses sont les références et monuments à lui et sa famille un peu partout en ville. Comme je n’étais ni un fervent de plage ou de petits bonhommes, j’allais profiter de l’air climatisé pour mettre à jour mes écrits.
RÉSUMÉ DU JOUR
Marche urbaine de 9km hors GR20
Jour 9 – ORGEUIL MAL PLACÉ
21 juin 2016 – Ajaccio
04.00 – Pendant un moment, je me demandais où est-ce que je me trouvais, pourquoi je n’étais pas à la montagne et pourquoi mon réveil était à 04.00 au lieu de 05.30?!?
Ça y est… la mémoire me revenait; Ajaccio… journée de repos la veille…
Je disais Au Revoir à Tanzi et retournais à la réalité en sautant dans le premier train en direction de Vizzavona avant même que le soleil soit levé… au grand dam de mes jambes/pieds qui avaient pris gout à ne pas marcher.
07.15 – Gare de Vizzavona. Les portes du train s’ouvrait. De l’argent plein les poches, je pouvais finalement entamer la portion sud du GR20.
Je devais maintenant rattraper mon retard d’hier et marcher plus de 32km pour rejoindre le refuge où j’avais réservé ce soir. Je mettais du beat dans mes oreilles et prenais la route. Le chant des oiseaux seraient pour un autre jour, j’avais besoin de motivation.
32km… sur le Camino de Santiago… c’était une petite journée, mais 32km avec plus de 1000m de monté et de descente représentait un certain défi. Maintenant seul, j’avais le loisir d’aller à la vitesse que je voulais… même si Tanzi avait suivit mon rythme, me laissant même derrière lors des descente…
La 1ère portion consistait à monter sur un chemin forestier, avec comme toujours mon ami le soleil qui tapait dans mon dos.
Trop confiant et ne portant pas trop attention à où j’allais, je manquais un virage et finissais par perdre le sentier. La chanson qui jouait dans mes oreilles me répetait « where are you now […] so lost I’m faded » (« Faded » de Alan Walker)… Je n’en avais aucune idée où j’étais Alan… mais merci de demander.
Je me retrouvais au beau milieu des bois pendant une demi-heure à chercher les drapeaux… que je retrouvais grâce à mon application IPhone gratuite « Maps.Me » qui contenait le sentier GR20 et offrait la localisation GPS sans connection internet/wifi (j’ai dit que c’était GRATUIT et sans frais caché).
Une fois de retour sur le sentier, je retournais à ma gentille promenade sur sentier de terre battue en forêt.
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08.45 – Je débouchais au sommet du Col Bocca Palmentu à 1640m, sans avoir dépensé trop d’huile de genoux.
900m d’ascension sur un sentier forestier… c’est tout ce que tu avais dans le corps GR20 du sud?!? Je n’avais même pas senti l’ascension tellement la pente était légère et le sentier dégagé. J’avais au moins une vue imprenable sur la mer tout en bas de l’autre coté.
Après une avant-midi pépère, le refuge de Capanelle, station de ski l’hiver et refuge de montagne l’été, ne se laissait pas atteindre sans effort. La montée finale, aussi abrupte que brève, faisait en sorte de vider ma batterie. J’arrivais à Capanelle avec la langue par terre et 14km dans les jambes.
10.45 – La 1ère étape de mon programme double était dans la poche. Un peu de repos, un bon fromage de chèvre et du pain frais, et je repartais pour Prati 18km plus loin.
Je repartais sur les chapeaux de roues en réalisant l’intense assension de 300/400m en dessous du monte pente dans un temps record et à la vue des autres randonneurs encore au refuge… pour m’appercevoir que le sentier ne passait pas par là, mais tout en bas.
Mal à l’aise et ne voulant pas redescendre la queue entre les jambes devant tous les autres, je décidais de continuer et de rejoindre le sentier officiel de l’autre coté de la montagne… par mon propre sentier; dans la brousse à descendre sur un flanc de montagne sans sentier, non dégagé et pentu. Plus de peur que de mal, mais au prix de nombreuses coupures sur les jambes, je retrouvais le sentier. Un gaspillage d’énergie qui pourrait me rattraper avant la fin de la journée.
Encore une fois, j’avais préféré risquer de me blesser gravement plutôt que de vexer mon égo. Mon orgeuil mal placé allait peut-être avoir raison de moi un jour… mais pas aujourd’hui.
La marche reprenais son court normal à zigzager gentiment dans les bois. Je me serais cru en train de faire le « sentier des loups » (en plus long) dans le Parc de la Jacques Cartier tellement la forêt et le sentier étaient identiques. Ce parcours de 18km ne comportait aucune difficulté (quand on suivait le sentier…), il n’y avait aucune haute montagne à l’horizon… que des collines recouvertes de forêt… de sorte que je montais 900m sans même m’en rendre compte. J’attendais les difficultés, mais elles ne sont jamais venus. Le sentier était resté un faux plat en montant, pour ensuite redescendre tout aussi tranquilement.
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En fait, l’ennemi principal était la chaleur accablante qui me bombardait de ses rayons toute la journée… ajouté à mon cerveau qui peinait à garder sa concentration un sentier très long. sans grand défi et aux paysages monotones.
Et puis venait la montée finale…
Après 27km sur 32, je croyais ma victoire unanime sur le GR20. J’avais célébré trop vite.
S’étant laissé marché dessus sans répliquer toute la journée, le GR20 avait une autre idée en tête. Tel Mohammed Ali, le GR20 avait gardé TOUT ce qu’il avait en réserve pour la fin…
Du 28 au 31ème rounds, le GR20 se réveillait et me lancait tout ce qu’il avait à la figure pour tenter le tout pour le tout et me passer le K.O.; une ascension de 700m sur 4km… ascension sans répit et abrupte.
Ayant relâché ma garde et à bout de force, j’étais secoué. J’étais tellement en confiance qu’au 26ème km j’avais cru bon de ne pas remplir ma bouteille d’eau à la dernière source.
ERREUR
Je me retrouvais maintenant à l’agoni devant la contre-offensive du GR.
MONTÉ… MONTÉ… MONTÉ…
Je réussisais à atteindre le sommet du Bocca D’Oro à 1825m de peine et de misère.
32ème et dernier round.
Je me promenais au sommet en titubant. Les attaques du GR20 avaient faits leur effet. Je cherchais le gite… mais il n’arrivait pas.
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Ding Ding Ding…
16.45 – Fin du combat. J’arrivais fivalement au refuge de Prati.
Les juges se sonsultaient; Victoire par décision partagée de Nicolas. Le GR20 avait failli me passer le K.0. à la toute fin…. j’avais échappé de justesse au désastre…
Peu importe, une victoire était une victoire… qu’elle soit obtenue par K.O., K.O. Technique, Décision Unanime ou Décision Partagé.
Je pouvais savourer le prix inattendu; du col Cerro D’Oru jusqu’au Refuge de Prati, à 1800m+, le sentier se trouvait dans les hauts de la cote Est de la Corse. La montagne plongait dramatiquement de 1800m à quelques mètres devant moi. On voyait ainsi la cote et la mer tout en bas au niveau 0.
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Réveil à 04.00 à Ajaccio, train de 1h jusqu’à Vizzavona et plus de 11 heures / 32km de marche… je me risquais à dire que cette journée avait été bien (trop) remplis.
RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Ajaccio / Gare de Vizzavona
Altitude de départ; +/-900m
Arrivé; Refuge de Prati
Altitude d’arrivé 1820m
Distance; 32km
Dénivelé; +1800 -850m
Jour 10 – SOLEIL DE PLOMB
22 juin 2016 – Refuge de Prati
Je me réveillais avec un ÉNORME mal de crâne. Voulant célébrer ma victoire In Extremis d’hier sur le GR20 et étant en extase devant la vue depuis mon refuge, je m’étais laissé allé un petit peu… beaucoup… sur la boisson. J’avais commencé par boire 1 bouteille de vin seul… pour en partager une seconde avec un groupe de jeunes qui me trouvaient amusant (allez savoir pourquoi… hic…).
Peu m’importait, j’avais survécu à hier, je pouvais affronter n’importe quoi…
Je ne ressentais AUCUNE presse de quitter ce petit coin de paradis et fixais longuement la mer tout en bas. Après tout, je n’avais que 11km, +700m et -750m à faire aujourd’hui… une prommenade de santé.
08.30 – Les esprits revenus (à peine), que je m’élancais le pas léger. Il n’y avait qu’une seule montagne dans les environs immédiat du refuge et le sentier avait décidé d’y monter jusqu’au sommet. Je me rendais tout de suite compte que mon corps n’entendait pas à rire; il n’avait pas vraiment apprécié (et digéré) toute l’alcool hier. Je manquais d’équilibre, escaladais une roche de manière nonchalante, manquais me fracasser le crâne par-ci… et cela me faisait rire. J’atteignais le sommet de Punta della Capella (1991m) relativement rapidement… pour un saoulons.
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De là, je pouvais apercevoir toute la pointe sud de la Corse, la mer des 2 coté, l’ile de la Sardaigne tout au loin au Sud et les montagnes que me réservait le GR20 jusqu’à la fin.
Le sentier descendait par la suite en passant de sommet en sommet et par des champs où les corses cultivaient de grosses roches… quels cons ces corses 😉
Je croisais plusieurs « troupeaux » de randonneurs. Je profite de cette occasion pour le dire une fois pour toute; c’est stupide et de l’argent jeté dans le feu que de faire le GR20 avec un guide dans un groupe organisé. Le sentier est très bien balisé, même seul vous allez vous faire des amis assez vite dans les refuges et vous avez l’air complètement ridicule de marcher 15/20 à la file indienne.
De plus, en montagne il est important d’aller à son propre rythme. En groupe vous êtes obligé de suivre la cadence moyenne. Si vous êtes le plus rapide, vous allez rapidement vous emmerder… et si vous êtes le plus lent vous serez à bout de souffle.
Fin de la parenthèse…
Bon an, mal an, moi et mon lendemain de veille avions réussis à nous rendre jusqu’à l’ascension finale sans encombre. Je n’entendais alors plus du tout à rire; le soleil était à son zénith, il n’y avait pas un seul nuage et je devais me rendre tout en haut d’un versant rocheux totalement exposé au soleil et sans la moindre goute de vent.
13.15 – Une marche de 3km sur l’arrête somitale plus tard et j’arrivais au refuge Usciolu, mon arrêt du jour, à 1810m. Situé dans le fond d’une dépression de la montagne, celui-ci ne ce dévoilait qu’à la toute dernière minute. Le refuge était dirigé par un jeune serviable et qui respirait la bonne humeur… inespéré après tous les acceuils glaciaux des refuges précédents.
RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Refuge de Prati
Altitude de départ; 1820m
Arrivé; Refuge de Usciolu
Altitude d’arrivé; 1810m
Distance; 11km
Dénivelé; +700m  -700m
Jour 11 – LA FIN AVANT LA FIN
23 juin 2016 – Refuge de Usciolu
05.00 – Il n’y avait pas de temps à perdre. Le refuge que j’avais réservé pour ce soir ayant passé au feu il y a 1 mois, j’avais dû penser à une solution alternative.
Après avoir envisagé plusieurs options, j’avais décidé de prendre la plus risqué et de faire 2 étapes en 1.
Cette décision n’avait pas été prise à la légère puisque j’allais devoir marcher plus de 35km, avec un dénivelé total de +1500m, -2100m.
Je n’entendais donc pas à rire… tellement pas à rire que j’avais troqué la bouteille de vin quotidienne du soir d’avant pour une tonne d’eau afin de bien m’imbiber.
L’avenir allait me donner raison…
05.29 – Sur le sentier aussi tôt le matin, il n’y avait pas de soleil, pas de vent, pas de bruit et surtout; pas d’idiot. Il n’y avait que moi et la montagne en tête à tête.
Le sentier continuait sur la crête commencé hier. Je jouais donc à saute-mouton avec les pics rocheux pointant vers le ciel ici et là. Cette crête suivait un axe Lune / Soleil; je marchais en direction de la Lune, qui terminait ses préparatifs pour aller au lit, tandis que le soleil se réveillait tranquillement (prend ton temps) dans mon dos.
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Avec un ciel encore une fois exempt de nuages, il allait faire très chaud aujourd’hui. Autant ne pas trop s’attarder et mettre le plus de km derrière moi avant que cela ne se produise.
08.00 – Le soleil était maintenant bien installé à son poste de contrôle et arrosait la Corse de ses rayons de chaleur dévastateur. J’en avais alors terminé avec la montagne, que j’avais troqué pour le confort (relatif) du plancher des vaches et un couvert végétal.
Je profitais de la relative absence de dénivelé pour engranger les km et de l’absence de randonneurs pour faire le plein de patience et de joie de vivre… qui m’avaient faits défaut depuis quelques jours vu les foules sur les sentiers.
J’en avais aussi profiter pour faire la paix avec la Corse; je me trouvais sur une île située au beau milieu de la mer Méditerrannée. En d’autres mots; c’est comme si j’étais en plein coeur d’une ruche de touristes. Demander que la Corse soit exempte de touristes était aussi improbable que de demander à un français de parler anglais sans avoir l’air fou…
09.00 – La forêt était malheureusement derrière moi. Je marchais désormais dans une plaine valonnée complètement exposée au soleil. Il n’y avait toujours aucun nuage dans le ciel et l’absence de vent me faisait suffoquer… même si je buvais beaucoup d’eau. C’était cependant la 1ère section du GR20 où j’aurais pu marcher en flip flop sans risquer de me tuer.
09.20 – Stop déjeuner à la bergerie I Croci. J’avais déjà 14km dans les jambes et était presque à la moitié de ma distance du jour… mais le pire était devant moi.
La plaine débouchait sur une longue ascension, qui ne m’aurait posée aucun problème en temps normal… mais qui devenait difficile avec l’absence totale d’ombre; la chaleur m’empêchait de respirer proprement.
J’avais la « patate » (« coeur » pour les non québecois) qui pompait fort… je pouvais l’entendre résonner jusque dans mes oreilles. Aussi fort soit-elle, tant et aussi longtemps que je l’entendais c’est ça qui importait non? 😉
Je sentais ma tête tourner quelques fois… je m’assoyais quelques secondes, me donnais 2-3 claques dans le visages, buvais un peu et repartais. Le soleil irradiait tout sur son passage. 1 ou 2 nuages bien placés m’auraient rendu la tâche tellement plus facile.
Arrivé au sommet, mes réserves d’eau étaient à sec. J’avais pensé que la descente serait facile et j’avais tout donné sur la monté…
Grosse ERREUR. La descente aurait déjà été casse-gueulle et technique avec toute ma tête. Je sentais mon cerveau capable de s’éteindre à tout moment.
J’étais comme le boxeur surpris par un uppercut à la fin d’un round et sauvé par la cloche. Je retournais dans mon coin, mon entraineur me demandait si tout allait bien, et je lui répondait « oui oui » d’une voix d’enfant en le fixant lui et ses 2 jumeaux un peu flous.
La différence majeure c’est que si le GR20 m’envoyait au tapis, on parlait d’un tapis tout sauf confortable; une paroi rocheuse à 45+ degrés. Qui sait ce qu’il allait m’arriver si je m’évanouissais.
Il n’y avait pas de solution magique; sans eau et surpris par une descente sournoise, je devais garder ma concentration coute que coute et descendre jusqu’en bas. Je me répétais tout haut; « Tu ne vas pas tomber dans les vappes… tu es fort… le GR20 n’est rien en comparaison à ce que tu as vécu au Kashmir… et tu n’es pas tombé dans les vappes là-bas ».
12.10 – J’atteignais le refuge d’Asinau. Je « garochais » mon sac par terre et me ruais sur la petite fontaine d’eau potable. J’y passais un bon 5 minutes avec la tête sous l’eau froide. De peine et de misère, j’avais complété la 1ère étape de mon programme double. J’avais marché un demi-marathon (21km) en 6h30. Il m’en restait encore 14. Je ne le savais pas encore, mais je n’avais encore rien vu.
Mes esprits revenus et mes réserves d’eau pleines telles les bosses d’un chameau, que je repartais d’un pas assuré. J’entrais dans la forêt… enfin à l’ombre.
Il était maintenant 14.00. N’ayant plus d’eau (encore…), avec 3km à parcourir, j’étais caché sous l’une des dernières zones d’ombres de l’infernale monté de la très difficile « Variante Alpine » reliant Asinau à Bavella. Depuis une bonne heure déjà, j’allais de zone d’ombre en zone d’ombre pour me refroidir. Je me sentais au bord du coup de chaleur.
Mais pourquoi diable avais-je décidé de prendre cette variante au lieu du petit sentier pépère faisant le tour de la montagne? Il fallait toujours que je choisisse la solution difficile… « Ain’t no mountain high enough (aucune montagne n’est trop haute) » comme le disait Marvin Gaye.
C’est à ce moment là que je prenais ma décision. Sans vous en parler, j’avais jonglé avec plusieurs scénarios depuis quelques jours. C’était maintenant décidé; je n’allais pas me rendre jusqu’à Conca (fin traditionnelle du GR20). Aujourd’hui serait ma dernière journée sur le GR20. Bavella serait mon stop.
Je n’abandonnais pas. Oh que non. J’arrêtais plutôt pour des raisons de logistique. Continuer jusqu’à Conca revenait à terminer le GR20 tard le samedi 25 juin. Or, en Corse, les transports en commun sont limités le samedi et ne fonctionnent pas le dimanche. Il me serait donc impossible de marcher jusqu’à Conca le 25, dormir là, prendre un bus tranquille le dimanche 26, pour attraper mon vol à Ajaccio tôt le 27.
Non… il fallait malheureusement que je sois à Ajaccio le 25.
Le gros avantage de Bavella est que le village se situait sur le chemin du bus jusqu’à Ajaccio. M’arrêter là le 23 me permettrait de me reposer en montagne le 24 et de prendre tranquillement le bus jusqu’à Ajaccio le 25.
En arrêtant à Bavella, je manquais seulement les 20 derniers km. Ajoutez à cela que le plaisir de marcher avait disparu; il y avait trop de randonneurs sur le sentier depuis quelques jours. De plus, j’aimais l’idée de terminer dans le cadre enchanteur des montagnes plutôt que dans un village pourri sur la cote.
Contrairement à La Réunion, je ne m’étais pas promis à moi-même de marcher de la mer à la mer, il n’y avait pas non plus d’enjeu spirituel comme sur le Camino. J’étais en paix avec ma décision. J’étais même heureux… soulagé… comme si on m’enlevait un fardeau des épaules (boule de quille).
Fin de la parenthèse.
J’étais toujours à l’ombre sous cet arbre sur le sentier de la Variante Alpine à essayer tant bien que mal de reprendre mon souffle.
Je quittais ma zone d’ombre pour me lancer à l’attaque du sommet.
Si jusqu’à maintenant j’avais trouvé les paysages du jour extrêmement ordinaires (pour être gentil) et que j’avais peiné autant dans les montées que dans la descente, je crois que tout cela était pour me préparer au spectacle que j’allais avoir sous les yeux à partir du sommet et dans la descente de la Variante Alpine sur Bavella.
WOW et reWOW
J’en avais le souffle coupé… et pas seulement à cause du soleil (qui plombait toujours) ou du manque d’eau (problème toujours pas résolu).
Le paysage était dramatiquement impressionnant; j’étais entouré d’aiguilles rocheuses pointant vers le ciel. Le sentier était tout autant dramatiquement dangereux en serpentant au travers tout ce chaos. Sans le savoir, je me trouvais au beau milieu des Aiguilles de Bavella, l’un des joyaux géologiques de la Corse.
Je ne pouvais m’empêcher de penser que c’était le décor parfait pour terminer mon GR20… s’il n’avait pas raison de moi avant.
Il n’y avait plus que 2km à faire, mais je me sentais plus loin que jamais. La descente n’était pas simplement une descente ordinaire, c’était un cycle infernal de montés et descentes… l’une des sections les plus ardus de tout le GR20. Une courte ascension, nécessitant l’utilisation de chaines pour s’aggriper, me laissait sans voix. Pas de doute, le GR20 avait compris que j’avais l’intention d’arrêter à Bavella et il n’entendait pas à me la donner facile.
J’avais des fous rires incontrolables (la fatigue) en pensant que ce serait complètement con de me tuer aussi près de mon fil d’arrivé immaginaire.
Une fois les aiguilles passés, ne restait plus qu’une dernière descente sur une paroi rocheuse ressemblant à un espèce de labyrinthe vertical aux multiples sentiers, dont plusieurs débouchaient sur des cul de sac (ravin). Je perdais beaucoup de temps à remonter, refaire mon chemin pour trouver l’issue. Décidément, j’allais y gouter jusqu’à la fin.
16.00 – Fin de cette journée infernale ayant commencée 10h30 plus tôt. Depuis 08.00 que je marchais au gros soleil, j’avais mangé pour la dernière fois à 09.20 et j’avais bu ma derniere goute d’eau vers 14.00. J’avais TOUT donné dans cette dernière journée… tellement tout donné que j’étais au bord des larmes… des larmes qui exprimaient toute ma fatigue et ma joie d’avoir terminé en un seul morceau.
Même mes bottes s’étaient sacrifiés pour la cause. En plus d’être trouées de partout, les semelles avaient fondues sous le coup de la chaleur. Si l’extérieur avait soufert, l’intérieur des bottes s’était transformé en véritable sauna. Par endroit mes bas avaient fusionnés avec la peau de mes pieds. Je les enlevais délicatement comme on enlèverais un bandage sur une plaie. Je n’avais jamais vu ça; mes orteils et le coté de mes pieds étaient brulés.
Je n’étais cependant pas au bout de mes peines. Je faisais le tour des auberges du village de Bavella avec toujours la même réponse; « désolé nous sommes complet ».
Il me venait alors une idée; j’allais me rendre jusqu’à Zonza quelques km plus bas… 10 km pour être exact. Avant de faire le GR20, moi et Tanzi avions séjourné dans ce charmant village.
Je commencais à marcher sur le bord de la route en levant mon pouce quand une voiture passait. Je souriais en pensant qu’à 31ans, c’était la première fois que je faisais du pouce.
10min, 20min, 45min passaient et j’étais toujours à marcher sur la route au gros soleil. Puis, une voiture s’arrêtais… je n’y croyais pas. Le gars m’avait vu un peu plus tôt à bout de souffle sur le sentier…
J’arrivais à Zonza, me trouvais un charmant auberge, pénétrais dans ma chambre, déposais Boule de Quille dans un coin et m’allongais tout habillé sur le lit pour reprendre mes esprits un instant… pour reprendre conscience seulement 2 heures plus tard quand quelqu’un cognait à ma porte pour me dire que le souper était servi.
Ce soir j’allais dormir seul dans un grand lit king, sans ronfleur dans la pièce et sans aucun réveil matin. Au programme de demain; RIEN.
Il fallait guérir vite puisque je commencais ma nouvelle aventure (et dernière avant mon retour au Canada) dans quelques jours dans les Alpes.
RÉSUMÉ DU JOUR
Départ; Refuge de Usciolu
Altitude de départ; 1810m
Arrivé; Bavella (fin du GR20)
Altitude d’arrivé; 1200m
Distance; 35.5km (marche le bord de la route non incluse)
Dénivelé; +1500m, -2100m
MON GR20 EN BREF
Ville de départ; Calenzana (Nord)
Ville d’arrivé; Bavella (Sud)
Distance totale; 172.1km
Dénivelé positif total (ascension); +/-11700m
Dénivelé négatif total; +/-11000m
Nombre de jours; 10* (Jour 8 = journée de repos à Ajaccio)
ÉPILOGUE
Tout d’abord, il faut se le dire, j’étais très sceptique à savoir que le GR20 était si difficile qu’on pouvait le raconter. Rendons donc à César ce qui revient à César; le GR20 est le sentier le plus techniquement difficile que j’ai marchè dans ma vie… et je commence à en avoir fait pas mal des treks.
Pour survivre au GR20, il ne faut pas simplement être un bon marcheur, avoir de bonnes jambes et un bon cardio, il faut aussi avoir certaines notions d’escalades, un très bon équilibre et ne pas avoir peur des hauteurs.
Lors de l’élaboration de mon plan de voyage pour la partie entre mon départ Dubai (début avril) et mon retour temporaire au Canada (juillet), j’avais passé beaucoup de temps à élaborer l’itinéraire de voyage parfait qui me permettrait d’en faire le plus possible avec le moins de temps possible. J’avais jonglé avec toutes les idées; Népal, Kyrgyzstan, Scandinavie, Namibie, Cap Vert, etc. pour acoucher de l’itinéraire que je venais de compléter; en plus du Madagascar, je venais de compléter 3 randonnées mythiques en moins de 3 mois.
La marche d’erreur était inexistante et les jours de repos très rare. Une petite blessure ou une longue période de mauvais temps auraient pu compromettre mon trip en parti ou totalité. Force est d’admettre que TOUT s’était passé comme prévu et que la mécanique avait tenu le coup… même si mon corps montrait des signes évident de fatigue (les vacances au Canada approchent).
Je me dirigeais donc vers les Alpes Françaises pour m’attaquer à ma cerise sur le sunday; le Mont Blanc.
COIN CONSEIL GR20
Pour ceux envisageant faire le GR20, voici quelques info utile;
DORMIR
– Favoriser la tente au dortoir des refuges du parc. Les refuges sont très vieux et les dortoirs se résument à des matelas collés l’un à coté de l’autre. Vous vous retrouvez entassé comme des sardines,
– Le camping est interdit dans le parc, mais chaque refuge offre des aires de camping,
– Pour ceux ne voulant pas trainer une tente, les refuges offrent aussi des tentes toutes montées (réserver à l’avance). Vous n’orez ainsi qu’à transporter un matelas de sol,
– À tout coup (même en refuge) il vous faut votre sac de couchage.
– Une autre option consiste à dormir dans les quelques bergeries sur le parcours (rare vers le nord mais plus fréquente dans le sud). Ils offrent généralement des aires de camping et plus rarement des chambres/dortoirs.
NOURRITURE
– Il n’est pas nécessaire de trainer sa nourriture pour l’ensemble du GR20. Il est possible de se ravitaisser dans les quelques villages que le GR croise et dans les refuges (ils ont généralement de (très) petites et $$$ épiceries.
– Les gites servent aussi des repas à tous les soirs au cout d’environ 20 euros. On vous sert généralement des pates sans gout en étant hyper radin avec les portions.
Les refuges sont tenus par des gens qui se foutent royalement des randonneurs. Vous vous sentez presque mal de leur demander quelque chose. Une fois, j’ai voulu prendre 2 morceaux de pain et ont m’a enlevé le 2ème des mains en me disant que c’était 1 seul par personne. J’imagine que c’est ça l’acceuil légendaire des Corses.
Si vous n’avez pas encore compris; NE MANGEZ PAS LE REPAS DU SOIR DANS LES GITES. C’est une véritable arnaque.
Seul point positif; les bergeries. J’ai rapidement pris l’habitude de m’arrêter dans chacune d’entre-elle pour me procurer du fromage et du pain.
Règle générale, la Corse aurait beaucoup à apprendre de La Réunion en terme de randonnée/gites/nourriture/respect des randonneurs. Les refuges devrait mettre l’accent sur les produits locaux au lieu d’arnaquer les gens à coup de pâtes sans gout à 20 euros.
La Corse fait partie de la France, le pays qui a inventé la gastronomie… et c’est en Corse que j’ai mangé des lentilles à la sauces tomates.
DOUCHE/EAU
– L’eau potable et facilement accessible dans les refuges et tout au long du parcours.
– Les refuges proposent des douches… avec de l’eau GLACIALE. Les rares fois où j’ai vu de l’eau chaude, on chargait 10 euros pour 5 minutes…
QUAND
Le GR20 se marche généralement de Juin à fin Septembre lorsque les sommets/cols ne sont pas trop enneigés.
Je vous DÉCONSEILLE de faire le GR20 durant l’été (beaucoup trop de randonneurs). Vous avez une petite fenêtre de la fin mai au début juin où les refuges ouvrent (il y a des gardiens) et où les foules ne sont pas encore présentes.
Autrement, si vous voulez la tranquilité… et le danger… vous pouvez le faire hors saison quand les refuges ne sont pas gardés. Il faudra porter votre nourriture, mais la parti dortoir des refuges est ouverte. À noter que des alpinistes chevronnés ont laissés leur vie sur le GR20 en hiver.
NE PAS commencer la randonnée un lundi. Commencer un lundi veut dire que votre préparation/achat se fera un dimanche… et tout sera fermé.
NE PAS finir un dimanche puisque la plupart des transport en commun ne fonctionneront pas.
BUDGET
Prévoyez;
– 14 euros / nuit pour dormir en refuge (dortoir),
OU
– 13 euros / nuit pour louer une tente déjà toute montée à coté des refuges
OU
– 7 euros / nuit pour une aire de camping pour y aménager votre tente.
+
– +/-10 euros / jour pour déjeuner/snacks/lunch
+
– environ 20 euros pour le repas du soir
En bout de ligne, le GR20 reste de la randonnées. Il vous faut « simplement » de bonnes jambes, des bonne bottes de montagne, un sac à dos confortables, une bouteille d’eau et beaucoup de détermination.

Épisode 70 – La Grande Traversée de La Réunion

Jour 1 – UN NOUVEL ESPOIR
25 avril 2016 – 06.00
Mon réveil sonne. 
Pendant une minute je ne sais pas où je suis… phénomène qui arrive souvent quand vous voyagez beaucoup et changez de place fréquemment…
Je suis dans une chambre d’hôtel?!?
Ça me revient! 
La veille en arrivant à St-Denis j’avais décidé de me gâter un me payant une belle chambre. Après 25 jours de cavale à dormir dans les endroits les moins cher, plus souvent qu’autrement dans des dortoirs, et avec 13 jours de randonnée qui m’attendaient, j’avais décidé de me payer un peu de confort; chambre à moi tout seul (oui!!!), bain, douche avec eau chaude, air climatisé, piscine, TV… Le gros luxe quoi…
Tous mes trucs étaient éparpillés sur le lit. La plupart allaient se retrouver dans mon gros sac qui resterait à l’hôtel, tandis que les éléments essentiels pour le trek prendraient la direction de mon petit sac de randonnée. 
J’avais encore en mémoire mon sac beaucoup trop lourd pour le Tour des Cirques (épisode précédent). Tout me semblait essentiel… mais je décidais de faire des économies de bouts de chandelles. Plusieurs bouts de chandelles feraient plusieurs chandelles économisées non?!? 
Trop de bandages dans mon kit médical… Out… 3 sous vêtements au lieu de 5… 1 seule paire de bas au lieu de 3… j’en entend déjà dire ouache… les bas ont 2 cotés non?!?… ça fait comme 2 paires de bas ;-)… imperméable?!? Même quand il ne pleut pas je suis détrempé de sueur… pourquoi je mettrait un imperméable quand il pleut… pour garder la sueur sur mes vêtements?!? Out… Le livre Lonely Planet La Réunion… allez hop je prenais quelques photos des pages importantes sur mon iphone… et puis Out… Mon livre « Le Pèlerinage » de Paulo Cuelho racontant son périple sur le Chemin de Compostelle… ahhh ça je le garde… au moins jusqu’à ce que je le finisse… ensuite Out. 
Au lieu d’un piano, je portais maintenant une boule de quille. Dire que j’avais marché 30 jours au Népal avec un sac léger comme une plume. Il faut croire que je vieillissais et que je devenais capricieux et/ou plus faible. 
Comme à mon habitude juste avant de commencer une aventure un peu folle, mon cerveau essayait de me faire peur en trouvant toutes les raisons inimaginables pour ne PAS entreprendre mon périple. Même après avoir fait bon nombre de trucs stupides, j’ai toujours de gros doutes avant de commencer une nouvelle aventure… c’est dans la nature humaine. J’écoutais ses craintes sans y accorder trop d’importance. 
Par un matin déjà nuageux… je me lançais. Je ne pouvais pas être plus éloigné des montagnes en partant du niveau 0 mètre d’altitude juste à coté du Barachois, l’esplanade de bord de mer de St-Denis. 

  
J’aurais très bien pu opter pour la facilité et prendre un bus pour un peu plus haut, mais dans mon livre à moi ça aurait été tricher. J’allais marcher l’ile au complet dans toute sa longueur de l’océan Indien… jusqu’à l’océan Indien. 
Je traversais St-Denis de long en large pour me rendre jusqu’au début du sentier. Vous auriez dû voir la scène… lundi matin… 1er jour de travail de la semaine… tout le monde habillé en chemise/veston/cravate… et moi habillé en randonneur puant… ça sonnait très drôle dans ma tête. Je me sentais comme dans le film « un indien dans la ville ». 
Peu importe, je continuais mon petit bonhomme de chemin sur la rue principale où se succédaient les beaux bâtiments en bois datant de l’époque coloniale. 

      
La montagne se rapprochait tranquillement mais surement… pour finalement se dresser devant moi. La récréation terminée, il fallait maintenant se mettre au travail… elle n’allait pas se monter toute seule…
Je me trouvais alors à 50m d’altitude… mon gite pour la nuit se trouvait à 1839m… ouch… Durée prévu… 7 heures…
Pour seul guide dès maintenant, et jusqu’à l’autre bout de l’ile, les petits drapeaux du GR R2 (Grande Randonnée Réunion no.2), le numéro du sentier de la Grande Traversée, composés de 2 bandes horizontales; l’une blanche et l’autre rouge. Ceux-ci se trouvaient sur les arbres, roches, etc. dans les sentiers. 
1er objectif, La Brulé, à 5.5km et 750m plus haut, petit village où j’avais repéré une épicerie et où je ferais des provisions. 
Une pluie fine m’accueillait sur le sentier pour faire sur que tout soit bien mouillé et glissant. Heureusement pour moi, le sentier avait une pente très douce… parfaite pour une journée de rodage.
Après quelques kilomètres, le bruit des voitures et de la ville avait fait place au bruit des ruisseaux et des oiseaux. 

                  
Tout au long de ce sentier, je me faisais dépasser par des petits vieux faisant leur exercice matinale. Si vous n’aviez pas encore compris, les gens sont très en forme à La Réunion et tout tourne autour de la randonnée. À ma décharge, ils n’avaient pas à porter une boule de quille. 

      
10.00 pile poil – J’arrivais à La Brulé. J’y étais accueillis par une magnifique forêt de bambou… mais malheureusement pour moi, l’épicerie identifiée sur la carte avait dû fermer boutique il y a une décennie de cela. Je trouvais une petite cabane en bois vendant quelques pacotilles… avec un attroupement d’hommes buvant de la bière… à 10h… un lundi matin… belle vie les gars. Je dis souvent « il est midi à quelque part dans le monde »… mais il y a des limites.
Il faut savoir que ce village était desservi par un bus de ville de St-Denis. Comme la plupart des gens faisant la Grande Traversée, j’aurais très bien pu éviter ce segment de sentier… mais je suis ici pour marcher… autant bien marcher toute la distance. 
Je passais mon chemin. Comme tant d’autres avant, ce petit village allait aussitôt s’effacer de ma mémoire…
De retour sur le sentier, mon nouvel objectif se nommait Camp Mamode à 6km et 600m plus haut.
Je passais dorénavant le plus clair de mon temps à alterner mon regard entre le sentier glissant et le ciel. Je m’étais pris une gigantesque toile avec une toute aussi gigantesque araignée dans la figure un peu plus tôt. N’ayant pas trop aimé l’expérience et ne désirant pas la renouveler, j’avais décidé d’être vigilant. 

Je m’amusais aussi à reprendre ma respiration, me plaindre du point de mon sac… et le plus amusant d’entre tous… mettre un pas devant l’autre. 
Pit stop au Camp Mamode (1200m d’altitude) sous les coups de 11.30. C’était la fin de la route. En d’autres mots, pour ceux qui avaient une voiture et qui était lâches, il était possible de monter jusque là et commencer à marcher par la suite…
J’allais y manger mes magnifiques sardines achetés un peu plus tôt à La Brulé… des sardines sans pain puisque le dépanneur n’en avait plus… un vrai régal… 
Ne me restait alors que 6km et 600m d’ascension. Le paysage avait alors changé du tout au tout. Je me retrouvais dans la jungle… et j’avais des points de vue sur la Cote et l’océan Indien à tout moment. En contrepartie, le sentier était dorénavant hyper glissant et boueux… 

            
Je ne sais pas trop comment l’expliquer, mais à un certain moment lors de cette montée et pour la première fois depuis mon départ de Dubai, j’étais devenu serein. Fini les plaintes à propos du poids de mon sac ou sur l’état de mes jambes. J’étais simplement heureux. Probablement que mon cerveau avait finalement compris que cela ne servait à rien de me lancer toutes ces remarques… j’allais continuer coute que coute.
13.50 – J’arrivais à mon refuge, le Gite de la Roche Écrite… un beau camp en bois rond (pas vraiment rond… mais vous voyez l’idée) à 1839m.

      
Le 1er jour de randonnée était dans la poche. Résultat des courses; 20km de marche, +1839m de dénivelé positif et très peu de descente. Pour la 1ère fois depuis le début de mon voyage, j’avais les jambes et la motivation pour en faire plus… mais j’allais me garder une petite gêne et profiter d’un repos bien mérité.
Il fallait célébrer… 
Garçon! Une bière bien froide SVP!

  
Le soir venu, le repas partagé avec tous les autres randonneurs dormant dans le gite sur une seule grande table fut l’un des moments forts de la journée. Avant la fin du repas, tout le monde avait raconté sa petite histoire et était devenu copain. Il faut savoir que tous les gites fonctionnent comme cela à La Réunion. Les tables individuelles ça divise, alors que les grandes tables ça uni… une idée à répéter ailleurs.

Jour 2 – EN ÉQUILIBRE
26 avril 2016 – 04.00
Le réveil sonne et je n’essai même pas de le snoozer. J’enlève ma couverture et je suis immédiatement prêt à partir en ayant dormi avec tous mes vêtements sur le dos. 
Direction le sommet de la Roche Écrite, 4km et 400m plus haut, pour y admirer le lever du soleil.
Trop confiant après mon ascension de Piton des Neiges de nuit en solo il y a quelques jours (épisode précédent)? Je ne sais pas mais l’ascension de ce matin/nuit était tout sauf amusante. Il n’y avait personne d’autre que moi dans le sentier… et il m’était très difficile de suivre les signes dans la noirceur totale. Il y avait bien sur des traces de peintures blanches… mais elles devaient dater d’il y a au moins une décennie… comprendre qu’elles avaient presque disparues…
En fait, ce n’était pas seulement les marques blanches qui avaient besoin d’entretien… le sentier lui-même avait besoin d’une cure de rajeunissement. La nature y avait repris ses droits et mes bras et jambes y goutaient; égratignure par-ci, écharde par là, etc. 
Tout seul… dans une forêt… en pleine noirceur… le cerveau commence à imaginer des bruits partout… c’est tout le temps dans ces moments là que tu penses à des films d’horreurs. Je ne pouvais pas penser à « Good Morning Vietnam » ou autre classique de la comédie… Non… je pensais au très mauvais film « Blair Witch Project »… vous savez le film où les gens sont poursuivis par des choses dans la forêt en pleine nuit.
Ça y est, je pensais être suivit… 
Calme-toi… rappelle-toi qu’il n’y a pas de prédateurs sur l’ile… que des grenouilles… hehe…
J’atteignais le sommet de la Roche Écrite (2227m) tout juste à temps pour le lever du soleil… gracieuseté du détour que j’avais pris dans un étang avec de l’eau (boue) jusqu’au-dessus des bottes… mon petit doigt me disait que ce n’était pas le sentier…
J’avais le Cirque de Salazie à mes pieds en étant au sommet de la paroi rocheuse le ceinturant. Sans aucun garde fou, l’endroit n’était définitivement pas pour ceux qui avaient peur des hauteurs… 
Quelle vue…

                                  
Le soleil aussitôt levé qu’une course contre la montre s’enclenchait pour être de retour au refuge avant 08.00… et la fin du petit déjeuner. 
J’atteignais le refuge à 07.40… non pas sans avoir accéléré l’allure… et m’être planté d’aplomb dans un buisson juste avant d’arriver. Excès de confiance? Probablement… mon genou gauche allait s’en rappeler pour quelques jours. Au moins cette petite frousse allait me rappeler qu’il ne fallait jamais relâcher sa garde jusqu’à la toute fin. « Être presque arrivé » ne veut pas dire « être arrivé ».
8km en montagne au réveil avec absolument rien dans l’estomac… même pas de l’eau puisque je n’avais pas apporté de bouteille… c’est ce que j’appelle un bon échauffement… ou être stupide…
8.15 – Sous un ciel bleue, je me lançais en direction de Dos D’âne, ma destination du jour, quelques 10km plus loin.

              
Ce qui avait commencé comme une sympathique petite promenade dans la jungle s’était peu à peu transformée en une sorte de « boot camp », à monter et descendre brusquement, se contorsionner pour passer sous des arbres morts, etc. 
La jungle était devenue de moins en moins dense et le paysage s’ouvrait devant moi. Je me retrouvais à marcher sur l’étroite arrête sommitale du rempart rocheux ceinturant le Cirque de Mafate… immédiatement en contrebas sur ma gauche. Cette section de sentier ne pardonnait pas puisqu’un tout petit faux pas me mériterait un allé simple… et très rapide vers le fond du cirque plus de 1000m plus bas. 

                        
Imaginez, je marchais par temps sec et je n’arrêtais pas de me planter… dans les arbustes sur ma droite. Au prix d’une collection de scratchs qui ne faisait que grandir, j’allais au moins survivre à cette journée. Je n’osais imaginer combien dangereux ce sentier pouvait être par temps pluvieux.
Peu importe, la vue était grandiose…
Dans un détour de l’éreintante descente finale, Dos D’Âne sortait de la brume. Avec une multitude de champs, il s’agissait vraisemblablement de l’un des garde-mangers de l’ile. Accessible par la route et tout juste à l’extérieur du Cirque de Mafate, Dos D’Âne agissait aussi comme l’une des principale porte d’entrée dans le cirque de Mafate.

    
12.00 – Complètement exténué après m’être levé à 04.00 et avoir marché 20km, monté +600m et descendu plus de -1200m, je n’étais pas au bout de mes peines. Le gite que j’avais réservé était introuvable… et le village était désert. Après avoir littéralement marché 3 fois le village de bord en bord, j’apercevais un minuscule écriteau qui m’avait jusqu’alors échappé. 
Voilà… j’avais trouvé Le Gite des Acacias. Décrit comme étant un véritable havre de paix par le Lonely Planet, c’est bien la seule chose que je n’y ai pas trouvé. On aurait dit une maison de fous. À partir du moment où je suis arrivé, jusqu’au moment où j’ai fermé les yeux (et encore), le propriétaire des lieux n’a jamais arrêté de parler… parlant très rapidement en créole… je ne comprenais PAS UN MOT. Ajoutez un enfant qui criait tout le temps et une femme qui écoutait l’émission « Top Modèle » (ça existe encore?!?) hyper fort pour enterrer la voix de son mari et vous avez une petite idée de oh combien reposant était mon havre de paix.  
Au moins nous avions une vue imprenable… mais brumeuse… sur la Cote et l’océan Indien en contrebas. 
J’étais le seul à dormir à mon gite ce soir :-(… mais au moins mon hôte m’avait ouvert une bouteille de vin rouge bordelais :-)… incluse dans le prix du souper… que je me faisais une joie de terminer… hic…

      

Jour 3 – TOUT CE QUI DESCEND… DOIT REMONTER
27 avril 2016 – 08.00
C’est avec un petit (gros) mal de crâne que cette journée commençait. N’empêche, beaucoup d’eau, ma boule de quitte encore gluante sur le dos et je prenais la direction de Aurère. 
À peine quitté Dos D’Âne que je rentrais officiellement dans le cirque de Mafate, et du même coup dans la réserve protégée par l’UNESCO. 

Première épreuve de la journée, descendre tout en bas de la vallée jusqu’à la Rivière aux Galets. J’étais assurément le 1er à passer par le sentier depuis un moment puisque je me tapais une tonne de toiles d’araignée dans la figure. Somme toute une descente longue, mais assez facile, comportant tout de même quelques sections nécessitant cordes et échelles.  
  J’étais maintenant à marcher dans le lit de la rivière. Toutes ces montagnes qui paraissaient minuscules hier lorsque je marchais sur l’arrête sommitale, ressemblaient maintenant à des géants insurmontables en étant au plus profond du cirque. 
Après avoir joué au funambule sur des roches glissantes pour traverser la rivière… 1, 2, 3 fois… en manquant prendre une saucette non désirée à quelques reprises, c’était maintenant inévitable… la haute voltige n’était plus possible, je devais me mouiller les pieds… un mal pour un bien si vous voulez mon avis… mes pieds devaient être très content de pouvoir respirer autre chose que la senteur infecte de mes bottes. 

   
   
   
Le sentier ne voulant pas se brancher de quel coté de la rivière il voulait être, je répétais l’expérience 6 autres fois. J’avais joué à « déchausse, mouille, sèche, chausse » 2 fois déjà quand j’ai finalement compris; je n’allais pas remettre mes bottes tant et aussi longtemps que le sentier ne monterait pas dans la montagne… la solution magique se nommait « flip flop ». 

  
Chaque passage dans la rivière était une loterie… le courant était assez fort pour faire chavirer quelqu’un n’étant pas solide sur ses pieds… hop et le pied pouvait partir… et vous vous retrouviez à la flotte… 
11.20 – Je quittais définitivement la rivière pour commencer à monter dans les hauteurs. Mon GPS affichait une altitude de 290m… et je devais me rendre jusqu’à 1000m… avec encore 4.2km à faire…  

   
    
    
   
    
Le sentier à flanc de montagne avait une vue spectaculaire de toute la vallée, de la rivière plus bas et des montagnes environnantes. J’allais devoir me trouver de nouveaux synonymes pour le mot « beau » et vite puisque j’étais seulement au jour 3 de ma randonnée et je commençais déjà à en manquer. 

L’ayant eu relativement facile jusque là, les choses devenaient vraiment sérieuses avec 2 km à faire; il y avait un pan de murs sur ma gauche et celui-ci devait se trouver sous mes pieds avant que j’arrive à destination.
Mon sourire, qui n’avait pas quitté mon visage depuis la rivière, c’était peu à peu transformé en une bouche grande ouverte qui recherchait désespérément de l’air frais. J’avais alors l’impression que toute l’eau que je buvais se retrouvait immédiatement à perler sur mon front ou sur mon chandail.
Il était désormais 13.30 et Aurère était en vue. Perché sur un plateau avec un piton juste à côté et des vallées plongeantes sur tous les autres cotés, mon petit doigt me disait que je n’avais pas fini de monter et descendre… mais bon, c’était pour un autre jour. Je déposais boule de quille sur le coin de mon lit et je me mettais à la recherche des 2 choses que je désirais le plus au monde à ce moment précis; une douche chaude et une bière froide.
Somme toute, la journée avait été relativement facile avec 13km de marche réparti sur 5h30, +900m de monté et -850m de descente. J’avais encore de l’énergie pour continuer, mais ça ne servait à rien de marcher plus longtemps puisque les nuages avaient maintenant recouvert tout le paysage. Au mieux ce serait brumeux, au pire brumeux et pluvieux. De toute façon, avec ce genre de sentier casse-cou, il valait mieux s’arrêter avec encore un peu d’énergie que de pousser trop et…
Un repos allait aussi être bénéfique pour mes blessures de guerres; mon mollet gauche, mon genou droit, ma cheville droite et mon pied droit montraient tous des signes de fatigue évident. 
Aurère était un très charmant petit village. Sans route (il n’y a pas de route dans le Cirque de Mafate… dois-je le rappeler), je ne sais pas comment l’expliquer, mais j’avais l’impression d’être dans « La Conté » du « Seigneur des Anneaux »… le village des hobbits. De la brume, de la musique reggae jouant en sourdine au loin et le bruit des oiseaux… c’était ça la vie… pour aujourd’hui…
Fin de journée après une longue randonnée… je sirotais une bonne bière au « bar » du coin (cabane en bois avec une table dehors)… ok… je l’avoue… j’en étais à ma 2ème… à Aurère… la route la plus près étant à 6 heures de marche… l’un des endroits les plus reculés de La Réunion… elle-même une ile perdue au milieu de nul part dans l’océan Indien…
Qu’est-ce que j’entend?!?
« Caliss de Tabarnak »
Je me dressais sur ma chaise aux aguets… 
NON… pas possible… 
Je me retrouvais nez à nez avec une équipe québécoise en tournage pour l’émission « Port d’attache » sur TV5. Son animatrice, Sophie je-sais-pas-le-nom-de-famille, me racontait le synopsis de l’émission (13 épisodes, 13 iles… Bali, Réunion, Comores, etc.)… je lui racontais mon histoire… 
Elle était complètement jalouse de ma vie… et j’étais hyper jaloux du fait qu’elle soit payée pour voyager…
Comme quoi l’herbe est toujours plus verte chez le voisin…

Jour 4 – BIENVENUE À ZOT
28 Avril 2016 – 07.30
Aujourd’hui je continuais ma découverte du Cirque de Mafate. 
Comme un con, j’avais écouté ce qu’on me recommandais en ce qui concerne les différentes étapes à faire pour boucler la Grande Traversée. Résultat; je me retrouvais à faire une randonnée de seulement 8km aujourd’hui. Toujours regarder le kilométrage entre les différentes étapes avant de booker les refuges/gites. 
Je marchais en forêt aux sons des oiseaux et des multiples points de vue sur les montagnes. Je passais « Ilet à Malheur », un village tout aussi charmant que Aurère, mais dans un cadre plus enchanteur. Ilet à Malheur était un nom créole datant de la colonie et des esclaves en fuite. Cela voulait en fait dire « Il porte malheur », « Ilet » étant un raccourci pour dire « il est ».   

   
 La journée était sans trop d’histoire; j’atteignais le sommet d’une montagne, simplement pour la redescendre de l’autre coté… et ainsi de suite… les canyons se succédaient. 

   
 
    

 

     
  
À 11.30 j’étais arrivé à Grande Place, ma destination du jour. Contrairement à Aurère et Ilet à Malheurs, Grande Place était tout sauf charmant. En fait, il n’y avait pas de village à proprement parlé, que des maisons disposées aléatoirement sur un flanc de montagne.
En revanche, j’avais touché le gros lot avec mon gite « Le Pavillon », un superbe complexe de 4 bâtiments installés sur un promontoir offrant une vue imprenable de la vallée et des montagnes. Le genre d’endroit qu’on ne voulait jamais quitter…
   
 
Au-dessus de l’entrée se trouvait une grosse affiche « Bienvenue à Zot ». 
Zot?!? 
On m’expliquait alors que Zot signifiait « vous/étranger » en créole… cela voulait donc dire « Bienvenue aux étrangers ».
12.00 – Après un snack bien mérité, il n’était pas question de me reposer tout de suite. Je laissais boule de quille se reposer… et sécher… au refuge et partais m’aventurer dans les montagnes environnantes… jusqu’à ce que je me bute à un sentier fermé. Avec la chaleur devenue suffocante, je décidais de couper court et de rentrer sagement au bercail. 
Ce sentier fermé était sensé être celui que j’allais prendre le lendemain. On m’expliquait alors que le sentier n’était plus praticable en raison d’éboulements multiples survenus dans les dernières semaines. J’allais donc devoir trouver un plan B pour le lendemain. 
Le sommaire du jour était donc 10-11km de marche, avec un chiffre conservateur de 700/800m de montée et de descente.
Je passais la fin de journée assis paisiblement sur une roche dans le pâturage juste au-dessus de mon gite. Les 2 chèvres broutant à proximité me faisaient sentir que je n’était pas le bienvenue… mais je m’en foutais… je leur disais « charge moi et je te transforme en ragou »…

     

  

   

J’admirais les montagnes et regardais les nuages quitter tranquillement le cirque alors que la nuit commençait son quart de travail. Je me sentais tout petit devant toute cette grandeur. On raconte que les 3 Cirques de La Réunion (Cilaos, Salazie et Mafate) ont été crée il y a 200 millions d’années lorsque les flancs du volcan Piton des Neiges, alors un volcan actif, se sont effondrés. Si mes notions très sommaire de géologie sont exactes, les cirques sont donc l’ancienne caldeira du volcan.
Contrairement aux Cirques de Salazie et Cilaos, qui sont des vallées entourées de gigantesques parois rocheuses sans véritable montagne dans leur milieu, le Cirque de Mafate est extrêmement accidenté avec de grosses montagnes séparant le Cirque en multiples petites vallées. 

Jour 5 – DÉTOUR… PAR LA ROUTE PANORAMIQUE
29 Avril 2016 – 07.30
Quelques options s’offraient à moi pour la randonnée d’aujourd’hui. Je devais rallier Grande Place, mais le sentier principal était fermé en raison d’éboulements. 
Je choisissais l’option la plus longue, mais qui devait me donner les plus belles vues; j’allais contourner complètement la vallée en longeant la paroi du Cirque. 
Le même refrain que les jours d’avant, j’allais devoir descendre dans le fond d’une vallée pour mieux remonter de l’autre coté…

    

  

  

     

08.30 – Ayant atteint le fond du canyon, mon purgatoire allait commencer. Par une journée sans nuage, je montais une paroi abrupte, interminable et exposée au soleil… sans la moindre zone d’ombre. Avec ces marches en plein soleil, Dieu avait peut-être finalement décidé de me faire pardonner tous mes pêchers… si oui, c’est lui qui allait finir par trouver le temps long…

  
Ajoutez à cela que pour la 1ère fois du voyage, mon iphone m’avait fait une petite frousse en cessant de fonctionner durant une bonne heure. Pour ceux qui ne le savent pas, mon IPhone est comme le ballon Wilson pour Tom Hank dans le film « Seul au Monde »; c’est mon meilleur ami, mon confident (j’y écris tous mes épisodes) et ma mémoire visuelle (je prend toutes mes photos avec). N’ayant pas fait de sauvegarde sur mon Mac depuis le départ, je pensais à tout ce que j’avais perdu. J’étais tellement contrarié que j’avais été hyper bête avec 2 randonneurs que j’avais croisé et qui ne demandaient qu’à piquer une jasette. Heureusement pour moi, il s’est remis à fonctionner comme par magie après un certain temps. C’est si beau l’amour entre un homme et une machine… Ahhhh…
Rangez les violons…
J’en étais où… ahhh oui, à suer toute l’eau de mon corps sur le mur rocheux que certains pouvaient oser appeler « sentier ».
En ayant fini avec mes pêchers, j’étais récompensé en me retrouvant à marcher dans un canyon hyper étroit et… à l’abri du soleil. 
J’atteignais ensuite un étrange petit village du nom de Ilet des Orangers. Cherchant les orangers, je n’y trouvais que des champs de maïs à perte de vue. Il était peut-être temps de rebaptiser l’endroit pour Ilet aux Mais?!?
Le temps mort avait été de courte durée. Je me retrouvais à nouveau avec un mur de tous les cotés devant moi. Mon petit doigt me disait que je n’avais pas fini de monter… et il avait raison. 

      
Je me retrouvais dans un canyon étroit… surnommé La Brèche… avec de grosses roches partout. Mon petit doigt me soufflait à nouveau à l’oreille que toutes ces roches n’étaient pas arrivées là par magie… qu’elles provenaient très vraisemblablement de la paroi au-dessus de ma tête. Je me trouvais hyper chanceux d’avoir un petit doigt aussi intelligent… et j’accélérais le pas.  

Midi pile, j’étais acceuillis au sommet de « La Brèche » (1295m) par un vent glaciale. J’avais une vue en contreplongée sur une bonne partie du Cirque de Mafate. Je pouvais apercevoir la randonnée que j’avais faite durant les 2 derniers jours sur la gauche; Grande Place, Aurère et Ilet à Malheurs, et ma randonnée des 2 prochains jours sur ma droite; Roche Plate, Marla et le Col du Taibit. 

            
Grande Place et les montagnes qui me paraissaient si grandes hier après-midi étaient maintenant toutes petites en-dessous de moi. On pouvait aussi voir les multiples hélicoptères à l’oeuvre à transporter les marchandises jusqu’aux différents villages du Cirque. Je remerciais intérieurement ce sentier fermé entre Grande Place et Roche Plate qui m’avait forcé à prendre ce détour. J’étais sans aucun doute sur le sentier panoramique par excellence du Cirque.
Allez… il n’était pas encore le temps de célébrer. En quelques minutes, la météo était devenue extrêmement instable; le ciel s’était couvert, il pleuvait et je pouvais entendre le tonnerre gronder. N’empêche, ma journée de travail était presque terminée… et l’eau était accueillie en sauveur par mon corps en surchauffe.
À 13.00, j’avais atteint l’épicerie de Roche Plate et la pluie s’était installée pour de bon. Il était grand temps de changer d’activité… à la bière. 
En 5h30, j’avais parcouru 13km, monté +1300m et descendu -800m, pour me situer dorénavant à 1150m d’altitude. 

      
Encore bien tombé, mon gite du jour était avantageusement situé dans les hauteurs de Roche Plate et m’offrait une vue impressionnante sur de tout le Cirque de la terrasse.

Jour 6 – JE N’AI PAS D’IDÉE POUR LE NOM DU JOUR
30 Avril 2016 – 07.30
Ayant pris la poudre d’escampette de mon gite… le repas d’hier avait été infecte, je ne voulais pas goûter à son déjeuner… j’étais déjà sur le sentier à marcher en direction de Marla… le ventre vide, mais les jambes qui ne faisaient pas trop mal (pas trop mal = super).
Sur ma droite…

une gigantesque paroi rocheuse infranchissable… le périmètre du Cirque… je me sentais comme dans « The Maze Runner »… vous savez ce mauvais film où des ados sont dans un labyrinthe géant…

    
Sur ma gauche…

un paysage très accidenté… espérons que le sentier n’aurait pas la mauvaise idée de s’y aventurer…

            
Derrière moi…

il m’était devenu impossible de voir les endroits où j’avais marché les jours précédents.
Devant moi…

j’apercevais Marla tout au fond avec le Col du Taibit au-dessus et le Piton des Neiges sur la gauche.
Sous mes pieds…

un sentier clairement fait de roches volcaniques…
Au-dessus de ma tête…

un ciel bleu avec quelques nuages. Espérons que ceux-ci réussiraient à cacher mon (enn)ami le soleil. 
Dans mon ventre…

absolument rien… 
Dans mes souliers…

vous voulez vraiment le savoir?!? Ok… si vous y tenez. Des bas détrempés sentant le fromage… je ne sais plus trop si c’était le jour « à l’endroit » ou « à l’envers ». 
Bref…
Arrivé au fond de la vallée, je retrouvais à nouveau la rivière aux Galets au site des « Trois Roches ». À cet endroit, la rivière formait des bassins d’eau qui étaient propices à la baignade.

          
10.30 et déjà à mi-chemin de mon parcours du jour, je décidais de prendre des détours pour me ralonger…
Je passais par la mystérieuse « Plaine des Sables »… n’ayant pas de sable… et étant complètement exempte d’arbre au milieu d’une forêt dense. Site d’atterrissage pour vaisseau extraterrestre?!? Ne partez pas en peur, mais peut-être…

    
L’inévitable se produisait finalement… j’arrivais à Marla. Signifiant « beaucoup de monde » en malgache, Marla était de loin le plus gros village de Mafate au sortir de la 2ème Guerre Mondiale… mais était quasiment désert de nos jours.
J’aurais pu croire que Marla signifiait « Là où tombe la pluie » puisque pour une 2ème fois que j’y passais (épisode précédent), une 2ème fois que je j’y étais accueilli par la pluie. Qui sait… peut-être que le Cirque de Mafate pleurait mon départ?
J’avais parcouru 13km, monté +1100m et descendu -550m. 

            
Malgré des paysages moins spectaculaires que tous les autres endroits où j’avais séjoubb yrné dans le Cirque auparavant, je tâchais de m’empreigner de l’ambiance du Cirque une dernière fois. 

Jour 7 – LENDEMAIN DE VEILLE
1 Mai 2016 – 07.30
C’est complètement déshydraté, la tête dans le cul et avec le coeur sur la main que je commençais ma journée de travail.
Dans la catégorie « à ne pas faire » il fallait maintenant ajouter; en virer une au bar du village avec des locaux à coup de shooters de rhum arrangé (le rhum réunionnais… du rhum mélangé avec des fruits; goyave, citron, etc.). Il faut comprendre; c’était samedi soir, il y avait de la musique & de l’ambiance, mon gite était encore une fois désert… et j’avais soif… 

      
Après maintenant 4 jours passés à arpenter tous les recoins du Cirque de Mafate de long en large et de haut en bas, je m’apprêtais à passer (à nouveau) le Col du Taibit pour quitter Mafate et me retrouver dans le Cirque de Cilaos. Le parcours d’aujourd’hui faisait à l’inverse une parti du parcours que j’avais fait lors de ma première journée de randonnée dans les Cirques entre Cilaos et La Nouvelle (épisode précédent). 
08.20 – Moi, boule de quille et mon mal de vivre avions atteint (contre toute attente) le sommet du col de Taibit (2081m) dans un temps record. J’y étais accueillis par une vue magnifique sur le Cirque de Cilaos. Il ne me restait alors que 9km en descente…

    

          

Est-ce que mon sac était moins lourd?!?

Est-ce que j’avais pris des forces en l’espace d’une nuit?!?

Est-ce que c’était l’alcool dans mon sang?!? N’empêche, mon sac était beaucoup plus léger qu’à l’habitude. J’en venais même à penser que j’avais oublié quelque chose… mais tout était là… sauf ma tête.
11.00 – 13km, +550m et -850m après avoir sorti de mon lit ma carcasse imbibée d’alcool, j’étais à monter la dernière marche qui me menait à Cilaos. 
J’allais pouvoir renouer avec la civilisation l’instant d’une demi-journée.

Jour 8 – ASCENSION
2 mai 2016
Je quittais Cilaos aux premières lueurs du soleil… donc vers 08.30. À l’ombre du géant Piton des Neiges, les premiers rayons atteignent Cilaos sur le tard. 
Pas de mal de tête, pas (à peine) d’alcool dans les veines, les jambes aussi fraiches que des jambes peuvent l’être après 7 jours de marche… donc pas très fraiches… j’étais prêt à m’attaquer à la 2ème section de la Grande Traversée. 
Direction la Caverne Dufour… encore…
Premier challenge; m’attaquer au mur que j’avais descendu pour revenir à Cilaos de la Caverne Dufour lors de mon dernier jour de randonnée dans sur le Tour des Cirques (épisode précédent). Je savais que cela ne serait pas de la tarte… mais j’avais la journée pour atteindre ma destination du jour. 
La vue d’aujourd’hui était complètement bouchée par les nuages durant toute l’ascension. Heureusement, j’avais eu le spectacle il y a quelques jours. 

                  
Après une montée soutenue de 10km et +1300m, j’atteignais le gite vers 12.30. Le timing était parfait puisqu’il commençait à tomber des cordes tout juste après. On pouvait voir les rafales de brume qui descendaient la montagne à toute vitesse, apportant avec eux un froid glacial. 
J’avais en tête de monter jusqu’au sommet pour voir le coucher du soleil… mais l’après-midi allait finalement se résumer à se les geler dans le refuge à regarder la pluie tomber.

Jour 9 – JOURNÉE DE MERDE
3 mai 2016 – 06.45
Il y a des jours où on ne veut pas aller travailler… comme il y a de ces jours où on ne veut pas marcher. Aujourd’hui était un jour comme cela. J’aurais aimé passer la journée au lit à écouter des films toute la journée… mais je ne pouvais pas… je devais continuer mon périple.
Il y avait un vent à glacer dans le dos et le soleil se levait à l’horizon. À peine levé que les nuages se mettaient à l’attaque. Ils n’attendraient vraisemblablement pas très longtemps pour recouvrir le ciel d’aujourd’hui. 
Complètement exténué, je quittais le refuge sans avoir monté le Piton des Neiges un seconde fois. 
Pour dire vrai, mon estomac avait pris la décision pour moi. Une nuit blanche passée dans la salle de bain du gite avait cette capacité de convaincre même les hommes les plus déterminés. 
Parti le ventre vide… puisque je ne pouvais rien avaler, j’allais manger 20km plus loin une fois arrivé à destination. 
Après 8 jours passés autour des Cirques, je quittais définitivement les Cirques et le Piton des Neiges pour me diriger vers le Sud de l’ile. Je me retrouvais à marcher dans un paysage composé de toundra vert délavé à perte de vue, sur un sentier extrêmement glissant… qui demandait une concentration de tous les instants pour négocier toutes les roches… concentration que je n’avais pas. 

                
Je décrirais la marche d’aujourd’hui comme marcher sur une patinoire en flip flop… aucune adhérence… avec le pied qui pouvait partir à tous les instants…
Comme si ce n’était déjà pas assez, une pluie diluvienne s’abattait sur moi et ne me quittais plus jusqu’à mon arrivé à destination… 5 heures plus tard. J’étais trempé jusqu’aux os… mais je ne pouvais pas arrêter puisqu’il n’y avait pas d’abri et pas âme qui vivait à des kilomètres à la ronde sur cette partie de l’ile. Mon cerveau pensait constamment à l’imperméable que j’avais retiré de mon sac à la dernière minute à mon départ de St-Denis; « ton imper t’aurais au moins tenu au chaud… »… Shut cerveau… ça ne m’aide pas à avancer… aide-moi plutôt à faire cesser ces dents de claquer de froid… 
Je n’arrêtais pas de me répéter que les mauvaises journées étaient là pour être en mesure d’apprécier les bonnes… mais cela ne suffisait pas. Je voulais cette journée de marche terminée et tout de suite.
J’avais perdu pied une bonne demi-douzaine de fois… à chaque fois mon pied partait, mes yeux devenaient tout rond, mes bras se mettaient à danser… et je reprenais mon équilibre par magie. Le sentier me réservait cependant de nouveaux pièges. On m’avait raconté à Cilaos de faire bien attention à cette section de sentier puisqu’il y avait des trous de boue d’une profondeur pouvant aller jusqu’à 1/2 mètre…
Ma réaction intérieure lorsque la personne m’avait parlé de ces gigantesques trous de boue; « ouais ouais… des trous de boue géant… tu me prends pour un con… »
Eh bien, j’avais dû ravaler mes paroles et donner raison à cette personne au moment où j’ai mis le pied dans l’un de ces trous…
L’effet de surprise fut total… un trou de boue qui ressemblait à tous les autres que j’avais déjà franchis… et puis boum… je me retrouvais avec une demi-jambe toute brune… et j’avais maintenant peur de mettre les pieds sur quelque chose d’autre que des roches…

            
Tic Tac… 08.00, 09.00, 10.00, 11.00… Sentier de merde, température de merde et paysage de merde… pas de doute, c’était une vraie belle journée de merde.
Puis… sans avertissement, la toundra/jungle et les montagnes disparaissaient et je me retrouvais à marcher dans des pâturages. Je marchais désormais entre les ballots de foin et les vaches… vaches qui mâchaient leur foin et semblaient me regarder en se disant « il est vraiment con de marcher sous la pluie… »

  
Puis je me retrouvais à marcher sur le bord de la route avec les voitures qui faisaient tout en leur possible pour ajouter une couche d’eau sur mon corps déjà imbibé en ne ralentissaient pas en passant à coté de moi… 
J’atteignait finalement Bourg Murat sous les coups de 12.30. 
Après une marche de la mort de 5 heures sous la pluie… j’avais décidé de me gâter… en allant manger dans le restaurant le plus en vue du village (mon Guide disait que c’était à ne pas manquer).
Vous auriez du voir la scène; moi, randonneur détrempé et couvert de boue, entrant dans un restaurant huppé… avec des nappes blanches et de la coutellerie en argent sur les tables… et plein de vieux couples qui me regardaient avec des points d’interrogation dans les yeux. Oui moi, le clochard… j’allais manger là. Après tout, il n’était jamais trop tard pour le 1er repas de la journée. J’osais même à prendre les chaises d’une autre table pour faire sécher mes vêtements… hehe.
Comme si tout le monde s’était donné le mot pour me faire passer une journée de merde, le restaurant avait le pire code pour le wifi EVER. Premier wifi que je rencontrais depuis le départ de ma randonnée 9 jours plus tôt, le code était la seule chose qui me séparait d’enfin donner un signe de vie à ma famille… grrrrr…

  
Résultat du jour, j’avais marché 22km, monté seulement +200m et descendu -1000m.
Je me retrouvais à Bourg Murat pour la nuit, petit village sans histoire. Rien ne laissait présager que j’étais à un peu plus de 20km du sommet d’un des volcans les plus actif au monde. 

Jour 10 – LA CONVENTION ANNUELLE DE LA BOUE
4 mai 2016 – 09.00
Jour de célébration… c’est le premier jour où je n’avais pas à mettre de bandage en préparation pour la marche… Hip Hip Hip… un petit pas pour l’homme, mais un très grand pas pour moi. 
Je remettais mes short/t-shirt/bottes encore souillés de la veille… moins hip hip hip… et je reprenais la route.
Nouveau jour, même rengaine; un pas devant l’autre. Direction le Gite du Volcan… par un matin brumeux, mais pas pluvieux…
Je me promenais dans les pâturages encore un bon moment… avec une bonne odeur de merde… avant de m’enfouir à nouveau dans la forêt par un petit sentier sinueux. 

                  
Beaucoup de tortues et le désormais classique des toiles d’araignée dans la figure… mais pas de sangsue… c’était ça l’important. Le défi d’aujourd’hui; éviter les trous de boue. On va le dire franchement; c’était un vrai festival de bouette… la convention annuelle de la bouette… le un sentier était COMPLÈTEMENT défoncé. 

                        
Je n’avais jamais vu ça. J’avançais à pas de tortue dans des champs de boue. Après un certain moment, j’arrêtais d’essayer d’éviter la boue… ça n’avait pas trop bien marché et je m’étais fait mal à marcher dans les buissons sur le coté. J’allais maintenant privilégier la méthode directe… je laverais mes jambes/bas/bottes plus tard…
Les 9 derniers km passaient en coup de vent (un coup de vent très lent) sur un sentier de roches volcaniques… sec.
Le gros désavantage avec la randonnée à La Réunion c’est que tous les panneaux d’indications inscrivent le « Temps » et non la « Distance ». C’est un peut frustrant quand on vous dit 20 minutes et que vous n’êtes toujours pas arrivé après 40 minutes. Le temps est variable selon les personnes, alors que la distance.. c’est la distance. Ils sont con c’est français. 
Non sans être préalablement passé par une étrange plaine aux apparences lunaires, j’arrivais finalement au Gite du Volcan à 15.45.

      
J’avais mis 6h30 à parcourir les 25km, +800m d’ascension et -200m de descente. Encore aujourd’hui, j’avais été tout fin seul sur le sentier. 
Ce soir j’allais être entouré de touristes et non de randonneurs dans un Gite de Montagne pas vraiment gite de montagne puisqu’il était accessible par la route… triste.
Je termine cette journée avec ma montée de lait mensuelle. Vous auriez l’idée de dormir dans un dortoir avec votre nouveau née? 
Non… C’est bien ce que je pensais… 
Eh bien j’avais le plaisir de partager mon dortoir de ce soir avec un couple et leur nouveau née. Tu réserve dans un dortoir de 12 personnes avec ton bébé naissant?!? Ça va pas la tête?!? Le gite offrait des chambres privées… 
Ce qui devait arriver arriva; le bébé allait crier toute la fucking nuit.
… 
Jour 11 – LE PITON DE LA FOURNAISE
5 mai 2016
Pendant 1 seconde au souper d’hier, j’avais pensé me lever à 04.00 du matin pour monter en haut du volcan au lever du soleil… 
Eille chose… tu as déjà vu les 2 plus beaux lever de soleil sur l’ile avec le Piton des Neiges et la Roche Écrite… le volcan n’est pas du tout réputé pour ça… personne ne t’en voudra de rester couché jusqu’à 06.00. Right cerveau… pour une fois tu as raison. 
06.00 – Vent extrême mais vue dégagée…
Je voulais vraiment aller au sommet du volcan avec ce vent à écorner les boeufs? 
J’ai bien dû me poser la question 10 fois… et puis merde… Allez…
06.30 – Après un déjeuner copieux (une première depuis mon départ de Dubai)… je prenais la route du sommet.
À peine marché 15 minutes que je me retrouvais à descendre dans l’immense cratère du volcan… ils appellent cela « l’enclo » ici… les mêmes français qui traduisent en français le titre du film « Hangover » par « Very Bad Trip »… je me répète… mais cons ces français 😉

  
Une fois tout au fond, je marchais en direction de la montagne, sur un ancien océan de lave en fusion désormais figé à jamais dans le temps. On pouvait facilement différencier les différentes coulées de lave. 

              

   

  
J’étais au beau milieu d’un paysage dévasté et je me sentais infiniment petit dans cette mer de chaos… et ne pouvais m’empêcher de penser que de tous les types d’endroits sur Terre, les volcans étaient probablement les pire endroits pour les êtres humains… et que celui-ci… encore actif… était possiblement l’attraction touristique la plus populaire de toute l’ile… 
Une fois la montagne atteinte, il fallait maintenant monter jusqu’au sommet pour y admirer le cratère Dolomieu, point culminant du volcan. 
Le sentier montait en ceinturant la montagne. J’avais commencé à l’intérieur des terres pour me retrouver directement face à l’océan et à la Cote 2500m plus bas… Cote inhabité à cet endroit en raison des coulées de lave encore fréquentes.

                  
08.20 – Je me trouvais juste à bord du cratère Dolomieu à 2512m d’altitude… le coeur d’un des volcans les plus actifs au monde… mon Mordor à moi… en ayant oublié l’anneau.
Aucun doute, c’était la meilleure journée pour monter au Piton. Le vent m’avait fait le plus grand cadeau qui soit; il n’y avait pas 1 seul nuage à l’horizon… phénomène très rare au Piton de la Fournaise. 
En effet, on m’avait souvent raconté que de voir le Piton de la Fournaise était une espèce de loterie peu importe la période de l’année. La matinée n’était pas garante d’un ciel bleue comme dans les Cirques. Beaucoup de gens venaient et se buttaient à un brouillard épais. Il n’y avait pas de recette miracle; il fallait simplement monter jusqu’en haut, lancer les dés et espérer avec une paire de 6.
Je ne pouvais m’empêcher de penser que le volcan donnait une fausse impression de sécurité. Malgré la présence d’une grande quantité de touristes, nous étions sur un volcan actif qui pouvait exploser à tout moment. Il y avait des fumeroles (petites cheminées) qui s’activaient dans le fond du cratère comme pour nous rappeler que le volcan n’était pas éteint. 
On raconte qu’il y a 2 types de volcans actifs; les explosifs (dangereux) et les non explosif (pardonnez les termes non scientifiques). Le Piton de la Fournaise est considéré comme un volcan actif non explosif. Concrètement, il va entrer en éruption, mais seulement de petites coulées de lave à la fois… il n’y aura pas de gigantesques explosions. Par exemple, le Piton de la Fournaise a eu 3 éruptions jusqu’à maintenant en 2016. 
La dernière éruption majeure remonte à 2007. À ce moment là, le Piton était un cône presque parfait, le cratère Dolomieu n’étant qu’un tout petit trou. C’est alors que le volcan s’est effondré sur lui-même… le cratère devenant un gigantesque trou de 1000m de diamètre et 350m de profond… trou où je me trouvais juste à coté. Depuis, la lave a comblé 70m de profondeur. Les experts estiment que le Piton de la Fournaise sera à nouveau un cône dans 100 ou 200ans.
Pour vous montrer à quel point les réunionnais sont con… Lors de chaque éruption du volcan, des gens de partout sur l’ile se ruent autour du volcan pour admirer les coulées de lave. Je vais encore plus loin… la fin de semaine, certains réunionnais vont sur d’anciennes coulées de lave encore chaude… pour se faire des BBQ (ça prend 10ans à de la lave pour se figer complètement). Con, mais con… 
Fin de la section éducative… début de la section « truc stupide »…
Sur un coup de tête (extrêmement con… probablement les français qui dépeignent sur moi), je décidais de descendre sur la paroi (le flanc… pas l’intérieur) du volcan jusqu’à un sommet un peu plus bas. 
Seul, hors sentier, à marcher sur d’anciennes coulées de lave… sur le flanc d’un volcan actif… mon coeur battait à tout rompre. Tout pouvait arriver… je pouvais tomber dans une rivière de magma coulant sous la surface (peu probable, mais possible), etc. J’en avais fait des trucs stupides dans ma vie, mais ça c’était dans les meilleurs…

  
Il y avait pas mal de curieux qui me regardaient. Peut-être attendaient-ils le moment où j’allais disparaitre dans une crevasse…
Finalement tout se passait bien, j’atteignais le petit sommet et je remontais jusqu’au cratère principal sans problème. Une promenade dans le parc comme on dit 🙂
Passé 9.00, le sommet commençait à être rempli de touristes. C’était mon signal pour redescendre. Le sentier était alors devenu une véritable autoroute de touristes. 

            
Passé 10.00, les nuages commencaient à faire leur apparition. Bon nombre de randonneurs n’auraient aucune vue très bientôt… l’avenir appartient à ceux qui se lève tôt…

      
11.30 – J’étais de retour au gite. 
Résultat du jour; 13km de marche, +600m de montée et -400m de descente…
Pour la 1ère fois depuis le départ de la randonnée, j’allais dormir au même endroit 2 soirs de suite. J’allais enfin avoir le temps et les bonnes conditions pour avancer l’écriture de cet épisode. 

Jour 12 – LE VENT DU NORD
6 mai 2016 – 06.45
J’entamais ce matin la descente qui me mènerait éventuellement à ma destination finale; l’océan Indien… à l’extrêmement opposé de St-Denis (mon point de départ il y a 12 jours). Direction le Gite de Basse-Vallée quelques 1800m plus bas… les genoux allaient être mis à rude épreuve…
Je ne le savais pas encore, mais le lever du soleil allait être le seul moment de cette journée où je verrais le soleil. Dame Nature avait décidé de me concocter un petit quelque chose dont elle est la seule à connaitre la recette; un vent extrêmement fort & glacial et du brouillard si sombre et dense que je ne voyais pas à 2 mètres en avant de moi par moment. 
Je marchais un bon moment dans un paysage lunaire où tout se ressemblait à perte de vue… avec de multiples sentiers… pas exactement le genre d’endroit où je voudrais me perdre… il fallait donc redoubler de vigilance… 

          
Je marchais ensuite sur le rempart du cratère dans lequel j’avais marché la veille…

  
Puis plus rien… comme si j’avais perdu l’usage de la vue… tout autour de moi était devenu blanc… j’avais pénétré dans un brouillard qui ne me quitterait plus. Les rafales de vent étaient alors tellement fortes que la plupart des gens seul dans une température comme celle-là auraient rebroussées chemin ou à tout le moins été prises de panique. 

  
  
Pas moi… je me concentrais à suivre les petits drapeaux rouge et blanc du GRR2. Mes seuls moments de panique se produisaient quand je n’apercevais pas de drapeau durant 4-5minutes… et puis j’en apercevais un… et je respirais à nouveau. 
J’étais complètement frigorifié, mais j’avais les pieds au sec et le sentier n’était pas boueux… tout ce qu’il me fallait.
Passé 09.00 je commençais à descendre un pan de mur végétal de 1500m… et la pluie se mettait de la partie. Il n’y en aurait définitivement pas de facile.
Je me retrouvais alors dans une forêt toute verte… même les troncs d’arbre étaient recouverts de lichen couleur vert radioactif. Il devait pleuvoir souvent ici. Le tout donnait à l’endroit des allures de forêt enchantée directement sortie d’un conte pour enfants. À ma plus grande surprise, j’y ai croisé une vingtaine de randonneurs qui montaient… quel réconfort de savoir que je n’étais pas le seul dans ce bourbier.

              
12.30 – Mon calvaire était terminé… J’atteignais mon gite de Basse-Vallée.
Au final, j’avais marché 21km, descendu -1800m et monté +150m. Je me trouvais désormais à 600m au-dessus du niveau de la mer. J’aurais très bien pu boucler les 15 derniers kilomètres dès aujourd’hui… mais j’avais déjà réservé/payé le gite, mes genoux n’avaient aucune envi de descendre -600m de plus et il faisait un temps de cul. Je voulais aussi maximiser mes chances de terminer la randonnée sur une bonne note avec du beau temps à mon arrivé à l’océan Indien.
Anecdote qui va surement être drôle dans quelques mois… mais qui ne l’est toujours pas quelques jours après; je suis arrivé à mon gite vers 12.30… j’ai cogné… pas de réponse… j’ai alors pensé que ce gite était comme les quelques autres gites que j’avais croisé qui ignoraient les randonneurs jusqu’à 15.00 (heure typique d’arrivé) pour ensuite ouvrir leur porte. 
J’ai donc attendu dehors jusqu’à 15.00… en plein milieu du bois… sous la pluie. 
15.00 – Je me met à taper dans la porte… COGNER avec mes poings… crier des injures… je fais le tour du gite… j’essai de rentrer par une fenêtre… rien ne marche. On dirait qu’il n’y a personne à l’intérieur… 
Il est maintenant 15.15… le village le plus près est à 2h de marche. Je peux le faire avant la noirceur… encore drôle si je réussis à me trouver un gite à cette heure si tardive… un vendredi soir…
Je remballe mes affaires et remet mes bottes mouillées… 
Je reprend la route en TABARNAK… j’ai envi de frapper sur tout ce qui bouge…
Je descends la petite route pour aller rejoindre le sentier. J’ai marché 2 minutes dans le sentier quand me vient l’idée d’aller voir à la maison un peu plus bas pour savoir si ils n’auraient pas le numéro du responsable du gite…
Je remonte à la maison… je cogne… une femme m’ouvre…
Moi – « Bonjour, j’ai fait une réservation au gite un peu plus haut… ça fait plus de 2h que j’attends dehors… je crois qu’on m’a oublié… »
Femme – « Ohhh… il fallait venir ici en premier… nous sommes les responsables du gite »…
Moi (avec des éclairs dans les yeux) – « vous êtes en train de me dire que j’attends sous la pluie depuis 2h alors que je devais passer ici pour m’enregistrer avant d’aller au gite? »
Femme – « oui c’est bien ça »
Moi – « Et qu’est-ce qui pouvait m’indiquer que je devais venir ici avant d’aller au gite?!? Ça ne vous tente pas de mettre une indication en avant du gite?!? »
Femme – « vous n’êtes pas le premier à qui ça arrive… »
Moi – (j’ai arrêté la discussion là sinon j’allais la frapper sous peu)
CR!SS de C@NNE… Excusez-là… ça aide à faire passer le morceau…
Ajoutez à cela qu’ayant mal planifié mon budget… ou bu trop de bières en chemin… je n’avais plus assez d’argent pour me payer le repas du soir :-(… Je devrais me contenter d’un déjeuner le lendemain matin. 

Jour 13 – LA DESCENTE D’HONNEUR
7 mai 2016 – 08.30
Par un ciel stable, je descendais dans une forêt noire… mais je pouvais apercevoir l’océan par le feuillage et entendre la bruit des vagues frapper le rivage. J’y étais presque…
10.15 – 15km et -600m de descente… mais surtout après 13 jours de marche… j’atteignais l’océan à nouveau. Cette fois c’était vrai; la FIN. J’avais gagné mon pari en attendant une journée pour finir; il faisait beau soleil.
Il n’y avait pas de panneau « Félicitation vous avez terminé la Grande Traversée GRR2″… non… un simple stationnement… et maintenant la vie devait continuer… je faisais quoi avant de marcher en montagne?!?

ÉPILOGUE
Ma Grande Traversée est dorénavant chose du passé. 
J’avais commencé le trek avec une forme physique suspecte et je le terminais en possession de tous mes moyens.
J’aurais facilement pu retrancher 3 ou 4 jours à la randonnée, mais chaque endroit où j’avais séjourné était spécial. Cela m’avait aussi permis de faire un tour complet et profiter à fond des paysages à couper le souffle… non pas simplement passer en coup de vent comme la plupart des randonneurs font. 
La Réunion était en quelque sorte l’échauffement de mon voyage. Je voulais éviter toute blessure inutile avant d’enligner coup sur coup le Chemin de Compostelle et le GR20 en Corse. 
Passer autant de temps dans les montagnes loin d’internet, de la télévision, etc. m’a aussi permis de me mettre en symbiose avec la nature et de considérablement ralentir mon rythme de vie. Auparavant basé sur la performance, à essayer d’en faire toujours plus avec le moins de temps possible… je profite maintenant du moment présent un point c’est tout. Fini les écouteurs en permanence sur les oreilles comme à Dubai, je prends maintenant le temps de regarder, écouter et sentir mon environnement immédiat. 
Une fois qu’on se libère du carcan que la société a bâti pour nous emprisonner jours après jours, on commence à profiter à fond de la vie 7jours sur 7. Le travail n’est pas la vie. Le travail est une invention du 21ème siècle… une nouvelle sorte d’esclavage… où les gens monnayent leur temps en échange de 1 ou 2 journée de congé par semaine.
Je ne suis pas le plus fort, ni le plus intelligent, je suis même assez stupide… mais j’ai beaucoup de détermination. Comme mon directeur à Dubai se plaisait à me dire; « you are a free spirit (tu es un esprit libre) ». Je n’ai que faire des principes établis. Comme Néo dans la Matrice, j’ai réussi à me libérer de ces chaines invisibles qui me retenaient prisonniers.
Bon… je commence à divaguer encore une fois… il est temps de conclure…
Je passe quelques jours sur la Cote pour me reposer et ensuite je met le cap sur l’Europe. 
Je serais vraisemblablement dans les Pays Basque (Espagne) lors de notre prochaine discussion. 

P.S. I – Sur la Cote comme dans le Centre de l’ile, la grande majorité des maisons ont de panneaux solaires pour s’alimenter en électricité.  
P.S. II – kékette… non je ne parle pas de ma 3ème jambe… je parle plutôt d’une bière locale… le slogan est « I love Kékette »… Les réunionnais ont un sens de l’humour tordu… j’adore…

P.S.III – Vous prendriez un bus dont le nom de la compagnie esr Marde
P.S. IIII – Budgéter une randonnée à La Réunion;
Tout d’abord, il fait savoir qu’une randonnée ici n’est pas pour les pauvres.
– Il est interdit de camper presque partout… mais beaucoup le font quand même,

– 20 euros pour un lit dans un dortoir en gite, 

– 20 euros pour un souper copieux en gite,

– 6-7 euros pour un déjeuner hyper basic,

– 5 à 10 euros pour le lunch et les fringales,
Il y aurait toujours moyen de réduire à 5-6 euros le prix du souper en mangeant des trucs en boite de conserve, mais je vous le déconseille. Vous manqueriez alors l’un des moments les plus intéressants de votre randonnée; le souper autour d’une même table avec tous les randonneurs et l’hôte du gite. 

Épisode 69 – La Réunion; Le Tour des Cirques

19 Avril 2016 
Après 3 semaines à me faire brasser dans les taxi-brousses malgaches, je retournais enfin à la civilisation. En l’espace d’une heure trente d’avion, je passais d’un pays du tier monde, à un endroit typiquement européen. Je quittais le Madagascar, l’une des plus grandes iles au monde, pour La Réunion, l’une des plus petites iles au monde. 
La piste d’atterrissage était directement en bord de mer. Jusqu’à la dernière minute j’avais l’impression qu’on allait atterrir sur l’eau… et puis l’avion a posé les roues sur une piste apparue comme par magie. 
À peine sorti de l’aéroport que je sautais dans un bus et passait en coup de vent dans la capitale St-Denis. J’avais peine à y croire… j’étais dans un bus avec air climatisé… avec amplement de place pour mes genoux… roulant sur une route n’ayant aucun nid de poule… directement sur le bord du littoral coincée entre l’océan et les montagnes… à l’heure du coucher du soleil… bien loin du Madagascar. 
J’avais les yeux collés à la fenêtre. Le bus était bondé et j’étais le seul à porter attention au paysage. Réalisaient-ils qu’ils vivaient dans un paradis sur Terre? Si non, quand l’avaient-t-ils oublié? Après combien de temps oublie-on de regarder les paysages qui nous entourent; 1 semaine, 1 mois, 1 an? Pourquoi sommes-nous fait ainsi? Vous qui me lisez… êtes-vous encore conscient de la beauté des lieux qui vous entourent?!? Je ne pouvais m’empêcher de me poser ces questions… mais je n’ai pas les réponses… 
45minutes et 2 euros plus tard… je me trouvais à St-Pierre… presque à l’autre bout de l’ile. 
Je vous ai dit que l’ile était petite? 

ENTRE MER ET MONTAGNE… LA RÉUNION POUR LES NULS
Levez la main ceux qui savait que La Réunion existait avant d’en entendre parler par moi?!?
Restez la main levée ceux qui…

– savaient où se trouvaient La Réunion?!?

– savaient que La Réunion n’était pas un pays, mais un territoire appartenant à la France?!?
Alors, qui a toujours la main levé? Vraiment!!! Belle gang de menteur…
Je me retrouve en effet chez les cousins français… sur un caillou au beau milieu de l’océan Indien… une ile d’à peine plus de 200km de circonférence… à quelques centaines de km du Madagascar. 
Complètement inhabitée jusqu’au 17ème siècle, l’ile de La Réunion a par la suite été colonisée par les français. Ils ont fait venir (de force) des africains (esclaves noirs) pour travailler dans les plantations de sucre, vanille, etc. Quand l’esclavage fut abolie sur l’ile en 1881, les planteurs eurent la « bonne idée » de remplacer les africains par des indiens payés à prix ridicule. Tout ce beau monde (blancs, noirs, indiens) forment aujourd’hui la population de La Réunion… sous la bannière française.  
En effet, La Réunion est un Département Outre Mer (DOM) appartenant à la France. Qu’est-ce que cela veut dire? Eh bien en gros cela veut dire que la France s’est gardé quelques petits paradis sur terre ici et là quand ses colonies ont commencé à se rebeller et demander leur indépendance… question de passer l’hiver bien au chaud en ne quittant pas leur pays. Vite comme ça, on peu penser à la Martinique (dans les Caraïbes), la Polynésie Française (Tahiti), la Guinée Française et Mayotte (une ile tout près du Madagascar et des Comores… je paris que vous n’avez jamais entendu parler des Comores et de Mayotte). Tous ces endroits sont sous la gouverne française et ont l’euro comme monnaie, 
Pas si con que ça les français (con… mais pas si con 🙂
Note au gouvernement canadien; pourquoi ne pas essayer d’annexer Cuba au Canada? Ils ont l’un des meilleurs système de santé au monde, ont un taux d’alphabétisation frôlant les 100%, de fabuleux cigares et ils savent danser. Cuba a un dictateur et est communiste… bahhh… personne n’est parfait!!!
Je m’égare… je parlais donc de ce petit paradis sur Terre qu’est La Réunion. Il y a tout pour être heureux ici;
– Des plages magnifiques… mais en raison de la présence de requins on peut seulement se baigner dans les zones de plages surveillées… et encore là il y a des tragédies chaque année…
– Des vagues parfaites pour le surf… c’était en fait un paradis pour le surf… avant que les requins se pointent il y a une dizaine d’années. Il y a maintenant une interdiction de surf partout autour de l’ile sous peine d’amende sévère… 
– Il reste donc les montagnes. Je n’en dit pas trop à ce sujet puisque ce sera le thème de cet épisode et du suivant.
L’ile peut se diviser comme suit; 

– LA COTE… avec sa multitude de plages et où la très grande majorité de la population habite,
– LES CIRQUES DE CILAOS, SALAZIE ET MAFATE

À La Réunion, un Cirque est une vallée luxuriante entourée de montagne. Véritable spectacle de la nature, les 3 cirques ont été inscrits au patrimoine de l’humanité en 2010 (UNESCO). Peu ou pas du tout développé avant la fin du 19ème siècle, à l’époque des plantations lors de la colonie française (beaucoup d’arbres et territoires montagneux… ce qui rendait les Cirques très difficile d’accès), ils ont longtemps été le repère des esclaves en fuites.
– LE PITON DES NEIGES

Un piton est une montagne. Le Piton des Neiges est un ancien volcan, la plus haute montagne de l’ile à 3070m et se trouve au beau milieu des 3 cirques.

– LE PITON DE LA FOURNAISE… aussi inscrit au patrimoine de l’humanité (UNESCO), c’est un volcan… pour être plus précis… l’un des volcans les plus actifs au monde.
On reparlera plus en détail de chacun de ces endroits… sauf pour la Cote… c’est probablement la dernière fois que vous en entendez parler. 
Autres faits inintéressants pour la plupart d’entre-vous;

– Capitale de l’ile; St-Denis,
– La population totale de l’ile est de 850000 habitants. Il y a plus de 400000 voitures sur l’ile… donc plus de 50% des gens ont une voiture… et ça inclus les enfants, on raconte que toutes les voitures une fois alignées font 5 fois le tour de l’ile. 
– St-Pierre, la plus grande ville, compte environ 70000 habitants,
– Roland Garros est le nom de l’aéroport international de l’ile. Les amateurs de tennis seront familiers avec ce nom puisque c’est le nom des internationaux de tennis de Paris. Roland était originaire de La Réunion et fut le 1er homme à traverser la mer Méditerranée en avion. Il fut aussi l’un des « inventeurs » du combat aérien et tomba au champ d’honneur en 1918 lors de la 1ère Guerre Mondiale.
– En plus du français, la plupart des habitants originaires de l’ile parlent le créole. Le créole est un dialecte qui était utilisé par les esclaves. Bien que dérivé du français, il m’est absolument impossible de comprendre quelqu’un qui parle le créole. 
Bon… voilà… Vous en savez un peu plus sur l’endroit. 
Je peux voyager maintenant? 

Jour 1 – LEÇON D’HUMILITÉ
06.00 – 20 avril 2016 – St-Pierre
À la base, l’idée était de me reposer en faisant tranquillement le tour de l’ile pour les 5 premiers jours de mon périple sur l’ile afin de faire le plein d’énergie et ensuite entreprendre « La Grande Traversée » le 25 avril.
Tout ce que je peux dire c’est que ce plan a foiré dès que j’ai vu les montagnes… j’avais envi de faire de la randonnée et tout de suite. 
Ce que monsieur veut, monsieur l’aura…
Direction Cilaos dans le Cirque de Cilaos. 
Après avoir négocié une route en lacets très serrés entre montagnes et falaises… les roues du bus passant à moins de 1m du vide à quelques reprises… chapeau conducteur… je me retrouvais à 1200m d’altitude dans le village de Cilaos. Cilaos, mot dérivé de la langue malgache signifiant « le pays qu’on ne quitte jamais »… et je comprenais très bien pourquoi on avait appelé l’endroit ainsi au premier coup d’oeil.
Le contraste entre la Cote et le centre de l’ile était frappant. Alors que la Cote était hyper urbanisée, le Cirque de Cilaos respirait la sérénité et l’authenticité. Ici la nature était vraiment à l’avant plan. Je me retrouvais au beau milieu d’une vallée toute verte entourée d’immenses montagnes… je dirais même plus… des montagnes aux apparences de murs infranchissables. Mis à part la route que j’avais prise pour arriver ici, toutes les autres directions n’étaient desservies que par des sentiers pédestres.

10.00am – C’est un départ. 
Puisque j’allais marcher la plupart des sentiers importants de l’ile lors de la Grande Traversée, j’avais choisi de faire le « Tour des Cirques », une randonnée très réputée sur l’ile et connue sous le nom de GR R1 (Grande Randonnée Réunion no.1). D’une durée de 3.5jours, celle-ci me permettrait de faire une répétition générale pour voir si tout était ok (condition physique, sac à dos, bottes, etc.). J’allais aussi pouvoir découvrir le Cirque de Salazie, complètement ignoré lors de la Grande Traversée. 
C’est donc chargé comme une mule que je commençais mon périple. Mon sac était tellement lourd que j’avais l’impression de porter un piano… j’avais pourtant pris le strict minimum et laissé le reste dans mon gros sac à l’Info Touristique. 
Peu importe… direction « La Nouvelle » à 18km de là.

            
Après 3h30 de marche, je n’avais couvert que 7.5km. J’avais passé ces 3h30 à jouer à serpents et échelles; monter, descendre, monter, descendre. J’étais environ à la même altitude que mon point de départ (1200m) et j’étais au pied du Col de Taibit (2090m). Le Col (passage pour franchir la montagne) se trouvait à mi-chemin de mon itinéraire du jour…
Le moins que l’on puisse dire c’est que les réunionnais ne plaisantent pas quand ils indiquent le temps de marche pour se rendre jusqu’à une destination. Partout ailleurs dans le monde, quand on vous dit que ça va prendre 5 à 6 heures de marche… cela signifie que vous allez boucler votre trajet en moins de 4 heures. À La Réunion, si c’est écrit que « La Nouvelle » se trouve à 6 heures de marche, vous serez chanceux si vous y terminez votre périple en 6 heures.

            
À 15.00 tapant, soit après 5h de marche, et après avoir réalisé que mon cardio était déficient, j’atteignais finalement le sommet du Col. Je quittais le Cirque de Cilaos pour basculer dans le Cirque de Mafate. 
En me retournant je pouvais voir le village de Cilaos, la ville de St-Pierre sur la Cote (où j’avais dormi la veille), de même que l’océan Indien à l’horizon. 

      
Fraichement arrivé dans le Cirque de Mafate, j’étais accueilli par une brume extrêmement dense. Il n’y avait pas moyen de voir à 20m autour de moi. On m’avait expliqué que ce type de température était typique des cirques; il faisait généralement beau soleil sans nuage le matin jusqu’à 9 ou 10 heure… 11 heure si vous étiez chanceux, pour ensuite laisser la place aux nuages pour le reste de la journée. Il fallait donc se lever le plus tôt possible pour profiter au maximum des paysages de La Réunion.
J’avais maintenant à descendre tout ce que je venais de monter pour me rendre jusqu’à Marla. Comme tous les autres villages situés dans le Cirque de Mafate, Marla n’était accessible seulement que par des sentiers pédestres. En d’autres mots, il n’y a pas de route et pas de voitures dans Mafate… les livraisons et évacuations d’urgence se faisant par hélicoptère. 
Une fois Marla passé, il ne restait plus que 5km… mais il a fallu que la pluie se mette de la partie. Remarquez que mes vêtements étaient déjà imbibés de sueur… donc ça ne changeait pas grand chose. J’ai achevé la grand nettoyage en prenant le mauvais embranchement pour me retrouver à marcher dans une chute…
Après avoir fini par croire que le village de La Nouvelle n’existait pas tellement ces 5km étaient interminables… le village était finalement à portée de vue.
Bon… il faut bien se comprendre… quand je parle de « village », je parle d’une douzaine de cabanes éparpillées sur un sommet de montagne.
Au total, j’avais marché 18km, monté +1100m et descendu -1200m… en 7h de marche…
Respect Réunion… Je t’avais manqué de respect en arrivant ici avec mon excès de confiance… et tu me l’avais mis dans les dents toute la journée durant. Les randonnées sur cette ile n’étaient définitivement pas pour des amateurs…
Bon… l’odeur de la nourriture concocté par le maitre du gite avait atteinte mes narines… j’étais conquis. 

Jour 2 – MOI ET MON PIANO
07.30 – 21 avril 2016 – La Nouvelle
Après un petit déjeuner tout sauf copieux (du pain… c’est tout)… pour 7 euros, j’enfilais mes bottes puantes (déjà), remettais mon piano sur les épaules et reprenais le sentier. 

              
Direction Hellbourg, 18km plus loin dans le Cirque de Salazie « juste à coté » du Cirque de Mafate dans lequel je me trouvais. Changer de Cirque signifiait franchir une montagne… qui donnait l’impression d’être un mur… par un col. Concrètement, cela signifiait qu’il fallait monter, pour redescendre par la suite. 

                  
La montée vers le Col de la Fourche était beaucoup plus facile que celle jusqu’au Col d’hier. Il y avait de nombreuses sections planes pour souffler un peu. Pour les non initiés, il faut savoir que lors d’une ascension, chaque section plane du sentier est accueilli comme une délivrance. 
L’une de ces sections planes était la très photogénique « forêt des tamarins ». Le silence et les rayons du soleil qui perçait au travers des tamarins (arbres) donnaient à cet endroit des airs d’havre de paix. J’en oubliais presque mon piano… presque.

   
   
    
 En moins de 2 heures, j’avais atteint le col (2000m). L’absence de nuage me permettait d’avoir une vue d’ensemble des 2 cirques… tout simplement sublime. D’un coté le cirque de Mafate avec sa végétation luxuriante et sa quasi absence de civilisation, et de l’autre le cirque de Salazie, tout aussi impressionnant mais avec des traces évidentes de civilisation ici et là.

                        
Le timing était quasiment parfait puisque les 2 cirques allaient se couvrir rapidement de nuages quelques minutes plus tard. Une fois recouvert de nuages, rien ne pourrait laisser présager un tel spectacle… une grâce matinée aurait pu couter très cher. 
Penser que la randonnée était dans la poche parce que j’avais atteint le col et qu’il ne me restait qu’à descendre jusqu’à Hellbourg à 12km et 1100m plus bas aurait été une grave erreur. La descente fut looooongue… mais sans trop de casse… en grande partie en raison d’un sentier très bien défriché et à l’absence de pluie… qui aurait pu transformer le tout en une véritable patinoire. 

                          
14.30 – 7 heures après mon départ, +900m d’ascension et -1100m de descente, j’enlevais finalement mes 2 bombes puantes… communément appelé bottes… dans mon nouveau chez moi pour la nuit… une charmante case créole colorée… avec un hôte tout aussi coloré.. dans le hyper coloré village de Hellbourg… j’ai dit coloré?!?

                        
Case Créole?!? Petite maison carrée en bois et peinte d’une couleur éclatante… les cases étaient à l’origine les habitations construites par les esclaves en fuite. Ça faisait penser aux Iles de la Madeleine… mais dans les montagnes. 
Perché à 900m d’altitude dans un coin du cirque de Salazie, Hellbourg, avec ses jolies petites maisons, se méritait pleinement son classement dans les plus beaux villages de France. Hellbourg était en fait le seul village hors France métropolitaine (la France en Europe) à être dans ce classement. 

Jour 3 – JOURNÉE DE « CONGÉ »
10.00 – 22 avril 2016 – Hellbourg
J’avais osé faire la grâce mâtinée jusqu’à 10h ce matin. Je croyais que ce serait une journée hyper facile. En effet, j’avais un peu moins de 10km à marcher… facile… les 2 doigts dans le nez. 
Je n’aurais pas pu mieux… me tromper. 
C’était sans compter que le trajet était une ascension de +1600m sans relâche dès le départ… question de faire remonter mon déjeuner… sur un sentier de roches et de grosses racines glissantes… dans des escaliers au mieux casse-gueulle… avec des marches faites pour des géants. 
Certains se demanderons surement pourquoi choisir de subir toutes ces épreuves si il n’en résulte que souffrance. Je répondrais à cela que oui c’est difficile, oui je souffre mentalement et surtout physiquement… mais j’adore ça. J’adore me dépasser, aller où les gens ne vont pas, monter des montagnes, voir des paysages grandioses en direct… non pas devant un écran de télé ou d’ordinateur. 
C’est en faisant ce genre d’activités que je me sens vivant… beaucoup plus qu’en travaillant dans un bureau 5 jours sur 7. Oui il y a des moments très pénible, mais dans la vie, à vaincre sans adversité on triomphe sans gloire… et ce qui est facile est accessible à tous… et je ne fais pas dans la facilité… je fais dans l’exception et le dépassement de soi. 
À la fin de la journée… quand tout est fini, j’enlève mes bottes, cri intérieurement « L I B E R T É » (comme le ferait Mel Gibson dans le film « Coeur Vaillant ») et me met à la recherche d’une bière… et ça recommence le lendemain matin… Ça c’est la vie avec un Grand V. 
Vous pouvez maintenant choisir entre la pilule bleu et la pilule rouge. La pilule bleu vous fera oublier tout ce que je viens de dire et vous retournerez à vos téléromans… ne ratez surtout pas La Voix pour être en état d’extase devant le nouveau has been. 
Vous pouvez aussi décider de prendre la pilule rouge et suivre le lapin blanc. Vous avez un rêve… réalisez le. Contrairement à ce que beaucoup peuvent penser, il n’est jamais trop tard. Regardez-moi, je suis une personne ordinaire qui fait des choses extraordinaires. En fait, je ne fais rien d’extraordinaire… je ne fais que réaliser mes rêves. Ce n’est pas plus compliqué. Ce qui est compliqué est de ce lancer.
Fin de la parenthèse…

Où est-ce que j’en était?!? Ahhh oui… à souffrir…

                              
Avec 4km à faire, une immense et peu invitante paroi végétale se dressait devant moi au travers de la brume. Mon GPS affichait 1850m d’altitude… et ma destination du jour se trouvait à 2480m… je devrais vaincre ce mur… ce qui fut chose faite au prix de beaucoup d’huile de genoux. 

En récapitulatif, c’est probablement le pire (difficile) sentier que j’ai pris de ma vie.

          
On pouvait maintenant apercevoir mon refuge à 2km de là. Le problème quand on voit notre objectif de si loin c’est que notre cerveau se croit arrivé… et là la randonnée devient I N T E R M I N A B L E. 
15h30 – mes bottes était rangé dans un coin du refuge à empester tranquille et j’avais une bière à la main. J’allais passer la nuit au refuge de la Caverne Dufour. Perché à 2480m sur l’un des flancs du Piton des Neiges (plus haute montagne de l’ile pour ceux qui ont oublié), le refuge se trouvait en plein coeur d’une toundra (forêt de très petits arbres). 
Après un repas copieux composé de saucisse rougail, met typique de l’ile, les nuages nous avaient fait l’honneur de décamper en même temps que le soleil et je restait dehors dans la nuit glaciale à regarder les étoiles et la Cote en contrebas. 

Jour 4 – AU SOMMET DE L’OCEAN INDIEN
04.00 – 23 avril 2016 – Refuge de la Caverne Dufour
Le soleil dormait encore sur ses 2 oreilles que j’étais déjà sur le sentier. Armé de ma lampe frontale, j’étais à monter les derniers 600 mètres qui me séparaient du sommet du Piton des Neiges. Toute l’ile de La Réunion allait être sous mes pieds avant le lever du soleil.
Avec un sac hyper léger (je n’avais apporté que 2 bouteilles d’eau… laissant le reste au refuge) j’avais l’impression de voler. Il fallait simplement faire attention de ne pas voler en éclat en me plantant sur l’une des nombreuses roches parsemant le sentier et qui n’attendaient que cela.
Malgré le noir total, le sentier était assez simple; il suffisait de suivre les très fréquentes traces blanches sur les roches…
5h45 – 3071m… j’avais atteint le sommet du Piton des Neiges… piton qui n’avait jamais vu de neiges soit dit en passant. Très loin d’être mon plus haut sommet à vie, c’était quand même la plus haute montagne de tout l’océan Indien.
La Cote avait complètement disparue sous un dense couvert de nuages qui semblait attendre le lever du soleil pour attaquer l’ile. On pouvait aussi voir un sentier lumineux sur le flanc de la montagne. Chaque faisceau de lumière représentait une personne en quête du sommet.

Ne restait qu’à attendre l’invité vedette… le soleil… qui se laissait désirer… dans la nuit glaciale. En fait, tout le monde qui avait réalisé l’ascension se les gelaient… sauf moi. J’avais prévu le coup en portant mes vêtements d’hiver. Alors que les autres sautillaient pour se réchauffer, je transpirais de chaleur hehe.

                                        
Le soleil a fait son show… et tout le monde est redescendu en vitesse au refuge. Un déjeuner infecte plus tard que je repartais avec mon piano pour descendre les 8km et 1300m qui me séparaient encore de Cilaos. 
Heureusement pour moi, le sentier était incroyable et offrait une vue imprenable sur tout le cirque de Cilaos. J’en ai vu des paysages de montagne, mais cette vue là est l’une des plus belles que j’ai pu voir de toute ma vie. C’était tout ce qu’il me fallait pour effacer l’ardoise de fatigue et me redonner un nouveau souffle. De plus, le sentier était sur un flanc de montagne complètement à l’ombre. 

Une vue magnifique + de l’ombre = tout ce qu’un randonneur pouvait demander.     

  

    

    

      

LE PAYS QU’ON NE QUITTE JAMAIS
Une fois de retour à Cilaos, la partie « repos » de mon périple à La Réunion tirait à sa fin. Les choses sérieuses allaient commencer sous peu (rire jaune)…
Le lendemain matin, il n’y aurait pas de réveil avant le lever du soleil, pas de marche en montagne… mais je devais me rendre à St-Denis, point de départ de la Grande Traversée de l’ile… une randonnée de 13jours… que j’allais entreprendre le surlendemain.
Jusqu’à maintenant l’ile comblait toutes mes attentes… et Dieu sait que j’avais des attentes extrêmement élevés envers La Réunion. Le centre de l’ile me coupait le souffle… au sens propre comme au figuré. Une ile minuscule… avec des paysages grandioses.
Je n’osais imaginer ce que me réservais la suite… mais ça c’est pour une autre histoire. 

P.S. I – Impossible d’y échapper quand on se trouve dans l’océan Indien… même à La Réunion… le riz fait parti intégrante de l’alimentation. Au moins le petit déjeuner est servi sans riz… une amélioration par rapport au Madagascar.
P.S. II – La bière locale se nomme « Bourbon »… et ne contient aucun bourbon. 
P.S. III – L’ile de La Réunion pourrait très bien être rebaptisée « l’ile de la grenouille ». Mis à part des oiseaux et animaux domestiques, c’est le seul animal que j’ai croisé… il y en a partout dans les sentiers.
P.S. IIII – « La Diagonale des fous ». C’est le nom de la course extrême qui se déroule tous les ans à La Réunion. Elle consiste à courir les sentiers de l’ile. Le gagnant de l’an dernier a terminé l’épreuve en 22heures. Le départ se fait de nuit à 22.00 et les participant ont 60 heures pour compléter l’épreuve. On raconte qu’en moyenne 2 personnes perdent la vie chaque année lors de la course. Pas difficile à croire quand on pense aux sentiers dans lesquels les athlètes courent… additionné au manque de sommeil. À tout moment, on croise des hommes courant dans les sentiers… ce sont des fou qui se pratiquent. 
P.S. IIII – « not parc, not patrimoine, not fierté », c’est la devise de l’ile. Vous comprendrez que « not » est le mot créole pour « notre ».